J-05-229
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – VENTE A CREDIT DE VEHICULE – NON PAIEMENT DU SOLDE – RETRAIT DU VEHICULE – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – CONTREDIT – ASSIGNATION EN PAIEMENT DE DOMMAGES – INTERETS – NON CONTESTATION DE LA CREANCE – ARTICLES 2078 CODE CIVIL – REALISATION DU GAGE – NON RESPECT DES FORMALITES – DEMANDE RECONVENTIONELLE BIEN FONDEE – COMPENSATION DES DEUX CREANCES – RESTITUTION DU VEHICULE –.
APPEL – INFIRMATION DU JUGEMENT – POURVOI EN CASSATION – RENVOI – RECEVABILITE DE L'APPEL (OUI) –.
CONFIRMATION DU JUGEMENT.
Il découle des dispositions des articles 2078 du code civil, 3 du décret n° 53-968 du 30 septembre 1953 relatif à la vente à crédit des véhicules automobiles et 93 du code de commerce que le vendeur d'automobile à crédit avec constitution de gage ne peut, en aucune manière, disposer ou s'approprier le gage sans formalité aucune en cas de non-paiement.
Article 11 AUPSRVE
Article 2078 CODE CIVIL
Article 3 DECRET N° 53-968 DU 30 SEPTEMBRE 1953 RELATIF A LA VENTE A CREDIT DES VEHICULES AUTOMOBILES
Article 93 DU CODE DE COMMERCE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 87 du 16 juillet 2004, Société Burkinabè de Crédit Automobile (SOBCA) c/ ZONGO K. Hamidou).
LA COUR,
– Vu le jugement n° 45 du 27 janvier 1993;
– Vu l'appel de la SOBCA en date du 16 mars 1993;
– Vu l'arrêt n° 22 du 07 mars 1997;
– Vu l'arrêt n° 92 du 06 novembre 2001;
– Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
FAITS - PROCEDURE - PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Suivant contrat en date du 02 août 1989, la Société Burkinabè de Crédit Automobile (SOBCA) a vendu à crédit à l'Entreprise Générale de Commerce et de Construction (E.G.C.C.) ayant pour aval, monsieur ZONGO K. Hamidou son directeur, un camion Benne de marque TATA au prix de 20.895.000 F.CFA.
Un acompte de 8.895.000 F fut payé et le solde de 12.000.000 F a été stipulé payable en trente (30) traites mensuelles de 544.340 F.
Le 31 novembre 1990, la SOBCA reprenait le camion vendu après 10 mois d'utilisation par l'acheteur et obtenait de suite une ordonnance d'injonction de payer contre ZONGO K. Hamidou en date du 20 décembre 1991 qu'elle lui notifiait le 09 janvier 1992. Elle initiait également une procédure de saisie conservatoire contre l'E.G.C.C et ZONGO K. Hamidou.
Le 17 janvier 1992, ZONGO K. Hamidou formait contredit à l'ordonnance d'injonction de payer et assignait la SOBCA le 23 juin 1992 en paiement de la somme de 45.000.000 F à titre de dommages-intérêts pour toutes causes de préjudices confondus.
A l'audience du 27 janvier 1993, le tribunal de première instance de Ouagadougou a rendu la décision contradictoire suivante :
– déclare le contredit recevable parce qu'intervenu dans les délais prescrits par la loi;
– condamne ZONGO K. Hamidou à payer à la SOBCA la somme de 12.000.000 F avec intérêt de droit à compter du jour de la demande;
– condamne la SOBCA à payer à ZONGO K. Hamidou la somme de 25.000.000 F à titre de dommages intérêts pour toutes causes de préjudices confondus;
– ordonne la compensation entre les parties et dit qu'après compensation la SOBCA reste redevable de la somme de 13.000.000 F à ZONGO K. Hamidou;
– ordonne la restitution du véhicule, objet du litige, évalué suivant rapport d'expertise en date du 18 août 1992 de l'expert SORE Samba à 3.612.400 F à ZONGO K. Hamidou;
– déboute chacune des parties du surplus de leurs demandes;
– dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.
Contre cette décision, la SOBCA interjetait appel le 16 mars 1993 pour voir infirmer le jugement attaqué.
Par arrêt n° 22 du 07 mars 1997, la Cour d'appel infirmait effectivement le jugement du 17 janvier 1993, déclarait la demande reconventionnelle de ZONGO K. Hamidou mal fondée, le déboutait en conséquence, le condamnait à payer à la SOBCA la somme de huit millions trois cents quatre vingt sept mille six cents francs (8.387.600 F) et déboutait la SOBCA du surplus de sa demande.
Pourvoi a été formé le 07 mai 1997 par Maître Mamadou SOMBIE, conseil de ZONGO K. Hamidou, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Ouagadougou du 07 mars 1997 et par arrêt n° 92 du 06 novembre 2001, la chambre judiciaire de la Cour de Cassation a déclaré le pourvoi recevable, a cassé et annulé l'arrêt n° 22 du 07 mars 1997 de la Cour d'appel de Ouagadougou et a renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'appel autrement composée.
Attendu que l'affaire a été réenrôlée pour l'audience publique ordinaire de la Cour d'appel du 19 décembre 2003 et renvoyée au 06 février 2004 pour comparution des parties, puis au 05 mars 2004 pour conclusion en réplique de Maître KERE et SOMBIE;
Qu'à cette date, l'affaire a été retenue, débattue et mise en délibéré pour arrêt être rendu le 16 avril 2004; que le délibéré a été cependant prorogé successivement au 07 mai, 21 mai et 16 juillet 2004, date à laquelle il a été vidé en ces termes
DISCUSSION
EN LA FORME
Attendu que la Société Burkinabè de Crédit Automobile en abrégé SOBCA a interjeté appel le 16 mars 1993 contre un jugement rendu contradictoirement le 27 janvier 1993; que cet appel étant intervenu dans les formes et délais prévus par la loi, il y a lieu de le déclarer recevable
AU FOND
– De la créance de la SOBCA
Attendu qu'il résulte des débats et des pièces du dossier que la créance de la SOBCA n'est pas contestée ni en son principe, ni en son montant; que le débiteur reconnaît qu'après le paiement de l'acompte d'un montant de 8.895.000 F, aucune autre somme n'a été versée au créancier et qu'il reste devoir à la SOBCA de la somme de 12.000.000 F.CFA.
Qu'en replaçant les parties dans leurs droits, et obligations respectifs, il y a lieu de contraindre ZONGO K. Hamidou au paiement de ladite somme;
– De la demande reconventionnelle
Attendu qu'aux termes de l'article 2078 du code civil, « le créancier ne peut à défaut de paiement, disposer du gage; sauf à lui faire ordonner en justice que ce gage lui demeurera en payement et jusqu'à due concurrence, d'après une estimation faite par experts, ou qu'il sera vendu aux enchères.
« Toute clause qui autoriserait le créancier à s'approprier le gage ou à en disposer sans les formalités ci­-dessus est nulle »;
Que l'article 3 du décret n° 53-968 du 30 septembre 1953 relatif à la vente à crédit des véhicules automobiles indique que : « la réalisation du gage se fera, quelle que soit la qualité du débiteur, conformément aux dispositions de l'article 93 du code de commerce » qui, à son tour, précise ceci : « A défaut de paiement à l'échéance, le créancier peut, huit jours après une simple signification faite au débiteur et au tiers bailleur de gage, s'il y en a un, faire procéder à la vente publique des objets donnés en gage;... Toute clause qui autoriserait le créancier à s'approprier le gage ou à en disposer sans les formalités prescrites est nulle »;
Qu'il découle de cet ensemble de textes de loi que le vendeur d'automobile à crédit avec constitution de gage ne peut, en aucune manière, disposer ou s'approprier le gage sans formalité aucune en cas de non-paiement;
Qu'il est constant cependant, que le 31 novembre 1990, soit 10 mois après la vente, la SOBCA a retiré purement et simplement le camion vendu des mains de l'acheteur sans aucune forme de procès; que de tels agissements sont constitutifs de voies de fait à l'encontre de ZONGO K. Hamidou et qui lui ont causé un préjudice certain;
Attendu que ZONGO K. Hamidou demande que la SOBCA soit condamnée à lui payer la somme totale de 45.000.000 F à titre de dommages intérêts se décomposant comme suit :
– 22.775.000 F représentant le manque à gagner suite au retrait abusif du camion depuis courant fin novembre 1990;
– 22.775.000 F représentant le préjudice commercial
Attendu qu'en réalité, les agissements de la SOBCA ont perturbé à coup sûr les activités commerciales de ZONGO K. Hamidou et lui ont fait perdre beaucoup d'argent; que c'est à juste titre que le premier juge, en tenant compte du temps de la privation de celui-ci dans l'exploitation dudit véhicule et des usages sur le marché, a estimé le manque à gagner à la somme de 17.500.000 F et qu'il convient de confirmer;
Que s'agissant des voies de fait exercés sur ZONGO K. Hamidou et des multiples procédures initiées par la SOBCA, il est certain que ces procédures ont eu pour conséquence de jeter le discrédit sur sa personne et sur ses activités; ce, d'autant plus que la SOBCA était coutumière de ces genres de comportements; que là également, la réparation du préjudice ne saurait être évaluée à moins de 7.500.000 F.CFA;
Attendu enfin qu'il y a lieu de procéder à une compensation entre les deux créances et dire qu'après compensation, la SOBCA reste redevable à ZONGO K. Hamidou de la somme de 13.000.000 F.CFA;
– Sur la restitution du camion
Attendu que le camion avait été purement et simplement retiré par la SOBCA depuis le 31 novembre 1990, soit plus de 13 ans de cela et l'a exploité durant; que de l'impossibilité matérielle de resituer le camion à ZONGO K. Hamidou dans l'état où il avait été évalué à dire d'expert à la somme de 3.612.400 F.CFA, il y a lieu de condamner la SOBCA au remboursement de la dite somme;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commercial et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'appel de la Société Burkinabè de Crédit Automobile (SOBCA) recevable;
AU FOND
Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions;
Condamne la SOBCA aux dépens.