J-05-242
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – RECEVABILITE (OUI) – CONTESTATION DE LA CREANCE – EXCEPTION DE NULLITE POUR VICE DE FORME – ACTE DE SIGNIFICATION – ARTICLE 8 ALINEA 1 AUPSRVE – MENTIONS OBLIGATOIRES – DATE ERRONEE – ABSENCE DE DATE – MONTANT INEXACT DE LA CREANCE – NOUVELLE SIGNIFICATION DE L'ORDONNANCE D'INJONCTION DE PAYER – REGULARISATION DU VICE DE FORME (NON) – NULLITE DE L'ACTE DE SIGNIFICATION (oui).
Une date erronée ou illisible équivaut à une absence de date et constitue un vice de forme sanctionnée par la nullité de l'acte conformément aux articles 81 et 99 du code de procédure civile. Dans tous les cas, une nouvelle signification de l'ordonnance d'injonction de payer n'a pas pour effet de régulariser ce vice mais constitue comme telle une seconde signification.
Par ailleurs l'article 8 alinéa 1 AUPSRVE prescrit à peine de nullité de la signification l'indication sur cet acte du montant de la somme à payer au créancier et fixé par la décision ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est précisé. Toute autre indication viole les prescriptions des dispositions précitées.
Article 8 AUPSRVE ALINEA 1
Article 81 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE
Article 99 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE
Article 394 CODE DE PROCEDURE CIVILE
(Tribunal DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n° 241 du 14 juillet 2004, l'Entreprise Burkinabè de Construction de Bâtiment (EBCB/OS) c/ Société Générale de Banques du Burkina (SGBB)).
LE TRIBUNAL,
Vu les pièces du dossier,
Ouï à l'audience du 18 février 2004, date à laquelle le dossier de l'affaire a été renvoyé devant le juge conciliateur, la tentative de conciliation ayant échouée aux motifs que « l'opposant ne reconnaît pas devoir une quelconque créance », le dossier de l'affaire a été renvoyé à l'audience du 16 juin 2004 où il a été débattu et mis en délibéré au 30 juin 2004, délibéré prorogé pour jugement être rendu à l'audience du 14 juillet 2004;
Ouï les parties en leurs explications, fins, moyens et conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
FAITS, MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par requête en date du 15 décembre 2003, la Société Générale de Banques du Burkina en abrégée SGBB, société anonyme dont le siège est à Ouagadougou, agissant poursuites et diligences de son président directeur général, lequel élit domicile en l'étude de maître Mahamoudou BAMBARA, avocat à la Cour, sollicitait l'autorisation de faire signifier à l'Entreprise Burkinabè de Construction de Bâtiment (EBCB/OS) une injonction de payer la somme de soixante six millions neuf cent quatre vingt un mille deux cent soixante dix (66.981.270) F.CFA représentant le solde débiteur du compte n° 005580066 01-24 ouvert à son nom dans ses livres;
Par exploit d'huissier de justice daté du 22 janvier 2003, la SGBB a signifier à l'EBCB/OS, l'ordonnance d'injonction de payer n° 798/03 rendue le 29 décembre 2003 par la présidente du tribunal de grande instance de Ouagadougou au pied de la requête à elle présentée;
Contre cette ordonnance, l'EBCB/OS a par acte d'huissier de justice en date du 22 janvier 2004 formé opposition,
Elle expose au soutien de son opposition in limine litis que l'acte de signification a elle notifié contient des causes de nullité relatives à la fausseté de la date de l'acte, et la non précision tant dans la requête que dans l'ordonnance d'injonction de payer des intérêts et frais de greffe;
Que l'absence de date ou sa fausseté sur un acte d'huissier de justice est sanctionné par la nullité de l'acte; Que la signification du 8 janvier 2003 doit être déclarée nulle car elle viole les dispositions des articles 99 et 100 du code de procédure civile;
Qu'au surplus, la SGBB réclame dans le même acte de signification, le paiement de la somme de soixante six millions neuf cent quatre vingt dix mille quarante huit (66.999.048) F.CFA au mépris de l'ordonnance n° 798/03 qui l'autorise à signifier une injonction de payer la somme de soixante six millions neuf cent quatre vingt un mille deux soixante dix (66.981.270) F.CFA uniquement;
Qu'or les articles 4 et 8 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution prescrivent sous peine de nullité, de préciser tant dans la requête ordonnance, que dans l'acte de signification de la décision, les intérêts et frais de greffe;
Qu'elle sollicite donc voir déclarer la nullité de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer n° 798/03 en date du 8 janvier 2003, pour les causes sus énoncées;
Qu'aussi la créance alléguée à son encontre par la SGBB est mal fondée; Que la somme réclamée fluctue considérablement, au regard des divers documents produits à l'appui, alors qu'il n'y a pas eu de règlement entre eux; Qu'en plus, l'impossibilité d'obtenir de la SGBB le relevé du compte ouvert dans ses livres, est une preuve que la créance n'est pas justifiée; Qu'elle sollicite voir déclarer, subsidiairement au fond, la SGBB mal fondée en son action;
Le 24 janvier 2004, la SGBB procédait par acte d'huissier de justice à une nouvelle notification de l'ordonnance d'injonction de payer n° 798/03 du 29 décembre 2003;
Par la plume de son conseil, elle fait valoir dans ses conclusions d'instance, que la nullité de l'acte de signification tirée de la violation de l'article 99 du code de procédure civile, notamment la fausseté de la date de notification de l'ordonnance ne peut, aux termes de l'article 140 alinéa 1 du même code de procédure civile « être prononcée qu'à charge par celui qui l'invoque de prouver le préjudice que lui cause l'irrégularité; même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public »;
Que l'EBCB/OS ne justifie d'aucun préjudice et ne saurait se prévaloir du seul fait de l'incorrection de la date pour demander la nullité de l'acte;
Que d'autre part l'article 100 du code de procédure civile invoqué prévoit que « (…) la nullité d'un acte de procédure pourra être prononcée si une formalité substantielle a été omise »;
Qu'en l'espèce, il ne s'agit pas d'une omission mais simplement une erreur matérielle qui se justifie par l'habitude et le fait qu' on était en début d'année;
Qu'en tout état de cause, la deuxième notification de la même ordonnance, régulièrement faite le 24 janvier 2004 vient corriger cette erreur;
Que le motif tiré de la différence de montant sur l'ordonnance et sur la signification est inopérant;
Que l'ordonnance porte autorisation de servir une injonction de payer la somme de soixante six millions neuf cent quatre vingt un mille deux cent soixante dix (66.981.270) F.CFA outre les frais, honoraires et émoluments aux fins de recouvrement de la créance;
Que cette autorisation justifie ce fait; Que la créance réclamée est bien fondée et justifiée par des pièces dûment déposées au greffe, d'où l'EBCB/OS peut en prendre connaissance;
Qu'elle sollicite :
– la confirmation de l'ordonnance d'injonction de payer,
– la condamnation de l'EBCB/OS à payer la somme de soixante six millions neuf cent quatre vingt un mille deux cent soixante dix (66.981.270) F.CFA outre les frais, honoraires et émoluments aux fins de recouvrement de cette créance ainsi que l'exécution provisoire de la décision à venir;
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que l'article 81 du code de procédure civile prévoit que « les actes d'huissier de justice indiquent indépendamment des mentions prescrites par ailleurs :
La date des jour, mois et an... »; Que l'article 99 du même code sanctionne de nullité la non observation de cette prescription qui pourra être prononcée s'il est porté atteinte aux intérêts de la défense ou si elle nuit aux intérêts de celui qui l'invoque;
Attendu que l'exploit de signification indique comme date le 8 janvier 2003 alors que la requête et l'ordonnance d'injonction de payer datent respectivement du 15 décembre 2003 et du 29 décembre 2003; Que la date de signification est manifestement erronée;
Attendu qu'une date erronée ou illisible équivaut à une absence de date et constitue un vice de forme sanctionnée par la nullité de l'acte;
Attendu que la signification en date du 24 janvier 2004 n'a pas pour effet de régulariser ce vice mais constitue comme telle une seconde signification;
Attendu que l'indication exacte de la date de l'exploit de signification sert à la computation des délais dont disposent le débiteur pour faire opposition et de se défendre;
Attendu par ailleurs que l'article 8 alinéa 1 prescrit à peine de nullité de la signification l'indication sur cet acte du montant de la somme à payer au créancier et fixer par la décision ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est précisé; Que toute autre indication viole les prescriptions des dispositions susdites;
Qu'il y a lieu par conséquent de déclarer nul l'exploit de notification de l'ordonnance d'injonction de payer pour violation des disposition de l'article 81 du code de procédure civile et 8 alinéa 1 de l'acte uniforme Ohada sur le recouvrement simplifié des créances et voies d'exécution;
Attendu que conformément à l'article 394 du code de procédure civile, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens; qu'il échet condamner la SGBB aux dépens,
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'exploit de notification d'injonction de payer en date du 08/01/03 nul pour violation de l'article 81 du code de procédure civile et 8 alinéa 1 de l'acte uniforme Ohada portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
Condamne la SGBB aux dépens.