J-05-252
VOIES D’EXECUTION – NANTISSEMENT – SAISIE – REALISATION DU NANTISSEMENT – CONTESTATION – JURIDICTION COMPETENTE – JUGE DES REFERES.
Le juge compétent pour connaître d’une action en contestation de saisie opérée dans le cadre de la réalisation d’un nantissement est le juge de l’exécution institué par l’article 49 de l’acte uniforme relatif au recouvrement simplifié des créances et voies d’exécution (juge des référés).
(Cour d’Appel d’Appel d’Abidjan, Arrêt n° 828 du 20 juillet 2004 BIAO (Me TOURE Mariame) C/ KONE TAHAPEHA (SCPA BOA-AKRE TCHAKRE et associés).
LA COUR,
Oui le Ministère Public;
Vu les pièces du dossier;
Ensemble l'exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en denier ressort sur l'appel relevé le 10 Février 2004 avec ajournement au 24 Février 2004 par la Banque Internationale pour l'Afrique Occidentale dite BIAO-CI ayant pour conseil Maître TOURE MARAME, de l'ordonnance de référé N°5931 rendue le 31 Décembre 2003 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan, signifiée le 28 janvier 2004 dont le dispositif est ainsi conçu
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière de référé d'heure à heure et en premier ressort;
– Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront, mais dès à présent, vu l'urgence et par provision;
– Recevons KONE TAHAPEHA en son action;
– L'y disons bien fondé;
– Ordonnons la main-levée sur le compte d'épargne N°2353493702 T sous astreinte comminatoire de 100.000 francs par jour de retard;
– Condamnons la BIAO-Cl aux entiers dépens";
Considérant qu’aux termes de son appel, la BIAO-CI expose que le sieur KONE TAHAPEHA était l’un des associés de 18 société SMACCM;
que dans le cadre de ses activités, la Société SMACOM a sollicité et obtenu un découvert;
que pour garantir le remboursement de ce prêt, un acte de nantissement a été signé par le sieur KONE TAHAPEHA relativement à son compte à terme qu’il avait ouvert dans les livres de la banque;
que par la suite la Société SMACOM qui a connu beaucoup de difficultés a fini par mettre la clé sous le paillasson depuis 1999;
que toutes les démarches engagées par la BIAO pour obtenir le remboursement de sa créance sont restées vaines;
que cette situation lui causant beaucoup de préjudices, la Banque ne pouvait rester indifférente devant l’attitude du sieur KONE TAHAPEHA;
Qu’elle dut se retourner contre ce dernier en sa qualité de caution pour se faire rembourser la somme de 12.477.074 F CFA accordée à la société SMACOM;
Considérant qu’après ce rappel des faits, la BIAO-CI demande l'infirmation de l'ordonnance querellée;
que pour ce faire, elle soutient que le sieur KONE TAHAPEHA ne conteste pas lui avoir remis à titre de garantie un acte de nantissement de son compte à terme afin de pouvoir obtenir un découvert bancaire dont il avait besoin pour le fonctionnement de la Société SMACOM;
qu’elle fait valoir que sa créance est exigible du fait de la défaillance de la société SMACOM et;aussi du fait de nombreuse démarches infructueuses;
qu'elle affirme que conformément à l’article 68 de I’acte uniforme sur les sûretés, le nantissement confère au créancier un droit de suite et de réalisation faute de paiement;
qu'elle estime qu’elle est bien fondée à poursuivre le sieur KONE TAHAPEHA pour le recouvrement de sa créance;
que la saisie par elle pratiquée est régulière;
Considérant que KONE TAHAPEHA plaide l’irrecevabilité de l’appel de la BIAO-CI pour être intervenu hors délai, 42 jours après le prononcé de la décision et 14 jours après signification de l’ordonnance querellée;
Que concernant le fond, KONE TAHAPEHA soutient que la BIAO-CI ne rapporte pas la preuve matérielle irréfutable et irréfragable augurant d’une parfaite possibilité de compensation entre les deux comptes qui n’ont ni la même nature juridique (le compte courant étant ouvert au nom d’une personne morale de droit privé SMACOM et le compte d’épargne intitus personae au nom de m. KONE TAHAPEHA, personne physique), ni même titulaire, les deux comptes reposant sur deux entités différentes et bien distinctes;
qu'il conteste le nantissement comportant des écritures insérées par le BIAO-CI dans cet acte à son insu et sans son consentement;
qu’il fait savoir que cet acte a été signé par chacun des trois associés de la société SMACOM ce, pour reconnaître que la BIAO-CI a octroyé un prêt à la société SMACOM et non à KONE TAHAPEHA, personne physique qui n’a pas garanti son compte d’épargne;
qu'il demande alors à la Cour de déclarer irrecevable l’appel de la BIAO-CI;
Considérant qu'en réplique, la BIAO-CI fait valoir que c'est à tort que KONE TAHAPEHA plaide l'irrecevabilité de l'appel en se fondant sur l'article 228 du code de procédure civile;
qu'elle fait savoir que pour se déclarer compétent dans la présente cause, le Juge des référés s’est fondé sur l'article 49 de l'Acte Uniforme relatif aux voies d'exécution arguant qu'il s'agit en l'espèce "d'une demande de main-levée sur un compte saisi";
Or considérant, soutient l'appelante, qu'il ne peut être procédé à une saisie de compte dans le cadre des voies d'exécution prévues par ledit acte uniforme que par le moyen d'une saisie conservatoire de créance ou d'une saisie-attribution de créance;
qu'il va donc sans dire, ajoute la BIAI-CI, qu'en l'espèce où il a invoqué à l’appui de sa décision, l'acte uniforme précité, le Juge des référés a considéré l'action dont il a été saisi comme étant une action en contestation de saisie attribution de créance; or il ressort de l'article 172. alinéa 1 de l'acte uniforme précité que la décision de la juridiction tranchant une telle contestation est susceptible d'appel dans les 15 jours de sa notification;
qu'alors la BIAO conclut à la recevabilité de son appel;
que consécutivement au fond, la BIAO-CI soutient que le Juge des référés est incompétent pour connaître de la demande de main-levée formée par le sieur KONE TAHAPEHA;
qu'en effet, précise-t-elle, s'agissant en l'espèce de la réalisation d'un nantissement (et non d’une saisie ) la mainlevée ne peut être valablement ordonnée tant que la dette principale n'est pas éteinte;
qu'elle rappelle que la dette dont le nantissement litigieux garantissait le paiement n'avait pas été réglée au moment où le Juge des référés était saisi;
que subsidiairement, la BIAO-CI demande à la Cour de ne pas suivre l’intimé car c'est bel et bien son compte d'épargne qu'il a nanti au profit de la banque pour garantir le remboursement du découvert par celle-ci à la société SMACOM dont il était l’un des associés;
que le contrat d’aval signé par le sieur KONE TAHAPEHA le prouve suffisamment;
qu'en conséquence l'appelante sollicite l'infirmation de l'ordonnance querellée;
Considérant que l'intimé ayant conclut, il convient de statuer contradictoirement;
DES MOTIFS
EN LA FORME
Considérant qu'en l'espèce il s'agit d'une contestation, incident réglé par les articles 169 à 172. de l'acte uniforme relatif au recouvrement simplifié et voies d'exécution;
Considérant que l'article 172 précité dispose en son alinéa 1er que "la décision tranchant la contestation est susceptible d'appel dans les quinze jours de sa notification";
Considérant qu'en l'espèce, l'ordonnance de référé n°5931 du 31 décembre 2003 ayant été signifiée le 28 janvier 2004 à la BIAO, l'appel relevé par cette dernière le 10 février 2004 dans la forme prescrite par la loi est recevable;
Considérant que le sieur KONE TAHAPEHA demande par voie de mémoire la majoration de l'astreinte à la somme de 500.000 F;
Considérant que cet appel incident régulièrement intervenu est recevable;
DE LA COMPETENCE DU JUGE DES REFERES
Considérant que la BIAO-CI plaide l'incompétence du Juge des référés au motif que celui-ci ne pouvait connaître de la demande de main-levée formée par KONE TAHAPEHA sans préjudicier au fond;
qu'elle soutient que s'agissant en l'espèce de la réalisation d'un nantissement (et non d'une saisie), la main-levée ne peut être valablement ordonnée tant que la dette principale n'est éteinte; or la dette dont le nantissement litigieux garantissait le paiement n’a pas été réglée;
Considérant qu'il est Constant qu'il s'agit en l'espèce d’un nantissement;
Considérant que l'article 68 de l'acte uniforme OHADA sur les sûretés renvoie à l'article 56-1 du même acte uniforme qui renvoie à son tour aux conditions prévues par les dispositions organisant les voies d'exécution;
Considérant qu'il résulte de ces articles combinés que le Juge compétent en l'espèce est, le Juge prévu par l'article 49 de l'Acte Uniforme relatif au recouvrement simplifié et voies d'exécution;
Or considérant que le Juge prévu par l'article précité est le Juge de l'exécution qui statue en urgence comme le Juge des référés mais dont la compétence est plus étendue que celle du Juge des référés habituel;
qu'il résulte de ce qui précède que le Juge des référés est compétent pour connaître de la demande de main-levée comme en l'espèce;
que dès lors le moyen tiré de l'incompétence du Juge des référés ne saurait prospérer;
Sur la main - levée
Considérant qu'il résulte tant de l'acte de nantissement non daté et non signé produit que de la lettre de la BIAO adressée le 31 Janvier 2002 au sieur KONE TAHAPEHA que le nantissement porte sur le compte n°23138154 820;
Or considérant que le compte saisi est le compte d’épargne N°2353493702 T qui n'a rien à voir avec le nantissement;
que dès lors c’est à bon droit que le Premier Juge a ordonné la main-levée de la saisie portant sur Ce compte;
Sur l’astreinte
Considérant que KONE TAHAPEHA demande une astreinte de 5O0.0O0.F en lieu et place de 100.000 F;
que cependant il se contente de demander sans justifier sa requête;
qu'il échet de rejeter cette demande injustifiée;
Sur les dépens
Considérant que la BIAO qui succombe doit supporter les dépens les dépens;
PAR CES MOTIFS
EN LA FORME
Déclare la BIAO.CI et le cieur KONE TAHAPEHA reCevables en l~urs appels princip~l et incident relevés de l'ordtnnance de référé
N° .5931/2003 rendue le 31/121'2003 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Inetance dtAbidjan - Plateau;
AU FOND
Les y déclare mal fondés;
Les en déboute;
Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions;
Condamne la BIAO aux dépens.