J-04-94
VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – DECISION DE MAINLEVEE – APPEL – NOUVELLE SAISIE (NON).
Lorsqu’une mainlevée d’une saisie conservatoire est ordonnée et que le saisissant fait appel de cette décision, il ne peut, sans violer le principe de l’autorité de la chose jugée, pratiquer une nouvelle saisie conservatoire.
Cour d’Appel d’Abidjan, Arrêt N° 929 du 11 juillet 2003, Me KAUDJHIS OFFOUMOU C/ SOPIM et AUTRES (Mes ORE Sylvain et BLAY CHARLES).
LA COUR,
Vu les pièces du dossier,
Ouï les parties en leurs conclusions;
Par exploit en date du 15 Avril 2003, Maître Kaudjhis Offoumou a relevé appel de l'ordonnance de référé N° 2324 rendue le 21 mai 2003 par la juridiction présidentielle du Tribunal d'Abidjan qui en la cause, a statué ainsi qu'il suit :
– « Constatons que les saisies ont été pratiquées abusivement et au mépris du principe de l'autorité de la chose jugée »;
– Ordonnons en conséquence au Trésor Public, à la BICICI, à la BIAO-CI et à ECOBANK de payer les sommes détenues pour le compte des demandeurs et ce, sous astreinte comminatoire de 3.000.000 de francs CFA par jour de retard;
Maître Kaudjhis Offoumou expose qu'en exécution d'une décision d’arbitrage N° 04/03 rendue le 18 février 2003 par le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Côte d'Ivoire, elle a procédé à des saisies conservatoires sur le Trésor Public le 10 Avril 2003 et entre les mains des sociétés locataires de la SOPIM, la SCI-GYAM et des établissements bancaires dans lesquels les débiteurs ont leurs comptes en banques et ce, par exploit du 16 Avril 2003;
Elle précise qu'elle avait déjà par actes des 7, 11, 12 et 16 mars 2003 pratiqué des saisies conservatoires et que par ordonnance de référé N° 1616/2003, le juge des référés avait ordonné la main-levée de ces saisies;
Elle ajouté qu'elle a relevé appel de cette décision mais compte tenu de ce que l'appel n'est pas suspensif, elle a préféré pratiquer de nouvelles saisies;
Elle reproche au juge des référés d'avoir jugé ces nouvelles saisies abusives;
Elle soutient in limine litis que l'ordonnance déférée est nulle pour les motifs suivants :
– Elle ne mentionne pas les dates des saisies conservatoires concernées;
– Elle ordonne son exécution sur minute avant enregistrement alors que cela n'a pas été demandé;
– Elle a été rendue en l'absence de conclusions du Ministère Public;
Par ailleurs, l'appelante fait valoir qu'elle a produit devant le juge des référés, l'acte d'appel relatif à la première ordonnance de sorte qu'il n'y a. pas lieu d'affirmer qu'il y a autorité de chose jugée;
Elle ajoute que le recouvrement de sa créance est en péril compte tenu de la mauvaise foi de ses débiteurs et de l'ancienneté de la créance;
Elle indique, relativement à la non validation de la saisie, que la décision à exécuter est une décision arbitrale fondée sur une loi spéciale, la loi N° 8l-588 du 27 juillet 1981 réglementant la profession d'avocat;
Qu'en l'espèce, les débiteurs saisis ont porté leur contestation devant le Tribunal qui se prononcera sur la validité de la saisie;
Les intimés font plaider que l'absence des dates des saisies ne cause pas préjudice et n'est pas de nature à semer la confusion, d'autant que les saisies en cause étaient clairement identifiées dans l'acte d'assignation;
Ils ajoutent que c'est à tort qu'il est reproché au premier juge d'avoir ordonné l'exécution sur minute et avant enregistrement;
Ils précisent a cet effet, que l'article 227 du code de procédure civile le permet en cas d'extrême urgence; or en l'espèce, soutiennent-ils il y avait urgence à faire cesser les saisies;
Ils font valoir par ailleurs que les saisies litigieuses ont été pratiquées au mépris de la chose jugée;
Que certes, l'ordonnance N° 1616 n'avait pas encore acquis autorité de chose jugée irrévocable, mais elle avait une autorité de chose jugée relative;
Qu'en réalité, il aurait fallu épuiser la voie de recours qu'est l'appel;
Ils font encore valoir que Me Kaudjhis Offoumou a accepté de travailler pour eux non seulement de 1992 à 1997 mais aussi 1998 à 2002;
Que cela prouve qu'il n'y a aucune mauvaise foi de leur part;
Ils ajoutent qu'il n'y a pas davantage péril pour le recouvrement étant donné qu'ils ont leurs activités en Cote d'Ivoire où ils disposent d'immeubles pouvant constituer un gage de leur solvabilité;
DES MOTIFS
Sur la nullité de l’ordonnance
Maître Kaudjhis Offoumou plaide la nullité de l'ordonnance attaquée pour des motifs qui, à l'examen, ne sont pas pertinents;
En effet, les pièces de la procédure, notamment l'acte introductif d'instance mentionnent tien les dates des saisies litigieuses;
S'agissant de l'exécution sur minute, le juge a latitude à l'ordonner s'il juge qu'il y a extrême urgence;
Enfin, s'agissant d'une procédure de référé, la communication au ministère public n'est pas obligatoire;
II convient en conséquence de dire que l'ordonnance attaquée est, régulière;
Sur la demande de main-levée
Il résulte des productions que par ordonnance de référé N° 1616 du 9 avril 2003, la juridiction Présidentielle avait ordonné la main-levée de précédentes saisies faites pour les mêmes causes au motif que la créance n'était pas en péril;
Que cette décision a été frappée d'appel et la procédure encore pendante devant la Cour d'Appel;
Dès lors, Me Kaudjhis Offoumou ne pouvait pratiquer de nouvelles saisies sans violer l'autorité de la chose jugée même si cette autorité était relative;
De surcroît, il est manifeste qu'elle ne dispose ni d'un titre exécutoire ni d'une autorisation lui permettant de pratiquer ces saisies conservatoires;
Dès lors, c'est à bon droit que le premier juge a statué comme il l'a fait;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement en matière civile et commerciale et en dernier ressort;
EN LA FORME
– Déclare Me Kaudjhis Offoumou recevable en son appel;
AU FOND
– L'y dit mal fondée;
– L'en déboute;
– Confirme 1'ordonnance entreprise;
– La condamne aux dépens;