J-05-227
Voir Ohadata J-04-37
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION D'UN DES DEUX DEBITEURS – DECISION D’INJONCTION DE PAYER RENDUE SUR OPPOSITION – APPEL – RECEVABILITE (OUI) – APPEL INCIDENT – ARTICLE 530 CODE DE PROCEDURE CIVILE – RECEVABILITE (OUI) –.
ACTE D'OPPOSITION – ARTICLE 11 AUPSRVE – NON SIGNIFICATION A L'AUTRE DEBITEUR – ARTICLES 20 ET 21 CODE DE PROCEDURE CIVILE – DECISION ULTRA PETITA (NON) – ABSENCE DE MOTIVATION ET DE BASE LEGALE – PREUVE LITTERALE – ARTICLES 1320 ET 1322 CODE CIVIL – ACTE SOUS SEING PRIVE – RECONNAISSANCE DE CREANCE – CREANCE NON CONTESTEE – INDEPENDANCE ENTRE LES DEUX DEBITEURS (NON) – CONFIRMATION DU JUGEMENT QUERELLE – DEMANDE RECONVENTIONNELLE – REJET.
Si le créancier a demandé dans sa requête à fin d'injonction de payer, la condamnation solidaire des deux débiteurs, il appartient cependant à celui qui initie la procédure d'opposition de citer son codébiteur, conformément aux dispositions de l'article 11 AUPSRVE, afin que le litige soit discuté dans sa globalité devant le tribunal compétent. En s'abstenant de le faire, l'opposant condamné au paiement pour la totalité de la créance est désormais mal placé pour dire que le premier juge a statué ultra petita.
Par ailleurs c'est en vain qu'il tente de faire croire qu'il est une entité juridique indépendante de l'autre débiteur et qu'il doit être mis hors de cause car la décision attaquée manque de motivation et de base égale.
Article 11 AUPSRVE
Article 1320 CODE CIVIL
Article 1322 CODE CIVIL
Article 20 CODE DE PROCEDURE CIVILE
Article 21 CODE DE PROCEDURE CIVILE
Article 530 CODE DE PROCEDURE CIVILE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 63 du 07 mai 2004, Telecel Faso SA c/ Spéro Stanislas ADOTEVI).
LA COUR,
Vu le jugement n° 062/2003 du 19 février 2003;
Vu l'appel de Telecel Faso S.A en date du 04 mars 2003;
Vu l'appel incident de ADOTEVI en date du 14 mars 2003;
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations;
Après en avoir délibéré conformément à la loi
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Le 14 octobre 2002, monsieur Spéro Stanislas ADOTEVI faisait signifier à la Société Telecel Faso S.A, une ordonnance d'injonction d'avoir à lui payer la somme de 52.500.000 F.CFA représentant le reliquat du remboursement de son apport en industries, peines et diligences entreprises pour la constitution de la société Telecel Faso et pour l'obtention de la licence GSM.
Le 28 octobre 2002, la société TELECEL FASO donnait opposition contre ladite ordonnance et assignait monsieur ADOTEVI par devant le tribunal de grande instance de Ouagadougou pour la voir annulée.
A l'audience du 08 janvier 2003, le tribunal rendait la décision contradictoire suivante :
– Déclare l'opposition de TELECEL FASO SA recevable en la forme;
– Au fond, condamne TELECEL FASO S.A à payer à Spéro Stanislas ADOTEVI la somme de cinquante deux millions cinq cents mille francs (52.500.000 F) en principal outre les intérêts de droit à compter du présent jugement;
– Déboute Spéro Stanislas ADOTEVI du surplus de sa demande;
– Condamne TELECEL FASO S.A aux dépens.
Contre cette décision, la société TELECEL FASO S.A relevait appel le 04 mars 2003 pour voir annuler ou infirmer le jugement attaqué d'une part, pour avoir statué ultra petita (art 20 et 21 du code de procédure civile) et pour absence de motivation; d'autre part, pour solliciter la mise hors de cause de TELECEL FASO S.A.
Elle expose que dans ses conclusions, monsieur ADOTEVI a demandé la condamnation solidaire de TELECEL FASO et TELECEL International (PTY) à lui payer la somme de 52.500.000 F; que cependant, seule la société TELECEL FASO a été condamnée en violation des dispositions des articles 20 et 21 du code de procédure civile.
Que s'agissant de l'absence de motivation, la pièce sur laquelle le tribunal s'est fondée pour la condamner est un acte sous-seing privé, signé par le Président Directeur général de TELECEL International (PTY) qui reconnaît devoir la somme de 70 000 $ US, soit 52.500.000 F.CFA à monsieur ADOTEVI;
Que TELECEL FASO, entité juridique totalement indépendante de TELECEL International (PTY) ne peut être tenue au paiement des dettes de celle-ci, que c'est donc à tort et en violation des dispositions des articles 1320 et 1322 du code civil que TELECEL FASO a été condamnée et qu'il convient d'annuler le jugement pour absence de motivations et pour défaut de base légale.
Enfin, elle sollicite sa mise hors de cause parce que n'étant pas liée juridiquement à TELECEL International (PTY), ayant une personnalité morale distincte et n'étant pas engagée vis à vis de monsieur ADOTEVI.
En réplique, monsieur ADOTEVI conclut à la confirmation pure et simple du jugement attaqué en soutenant d'une part qu'il appartenait à TELECEL FASO, initiatrice de la procédure d'opposition, de faire citer TELECEL International (PTY) tel que prévu par l'acte uniforme (l'opposant notifie son opposition à toutes les parties et au greffe... ) et d'autre part, que TELECEL FASO ne conteste pas la créance ainsi qu'il en résulte de la lettre du 04 septembre 2001 et de l'état des comptes dressé le 25 juin 2001.
Monsieur ADOTEVI sollicite enfin, que TELECEL FASO soit condamnée au paiement de la somme de 15.000.000 F à titre de dommages et intérêts qu'il avait demandé en barre d'instance pour procédure dilatoire car cela fait près de trois (03) années que TELECEL FASO refuse d'honorer ses engagements alors que lui-même fait l'objet de diverses pressions de la part des institutions financières de la place.
Attendu que l'affaire a été enrôlée pour l'audience publique ordinaire de la Cour d'appel 21 mars 2003 et renvoyée au rôle général pour la mise en état; que l'ordonnance de clôture étant intervenue le 12 décembre 2003, la cause était appelée à nouveau à l'audience du 16 janvier 2004 et renvoyée au 20 février 2004 pour aviser Maître TOE Flore, conseil de l'intimé;
Qu'à cette date, la Cour rapportait l'ordonnance de clôture, autorisait les parties à produire des pièces et conclusions jusqu'au 31 mars 2004 et renvoyait l'affaire au 02 avril 2004, date à laquelle elle a été retenue, débattue et mise en délibéré pour arrêt être rendu le 07 mai 2004;
Qu'advenue cette date, la Cour vidant son délibéré a statué en ces termes;
DISCUSSION
EN LA FORME
Attendu que la société TELECEL FASO SA a interjeté appel le 04 mars 2003 contre un jugement contradictoire du 15 février 2003; que cet appel remplit toutes les conditions de forme et de délai prévues par la loi et doit être déclaré recevable;
Attendu que Spéro Stanislas ADOTEVI a également interjeté appel incident contre ledit jugement le 14 mars 2003; que l'appel principal étant recevable, il y a lieu de déclarer l'appel incident recevable (art 530 CPC).
AU FOND
– Sur la violation des articles 20 et 21 du code de procédure civile
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir statué ultra petita en procédant à la condamnation seule de la société TELECEL FASO alors qu'il était demandé initialement la condamnation solidaire de TELECEL FASO et de TELECEL International (PTY);
Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 11 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution que l'opposant est tenu à peine de déchéance, de signifier son recours à toutes les parties et au greffe de la juridiction ayant rendu la décision;
Qu'en l'espèce, si monsieur Spéro Stanislas ADOTEVI a demandé dans sa requête à fin d'injonction de payer, la condamnation solidaire de TELECEL FASO et de TELECEL International (PTY), il appartient cependant à TELECEL FASO, initiatrice de la procédure d'opposition de citer TELECEL International conformément aux dispositions de l'article ci-dessus visé afin que le litige soit discuté dans sa globalité devant le tribunal compétent; qu'en s'abstenant de le faire, TELECEL FASO est désormais mal placée pour dire que le premier juge a statué ultra petita;
– Sur l'absence de motivation et de base légale
Attendu qu'il est reproché d'autre part au jugement querellé d'avoir condamné TELECEL FASO en violation des articles 1320 et 1322 du code civil et sans motifs suffisants;
Que cependant, il résulte des débats et des pièces régulièrement versées au dossier que pour l'implantation de TELECEL FASO, une déclaration d'intention a été signée entre TELECEL International (PTY) et monsieur ADOTEVI agissant pour son propre compte et pour celui du consortium d'investisseurs locaux dont il s'est porté fort; que de suite, par lettre du 26 mai 2002, TELECEL International reconnaît devoir la somme de 70.000 $ US, soit 52.500.000 F à monsieur ADOTEVI;
Que mieux, par lettre en date du 04 septembre 2001, TELECEL FASO reconnaissait bien l'existence de la créance de monsieur ADOTEVI en ces termes : « Etant donné que TELECEL FASO vous est redevable, le montant des communications effectuées viendra en déduction de la créance, en guise de compensation »;
Qu'en outre, il ressort du relevé de compte de TELECEL FASO SA en date du 25 juin 2001 ouvert dans les livres de la banque BELGOLAISE de Paris, qu'un acompte de 40.000 dollars US a été versé par TELECEL FASO à monsieur ADOTEVI; que de ces deux pièces, il en découle que la créance de monsieur Spéro Stanislas ADOTEVI sur la société TELECEL FASO n'est pas contesté dans son principe;
Que de surcroît, le signataire de la lettre du 26 mars 2002, en la personne de monsieur Miko RWAYITARE, Président Directeur général de TELECEL International (PTY) Ltd, est également administrateur de la société TELECEL FASO S.A. tel qu'il résulte de la déclaration de constitution de personne morale ou d'ouverture d'un établissement secondaire ou d'ouverture d'une succursale d'une personne morale étrangère, signée le 19 mai 2000 à Ouaga et enregistré au greffe du tribunal de grande instance de Ouagadougou le 22 mai 2000;
Que de tout ce qui précède, c'est en vain que TELECEL FASO tente de faire croire qu'elle est une entité juridique indépendante de TELECEL International (PTY) et qu'elle doit être mise hors de cause car la décision attaquée manque de motivation et de base égale;
– Sur la demande reconventionnelle
Attendu que monsieur ADOTEVI sollicite à titre reconventionnel que la société TELECEL FASO S.A soit condamnée à lui payer la somme de 15.000.000 F.CFA pour procédure dilatoire car cela fait près de trois années que celle-ci refuse d'honorer ses engagements;
Attendu que cette demande est régulière en la forme mais non justifiée quant au fond; qu'en réalité, monsieur ADOTEVI n'apporte pas aux débats la preuve de l'existence du préjudice qui lui est causé du fait de la société TELECEL FASO;
Qu'il se contente tout simplement d'affirmer qu'il fait l'objet de diverses pressions de la part des institutions financières de la place sans en apporter la preuve, qu'il convient donc de le débouter de ce chef de demande.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort
EN LA FORME
Déclare l'appel de la société TELECEL FASO S.A recevable; reçoit monsieur ADOTEVI en son appel incident;
AU FOND
Rejette la demande de monsieur ADOTEVI tendant au paiement de dommages et intérêts;
Confirme le jugement querellé en toutes ses dispositions;
Condamne TELECEL FASO aux dépens.