J-04-454
VOIES D’EXECUTION – Saisie attribution des créances – Opposition – indication erronée du siège social (non) – Absence d’indication du siège social dans l’acte de saisie – GRIEF ( non) – NULLITE (NON).
Si l’AUPSRVE a prévu certaines formalités qui doivent être respectées à peine de nullité, dans certains cas, cette nullité ne peut être prononcée que si l’irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l’invoque. Ainsi, si l’indication du lieu du siège social du débiteur est prescrite à peine de nullité, celle-ci n’a pas lieu d’être lorsque cette indication ressort d’un procès-verbal d’huissier qui est un acte authentique. Par contre, en l’absence de préjudice subi, il n’ y a pas lieu de tenir compte de l’absence d’indication de la rubrique réservée à la provision à échoir.
Article 157 AUPSRVE
Article 160 AUPSRVE
(Tribunal de première instance de Yaoundé Centre Administratif, Ordonnance n° 762/C du 1er juillet 2004, Affaire Crédit Lyonnais Cameroun, Me NDENGUE KAMENI et Me NGONGO OTTOU c/ Société BIOTECH Sarl, Me NGONGANG SIME Alain, Banque des Etats de l’Afrique Centrale).
– Nous, juge des référés;
– Vu l’ordonnance 74/2 portant organisation judiciaire de l’Etat et les textes modificatifs subséquents;
– Vu les pièces du dossier de la procédure;
– Attendu que suivant exploit du 9 octobre 2003 de Me MAAH Ebénézer Paul, Huissier de justice à Yaoundé, le Crédit Lyonnais du Cameroun à assigné la Société BIOTECH Sarl et Me NGONGANG SIME Alain devant le Tribunal de Première Instance de céans statuant en matière de difficulté d’exécution pour s’entendre ordonner la main levée de la saisie attribution des créances du 19 septembre 2003;
– Attendu que le CLC et la société BIOTECH ont régulièrement conclu dans la présente cause; Qu’il y a lieu de statuant contradictoirement à leur endroit;
– Attendu qu’aussi bien dans l’acte introductif d’instance que dans ses conclusions subséquentes, le CLC expose qu’il s’oppose formellement à la saisie attribution des créances pratiquée le 19 septembre 2003 sur ses comptes domiciliés à la BEAC par Me NGONGANG SIME Alain à la requête de la société BIOTECH;-
– Que cette saisie entachée de nombreuses irrégularités mérite d’être levée pour les raisons suivantes :
– Le procès verbal de saisie-attribution du 19 septembre 2003, En violation de l’article 157 (1) de l’Acte Uniforme OHADA n° 6 ne contient pas de renseignement exact sur le lieu du siège social du Crédit Lyonnais Cameroun;
– La violation de l’alinéa 3 de l’article 157 du texte susvisé, l’acte du 19 septembre 2003 ne contient pas la rubrique réservée aux frais et intérêts échus et celle réservée à la provision pour les intérêts à échoir dans le mois prévu pour élever la contestation;
– En violation de l’article 160 de l’Acte Uniforme OHADA n° 6, l’acte de dénonciation de la saisie attribution des créances pratiquée le 19 septembre 2003 ne contient pas de copie du procès verbal de saisie au sens de la loi, mais plutôt la société BIOTECH y a amené une copie, ce qui n’est pas suffisant au regard de la loi;
– Le procès verbal de saisie du 19 septembre 2003 ne mentionne pas le mois au cours duquel il a été établi;
– Au fond, la saisie attribution des créances pratiquée le 19 septembre 2003 en vertu du jugement n° 202 du 30 janvier 2000 est manifestement abusive car ledit jugement a été rendu en violation flagrante du principe de l’autorité de la chose jugée; Que pour toutes ces raisons, cette saisie mérite d’être purement et simplement levée;
– Attendu que dans ses conclusions en répliqué, notamment celle du 4 novembre 2003, la société BIOTECH a soutenu :
– Que contrairement aux du CLC, son siège social se trouve à Douala où se trouvent la Direction Générale, les principales directions et départements, les services centraux et névralgiques de la banque; Que tout ceci a fait l’objet du constat du 28 octobre 2003 de Me Elise Adèle KOGLA, Huissier de justice à Douala; Que c’est donc à juste titre que le procès verbal de saisie querellé indique Douala comme étant le lieu du siège social du CLC;
– Que contrairement aux affirmations du demandeur, il ressort du procès verbal de saisie querellé que les frais de saisie ont bel et bien été calculés; Que s’agissant des intérêts échus et à échoir, la loi communautaire ne fait pas interdiction au créancier poursuivant de renoncer de s’en prévaloir; Qu’en plus, il est fait interdiction aux huissier de justice d’inclure dans leurs actes de poursuite des intérêts qui ne figurent pas sur le titre exécutoire objet de la poursuite;
– Qu’enfin, l’acte de dénonciation de saisie attribution du 19 septembre 2003 contient bel et bien l’acte de saisie;
– Qu’ainsi donc, la saisie querellée ne souffre d’aucune irrégularité;
– Attendu que s’agissant de l’autorité de la chose jugée invoquée par le demandeur, il a soutenu que ce dernier n’est par fondé à critiquer le jugement civil n° 203 du 30 janvier 2000 du Tribunal de Grande Instance de céans devenu irrévocable faute d’appel, et ce devant une juridiction d’instance; Que c’est de manière tardive que le demandeur invoque les arguments de « double emploi » et de « violation flagrante du principe de l’autorité de la chose jugée » qui ne sont nullement de la compétence du juge de l’exécution; Que pour toutes ces raisons, le Crédit Lyonnais Cameroun doit purement et simplement être débouté de son action;
– Attendu qu’enfin, elle a soutenu qu’en raison de la mauvaise foi du CLC qui multiplie les procédures dilatoires pour ainsi faire une résistance abusive au paiement de sa créance, elle se porte reconventionnellement demanderesse et sollicite l’allocation de la somme de 50.000.000 F en réparation du préjudice subi;
Sur les arguments de forme soulevés par le CLC
– Attendu qu’il est de principe que l’Acte Uniforme OHADA n° 6 a expressément prévu que l’inobservation de certaines formalités prescrites est sanctionné par la nullité; Que toutefois, pour quelques unes de ces formalités limitativement énumérées, cette nullité ne peut être prononcée que si l’irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l’invoque;
– Attendu que parmi les nullités invoquées par le demandeur, seule celle relative à l’indication du lieu du siège social du débiteur est prescrite à peine de nullité;
– Attendu qu’il est reproché au procès verbal litigieux d’avoir indiqué Douala comme étant le lieu du siège social du CLC alors que celui-ci se trouve à Yaoundé; Mais attendu que Me KOGLA Adèle, Huissier de justice à Douala, par procès verbal du 28 octobre 2003 a constaté que la Direction générale, les principales directions ainsi que les services centraux et névralgiques du CLC se trouvent à Douala;
– Attendu que les actes d’huissier, actes authentiques, font foi jusqu’à inscription de faux; Qu’ainsi , tant que le CLC n’aura pas prouvé le caractère faux des constatations faites par l’huissier, l’argument par lui soulevé ne saurait emporter la conviction du Tribunal;
– Attendu que s’agissant des nullités relatives à la non indication de la rubrique réservée à la provision à échoir, à l’indication du mois au cours duquel la saisie a été opérée, le CLC ne précise pas le préjudice que lui aurait fait subir le non respect de ces formalités;
– Attendu que contrairement aux affirmations du CLC, l’acte de dénonciation de la saisie-attribution contient bel et bien l’acte de saisie;
– Attendu que de tout ce qui précède, il résulte qu’aucun des arguments de forme soulevés par le demandeur n’est fondé;
Sur les arguments de fond soulevés par le CLC
– Attendu que le demandeur s’oppose à la saisie attribution du 19 septembre 2003 au motif que le jugement civil n° 202 du 30 janvier 2000 a été rendu en violation flagrante du principe de l’autorité de la chose jugée;
– Attendu que les voies légales pour contester un jugement auquel on a été partie est l’opposition ou l’appel;
– Attendu que l’une des missions cardinales du juge de l’exécution est de s’assurer que les titres exécutoires sont effectivement exécutés; Que remettre en cause un titre exécutoire ne relève donc justement pas de sa compétence;
– Attendu que de tout ce qui précède, il résulte que c’est en vain que le CLC s’oppose à la saisie-attribution du 19 septembre 2003; Que son action n’étant pas fondée, il y a lieu de le débouter de toutes ses demandes;
Sur la demande reconventionnelle de BIOTECH
(…);
PAR CES MOTIFS
– Nous, juge des référés statuant comme juge de l’exécution, publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en matière de difficultés d’exécution et en premier ressort;
– Recevons le Crédit Lyonnais Cameroun SA en son action;
– Recevons BIOTECH Sarl en sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts;
– Déclarons le Crédit Lyonnais Cameroun non fondée en son action;
– Le déboutons en conséquence de toutes ses demandes;