J-05-211
1. VOIES D’EXECUTION – SAISIE – ATTRIBUTION – SAISIE ATTRIBUTION DES CREANCES – DIFFICULTE D’EXECUTION – DEFAUT DE TITRE EXECUTOIRE – COMPETENCE – JUGE DE L’EXECUTION (oui).
2. VOIES D’EXECUTION – SAISIE – ATTRIBUTION – SAISIE ATTRIBUTION DES CREANCES – TITRE EXECUTOIRE – PROTOCOLE AUTHENTIFIE PAR LE NOTAIRE – PROTOCOLE VALANT TITRE EXECUTOIRE (NON) – NULLITE.
1.. les difficultés relatives au titre exécutoire qui fonde une saisie attribution relèvent bien de la compétence du juge de l’exécution conformément à l’article
49 AUPSRVE2.Un protocole d’accord sur lequel un notaire est saisi pour faire apposer la formule exécutoire, ne peut en aucun cas valoir titre exécutoire ce qui entraîne la nullité de la saisie pratiquée.
(Tribunal de Première Instance de Yaoundé- Ekounou, ordonnance n°133 du 17 Mars 2005, Affaire ATANGANA ASSIGA Victor Marie contre Caisse d’Epargne et de Crédit (CCEC), First Trust savings and loan, SGBC, CBC.).
Nous, Président, juge du contentieux de l’exécution,
Attendu qu’à la requête de Monsieur ATANGANA ASSIGA Victor Marie, demandeur ayant élu domicile en l’étude de Maître Jacques MBUNY, Avocat au bureau, et par exploit en date du 08 Mars 2005, non encore enregistré de Marie Fidélia BILOA, Huissier de Justice à Yaoundé, il a fait donner assignation à :
– La caisse Camerounaise d’Epargne et de Crédit (CCEC);
– FIRST TRUST Savings and loan;
– La SGBC;
– La C.B.C. d’avoir à se trouver et comparaître devant nous le 08 Mars 2005, pour est-il dit dans l’acte de saisine;
Attendu que ses comptes ont fait l’objet d’une saisie attribution de créance par la Caisse Camerounaise d’Epargne et de Crédit (CCEC) le 25 Février 2005;
Que ladite saisie a été dénoncée au requérrant le 04 Mars 2005;
Que la requise a visé comme titre exécutoire un protocole d’accord sur lequel elle a saisi un Notaire pour faire apposer la formule exécutoire;
Que ce protocole a été annulé par le Tribunal de Grande Instance du Mfoundi en date du 09 Décembre 2004;
Que cette annulation est d’autant justifiée qu’un Notaire ne peut apposer la formule exécutoire sur un acte sous seing privé, acte passé hors sa présence à la réquisition d’une partie sans aucune authentification de signature;
Que cette formule exécutoire est nulle et non avenue;
Que c’est le lieu de rappeler que la même créance a fait l’objet d’une injonction de payer et l’opposition de Sieur ATANGANA a été déclarée fondée;
Que c’est pour contourner cette décision que la CCEC brandit le fameux protocole d’accord qui à son tour a été annulé;
Qu’en l’état, la CCEC n’a pas un titre de créance sur Sieur ATANGANA et la saisie pratiquée sur les comptes de Sieur ATANGANA devra être levée pour défaut de titre ou tout au moins parce que celui-ci est à juste titre contesté;
Que la CCEC en relevant appel contre la décision annulant le protocole rapporte elle-même la preuve de la contestation;
Que cette saisie qui cause un réel préjudice professionnel au requérant au regard de la profession qu’il exerce mérite d’être levée en urgence;
Qu’il y a par conséquent lieu d’ordonner la main levée de la saisie pratiquée sur les comptes de Monsieur ATANGANA ASSIGA Victor Marie sous astreintes de 500.000 f CFA par jour de retard à compter du prononcé de la décision;
Dire que votre décision sera exécutoire nonobstant toute voie de recours;
Attendu qu’au soutien de son action le demandeur expose :
Que ses comptes ont fait l’objet d’une saisie attribution de créance par la Caisse Camerounaise d’Epargne et de Crédit (CCEC) le 25 Février 2005;
Que la requise a visé comme titre exécutoire un protocole d’accord sur lequel elle a saisi un Notaire pour faire apposer la formule exécutoire;
Que ce protocole a été annulé par le Tribunal de Grande Instance du Mfoundi en date du 09 Décembre 2004;
Que cette annulation est d’autant justifiée qu’un Natoire ne peut apposer la formule exécutoire sur un acte sous seing privé;
Que cette formule exécutoire est nulle et non avenue;
Qu’en l’état, la CCEC n’a pas un titre de créance sur Sieur ATANGANA et la saisie pratiquée sur ses comptes devra être levée pour défaut de titre ou tout au moins parce que celui-ci est à juste titre contesté;
Que la CCEC en relevant appel contre la décision annulant le protocole rapporte elle-même la preuve de la contestation de son titre;
Attendu que pour faire échec à la demande de ATANGANA ASSIGA, les défendeurs ont conclu à l’incompétence du juge de l’exécution et à l’irrecevabilité des moyens développés par le demandeur pour autorité de la chose jugée;
SUR L’INCOMPETENCE DU JUGE DE L’EXECUTION
Attendu que la doctrine et la jurisprudence affirment que le juge de l’exécution est incompétent pour contester le titre lui-même en vertu duquel la mesure d’exécution a déjà été engagée;
Qu’il ne peut intervenir que sur des difficultés portant sur les faits intervenus en aval exécutoire;
Qu’en d’autres termes le juge de l’exécution ne peut être saisi des difficultés relatives à un titre que s’il ne s’agit pas des demandes tendant à remettre en cause le titre dans son principe;
SUR L’EXCEPTION DE L’AUTORITE DE LA CHOSE JUGEE
Attendu en effet qu’en date du 14 Novembre 2003, sur la base de la même grosse notariée dûment en forme exécutoire signification commandement avait été faite à Sieur ATANGANA ASSIGA de payer le même montant en principal que celui figurant aujourd’hui dans le procès verbal de saisie attribution des créances;
Qu’en réaction à cette signification commandement, il saisira le Juge de l’exécution de céans par exploit d’assignation en date du 24 Novembre 2003, aux fins de discontinuation des poursuites, motifs pris, selon le demandeur, de l’irrégularité du titre exécutoire support à la saisie attribution du 25 février 2005;
Attendu que par ordonnance n°372/C rendue le 27 février 2003, le juge de céans a débouté sieur ATANGANA ASSIGA de sa demande comme non fondée;
Attendu que les motifs de cette décision méritent d’être repris, relativement à la validité de la grosse notariée dûment en forme exécutoire en date du 03 Juillet 2002;
Attendu que le juge de céans, dans un attendu décisif énonce ce qui suit : « l’article 33 de l’Acte Uniforme, OHADA n° 6 …, dans une énumération non limitative, répond en son paragraphe 4 que les actes notariés revêtus de la formule exécutoire, constituent des titres exécutoires »;
« Qu’il est constant dans le cas d’espèce que le protocole d’accord signé des parties en querelle le 03 juillet 2002 et déposé au rang des minutes de l’Etude de Me HAPPI Marie Claude, Notaire est incontestablement un acte authentique pour lequel, le droit de délivrer grosses et expéditions appartient au Notaire détenteur conformément à l’article 40 al 1 du décret invoqué ci-dessus » (c’est-à-dire le décret n°95/034 du 24 février 1955 portant statut et organisation de la profession de Notaire);
« Que c’est donc à juste titre que le Notaire susnommé a délivré grosse du protocole d’accord querellé pour tenir lieu de titre exécutoire à faire valoir par CCEC contre ATANGANA ASSIGA qui du reste, ne conteste pas la signature apposée … »;
Attendu qu’il résulte de telles énonciations que le juge de céans, statuant en premier ressort, a conféré incontestablement une onction de régularité du titre exécutoire inutilement querellé;
Attendu qu’en droit processuel une question litigieuse, tranchée dans une instance précédente par la même juridiction doit être considéré comme ayant acquis autorité de la chose jugée au sens des disposition de l’article 155 du code civil;
Que de manière générale et, depuis belle lurette, il a été jugé que, si une question litigieuse a déjà été tranchée dans un sens déterminé à l’occasion d’une instance précédente, elle ne peut faire l’objet d’un nouveau débat pour en déduire des conséquences différentes;
Attendu que les parties en cause comparaissent par l’entremise de leurs conseils respectifs qui concluent;
Qu’il doit être statué contradictoirement à leur l’égard;
Attendu qu’en matière de compétence juridictionnelle, l’article 49 de l’acte uniforme n° 6 édicte en substance que la juridiction compétente peut statuer sur tout litige ou toute autre demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d’urgence ou le Magistrat délégué par lui; Qu’au demeurant le large champ d’application d’article 49 précité ouvert à tout litige ou toute autre demande relative à une mesure d’exécution forcée, inclut les cas d’urgence et les difficultés relatives à l’exécution d’une décision de justice ou de toute autre titre exécutoire;
Attendu qu’il est de jurisprudence constante que le juge de exécution peut connaître de difficultés relatives à un titre exécutoire, mais uniquement à l’occasion de contestations portant sur les mesures d’exécution forcée engagées ou opérées sur le fondement de ce titre;
Attendu que l’acte notarié est un titre exécutoire d’une nature particulière dans la mesure où; il est le résultat d’un accord des volontés des parties, que le notaire ne fait q’authentifier, et où il peut donner lieu à des difficultés qui n’apparaîtront qu’au moment de l’exécution comme dans le cas de l’espèce;
Que dans ces conditions il est normal que la compétence du juge de l’exécution ne soit pas exclue quant aux difficultés d’exécution soulevées par l’acte notarié;
Attendu qu’il est logique de permettre au juge de l’exécution d’interpréter l’acte notarié qui sert de fondement aux poursuites déjà engagées afin de pouvoir découvrir la véritable commune intention des parties;
Que le juge de l’exécution doit s’assurer du caractère exécutoire du titre sur le fondement duquel les poursuites sont engagées;
Que de même rien n’interdit au juge de l’exécution face à une irrégularité manifeste postérieure à l’obtention du titre dont se prévaut le créancier pour poursuivre l’exécution forcée, de constater cette irrégularité et d’en déduire, pour la prononcer, la nullité de l’acte de saisie;
Attendu que l’article 153 de l’acte uniforme susvisé prescrit que tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, peut, pour en obtenir le paiement saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent;
Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier de la procédure que le titre exécutoire dont se prévaut la CCEC est constitué du protocole d’accord du 03 juillet 2002,
Mais attendu que le caractère exécutoire de ce protocole d’accord a été remis en cause par le jugement n° 155 du 09 décembre 2004, du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi qui a annulé le protocole d’accord du 03 juillet 2002, reçu au Cabinet de Maître HAPPI Marie Claude, Notaire à Yaoundé, suivant acte n° 3629 du répertoire daté le 04 juillet 2002 et 29 Octobre 2003, sur lequel la formule exécutoire a été apposée;
Que cette décision a fait l’objet de voie de recours de la part des défendeurs, toutes choses qui induisent ou qui confortent le caractère discuté et donc non exécutoire du titre au moment de la saisie querellée;
Attendu par ailleurs que l’une des conséquences nécessaires du caractère provisoire de l’ordonnance des référés sont qu’elle n’a pas, au principal, l’autorité de la chose jugée;
Que dès lors le juge des référés n’est pas saisi du principal, il est logique d’en déduire que le juge du principal, dans le cas d’espèce, le Tribunal de Grande Instance n’était aucunement lié à ce qui a pu être décidé en référé;
Attendu que s’il est de principe que le juge des référés est lié par sa propre décision parce que les ordonnances des référés ont une autorité de chose jugée au provisoire, ce principe à une limite en ce que l’ordonnance des référés peut être rapportée ou modifiée en cas de circonstances nouvelles;
Attendu que depuis l’intervention de l’ordonnance de référé n°372/C du 27 février 2003, qui sert de fondement au défendeur sur l’exception de la chose jugée et la saisine du juge des référés de céans statuant en matière de contentieux de l’exécution, il est survenu une circonstance nouvelle notamment l’intervention du jugement civil n°155 du 09 décembre 2004, du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi;
Que ce jugement étant un jugement de fond, lequel a d’ailleurs prononcé la nullité du protocole d’accord entre les parties, la nouvelle saisine du juge de l’exécution est légalement justifiée et lui permet de statuer en toute légalité et donc lui offre la possibilité de modifier les mesures prononcées dans la précédente ordonnance;
Attendu qu’il résulte de ce qui précède, que sieur ATANGANA ASSIGA Victor Marie est fondé à demander la main levée de la saisie;
Attendu qu’aux termes de l’article 50 du code de procédure civile et commerciale la partie qui succombe doit être commandée aux dépens;
Qu’il convient de les mettre à la charge des défendeurs avec distraction au profit de Maître Jacques MBUNY Avocat aux offres de droit;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement à l’égard de toutes les parties en matière du contentieux de l’exécution et en premier ressort;
Déclarons recevable l’action intentée par ATANGANA ASSIGA Victor Marie l’y disons fondée;
Déclarons nulle, pour défaut de titre exécutoire, la saisie attribution pratiquée le 25 Févier 2005, par le Ministère de Maître NGONGANG SIME, Huissier de justice;
Ordonnons par conséquent la main levée de la saisie pratiquée sur les comptes de sieur ATANGANA ASSIGA Victor Marie sous astreinte de 500.000 (cinq cent mille francs) par jour de retard à compter du prononcé de la présente ordonnance;