J-04-480
VOIES D’EXECUTION – SAISIE-VENTE – ACTION EN DISTRACTION FONDEE SUR DES TITRES DOUTEUX – DE L’ACTION (OUI CONTINUATION DES POURSUITES (OUI) – REJET).
Il y a lieu d’ordonner la continuation des poursuites lorsque les tiers qui intentent une action en distraction, dans le cadre d’une saisie vente, produisent des titres de propriété douteux.
(TRIBUNAL REGIONAL HORS CLASSE DE DAKAR, AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 3 JUILLET 2001, Marcel Xavier VENN / La Société BICIS).
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier;
OUI les avocats des parties en leur déclaration respective;
Le Ministère Public, entendu et après en avoir délibéré conformément à la loi;
ATTENDU que par exploit en date du 20 juillet 2000 de Me Abdoulaye DIOUM, Huissier de Justice à Dakar, Marcel Xavier VENN et Béatrice ADJOVI ont donné assignation à 1°) la BICIS, 2°) Madame Fatima Haris DIOP, 3°) Mr. Benjamin VENN en distraction d’objets saisis par procès-verbal en date du 24 mai 1999;
L’exécution provisoire étant en outre sollicitée;
ATTENDU que dans ses conclusions en date du 12 mars 2001, la BICIS a introduit une demande reconventionnelle tendant à faire condamner les demandeurs à lui payer 2 000 000 FCFA de dommages-intérêts pour procédure abusive, offensante et frustratoire;
L’exécution provisoire et la condamnation des demandeurs aux dépens étant en outre sollicitées;
EN LA FORME
ATTENDU que les demandes principale et incidente sont régulières;
QU’il échet de les déclarer recevables;
AU FOND
1°) – SUR LA DISTRACTION-
ATTENDU que Marcel Xavier VENN et Béatrice ADOJVI qui poursuivent la distraction des objets saisis sur Benjamin VENN par procès-verbal en date du 24 mai 1996 de Me Ahmadou Moustapha SECK, Huissier de Justice à Dakar ont produit au soutien de leur demande, des actes de vente d’œuvre d’art non signés, un bail signé par Marcel Xavier VENN, relatif à l’appartement n° 83/A Immeuble Air France au 103 Avenue Peytavin Dakar, une facture n° 002471 du 10 décembre 1990 de Cap-Vert Meubles établie au nom de Marcel Xavier VENN, un acte de vente en date du 20.08.1992, une facture délivrée par « La Brocante » à Madame Béatrice ADOJVI le 15.01.1994;
ATTENDU que dans ses conclusions en date du 12 mars 2001, la BICIS soutient que la saisie a été opérée au domicile de sieur Benjamin VENN sis au 103 Avenue Peytavin, Immeuble Air France à la date du 24 mai 1996; or le sieur Marcel Xavier VENN et la dame Béatrice ADOJVI ne peuvent pas expliquer comment ils sont devenus du jour au lendemain les occupants légitimes dudit appartement;
QU’ils s’ensuit que leur procédure de distraction d’objets saisis est purement dilatoire;
ATTENDU que le procès-verbal de saisie en date du 24 mai 1999 allégué par les demandeurs n’est pas produit au débat;
Que seule existe dans la procédure le procès-verbal de saisie établi par Me Hamadou Moustapha SECK à la date du 24 mai 1996;
Qu’il résulte dudit procès-verbal que la saisie a eu lieu au domicile du sieur Benjamin VENN sis au 103 Avenue André Peytavin Immeuble Air France;
Qu’ainsi, la saisie a eu lieu bien avant l’occupation dudit appartement par le couple VENN puisque le bail qu’ils ont produit au débat date du 1er .07.1998;
QUE donc les titres de propriété qu’ils produisent sont douteux, d’autant que certains d’entre eux ne sont pas signés;
QU’il échet d’ordonner la continuation des poursuites pour les objets saisis par procès-verbal en date du 24 mai 1996;
2°) – SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE.
ATTENDU que la BICIS sollicite la condamnation des demandeurs à lui payer la somme de 2 000 000 FCFA à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive;
ATTENDU qu’il résulte des pièces de la procédure, que la procédure initiée par le couple VENN est purement dilatoire au motif qu’elle cherche seulement à retarder l’exécution de la décision;
QU’il échet de les condamner à payer la somme de 500 000 FCFA à titre de dommages-intérêt à la BICIS;
3°) – SUR L ‘EXECUTION PROVISOIRE.
ATTENDU que la mauvaise foi des demandeurs est largement établie par les pièces de la procédure;
Qu’il échet d’ordonner l’exécution provisoire;
PAR CES MOTIFS
STATUANT publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort;
EN LA FORME
Déclare l’action recevable;
AU FOND
Ordonne la continuation des poursuites pour les objets saisis par procès-verbal en date du 24 mai 1996;
Condamne les demandeurs à payer 500 000 FCFA à la BICIS;
Ordonne l’exécution provisoire;
Condamne les demandeurs aux dépens;
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier./.
Observations
Par Ndiaw DIOUF, agrégé des facultés de droit, Directeur du Centre de Recherche, d’Etude et de Documentation sur les Institutions et les Législations Africaines (CREDILA) – UCAD
Il n’y a pas de raison que les biens d’une personne fasse l’objet d’une saisie alors qu’elle n’est pas personnellement tenue. C’est la raison pour laquelle le législateur a prévu une voie de droit spécifique permettant au tiers qui se prétend titulaire d’un bien englobé dans la saisie de demander la soustraction de celui-ci à l’assiette de la saisie. C’est ce que l’on appelle action en distraction. Une telle action ne peut cependant prospérer que si le tiers apporte la preuve de son droit de propriété. Tel n’est pas le cas, selon le tribunal régional de Dakar, lorsque le tiers produit des titres douteux et lorsqu’au surplus il n’arrive pas à expliquer comment il en est devenu du jour au lendemain, occupant légitime de l’appartement dans lequel les biens sont saisis.