J-05-127
PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT – INJONCTION DE PAYER – PROCEDURE ENGAGEE SUR LA BASE D’UNE CREANCE DONT LE MONTANT EST CONTESTE – SANCTION – RETRACTION DE L’ORDONNANCE PORTANT INJONCTION.
La procédure d’injonction de payer étant ouverte pour les seules créances incontestables, il y a lieu, si la créance est contestée dans son montant, de rétracter l’ordonnance qui porte injonction de payer.
Article 1 AUPSRVE
Article 14 AUPSRVE
(Tribunal RÉGIONAL HORS CLASSE DE DAKAR, JUGEMENT N° 1210 DU 12 MAI 2004, Amadou DIARRA C / Cheikh Ahmed Tidiane DIOP).
LE TRIBUNAL,
VU les pièces du dossier;
OUI le demandeur en ses conclusions;
NUL pour les défendeurs, non concluant ni représentés;
OUI le Ministère Public en ses réquisitions;
ATTENDU que suivant exploit du 10 septembre 2003, servi par Arona DIA, Huissier de justice à Pikine, Amadou DIARRA a assigné Cheikh Ahmed Tidiane DIOP et le Greffier en Chef du Tribunal Régional Hors lasse de Dakar;
ATTENDU qu’il y a lieu de recevoir l’action;
AU FOND
ATTENDU qu’en sollicitant l’opposition à l’ordonnance ci-dessus visée, Amadou DIARRA a soutenu que l’ordonnance a été prise en violation des règles de compétence d’une part;
QU’au regard de la somme objet de la demande c’est le Tribunal Départemental qui est compétent, et du point de vue territorial c’est le Tribunal départemental de Pikine qui doit connaître de l’affaire en application de l’article 3 de l’Acte Uniforme portant Procédure simplifiées et des voies d’exécution;
QUE d’autre part, il ne reconnaît pas devoir la somme de 500 000 F mais celle de 300 000 F, car un acompte de 200 000 F a été versé;
ATTENDU qu’il résulte de l’article 1 de l’AU/PSRVE, la procédure d’injonction de payer est ouverte pour les seules créances incontestables;
QU’en l’espèce, la créance de Cheikh Ahmed Tidiane DIOP est contestée dans son montant, seule la somme de 500 000 F est reconnue;
QUE dès lors c’est à bon tort que l’injonction de payer a été ordonnée et qu’il échet de rétracter l’ordonnance n° 877 du 23 mai 2003 sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de droit soulevés;
PAR CES MOTIFS
STATUANT publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort;
DECLARE l’opposition recevable,
AU FOND
RETRACTE l’ordonnance d’injonction de payer n° 677 du 23 octobre 2003 avec toutes les conséquences de droit;
CONDAMNE Cheikh Ahmed Tidiane DIOP aux dépens;
AINSI fait jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus;
ET ont signé le Président et le Greffier./.
Observations de Ndiaw Diouf agrégé des Facultés de droit, Directeur du Centre de Recherche, d’Étude et de Documentation sur les Institutions et les Législations Africaines (CREDILA), Faculté des Sciences Juridiques et Politiques, Université Cheikh Anta Diop, Dakar
Le tribunal régional de Dakar a laissé passer une bonne occasion de se prononcer sur la question de la compétence d’attribution en matière d’injonction de payer. Saisi d’une opposition formée contre une ordonnance d’injonction de payer par une personne qui a soulevé l’incompétence de la juridiction saisie avant de soutenir que la somme due est inférieure à la somme réclamée par le créancier, le tribunal régional de Dakar a choisi d’ignorer la question de la compétence pour se prononcer uniquement sur le fond en rétractant l’ordonnance.
Une telle décision encourt deux types de critiques.
Il y a tout d’abord l’omission de statuer. En effet lorsqu’une question de compétence est soulevée, la juridiction saisie ne peut pas aborder le fond sans l’avoir préalablement tranchée. Le traitement de cette question est d’autant plus important que le débiteur ne peut pas contester la compétence du Président saisi devant celui-ci, la procédure étant conduite unilatéralement par le créancier. Ceci dit, un examen de cette question par le tribunal aurait permis de savoir si le Président du tribunal régional peut être saisi d’une requête tendant à obtenir une injonction de payer dans une hypothèse où le litige relève, au fond, de la compétence du tribunal départemental.
Il y a, par ailleurs, la méconnaissance du rôle du tribunal devant lequel l’opposition est portée. Ce tribunal est saisi non seulement de l’opposition mais aussi de l’entier litige, c'est-à-dire de la demande en paiement et des moyens du débiteur prétendu. Il doit donc se prononcer sur les droits des parties par une décision qui se substitue à l’ordonnance. Il n’a pas à rétracter cette ordonnance.