J-04-58
PROCEDURES COLLECTIVES D'APUREMENT DU PASSIF – LIQUIDATION DES BIENS – DÉCISION D'OUVERTURE – EFFETS SUSPENSIFS SUR LES POURSUITES INDIVIDUELLES – REQUETE AUX FINS DE SURSIS A UNE VENTE AUX ENCHERES PUBLIQUES.
ARTICLES 433 ET 464 ALINEA 2 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE – COMPETENCE AU JUGE DES REFERES (OUI) – DEFAUT DE QUALITE (NON) – ARTICLE 75 AUPCAP – DISCONTINUATION DE LA SAISIE-VENTE.
En présence d'un jugement de liquidation des biens un créancier peut-il poursuivre l'exécution de sa décision devenue définitive ?
Aux termes de l'article 75 AUPCAP : « la décision d'ouverture suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à faire reconnaître des droits et des créances ainsi que toutes les voies d'exécution tendant à en obtenir le paiement… La suspension des poursuites individuelles s'applique également aux créanciers dont les créances sont garanties par un privilège général ou une sûreté réelle spéciale tel que, notamment, un privilège mobilier spécial, un gage, un nantissement ou une hypothèque. »
Article 75 AUPCAP
Article 186 AUSCGIE
Article 433 ET 464 ALINEA 2 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBO-DIOULASSO (BURKINA FASO), Ordonnance de référé n° 68 du 06 juin 2003, Clinique Centrale du Houet c/ BICIA-B).
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS
Par exploit en date du 27 mai 2003, la Clinique Centrale du Houet en liquidation a fait citer Maître KORGO Jules I et la BICIA-B à comparaître par-devant le juge des référés du Tribunal de grande instance de céans.
Elle explique qu’elle est confrontée à des difficultés financières l’obligeant à initier une procédure collective d’apurement du passif pour voir constater son état de cessation de paiement; que c’est ainsi qu’elle a été admise au bénéfice de la liquidation judiciaire avec suspension des poursuites individuelles et des instances en cours; que cependant les biens constituant l’actif de la Société sont l’objet de procédures d’exécution suivies d’enlèvement, toutes choses qui risquent de causer un préjudice à la masse des créanciers; qu’en effet, suivant annonce légale parue dans l’Observateur paalga n° 5895 du 19 mai 2003, il est prévu une vente aux enchères publiques de matériel appartenant à la Clinique par le ministère de Maître KORGO I. Jules; qu’au regard de la liquidation en cours, elle sollicite voir ordonner le sursis à la vente aux enchères publiques entreprise ou sa nullité. En réplique, la BICIA-B soulève l’incompétence du juge des référés à connaître d’une telle demande.
Elle soutient que le juge des référés ne peut ni arrêter ni suspendre l’exécution d’une décision devenue exécutoire et ce, conformément aux articles 398 et 433 du code de procédure civile; que la BICIA-B bénéficie d’un titre exécutoire, en l’espèce une ordonnance d’injonction de payer; que par ailleurs la requête mérite d’être déclarée irrecevable au cas où l’incompétence ne serait pas retenue; qu’en effet la liquidation de la Clinique Centrale du Houet n’a pas qualité pour agir au nom de madame DEBE/KAMBOU H. M. Flore qui a acquis le matériel professionnel et l’a nanti au bénéfice de la BICIA-B et cela bien avant la constitution de la Clinique Centrale, société unipersonnelle à responsabilité limitée; que si par extraordinaire, la requête venait à être déclarée recevable, elle sollicite que la liquidation de la Clinique soit déboutée de sa demande en nullité de la vente, celle-ci n’ayant pas encore eu lieu.
En réponse aux conclusions en réplique développées par la défenderesse, la partie demanderesse fait valoir que le principe de la suspension des poursuites et d’application conformément à l’article 75 et suivants de l’acte uniforme sur les procédures collectives d’apurement du passif (AUPCAP); que le juge des référés est incompétent à apprécier de la propriété du matériel professionnel nanti entre la clinique Centrale du Houet SUARL et Madame DEBE; qu’en tout état de cause le sursis sollicité ne modifie en rien le droit de la BICIA-B sur ledit matériel.
DISCUSSION
Sur la compétence
Attendu qu’il est constant que la BICIA-B poursuit à l’encontre de la Clinique Centrale du Houet l’exécution forcée d’une ordonnance d’injonction de payer n° 471/02 du 31 décembre 2002, revêtue de la formule exécutoire et portant sur la somme de 70.444.633 F.CFA reliquat d’un prêt assorti d’un nantissement;
Attendu que par jugement en date du 02 avril 2003 le Tribunal de grande instance de céans, prononçait la liquidation des biens de la Clinique Centrale du Houet SUARL; Que poursuivant sur sa lancée, la BICIA-B par l'intermédiaire de l'huissier instrumentaire fixait par annonce légale la vente des biens saisis sur la Clinique;
Attendu que les articles 433 et 464 alinéa 2 du code de procédure civile donne compétence au juge des référés pour statuer sur les difficultés relatives à l'exécution d'un titre exécutoire ou d'un jugement; que le juge saisi de la difficulté statue provisoirement sans pouvoir en principe arrêter l'exécution légitime d'un titre authentique ou d'une décision définitive;
Attendu que le droit du juge « consiste à se prononcer sur les contestations concernant la manière de pratiquer l'exécution, même sur celles relatives au point de savoir si le créancier, en l'état est autorisé à procéder à cette exécution il tranche, et il juge la contestation ». (cf. CEZAR-Bru, Hébrand et Seignolle, la juridiction du président du Tribunal, Tome 1, des référés, n° 350, p. 514);
Attendu qu'en l'espèce il s'agit de savoir si, en l’état, c'est-à-dire en présence d'un jugement de liquidation des biens de la Clinique Centrale du Houet la BICIA-B peut poursuivre l'exécution de sa décision devenue définitive; qu'il s'agit bien d'une difficulté d'exécution qui rentre dans la compétence du juge des référés;
Sur la recevabilité de la requête
Attendu que, la liquidation de la Clinique Centrale du Houet a qualité et intérêt pour agir au nom de la Clinique; que la créance dont le recouvrement est poursuivie a été contractée par le fonctionnement de la dite Clinique; Que cette dette a été contractée par Madame DEBE exploitant à cette époque la Clinique sous forme d'entreprise « individuelle qui sera transformée par la suite en société unipersonnelle à responsabilité limitée »; que cette modification n'affecte en rien l'existence de ladite dette étant entendu que l'article 186 de l'acte uniforme sur les sociétés commerciales précise que les droits et obligations contractées par la société sous son ancienne forme subsistent sous la nouvelle forme et qu'il en est de même pour les sûretés sauf clause contraire dans l'acte constitutif de ces sûretés; Attendu qu'il convient dès lors de déclarer la liquidation de la Clinique recevable.
Sur la mesure sollicitée
Attendu qu'aux termes de l'article 75 de l'acte uniforme/PCAP : « la décision d'ouverture suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à faire reconnaître des droits et des créances ainsi que toutes les voies d'exécution tendant à en obtenir le paiement… La suspension des poursuites individuelles s'applique également aux créanciers dont les créances sont garanties par un privilège général ou une sûreté réelle spéciale tel que, notamment, un privilège mobilier spécial, un gage, un nantissement ou une hypothèque. »;
Attendu qu'il est indéniable qu'en l'état, aucune mesure d'exécution ne peut être entreprise contre la Clinique Centrale du Houet en liquidation;
Attendu qu’au regard de ce qui précède, il convient dès lors de faire droit à la demande de la Clinique en liquidation en ce qu'elle a sollicité que soit ordonner de surseoir provisoirement à la saisie-exécution.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement en la forme des référés contradictoirement et en 1er ressort;
Nous déclarons compétent;
Déclarons la Clinique Centrale du Houet en liquidation recevable;
Ordonnons la discontinuation de la saisie-vente poursuivie par la BICIA-B
Mettons les dépens à la charge des défendeurs.