J-05-25
PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT – VENTE – DEFAUT DE LIVRAISON – INJONCTION DE DELIVRER – PROCEDURE EXCLUSIVE (NON) – COMPETENCE DU JUGE DES REQUETES (oui).
La procédure d’injonction de délivrer prévue par l’AUPSRVE n’étant pas exclusive, le juge des requêtes, compétent pour prendre toute mesure utile justifiée par l’urgence, peut parfaitement se fonder sur les apparences et le défaut de preuve de résolution d’un contrat de vente pour autoriser l’acheteur à prendre possession des marchandises, objet du contrat.
(Cour d’Appel de l’Ouest, arrêt n° 31/civ. du 11 décembre 2002, Affaire Sté U.P.S. c/ S.T.P.C.).
La cour,
– Vu l’ordonnance de référé n° 542 du Président du Tribunal de Première instance de Douala;
– Ensemble l’appel interjeté contre ladite ordonnance le 26 juin 2000;
– Vu l’arrêt n° 84/CC du 7 mars 2000 de la Cour suprême du Cameroun par lequel la cause et les parties ont été renvoyés devant la Cour d’Appel de céans;
– Vu l’ordonnance n° 72/4 du 26 août 1972 portant organisation judiciaire de l’Etat et les textes modificatifs subséquents;
– Vu les pièces du dossier de la procédure;
– Ouï les parties représentées par Maîtres BOUOBDA et KAMKUI respectivement avocats à Bafoussam et à Douala pour l’intimé et Maître BILONG NDJONG Denis, avocat à Douala pour l’appelant en leurs conclusions écrites et orales;
– Le Ministère Public entendu;
– Et après avoir délibéré conformément à la loi;
EN LA FORME
Considérant que l’appel interjeté le 28 juin 2000 par la société United Plastics Services, en abrégé UPS sous le numéro 976 contre l’ordonnance sus-évoquée qui n’était pas encore notifiée à l’appelante est recevable comme fait dans les forme et délai de la loi;
– Considérant que toutes les parties ont conclu;
– Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard;
AU FOND
– Considérant que l’appelant explique à l’appui de son appel que suivant convention en date du 28/12/99, elle a cédé au prix de 43.919.000 F toutes taxes comprises certaines machines de son usine à la STPC;
– Que cette cession a été consentie et acceptée suivant certaines conditions de paiement dont un échéancier de virement qui n’a pas été respecté par l’acquéreur;
– Que tirant les conséquences de cette défaillance, l’exposant a fait signifier à la STPC une résolution de la vente avec offre de remboursement de l’acompte versé;
– Qu’alors qu’elle savait bien qu’elle n’a pas honoré ses engagements contractuels, la société STPC a saisi le juge des requêtes qui lui a signé une ordonnance n° 1073 du 6 mars 2000 l’autorisant à prendre possession des marchandises objets de la convention;
– Que réagissant à cette action, l’exposant a saisi le juge des référés pour constater la voie de fait créée par l’ordonnance ainsi rendue et faire cesser ladite voie de fait par rétractation de l’ordonnance querellée;
– Qu’elle entend réitérer cette demande devant le juge d’appel et solliciter du même coup la restitution des machines enlevées sous astreinte de 1.000.000 F par jour de retard à compter de l’arrêt à intervenir;
– Que l’ordonnance de prise de possession en cause est d’autant plus critiquable qu’elle s’appuie sur une législation dépassée depuis l’entrée en vigueur des textes de l’OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires) en vertu de l’article 336 de l’Acte Uniforme n° 6;
– Que ledit Acte Uniforme a en effet aménagé en son article 19 une procédure dite "d’injonction de délivrer" au travers de laquelle celui qui se prétend créancier d’une obligation de délivrance d’un bien meuble corporel déterminé peut obtenir délivrance de son bien;
– Considérant que pour échec aux prétentions sus-rappelées de UPS, la Sté STPC fait rétorquer que la société UPS étant dissoute et de ce fait juridiquement inexistante, une action judiciaire en injonction de délivrer était vouée à l’échec faute de demandeur;
– Que face à cette situation à laquelle il faut ajouter la mauvaise foi patente de son cocontractant qui, au moment de se prêter à une seconde transaction sur les machines litigieuses avec un tiers, savait pertinemment que la vente des marchandises en faveur de l’exposante était parfaite et la propriété acquise à cette dernière par le jeu des articles 1583 du Code Civil, les parties contractantes s’étant en effet longtemps avant mises d’accord aussi bien sur la chose que sur le prix du reste payé;
– Que UPS n’a pas obtenu la résiliation de la vente, laquelle ne peut au regard des circonstances de fait et des actes posés, intervenir en dehors des tribunaux et par la seule volonté d’une partie;
– Que la prise de possession d’un bien par son légitime propriétaire au travers d’une ordonnance du juge des requêtes est régulière;
– Qu’en tout cas, UPS S.A. qui ne pouvait établir son existence légale, ni produire le registre de commerce et des statuts harmonisés conformément à la législation OHADA après le 28/12/99, date de cession des machines litigieuses, est mal fondée à se prévaloir de cette législation;
– Considérant qu’il est juridiquement acquis que le juge des requêtes est habilité à prendre toute mesure utile justifiée par l’urgence;
– Considérant qu’il n’est pas démontré en l’état des pièces du dossier que la propriété des machines litigieuses dévolue à l’acquéreur dès la signature de leur convention et le paiement subséquent du premier acompte en exécution de celle-ci, a été retirée par la résolution régulière du contrat de vente, laquelle ainsi que l’a pertinemment rappelé le conseil de l’intimé ne peut intervenir que par voie judiciaire;
– Que la prise de possession desdites machines par son propriétaire sur autorisation du juge des requêtes, consacrée aussi bien par la doctrine que par une abondante jurisprudence est régulière et n’a rien d’une voie de fait;
– Que la procédure dite "d’injonction de délivrer" invoquée par l’appelant n’est pas exclusive;
– Qu’il n’y a pas lieu de ce fait a rétractation de l’ordonnance n° 1073 du 6/3/2000 par laquelle la mesure querellée a été ordonnée;
– Considérant par ailleurs que la contestation sérieuse relevée par le premier juge est réelle, UPS S.A. ayant émis en cours de référé des réserves sur le droit de propriété de la Sté STPC en arguant d’une pseudo résolution de la vente question de fond, que ledit juge, statuant en référé, ne pouvait se permettre de discuter;
– Que le reproche à lui fait par l’appelant à savoir qu’il se devait de rapporter l’ordonnance attaquée du seul fait de la contestation sérieuse dont s’agit manque de pertinence, dès lors que la possession des machines concernées se justifie par la forte présomption de droit de propriété découlant du contrat de vente jusque là non contesté et qui se devait de produire effet tant que la preuve de la résolution n’est pas rapportée;
– Qu’il n’est pas superflu de rappeler ici le principe faisant du juge des référés celui des apparences;
– Considérant qu’il échet au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent de confirmer entièrement l’ordonnance appelée;
– Considérant que la partie qui succombe doit supporter les dépens;
Par ces motifs
– Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale, en appel et en dernier ressort;
EN LA FORME
– Reçoit l’appel;
AU FOND
– Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.