J-05-133
1 – PROCEDURES SIMPLIEES DE REOUVREMENT – PROCEDURE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – IMPOSSIBILITE POUR L’OPPOSANT DE PROUVER LES PAIEMENTS EFFECTUES – REJET DE L’OPPOSITION (OUI).
2 – PROCEDDURES SIMPLIFIES DE RECOUVREMENT – INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – DEMANDE D’APPOSITION DE LA FORMULE EXECUTOIRE ADRESSEE AU TRIBUNAL SAISI DE L’OPPSOSITON – REJET – (oui).
1- Il y a lieu de rejeter l’opposition lorsque le bénéficiaire de l’ordonnance d’injonction de payer ayant prouvé sa créance comme l’exige l’article 13 AUPSRVE, le demandeur à l’opposition se borne à faire état de paiement sans produire de pièces justificatives.
2- La demande d’apposition de la formule exécutoire ne peut, en cas d’opposition, prospérer en raison des dispositions de l’article 14 AUPSRE qui prévoit que la décision de la juridiction saisie se substitue à la décision d’injonction de payer.
Article 13 AUPSRVE
Article 14 AUPSRVE
(Tribunal RÉGIONAL HORS CLASSE DE DAKAR (SENEGAL), JUGEMENT N° 2734 DU 15 DECEMBRE 2004, WEST AFRICAN AIRLINES / SOCIETE AVIATION HANDLING SERVICES).
LE TRIBUNAL,
VU les pièces du dossier;
OUI les parties en leurs conclusions;
OUI le Ministère public en ses réquisitions;
ET après en avoir délibérer conformément à la loi;
ATTENDU que par exploit du 29 juillet réitéré par avenir du 5 août 2004, la société West African Airelines SA a formé opposition contre l’ordonnance d’injonction de payer n°478/2004 du 30 juin 2004 qui lui a été signifiée par la société Aviation Handling Services SA le 16 juillet 2004;
ATTENDU que cette dernière a sollicité dans ses conclusions du 28 octobre 2004 l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance querellée outre le paiement de la somme de 5.000.000 FCFA à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;
EN LA FORME :
ATTENDU que l’action a été initiée dans les forme et délai légaux, qu’il échet de la déclarer recevable;
AU FOND :
ATTENDU que la société demanderesse a soutenu dans l’exploit introductif d’instance que la somme réclamée par Aviation Handling Services d’un montant de 23.055.030 F n’est pas due puisqu’elle a procédé à divers versements d’un montant de 19.856.497 FCFA; qu’en outre l’exploit de signification de l’ordonnance d’injonction de payer est nul pour n’avoir pas obéir aux prescriptions des deux derniers alinéas de l’article 8 de l’Acte Uniforme sur les Voies d’Exécution; qu’elle a conclu à la rétraction de l’ordonnance querellée;
ATTENDU que la société défenderesse a rétorqué dans ses conclusions du 28 octobre 2004 que la demanderesse n’a produit aux débats aucune pièce pour étayer ses allégations;
QUE suite à une mise en demeure de payer la somme de 23.055.030 FCFA en date du 16 juin 2004, elle avait déclaré avoir transmis le dossier à Cotonou pour un prompt règlement de la créance suivant correspondance du 16 juin 2004;
QUE l’opposition formée procède d’une mauvaise foi évidente et doit être sanctionnée;
QU’elle a conclu à l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance querellée et le paiement de la somme de 5.000.000 FCFA à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;
SUR CE;
ATTENDU qu’il résulte des dispositions de l’article 13 de l’Acte Uniforme sur les Voies d’exécution, qu’en cas d’opposition, le bénéficiaire de l’ordonnance d’injonction de payer supporte la charge de la preuve de sa créance;
ATTENDU qu’en l’espèce, la société Aviation Handling Services SA a produit aux débats diverses factures d’un montant global de 23.055.030 FCFA, que la demanderesse a fait état des divers paiements de ladite créance jusqu’à concurrence de 19.856.497 FCFA sans aucune pièce justificative de ses prétentions conformément à l’article 9 alinéa 2 du Code des Obligations Civiles et Commerciales; qu’elle a invoqué la violation des dispositions de l’article 98 (sic) de l’Acte Uniforme sur les voies d’exécution; que ce moyen n’est pas fondé, l’exploit de signification en date du 16 juillet 2004 ayant respecté cette disposition légale;
QU’il s’ensuit que l’opposition n’est pas fondée et doit être rejetée;
ATTENDU que la société défenderesse a sollicité le paiement de dommages et intérêts sans caractériser l’existence d’une procédure abusive; que ce fait ne saurait être constitué par le simple rejet des prétentions de l’opposante qui n’a fait qu’user d’une voie de droit qui lui est offerte par la loi; qu’il échet de rejeter une telle demande;
ATTENDU qu’en outre la société défenderesse a sollicité l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance d’injonction de payer; que cependant une telle demande ne peut prospérer en application de l’article 14 de l’Acte Uniforme sur les Voies d’exécution prévoyant qu’en cas d’opposition, la décision de la juridiction saisie se substitue à la décision d’injonction de payer;
QU’il échet de débouter la société défenderesse de ce chef;
ATTENDU que les parties ont respectivement succombé sur leurs chefs de demande; qu’il échet de faire masse des dépens entre elles;
PAR CES MOTIFS :
STATUANT publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort;
EN LA FORME :
RECOIT l’opposition;
AU FOND :
DECLARE celle-ci mal fondée;
DEBOUTE les parties de toutes leurs demandes respectives;
FAIT masse des dépens entre elles;
AINSI fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus;
ET ont signé le Président et le Greffier./.-
Observations De Ndiaw Diouf, Professeur agrégé, Directeur du CREDILA
En formant opposition contre l’ordonnance d’injonction de payer, le débiteur prend certes l’initiative de la phase contradictoire de la procédure, mais cela ne lui confère pas la qualité de demandeur. En effet dès que cette instance est engagée, la procédure ordinaire reprend ses droits. C’est la raison pour laquelle celui qui a obtenu l’ordonnance, c'est-à-dire le créancier, a la charge de la preuve de sa créance. Mais s’il établit cette créance, le débiteur qui a formé opposition en invoquant le paiement ne peut échapper à une condamnation que s’il établit, conformément au droit commun, sa libération. C’est ce que rappelle le tribunal régional hors classe de Dakar dans son jugement du 15 décembre 2004. Hélas ! Le tribunal n’a pas tiré de ce rappel les conséquences qui s’imposent. En effet le tribunal s’est borné, après avoir constaté la carence, à rejeter l’opposition alors qu’il aurait dû rendre une décision de condamnation ayant vocation à se substituer à l’ordonnance. L’article 14 est très clair sur ce point : « La décision de la juridiction saisie sur opposition se substitue à la décision portant injonction de payer ». Cette solution s’explique par le fait qu’avec l’opposition, le tribunal est saisi de la demande initiale et de l’entier litige (V. art. 8).
C’est ce qui explique d’ailleurs, comme l’a rappelé le tribunal, que toute demande tendant à obtenir, du tribunal saisi de l’opposition, une décision ayant pour objet d’ordonner l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance soit vouée à l’échec. L’apposition de la formule exécutoire ne peut, en effet, être demandée avec des chances de succès que si le débiteur a laissé passer le délai sans faire opposition ou s’il a choisi le désistement après avoir formé opposition (art. 16, al. 1er), en quelque sorte dans les cas où il n’y a pas de possibilité pour le tribunal de statuer sur l’opposition.