J-05-250
PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT DE CREANCE – CARACTERES DE LA CREANCE – RECONNAISSANCE DE DETTE COMPORTANT PAIEMENT ECHELONNE DE LA CREANCE – MODALITES NON ACCEPTEES PAR LE CREANCIER – OPPOSABILITE AU CREANCIER (NON) – EXIGIBILITE DE LA CREANCE (non).
La reconnaissance de dette comportant des propositions de modalités de paiement échelonné non explicitement acceptées par le créancier constitue un acte unilatéral du débiteur non opposable au créancier. L’absence de clause d’exigibilité immédiate de toute la créance pour le non paiement d’une créance ne peut, de ce fait, lui être opposé pour dénier à la créance non payée son caractère exigible.
Article 1 AUPSRVE
Article 2 AUPSRVE
(Cour d’Appel d’Abidjan, Arrêt n° 684 du 22 juin 2004, TALLAL SAYEGH (Magnès OUANGUI) c/ Sté AUTO GLASS CENTER (VITR’Auto) Côte d’Ivoire (Me AMADOU Fadika).
LA COUR,
Oui le Ministère Public;
Vu les pièces du dossier;
Ensemble les faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit daté du 12 mars 2004 comportant ajournement au 30 mars 2004, M. TALLAL SAYEGH a relevé appel du jugement civil N°412 rendu le 18 février 2004 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan qui, en la cause, a statué ainsi qu'il suit :
"Statuant publiquement contradictoirement, en matière civile et commerciale, et en dernier ressort;
– Reçoit la Société AUTO GLASS CENTER en son opposition;
– I'y dit bien fondée;
– Déclare Monsieur TALLAL SAYEGH irrecevable en sa demande en recouvrement;
– Le condamne aux dépens;
Il ressort des énonciations du jugement querellé ainsi que des pièces du dossier de la procédure que Monsieur TALLAL SAYEGH, se prévalant d’une créance de 22.000.000 F à l'égard de la Société AUTO GLASSE CENTER, a par requête aux fins d'injonction de payer datée du 27 Février 2003, sollicité la condamnation de celle-ci au paiement de cette somme; Celle-ci, condamnée payer datée du 10 mars 2003, a fait opposition à cette condamnation en expliquant qu’elle a sollicité et obtenu de Monsieur TALLAL SAYEGH la somme totale de 21.750.000 pour laquelle elle a établi au profit de ce dernier une reconnaissance de dette au terme de laquelle, elle a proposé des remboursements échelonnés sur 24 mois, soit 1.500.000 F le 25 de chaque mois; Ce qui donne 36.000.000 F; plus un reliquat de 4.700.000 francs à verser à l'échéance finale;
Ceci exposé, la Société AUTO GLASS CENTER soutient que la requête aux fins d'injonction de payer est irrecevable parce que la créance litigieuse n'a pas une cause contractuelle;
Ensuite, a-t-elle, allégué, cette créance l'est ni certaine, ni liquide, ni exigible en ce que la reconnaissance de dette qu'elle a signée au profit son débiteur, établit que le remboursement de la créance se ferait sur 24 mois allant du 25 Février 2002 au 25 Février 2004;
Ainsi, poursuivait-elle, alors qu'elle a régulièrement payé la somme de 19.500.000 F, le créancier vint à réclamer la somme de 21.200.000 F qui n’est pas encore échue;
Aussi, a-t-elle ajouté, en dehors de clause rendant exigible toute la créance en cas de non paiement d'une échéance, la créance dont le paiement est réclamé n'est pas exigible;
Enfin, l'opposante a fait observer que le prêt dont le remboursement est recherché subit un taux usuraire prohibé parce que contraire à l'article 1907 du code civil;
Pour sa part, Monsieur TALLAL SAYEGH a fait valoir que sa créance, certaine, liquide et exigible, résulte d'une opération d'achat de glaces proposée par la Société AUTO CENTER GLASS et financée par lui au moyen d'un prêt avec intéressement au bénéfice d'où la reconnaissance de dette et le montant reconnu par la débitrice;
Sur l’exigibilité de sa créance, il a, en effet, relevé que la reconnaissance de dette invoquée par la débitrice n'étant pas un contrat, mais plutôt un acte unilatéral, elle n'emporte aucune obligation à son égard;
Pour déclarer irrecevable la requête aux fins d'injonction de payer de Monsieur TALLAL SAYEGH le Premier Juge a estimé que ce dernier a produit au soutien de sa requête une reconnaissance de dette au terme de laquelle la créance devait être remboursée sur 24 mois, non entièrement échus, de sorte que ladite créance n'est pas exigible;
Il a estimé, par ailleurs, que le créancier n’a pas fait la preuve du fondement de la créance litigieuse;
C'est contre cette décision que Monsieur TALLAL SAYEGH relève appel en soutenant que sa créance est bien exigible en ce que la reconnaissance de dette invoquée n'a aucun caractère contractuel, et ne lui est donc pas opposable;
Par ailleurs il invoque la cause contractuelle de sa créance, en ce qu’il a existé une convention commerciale entre lui et la Société AUTO GLA.SS CENTER;
Au total, estimant que sa demande en recouvrement est bien fondée l'appelant conclut à l'infirmation du jugement entrepris et, la Cour, statuant à nouveau, rejetera comme non fondée l’opposition de la société AUTO GLASS CENTER;
Pour sa part, la Société AUTO GLASS CENTER, par le canal de son conseil, Maîtres AMADOU FADIGA et Associés, Avocats à la Cour, conclut à la confirmation du jugement entrepris en soutenant que Mr TALLAL SAYEGH ne rapporte pas le caractère contractuel de sa créance dont il se prévaut et que cette créance n'est pas exigible en ce que le montant réclamé n'est pas échu;
Toutes les parties ont ainsi conclu et produits des pièces;
Il conviendra donc de statuer contradictoirement;
DES MOTIFS
EN LA FORME
L'appel de Monsieur TALLAL SAYEGH a été relevé conformément aux prescriptions légales;
Il doit être, en conséquence, déclaré recevable;
AU FOND
Contrairement à l'opinion du Premier Juge, la créance dont se prévaut Monsieur TALLAL SAYEGH est bien certaine, liquide et exigible, a une cause contractuelle et obéit, en conséquence, aux prescriptions des articles 1 et 2 de l'acte uniforme relatif aux recouvrement simplifié et voies d'exécution;
En effet, pour contester le caractère exigible de la créance, la société VITR'AUTO, suivie en cela, par le Premier Juge, prétend qu'aux termes de la reconnaissance qu'elle a signée, des échéances de paiements ont été envisagées par elle; de sorte que, en dehors d'une clause d'exigibilité immédiate de toute la créance pour le non paiement d'une échéance, le montant dont le paiement est réclamé n'est pas exigible;
Or, la reconnaissance de dette dont il s’agit n'ayant pas été signée par Mr TALLAL SAYEGH et les échéances de paiement qu'elle contient n'ayant pas été explicitement acceptées par lui, celle-ci ne peut avoir une nature contractuelle pouvant lui permettre d'être opposé aux deux parties;
Il s'agit dès lors d'un acte Unilatéral qui, comme tel, n'engage que la partie qui l'a signé; laquelle reconnaît devoir telle somme d’argent à Monsieur TALLAL;
En tout état de cause, par cet acte, la société VITR’AUTO a explicitement reconnu être débitrice de Monsieur TALLAL SAYEGH et s'est engagée à payer l'intégralité de cette dette, au plus tard fin Février 2004;
A ce jour, 22 juin 2004, elle ne conteste pas que le reliquat de 21.200.000F en principal n'a pas été payé;
C'est donc à tort que le premier Juge a déclaré la requête aux fins d'injonction de payer de Mr TALLAL SAYEGH irrecevable pour non exigibilité de la créance;
Par ailleurs, il ressort des productions, notamment des propres affirmations de l'intimée, que la créance dont le recouvrement est poursuivi est né d'un prêt à elle octroyé par Mr TALLAL SAYEGH à l'effet d'importer des pare brises de France avec clause d'intéressement de ce dernier au bénéfice après remboursement du capital;
Ainsi, non seulement la créance de TALLAL SAYEGH a une cause contractuelle, mais en plus, elle ne viole aucune disposition légale;
Il convient donc, au total, d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, condamner la société VITR’AUTRO au paiement de la somme de 21.200.000 francs au profit de Monsieur TALLAL SAYEGH;
L'intimée qui succombe doit être condamnée aux dépens en application des dispositions de l'article 149 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière ci vile et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare recevable l'appel de Monsieur TALLAL SAYEGH relevé du jugement civil N°412 rendu le 18 février 2004 par le Tribunal de Première Instance d'Abidjan;
AU FOND
L'y dit bien fondé;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions
Statuant à nouveau,
Déclare régulière et fondée la demande de Mr TALLAL SAYEGH;
Condamne la Société VITR’AUTO à lui payer la somme, en principal, de 21.200.000 FCFA;
Condamne l’intimée aux dépens.