J-04-54
DROIT COMMERCIAL GENERAL – BAIL COMMERCIAL – BAIL D'UN IMMEUBLE A USAGE COMMERCIAL – ARTICLE 93 AUDCG – NOTIFICATION DU CONGE AU PRENEUR – NON-CONTESTATION DE LA NOTIFICATION – FIN DU CONTRAT DE BAIL A LA DATE FIXEE PAR LE CONGE (OUI) – DELAI DE GRACE.
Au sens de l'article 93 alinéa 1er AUDCG " dans le cas d'un bail à durée indéterminée, toute partie qui entend le résilier doit donner congé par acte extrajudiciaire au moins six mois à l'avance."
Faute pour le preneur, bénéficiaire d'un droit au renouvellement, de s'opposer à ce congé, le bail cesse à la date fixée par le congé.
Article 93 AUDCG
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBO-DIOULASSO (BURKINA FASO), Ordonnance de référé n° 64 bis du 30 mai 2003, Bureau de Recouvrement des Créances du Burkina (BRCB), Société de Transit et de Transport (SOTTRA) c/ YAMEOGO Paul).
FAITS ET PROCEDURE
Par exploit en date du 26 mars 2003, le BRCB et la SOTTRA ont fait citer YAMEOGO Paul à comparaître par-devant le juge des référés du Tribunal de grande instance de céans à l'effet de voir ordonner son expulsion et sa condamnation aux dépens;
Ils expliquent que suivant contrat de dation en paiement en date du 10 novembre 2000 dûment enregistré, les héritiers de feu KORBEOGO Adama ont cédé l'immeuble objet du titre foncier n° 1597 dont ils sont propriétaires au BRCB à l'effet d'éteindre la dette de la succession; que cette cession a été notifiée depuis le 08 décembre 2001 à YAMEOGO Paul, locataire des lieux de même qu'un congé d'un délai de six (6) mois; que depuis lors, le locataire se maintient toujours sur les lieux tout en ignorant les clauses et conditions du bail notamment le paiement des loyers; que par la suite l'immeuble a fait l'objet d'une vente entre le BRCB et la SOTTRA par acte en date du 19 septembre 2002 et notifiée également au défendeur qui refuse de quitter les lieux; que le Président du Tribunal peut, selon l'article 464 alinéa 1er – 1° du code de procédure civile (C.P.C) prescrire même en cas de contestations sérieuses les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite; qu'il y a urgence à ordonner l'expulsion de YAMEOGO Paul qui occupe l'immeuble sans droit ni titre.
En réplique, YAMEOGO Paul, par l'intermédiaire de son conseil soulève une fin de non recevoir en expliquant que le BRCB n'existe plus et a été remplacé par le contentieux de l'Etat et que par conséquent on ne peut plus agir au nom du BRCB; que par ailleurs les demandeurs ne produisent aucun des titres exigés à l'article 51 de la réforme agraire et foncière permettant d'établir leur droit de propriété ou de jouissance sur l'immeuble en cause; que leur demande doit par conséquent être rejetée pour défaut de qualité en la personne des demandeurs; qu'enfin l'acte de dation en paiement invoqué et établi entre les héritiers de feu KORBEOGO et le BRCB comporte certaines irrégularités; qu'il n'a d'effet qu'entre les parties.
Répondant aux arguments du défendeur la SOTTRA fait valoir qu'il ne s'agit pas de discuter de l'existence du BRCB ou pas qui est une structure de l'Etat dont les compétences auraient été dévolues au contentieux de l'Etat; que la dation en paiement opérée par les héritiers au bénéfice du BRCB est valable et suffisant à asseoir les revendications de la SOTTRA qui a acquis l'immeuble avec le BRCB; que du reste YAMEOGO Paul en sa qualité de locataire n'a jamais contesté le congé à lui notifié et qu'en cette qualité il ne peut critiquer, faute d'intérêt, l'acte de dation en paiement conclu entre les héritiers de feu et le BRCB.
DISCUSSION
SUR LA RECEVABILITE DU BRCB
Attendu que le défendeur par l'intermédiaire de son conseil affirme que le BRCB n'existant plus, il ne peut agir;
Attendu que le défendeur se contente d'affirmer que le BRCB a été supprimé;
Attendu que par la loi n° 23/93 ADP portant dispositions particulières applicables au recouvrement des créances compromises des établissements de crédits en restructuration cédées à l'Etat burkinabè, il a été créé en son article 2 le Bureau de Recouvrement des Créances compromises cédés à l'Etat Burkinabè (BRCB);
Attendu que faute de produire le texte supprimant le BRCB il y a lieu de passer outre son exception et de déclarer le BRCB et la SOTTRA recevables;
SUR LA MESURE SOLLICITEE
Attendu qu'il ressort des pièces du dossier que par acte notarié en date du 21 avril 2002 de l'étude de Maître OUATTARA Tahirou, les héritiers de feu KORBEOGO Adama ont cédé à titre de dation en paiement au BRCB qui a accepté la pleine et entière propriété des investissements et la jouissance du terrain faisant l'objet du titre foncier n° 1597 de Bobo-Dioulasso (cf. copie du titre foncier);
Attendu que le BRCB nouveau propriétaire de l'immeuble a, par exploit d'huissier du 31 mai 2002, notifié à YAMEOGO Paul, locataire des lieux et y exploitant un bar, un congé pour un délai de six (6) mois à compter de la notification;
Attendu qu'entre temps le BRCB a vendu l'immeuble à la Société de Transit et de Transport par attestation de vente en date du 19 septembre 2002 signé de son directeur;
Attendu que YAMEOGO Paul ne conteste pas sa qualité de locataire des lieux; qu'il s'agit d'un bail commercial au regard des activités y menées à savoir l'exploitation d'un débit de boissons;
Attendu qu'au sens de l'article 93 de l'acte uniforme OHADA sur le droit commercial général en son alinéa 1er, dans le cas du contrat de bail à durée indéterminée, toute partie qui entend le résilier doit donner congé par acte extrajudiciaire au moins six (6) mois à l'avance; qu'il est précisé plus loin que faute pour le preneur, bénéficiaire d'un droit au renouvellement, de s'opposer à ce congé, le bail cesse à la date fixée par le congé;
Attendu qu'en l'espèce il est constant que le preneur YAMEOGO Paul n'a pas contesté le congé à lui notifié le 31 mai 2002 et qui prenait effet six (6) mois plus tard c'est-à-dire le 30 novembre 2002; que par conséquent de par la loi, le contrat de bail qui a lié le preneur aux héritiers de feu KORBEOGO puis ensuite au BRCB a pris fin depuis le 30 novembre 2002;
Attendu que YAMEOGO Paul n'élève aucune contestation sérieuse; que le juge des référés est par conséquent compétent, au regard de l'article 464 alinéa 1er – 1° qui dispose que le Président du Tribunal peut en cas d'urgence ordonner toutes mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse et que justifie l'existence d'un différend;
Attendu qu'il convient dès lors de faire droit à la requête et d'ordonner l'expulsion de YAMEOGO Paul de l'immeuble objet du titre foncier n° 1597 tour à tour cédé au BRCB puis à la SOTTRA, tant de sa personne, de ses biens que de tous occupants de son chef;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement, en la forme des référés et en 1er ressort;
Déclarons le BRCB et la SOTTRA recevables;
Ordonnons l'expulsion de YAMEOGO Paul de l'immeuble abritant le " BAR LIBERTIE " sis sur la parcelle H du lot 1081 quartier Accart-ville de Bobo-Dioulasso, objet du titre foncier n° 1597, tant de sa personne, de ses biens que tous occupants de son chef;
Lui octroyons un délai de grâce d'un mois à compter de la présente décision;
Le condamnons aux dépens.