J-05-145
1.DROIT COMMERCIAL GENERAL – BAIL COMMERCIAL – EXPULSION ET PAIEMENT DES LOYERS – COMPETENCE – JUGE DE L’EXECUTION (non).
2.SAISIE CONSERVATOIRE – MISE ENDEMEURE PREALABLE – (OUI) – NULLITE DE LA SAISIE (non).
1.Le juge de l’urgence, juge de l’exécution est incompétent à connaître des demandes en expulsion ou de paiement des arriérés de loyers qui ne constituent ni une demande relative à une mesure d’exécution forcée, ni une saisie conservatoire conformément aux exigences de l’article 49 AUPSRVE
2.La mise en demeure de s’exécuter doit précéder l’intervention d’une saisie conservatoire de créance.
Article 77 AUDCG
Article 49 AUPSRVE
(Tribunal de Première Instance de DOUALA NDOKOTI, ordonnance n°147/074-05 du 27 janvier 2005, affaire Société ANFI contre WEA Marguerite).
Nous Président, Juge du contentieux de l’exécution;
– Vu l’exploit introductif d’instance;
– Vu les pièces du dossier de la procédure;
– Après en avoir délibéré conformément à la loi;
– Attendu qu’en vertu de l’ordonnance présidentielle n° 561 du 30 août 2004 et suivant exploit en date du 31 août 2004 non encore enregistré mais qui le sera en temps utile de Me Guy EFON Huissier de justice à Douala, la Société Anfi agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux ayant pour conseil Me NGOUOMPE Avocat au Barreau du Cameroun BP 9173 Douala a fait donner assignation à;
– Dame WEA Marguerite demeurant à Bassa ayant pour conseil Me ZENGANG Thomas Avocat à Douala d’avoir à se trouver et comparaître par devant Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Ndokoti statuant en matière de contentieux de l’exécution est-il dit dans cet exploit;
– Déclarer nul le commandement tendant à saisie conservatoire du ministère de Me TOWA Pierre du 20 août 2004;
– Constater que la société Anfi SA occupe les lieux loués depuis 1999;
– Constater que sieur WEA Nicolas fils et par ailleurs mandataire de dame WEA Marguerite a paralysé les activités de la société requérante pendant plusieurs semaines;
– Constater que cette voie de fait a causé à la société exposante d’importants préjudices;
– Constater qu’une action pénale a été engagée contre sieur WEA Nicolas;
– Constater qu’aux termes de l’article 77 de l’acte uniforme relatif au droit commercial Dame WEA Marguerite est responsable de la réparation du préjudice subi par la société ANFI SA du fait de sieur WEA Nicolas;
– En conséquence ordonner la discontinuation des poursuites initiées par Dame WEA relativement aux loyers de l’immeuble dont s’agit et ce jusqu’au terme de la procédure pénale qui a été engagée contre sieur WEA Nicolas;
– Condamner Dame WEA Marguerite aux entiers dépens distraits au profit de Me NGOUOMPE, avocat aux offres de droit;
– Attendu qu’au soutien de son action la demanderesse par l’organe de son conseil Me NGOUOMPE expose;
– Qu’elle occupe depuis 1999 comme locataire un immeuble à usage commercial sis à Bassa Douala au lieu dit Ndoghem appartenant à Dame WEA Marguerite moyennant un loyer mensuel de 500 000FCFA payable trimestriellement;
– Qu’elle a toujours honoré ses engagements vis-à-vis de sa bailleresse;
– Qu’ayant accusé un léger retard dans le règlement desdits loyers suite à des difficultés ponctuelles sieur WEA Nicolas par ailleurs fils de la bailleresse et gestionnaire de l’immeuble dont s’agit va en date du 23 juillet 2004 sans sommation aucune investir les locaux loués avec une escouade de vigiles de la société de gardiennage Suprocam;
– Que ces vigiles vont pratiquement empêcher à toute personne d’accéder à la société, paralysant ainsi toutes les activités de la requérante;
– Que toutes les démarches entreprises auprès de sieur WEA pour pouvoir mettre un terme à la voie de fait dont il a fait montre vis-à-vis de la société exposante vont s’avérer vaines;
– Que suite à cette situation inconcevable, la société Anfi va en date du 26 juillet 2004 saisir Monsieur le Procureur de la République d’une plainte contre sieur WEA Nicolas pour violation de domicile et entrave à l’activité commerciale;
– Que c’est dans le cadre de l’instruction de cette plainte que les officiers de police judiciaire de la Brigade de Gendarmerie de Ndog-bong ont ordonné à sieur WEA de lever la mesure en date du 13 août 2004;
– Que la société exposante a ainsi vu ses activités paralysées pendant près d’un mois, ce qui lui a causé préjudice incommensurable;
– Qu’aux termes de l’article 77 de l’acte uniforme OHADA relatif au droit commercial “ le bailleur est responsable envers le preneur du trouble de jouissance de son fait ou du fait de ses ayants droit ou de ses préposés ”;
– Qu’alors que la société exposante n’avait pas fini de faire le bilan des pertes par elle accusées, Dame WEA sans état d’âme va en date du 20 août lui servir un commandement tendant à la saisie conservatoire des biens;
– Que ledit commandement est muet quant aux mentions d’enregistrement du contrat de bail;
– Que si le contrat sous-tendant le commandement dont s’agit n’est pas enregistré, le Juge de céans déclarera nulle la mesure d’exécution entreprise par Dame WEA Marguerite;
– Attendu que dans ses conclusions additive, d’une demande que le juge de céans est incompétent à connaître d’une demande de paiement de loyer et d’autre part que la saisie conservatoire de créances pratiquée le 27 août 2004 doit être déclarée nulle et de nul effet pour n’avoir pas été précédée d’une mise en demeure de payer;
– Attendu que pour étayer ses prétentions, la demanderesse fait verser aux débats une kyrielle de pièces dont la plainte avec constitution de partie civile, l’assignation en expulsion, les procès-verbaux de contrat, la sommation de libérer de quelques reçus de paiement des loyers;
– Attendu que réagissant à ces prétentions, la défenderesse sous la plume de son conseil Me ZENGANG conclut d’une part au débouté de l’action de la demanderesse sur la nullité du commandement, et de la saisie querellés et formule d’autre part une demande reconventionnelle inhérente à l’expulsion de la demanderesse et au paiement des arriérés de loyers;
– Attendu que pour conforter sa défense, Dame WEA Marguerite fait produire au dossier nombre de pièces dont la mise en demeure du 18 avril 2004, le commandement querellé, le contrat de bail enregistré et le procès-verbal de saisie conservatoire;
Sur l’exception d’incompétence du Juge de céans à connaître des demandes d’expulsions et de paiement des arriérés de loyers;
– Attendu qu’aux termes de l’article 49 de l’acte uniforme OHADA n°6 “ la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d’urgence ou le Magistrat délégué par lui ”;
– Attendu que la demande en expulsion ou celle corrélative de paiement d’arriérés de loyers ne constitue ni une demande relative à une mesure d’exécution forcée, ni une saisie conservatoire;
– Qu’au regard de ce qui précède, il y a lieu de nous déclarer incompétent à en connaître;
Sur l’exception d’irrecevabilité de la demande additionnelle relative à la nullité de la saisie querellée;
– Attendu que cette demande ayant trait au contrat de bail litigieux il y a lieu de la déclarer recevable;
Sur la nullité du commandement et de la saisie querellés;
– Attendu sur la nullité du commandement querellé, que la défenderesse ayant produit au dossier un contrat de bail dûment enregistré le moyen invoqué ne saurait prospérer;
– Attendu, sur la nullité de la saisie querellée, qu’il appert, des pièces produites notamment de la mise en demeure du 19 août 2004, et du commandement servi en date du 20 août 2004, que la demanderesse a été mise en demeure de s’exécuter avant la saisie intervenue le 27 août 2004;
– Attendu le moyen invoqué ne saurait dès lors être accueilli;
– Qu’au regard de ce qui précède il échet de rejeter l’action en nullité du commandement et de la saisie querellée et d’ordonner la continuation des poursuites, étant observé que la procédure pénale en cours concerne sieur WEA Nicolas et non dame WEA Marguerite la bailleresse,
– Attendu que la demanderesse ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de contentieux de l’exécution conformément à l’article 49 de l’acte uniforme OHADA portant voies d’exécution et en premier ressort;
– Nous déclarons incompétent à connaître des demandes d’expulsion et de paiement d’arriérés de loyers;
– Rejetons non fondée la fin de non recevoir invoquée par la défenderesse;
– Recevons la demanderesse en son action;
– Constatons que le contrat de bail litigieux est dûment enregistré;
– Constatons que la demanderesse a été mise en demeure de s’exécuter avant la saisie conservatoire de créances querellée;
– Constatons que la procédure pénale en cours concerne sieur WEA Nicolas et non dame WEA Marguerite la bailleresse;
– En conséquence rejetons comme non fondée l’action en nullité du commandement et de la saisie querellés;
– Ordonnons la continuation des poursuites;