J-05-243
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – RECEVABILITE (OUI) – ORIGINE DE LA CREANCE – CONTRAT – CAUSE – DELIVRANCE DE VISA – QUALITE DU DEFENDEUR POUR DELIVRER DES VISAS (NON) – CAUSE ILLICITE – ARTICLE 1131 CODE CIVIL – CONTRAT ILLEGAL – OBLIGATION SANS EFFET – DEMANDE EN PAIEMENT IRRECEVABLE.
Les visas sont délivrés par les autorités diplomatiques, après présentation de pièces. L'opposant étant un commerçant et non un agent chargé de délivrer les visas, il ne peut trouver un visa si ce n'est par fraude.
Un contrat pour être valable doit remplir certaines conditions. Dans le cas d'espèce le contrat dont la cause est la délivrance de visa a une cause illicite. Et aux termes de l'article 1131 du code civil l'obligation sans cause ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.
Dès lors, la prétention du demandeur étant fondée sur un contrat illégal, son intérêt ne peut être juridiquement protégé.
Article 1131 CODE CIVIL
(Tribunal DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n° 90 du 28 avril 2004, OUEDRAOGO Abdoul Rasmané c/ COMPAORE Rachid).
LE TRIBUNAL,
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les pièces du dossier;
Oui les parties à l'audience du 07 janvier 2004, date à laquelle l'affaire a été renvoyée à la conciliation pour audience être reprise le 19 février 2004 pour cause d'échec de tentative de conciliation;
A cette date l'affaire a été plusieurs fois renvoyée puis mise enfin en délibéré au 17 mars 2004, pour jugement être rendue;
Advenue cette date, le tribunal a statué en ces termes;
Par requête en date du 26 novembre 2003 COMPAORE Rachid a sollicité l'autorisation de faire signifier à OUEDRAOGO Abdoul Rasmané une injonction de payer la somme de deux millions trois cent mille (2.300.000) francs CFA, elle expose que cette somme avait été remise au débiteur à titre de frais d'obtention d'un visa;
Que toutes les démarches par lui entreprises pour recouvrer le paiement de cette créance sont restées vaines;
Le 12 décembre 2003 OUEDRAOGO Abdoul Rasmané a par acte de maître Almissi OUEDRAOGO huissier de justice à Ouagadougou, fait assigné à COMPAORE Rachid, l'ordonnance d'injonction de payer n° 749/2003, à lui délivré par le président du tribunal de grande instance de Ouagadougou le 27 novembre 2003 au pied de sa requête;
Contre cette ordonnance OUEDRAOGO Abdoul Rasmané a par acte en date du 12 décembre 2003 de maître Almissi OUEDRAOGO, huissier de justice à Ouagadougou, formé opposition; par le même acte, il a donné assignation à COMPAORE Rachid et au greffier en chef du tribunal de grande instance de Ouagadougou d'avoir à comparaître le 26 novembre 2003 devant le tribunal de grande instance de Ouagadougou pour voir déclarer l'ordonnance d'injonction de payer n° 749/2003, à lui notifier, nulle;
Au soutien de sa demande, il expose que le 05 décembre 2003, il recevait signification d'une ordonnance l'enjoignant de payer la somme de deux millions trois cent mille (2.300.000) francs CFA à COMPAORE Rachid;
Que pour obtenir l'ordonnance n° 749/2003, COMPAORE Rachid alléguait dans sa requête datée du 26 novembre 2003 être créancier de OUEDRAOGO Rasmané à qui il avait remis la somme de deux millions trois cent mille (2.300.000) francs CFA au titre de frais d'obtention de visa;
Que le visa n'ayant pas été obtenue, il sollicite donc le remboursement de la somme remise;
Que pour obtenir l'ordonnance d'injonction de payer n° 749/2003 COMPAORE Rachid invoque les dispositions de l'article 2 alinéa 1 de l'acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
Que ledit article stipule que « la procédure d'injonction de payer peut être introduite lorsque la créance a une cause contractuelle... »;
Que dans le cas d'espèce, il est aisé de constater que la créance n'a pas une origine contractuelle; qu'il s'agit plutôt d'une restitution de somme qui ne peut être demandée suivant la procédure d'injonction de payer telle que prévue par l'article 2 de l'acte uniforme suscité;
Que OUEDRAOGO Rasmané était tenu d'une obligation de faire et non pas une quelconque autre obligation;
Que par ailleurs aux termes de l'article 1184 du code civil « la condition résolutive est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des parties ne satisfait point à son engagement; dans ce cas le contrat n'est point résolu de plein droit; la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages-intérêts la résolution doit être demandée en justice »;
Que le contrat liant les deux paries n'ayant jamais été résolu, il s'en suit que COMPAORE Rachid ne pouvait aucunement recourir à la procédure d'injonction de payer prévue par l'acte uniforme sus-cité;
Que c'est à bon droit que l'ordonnance n° 749/2003 rendue le 17 novembre 2003 sera annulée pour violation de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
Qu'au fond il convient de souligner qu'en aucun cas, OUEDRAOGO Rasmané ne s'est engagé à faire un visa pour COMPAORE Rachid; qu'il l'a plutôt mis en contact avec NIKIEMA Mahama qui s'est engagé envers lui à établir le visa moyennant la somme de deux millions deux cent cinquante mille (2.250.000) francs CFA;
Que le requis a effectivement versé la somme de deux millions trois cent mille (2.300.000) francs au sieur NIKIEMA Mahama qui a établi le visa;
Mais que le requis a renoncé au voyage tout en réclamant la somme versée;
Attendu que le conseil de COMPAORE Rachid réplique en déclarant que le présent litige rentre bel et bien dans le cadre de l'article 2 alinéa 1 de l'acte uniforme précité; que la créance de COMPAORE Rachid a une origine contractuelle;
Qu'en outre COMPAORE Rachid a bel et bien contracté avec OUEDRAOGO Rasmané;
Que c'est lui qui a chiffré le montant à deux millions cinq cent mille (2.500.000) francs et la dite somme lui a été remise; qu'il veut tout simplement dénaturer les faits;
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu que COMPAORE Rachid a remis à OUEDRAOGO Rasmané la somme de deux millions cinq cent mille (2.500.000) francs dans le but de lui trouver un visa;
Attendu que COMPAORE Rachid est un commerçant et non un agent chargé de délivrer les visas;
Que les visas sont délivrés par les autorités diplomatiques, après présentation de pièces; que OUEDRAOGO Rasmané ne peut trouver un visa si ce n'est par fraude;
Que la cause de ce contrat est la délivrance de visa;
Attendu que l'article 1131 du code civil énonce que l'obligation sans cause ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet;
Que le contrat pour être valable doit remplir certaines conditions; que le contrat dans le cas d'espèce a une cause illicite;
Qu'un contrat basé sur une cause illicite ne peut être valable;
Que la prétention de COMPAORE Rachid étant fondée sur un contrat illégal, son intérêt ne peut être juridiquement protégé;
Qu'il y a lieu de déclarer la demande en paiement de COMPAORE Rachid irrecevable;
PAIR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et, en premier ressort;
EN LA FORME
Reçoit l'opposition formée par OUEDRAOGO Abdoul Rasmané;
AU FOND
Déclare la demande en paiement de COMPAORE Rachid irrecevable;
Le condamne aux dépens.