J-05-207
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE IMMOBILIERE – ADJUDICATION – PROCEDURE – DEMANDE DE NULLITE – DELAI ET JURIDICTION COMPETENTE – APPLICATION DE L’aRTICLE 313 (NON) – NULLITE DE LA VENTE (oui).
Si l’article
313 AUPSRVE qui dispose que : « la nullité de la décision judiciaire ou du procès-verbal d’adjudication ne peut être demandée par voie d’action principale en annulation portée devant la juridiction compétente dans le ressort de laquelle l’adjudication a été faite que dans un délai de 15 jours suivant l’adjudication », cette disposition n’est toutefois pas applicable lorsque les demandeurs ne demandent pas la nullité de la décision judiciaire d’adjudication »; mais plutôt la nullité de la vente intervenue devant le tribunal. Cette vente quia eu lieu sur une base illégale doit être déclarée nulle.
(Tribunal de grande instance de la Mifi, jugement n°25/CIV/TGI du 17 février 2004, affaire DZOKOU Jean Marie, NDEFFO Maurice c/ CCEI BANK).
Le Tribunal,
– Vu l’acte introductif d’instance;
– Vu les pièces du dossier de la procédure;
– Oui les parties en leurs demandes, fins et conclusions;
– Après en avoir délibéré conformément à la loi;
– Attendu que par exploit du 24 août 2001 de Maître TCHOUA Yves, huissier de justice à Bafoussam, déjà enregistré, les sieurs DZOKOU Jean Marie et NDEFFO Maurice fait donner assignation à la CCEI Bank pour s’entendre;
– Recevoir leur demande;
– Déclarer nulle et de nul effet la vente sur saisie immobilière du 17 octobre 2000;
– Condamner la CCEI Bank aux entiers dépens;
– Attendu que toutes les parties comparaissent et concluent; qu’il échet de dire le présent jugement contradictoire;
– Attendu qu’au soutien de leur demande, les sieurs DZOKOU Jean Marie et NDEFFO Maurice font exposer :
– Qu’au cours d’une vente immobilière les opposant à la CCEI Bank, le juge de l’audience éventuelle a cru devoir fixer l’adjudication des immeubles par devant Notaire alors même que le cahier des charges prévoyait que l’adjudication se ferait devant le tribunal;
– Que pour pallier à cette erreur, le même juge a par erreur rendu au pied d’une requête à lui présentée par la CCEI Bank une ordonnance pour modifier le dispositif d’un jugement rendu publiquement et contradictoirement entre les parties;
– Qu’une telle ordonnance qui n’avait pas de base légale a été attaquée par eux, qui ont immédiatement appelé et demandé des défenses à exécution;
– Qu’un certificat de dépôt de ces défenses à exécution a été dûment notifié à la juridiction avant l’audience d’adjudication, ce qui empêchait ipso facto la vente;
– Qu’à l’audience du 11 octobre 2000, alors que le ministère public avait déjà requis la défense à exécution de l’ordonnance litigieuse, la CCEI Bank a cru devoir malicieusement demander le rabat de délibéré de la cause qui devait être jugée à cette audience pour ainsi ne rien produire comme document nouveau et surprendre la religion du tribunal;
– Que toutefois, la Cour a continué dans le bon droit en analysant dans son arrêt des défenses à exécution, qu’aucune ordonnance ne saurait juridiquement modifier les dispositifs d’un jugement rendu publiquement et contradictoirement entre les intéressés;
– Que la Cour a déjà donc eu à prendre position dans son arrêt des défenses à exécution en décidant qu’on ne saurait modifier le dispositif d’une décision par voie d’ordonnance;
– Que le juge qui a déjà jugé ayant cessé de juger ne saurait de ce fait juger la même chose en privé dans le secret de son cabinet;
– Que l’arrêt des défenses à exécution de l’ordonnance attaquée ayant mis à néant la vente du 17 octobre 2000, c’est à bon droit que le juge du tribunal de grande instance constatera la nullité de cette vente ou mieux son inexistence;
– Attendu que pour faire obstacle à cette demande la CCEI Bank fait exposer :
– Que les demandeurs semblent ignorer la véritable nature juridique d’une décision ordonnant les défenses à exécution provisoire;
– Que l’arrêt ordonnant les défenses à exécution provisoire est essentiellement provisoire rendue dans l’attente de la décision à intervenir au fond;
– Que dans les motifs de l’arrêt n°37/CIV du 10 janvier 2001 produit au dossier, il est dit ceci :
« ----Qu’il échet en conséquence d’ordonner les défenses à l’exécution de l’ordonnance critiquée jusqu’à la décision de la Cour d’Appel sur l’appel interjeté, en application de la loi n°97/018 du 7-8-97 modificative de celle du 4-8-92 »;
– Qu’il en découle donc que l’arrêt ayant ordonné les défenses cesse de produire ses effets aussitôt que la Cour a vidé sa saisine sur le fond;
– Que les demandeurs ont formé appel contre l’ordonnance n°59/99 du 2-8-2000 et dont l’exécution a été suspendue suivant l’arrêt n°37/CIV du 10-01-2001;
– Que par arrêt n° 136/CIV du 8-8-2001, la Cour d’Appel de l’Ouest a rendu la décision dont le dispositif est ainsi conçu :
« ----Publiquement et contradictoirement à l’égard des parties et en dernier ressort;
– Déclare l’appel irrecevable;
– Met les dépens à la charge de l’appelant; »
– Que le prononcé de cet arrêt rend caduc l’arrêt n°37/CIV du 10 janvier 2001;
– Que c’est donc à tort que les demandeurs fondent leur action sur l’arrêt des défenses à exécution;
– Qu’au demeurant l’article 293 de l’acte uniforme n°06 dispose :
« ----La décision judiciaire ou le procès-verbal d’adjudication établi par le Notaire ne peut faire l’objet d’aucune voie de recours sans préjudice des dispositions de l’article 313 du même acte; »
– Que l’article 313 de cet acte dispose : « la nullité de la décision judiciaire ou du procès-verbal d’adjudication ne peut être demandée par voie d’action principale en annulation portée devant la juridiction compétente dans le ressort de laquelle l’adjudication a été faite que dans un délai de 15 jours suivant l’adjudication »;
– Qu’il découle de la combinaison de ces deux articles que les décisions d’adjudication sont définitives et que la seule voie de recours admise est l’action principale en annulation qui ne peut être introduite que dans un délai de 15 jours suivant l’adjudication;
– Que l’exploit en nullité de la vente lui a été servi le 24 août 2001 à la requête des sieurs DZOKOU Jean Marie et NDEFFO Maurice;
– Que la vente ayant eu lieu le 17 octobre 2000, c’est dix mois plus tard que DZOKOU a estimé qu’il pouvait actionner en nullité ce en violation de l’article 313 précité;
– Qu’il convient de déclarer l’action en nullité de la vente ainsi engagée irrecevable comme faite hors délai;
– Mais attendu que l’article 313 de l’acte uniforme OHADA est inapplicable en l’espèce, en ce que les demandeurs ne demandent pas « la nullité de la décision judiciaire…d’adjudication »; mais demande plutôt la nullité de la vente intervenue devant le tribunal, ce qui, aussi bien sur le plan procédural que fondamental, n’est pas la même chose;
– Attendu qu’il est incontestable, ainsi que l’a relevé la Cour d’Appel dans son arrêt n°37/CIV du 10 janvier 2001 produit au dossier : « qu’en droit, la requête aux fins de rectification n’est pas la voie de recours appropriée à exercer contre un jugement qui fait grief à une partie à un procès;
– Que le juge ne peut être saisi après avoir vidé sa saisine qu’en interprétation de la décision rendue et jamais en rectification de celle-ci;
– Qu’il s’ensuit que laisser exécuter l’ordonnance sur requête querellée qui, au demeurant manque de base légale serait cautionner une atteinte grave irrémédiable aux intérêts des requérants »;
Et attendu que c’est vainement qu’on chercherait dans l’article 248 de l’acte OHADA ou de quelque principe général de droit « le pouvoir d’évocation » en vertu duquel le tribunal de céans, « ayant constaté les irrégularités sus-évoquées, s’est ressaisi de la procédure, faisant fi de l’ordonnance, elle-même irrégulière », le tout en application de sa « plénitude de juridiction »;
– Attendu qu’il suit de tout ce qui précède que la vente querellée a été faite sur une base légale manifestement erronée;
– Qu’il échet dès lors de dire et de juger que c’est à bon droit que les demandeurs demandent en conséquence sa nullité;
PAR CES MOTIFS
– Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale et en premier ressort;
– Déclare nulle la vente des immeubles objet des titres fonciers n° 660/Mifi et n°7845/Mifi intervenue devant le tribunal de céans le 17 octobre 2000;