J-05-216
INJONCTION DE PAYER – CHEQUE – ABSENCE DE PROTET – CREANCE CERTAINE, LIQUIDE ET EXIGIBLE (NON) – RETRACTATION DE L’ORDONNANCE.
INJONCTION DE PAYER – ABSENCE DE CONCILIATION – ABSENCE DE DELAI DE GRACE.
Un chèque non payé ne peut fonder une procédure d’injonction de payer que si le créancier a fait établir un protêt qui seul rend la créance certaine, liquide et exigible Dans ces conditions le débiteur ne peut bénéficier d’un délai de grâce en l’absence de toute conciliation.
(Tribunal de Grande Instance du Moungo à Nkongsamba, jugement N°14/civ du 19 Décembre 2002; Affaire Dame Eugénie Titi De Mussole contre la Cameroon Pharmaceutical and Trading (CAMPHARM).
Le Tribunal;
Attendu que par son ordonnance n°06/2000-2001 du 27 Février 2001, Tribunal de Grande Instance du Moungo avait enjoint à dame Eugénie Titi de Mussole de payer à la CAMPHARM la somme de 6.913.993 francs en principal, plus 500.000francs de frais;
Attendu que par exploit des 12 et 13 Mars 2001 de Me Mba Réné, Huissier de justice à Nkongsamba, enregistré à Nkongsamba le 03 Janvier 2002, vol 1, folio 24, n°391, à la somme de 4.000francs suivant quittance n°2096692 du 03 Janvier 2002 du 28 Décembre 2001, dame Eugénie Titi de Mussole, pharmacienne BP. 343 Nkongsamba, s’est opposée à l’ordonnance sus -mentionnée et a assigné de ce fait :
1°- La Cameroon Pharmaceutical Industrial and Trading (CAMPHARM), BP. 12815 Douala, laquelle a élu domicile en d’Etude de Lessa, Avocat au Barreau du Cameroun BP. 3632 Douala;
2e- Mme le Greffier en Chef du Tribunal de grande instance du Moungo pour s’entendre :
la recevoir en son opposition comme faite dans les formes et délai légaux;
procéder à la conciliation prévue par l’article 12 de l’Acte Uniforme OHADA sur les voies d’exécution;
en cas de conciliation, dresser procès-verbal;
à défaut de conciliation, renvoyer l’affaire devant le tribunal;
advenue à cette date, déclarer l’opposition fondée;
dire en conséquence que le montant réel de la créance, en principal, est exagéré;
constater que la requérante n’est redevable envers la CAMPHARM que de la somme de 6.830.183 francs en principal;
lui accorder un délai de grâce de 24 lois à compter de la signification de la dite décision pour le règlement de ladite créance;
Attendu que l’opposante argumente dans l’acte de saisine :
Quelle s’oppose contre la décision d’injonction de payer n°06/2000-2001 du 27 Février 2001 de Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance du Moungo, laquelle lui a été signifiée le 27 Février 2001 par l’exploit de Me Penda Jean, Huissier de Justice à Nkongsamba et l’enjoignant da payer à la CAMPHARM la somme de 6.913.999 francs en principal en sus de celle de 500.000 francs à titre de frais liés à la présente procédure et intérêts de droit;
Qu’elle sollicite la conciliation préalable prévue par la loi (article 12 OHADA) sur les voies d’exécution;
Que le montant réel de la créance est exagéré, la correspondance du 08 Février 2000 entre les parties l’évaluant à 8.150.183 francs;
Qu’elle (demanderesse) lui a avancé la somme de 1.320.000 francs, réduisant sa dette à 6.830.183 francs et non 6.913.999 francs comme la stipule l’ordonnance querellée;
Que sa bonne foi est réelle, et qu’elle s’est retrouvée paralysée par la rupture de livraison des médicaments;
Qu’il y a lieu, en raison de sa bonne foi, de lui accorder un délai de grâce pour apurer sa créance, conformément aux articles 39 alinéa 1 et 2 de l’Acte Uniforme OHADA;
Attendu qu’au surplus de ce qui procède, dame Eugénie Titi de Mussole articule :
Que vu l’article 40, 41 et 52 alinéa 1 du décret du 30 Octobre 1935, il ressort des pièces produites par son adversaire qu’aucun des chèques, base des poursuites, n’a fait l’objet d’aucun protêt;
Qu’en matière civiles, le refus du paiement d’un chèque n’est constaté que par acte authentique (protêt);
Qu’aussi, « les actions en recours du porteur contre le tireur et autres obligés se prescrivent par 6 mois à partir de l’expiration du délai de présentation (article 52 al 1 décret du 30 Octobre 1935) fixé à 8 jours par l’article 29 du même décret; que partant;
En la forme : l’action de la CAMPHARM est éteinte par la prescription, l’absence de tout protêt entraîne le rejet de débats les chèques produits par la société CAMPHARM;
Attendu que la CAMPHARM, par son conseil Me Elessa Théodore prétend :
Que la somme à recouvrer est de 6.913.999 francs en principal plus 500.000 de frais;
Que pour apurer son passif, dame Titi de Mussole a mis les chèques B.I.C.E.C n°0825152 d’un montant de 500.000 francs n 825153 de 498.000 francs, n°222 de 382.164 de 4.98.133 francs, et CCI-Bank n°6716297 de 1.535.674 francs revenus impayés;
Que dame Titi de Mussole et son conseil Me Ntsamo Etienne, pour solliciter la prescription de l’acte de la CAMPHARM pour forclusion est abrogé, et que la procédure d’injonction de payer est régie par l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution;
Que l’article 2 al. 2 dudit Acte Uniforme prescrit :
« la procédure d’injonction de payer peut être introduite lorsque l’engagement résulte de l’émission ou de l’acceptation de tout effet de commerce ou d’un chèque dont la provision s’est révélée insuffisante ou inexistante;
Que le vol dont aurait souffert dame Titi de Mussole ne saurait la dispenser du paiement de ses dettes;
Que la créance est certaine, liquide, exigible;
Qu’au lieu de payer sa dette, dame Titi de Mussole se paie le luxe des services d’un conseil;
Qu’elle refuse toute conciliation ou quelque paiement échelonné, l’article 39 al. 1 de l’Acte Uniforme dispose que « le débiteur ne peut forcer le créancier à recevoir en partie le paiement s’une dette indivisible »;
Que dame Titi de Mussole devra être déboutée de sa demande;
Mais, que si par extraordinaire, en application de l’article 39 al. 2 de l ‘Acte Uniforme, le Tribunal de Grande Instance du Moungo voulait reporter ou échelonner la dette concernée, que le délai accordé n’excède par une année;
Qu’il échet d’ordonner l’application de la formule exécutoire sur l’ordonnance d’injonction de payer n°06/2000-2001 du 27 Février 2001 du Tribunal de Grande Instance du Moungo;
Et de condamner dame Eugénie Titi de Mussole aux dépens dont distraction au profit de Me Elessa, Avocat aus offres de droit;
Attendu qu’il échet de dire :
EN LA FORME
Attendu que l’ordonnance querellée date du 37 Février 2001; qu’elle a été signifiée le même jour;
Que dame Eugénie Titi de Mussole a fait opposition avec assignation par acte de Me Penda Jean, Huissier de Justice en date des 12 et 13 Mars 2001;
Attendu que cette opposition est recevable, comme faite dans les termes de la loi (article 9 et suivants de l’Acte Uniforme OHADA);
Qu’il y a lieu de la recevoir;
AU FOND
Attendu que dame Titi de Mussole a sollicité la conciliation, avec un échelonnement du paiement de sa dette;
Attendu que la CAPHARM a rejeté cette demande;
Attendu que celle-ci n’a jamais cru devoir comparaître en chambre de conseil, malgré maints renvois utiles, pour la tentative de conciliation prévus par l’article 12 de l’Acte Uniforme OHADA;
Que cette absence donne tout lieu de dire que la CAMPHARM, discutant déjà le montant de sa créance, rejette toute conciliation, cela d’autant plus que’ citant l’article 39 al. 1 de l’Acte Uniforme, elle précise que « le débiteur ne peut forcer le créancier à recevoir en partie le paiement d’une dette même indivisible »;
Qu’il y a lieu de constater la non conciliation des parties;
Attendu que le décret du 30 Octobre 1935 unifiant le droit en matière de chèques n’est nullement abrogé pour ce qui est du protêt, ce qui est contraire aux prétentions de la CAMPHARM (qui ne précise nullement la loi d’abrogation);
Attendu que l’article 40 du décret du 30 Octobre 1935 ci-dessus dispose : « le porteur peut exercer ses recours contre les endosseurs, les tireurs et les autres obligés, si le chèque, présenté en temps utile, n’est pas payé et si le refus de paiement est constaté par un acte authentique (protêt »;
Que l’article 56 du même décret prescrit :
« nul acte de la part du porteur du chèque ne peut suppléer l’acte de protêt, hors le cas prévu par les articles 36 et suivants touchant la porte du chèque »;
Qu’il y a lieu d’en déduire que le protêt, acte du Notaire ou de l’Huissier meure le seul acte de la provision du chèque émis, s’il est présenté en temps utile;
Attendu qu’en l’espèce, aucun des chèques produits par la CAMPHARM ne porte quelque protêt;
Qu’il y a tout lieu de le constater, et d’en tirer les conséquences de droit qui suivent :
Qu’à défaut du protêt il est impossible de dire avec certitude si la provision était absente ou insuffisante pour des chèques émis;
Qu’au surplus que rien n’indique que la CAMPHARM a respecté les délais de présentation et de paiement prescrits par les articles 28 et suivants du décret du 30 Octobre 1935 déjà cité;
Attendu qu’en absence de tout protêt la CAMPHARM ne pouvait exercer quelque voies de recours en cas de non paiement (article 40 du décret du 30 Octobre 1935);
Attendu que la procédure d’injonction de payer n’est ouverte que pour des créances certaines, liquide et exigibles (article 1 du livre 1 OHADA sur les procédures simplifiées de recouvrement);
Qu’en l’espèce, la créance n’étant pas exigible (faute de protêt). Que n’étant certaine en l’absence de tout protêt sur la provision, il échet de rétracter l’ordonnance querellée;
Attendu que dame Titi de Mussole a simplicité l’échelonnement du paiement de sa dette;
Mais que le créancier s’oppose à cette mesure, ou ne l’admet que subsidiairement;
Attendu que des divergences réelle portent sur le montant réel de la créance;
Que les éléments comptables ne permettant pas quant à présent liquider;
Qu’en l’absence au surplus de quelque protêt, il échet, compte tenu de tout ce qui précède, de dire qu’il n’y a aucun lieu quant à présent à quelque échelonnement de paiement d’une dette incertaine, non liquide et inexigible;
Attendu que la partie qui succombe au procès en supporte les dépens;
Qu’il échet de condamner la CAMPHARM aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Ntsamo, Avocat aux offres de droit;
Par ces motifs
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale et en premier ressort;
EN LA FORME
Déclare l’opposition recevable comme faite dans les termes de la loi,
AU FOND
Constate la non conciliation des parties;
Constate l’absence de protêt pour les chèques produits;
En conséquence, dit la provision incertaine dans son existence ou insuffisance;
Rétracte l’ordonnance d’injonction de payer querellée;
dit qu’il n’y a aucun lieu à quelque échelonnement.