J-05-253
SURETES – HYPOTHEQUE CONSERVATOIRE – JUGEMENT – SIGNIFICATION A PREPOSE – NULLITE DE LA SIGNIFICATION (NON) – PERSONNE MORALE DE DROIT PRIVE NON COMMERÇANTE – ORDONNANCE AUTORISANT A PRENDRE INSCRIPTION D’HYPOTHEQUE CONSERVATOIRE – ACTION EN VALIDATION – DELAI POUR AGIR – POINT DE DEPART – JOUR DE L’ENROLEMENT DE LA PROCEDURE.
IMMEUBLE – MALFAÇONS – CONSTRUCTION – DOMMAGES – INTERETS – INTERETS PRODUITS – ACQUEREUR D’UNE PARTIE DE L’IMMEUBLE – QUALITE POUR RECLAMER UNE PART DES INTERETS.
Le défaut de signification d’une décision de justice au représentant légal d’une personne morale de droit privé qui n’est pas une société commerciale, n’est pas cause de nullité de la signification faite au préposé de ladite personne morale.
Le délai fixé par ordonnance pour agir en validation d’hypothèque conservatoire court, non à compter de la date de l’exploit d’assignation, mais à partir de la saisine du tribunal qui n’est effective que du jour de l’enrôlement de la procédure.
A qualité pour réclamer une part des intérêts, l’acquéreur de plusieurs étages d’une immeuble dont le constructeur a été condamné à indemniser le propriétaire pour les malfaçons de ce immeuble.
Article 455, 164, 168 CODE IVOIRIEN DE PROCEDURE CIVILE, COMMERCIALE ET ADMINISTRATIVE
(Cour d’Appel d’Abidjan; chambre Civile et Commerciale, Arrêt n° 47 du 16 janvier 2004 SCGL c/A2IC).
LA COUR,
Vu les pièces du dossier :
Ensemble l'exposé des faits,.procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
Ouï les parties en leurs conclusions;
Après en avoir délibéré Conformément à la loi
Par arrêt N°938 du 21 Avril 1978, la Société Civile de Grand Lahou dite SCGL propriétaire de l'immeuble SMGL sis au Plateau a obtenu la condamnation de la Société Française d'Entreprise de Dragage et de Travaux publics dite SFEDTP et autres à lui payer la somme de 167.950.000F à titre de dommages-intérêts pour les malfaçons dudit immeuble; après le partage de ladite somme entre les co-propriétaires, la SCGL a poursuivi à l'insu des autres co-propriétaires la procédure contre la Société SFEDTP et a également obtenu la condamnation de celle-ci par arrêt N°1093 du 14 Juin 1996,au paiement de la somme de 241.952.515 F au titre des intérêts de la somme principale obtenue;
La Société Civile particulière Amécian Ivoirien Investissement Corporation dite A2IC devenue co-propriétaire de l'immeuble, SMGL du fait de l'achat par acte notarié du 11 Décembre 1994 de 5 étages dans l'immeuble SMGL a dès lors réclamé à la SCGL la somme de 118.172.993 francs au titre de sa part sur les intérêts;
Suivant jugement N°05 du 23 Janvier 2003, le Tribunal de première Instance d'Abidjan a fait droit à la demande de la société Civile particulière American Ivoirian Investissement Corporation dite 2AIC en condamnant la SOGL au paiement de la somme de 118.172.993 F avant de valider l'hypothèque conservatoire prise sur les appartements de celle-ci;
Appelante de cette décision la Société Civile de Grand Lahou dite SCGL en sollicite l'infirmation;
A l'appui de son appel, elle plaide la nullité de la signification du 12 mai 2003 sur le fondement de l'article 255 in fine du code de procédure civile en indiquant que l'acte de signification a été remise à une employée en la personne de Madame SAURA au lieu d'être remise en représentant légal;
De même, elle soutient que le jugement attaqué est nul en ce qu'il ne fait ni allusion à la mise en état effectuée ni état des réquisitions du Ministère Public;
Elle relève également que la Société 2AIC a violé l'article 136 alinéa 3 du traité OHADA en saisissant la juridiction du fond seulement 08 jours après la signature de l'ordonnance portant autorisation d'inscription provisoire d'hypothèque alors que le délai minimum prescrit est de 15 jours;
Elle soulève l'irrecevabilité de l'action de la Société 2AIC en vertu de la règle electa una via et explique que celle-ci a attrait Mme BAILLY la gérante de la SCGL devant les juridictions pénales pour avoir payement du même montant sollicité devant le Tribunal civil;
Elle relève qu'il y a une question préjudicielle en alléguant qu'elle a initié une action pour faux et usage de faux contre Mr. ASSEBIAN Jean-François administrateur unique de la société A2IC;
Elle prétend également qu'elle a saisi le Tribunal non en qualité de Syndic mais en son nom personnel si. bien que la SCGL ne justifie d'aucune qualité à lui réclamer 118.172.993 F au titre de sa part des intérêts obtenus;
En réplique, la Société civile particulière America Ivoirian Investissement Corporation dite A2IC sollicite la confirmation du jugement critiqué;
Elle fait remarquer que la nullité de l'acte de signification fondée sur l'article 255 in fine du code de procédure civile ne saurait prospérer dans la mesure où ce texte ne vise que les entités à assigner;
Elle soutient que la nullité du jugement attaqué n’est pas fondée puisque la lecture attentive dudit jugement démontre qu'il y a eu mise en état; elle ajoute que l'article136alinéa 3 du traité OH.ADA n'a pas été violé dans la mesure où la date de l'exploit d'assignation (19 Octobre 2000) n’est pas la date de saisine du Tribunal qui correspond à la date d'ajournement;
Elle fait remarquer que le SCGL se distingue de ses dirigeants et que la règle Electa una via ne saurait prospérer pas plus que la question préjudicielle surtout que la procédure pénale contre Mr. ASSEBIAN Jean-François s'est soldée par une décision de relaxe pour délit non établi;
Enfin, elle allègue qu'elle a qualité à agir parce qu'elle est subrogée dans les droits de l'ex-BNDA et l'ex-EIDI qui lui ont vendu des appartements dans l'immeuble SMGL;
par réquisitions écrites du 07 novembre 2003, le Ministère Public a conclu à la confirmation de la décision entreprise en indiquant que les différents moyens de nullité du jugement et d'irrecevabilité de l'action invoqués par la SCGL n'e sont pas fondés;
SUR CE
Considérant que les parties ont conclu; qu'il y a lieu de statuer par décision contradictoire;
EN LA FORME
Sur la recevabilité
Considérant que le jugement N°05 rendu le 23 Janvier 2003 par le tribunal de première Instance d'Abidjan a été signifié à la SCGL le 12 mai 2003; que dès lors, son appel interjeté le 12 Juin 2003 est recevable pour être conforme aux prescriptions des articles 164 et 168,u code de procédure civile;
Sur la nullité de l’exploit de signification du 12 mai 2003 tirée de la violation de l’article 255 du CPC
Considérant que contrairement aux allégations de la SCGL l'article 255 in fine qui n'est relatif qu'aux assignations n'impose pas de Signifier les décisions de justice des personnes du représentant légal s'agissant des personnes morales de droit privé autres que les sociétés de commerce (qu’il s'ensuit que l'exception de nullité alléguée doit être rejetée pour être mal fondée;
AU FOND
Sur la nullité du jugement entrepris
Considérant que le jugement critiqué rappelle que lors de la mise en état, les parties ont maintenu leurs déclarations contenues dans leurs écritures respectives; que de même, ledit jugement Vise les réquisitions écrites du ministère, public en date du 24 Juin 2002; que c'est à tort que la SCGL prétend que le premier juge a omis de faire état de la mesure d'instruction ordonnée et des réquisitions du parquet; qu'il y a lieu d'en juger ainsi et de rejeter l'exception de nullité soulevée par la SCGL;
Sur la violation de l’article 136 alinéa 3 de l’acte uniforme relatif au droit des sûretés
Considérant que la SCGL prétend qu'en introduisant l'action en validité de l'hypothèque conservatoire le 19 Octobre 2.000, la société A2IC a violé le délai minimum de 15 jours prescrit par l'ordonnance présidentielle N°4324 du II Octobre 2000;
Mais considérant que la date de l'exploit d'assignation (19 Octobre 2000) n'est pas celle de la saisine du tribunal qui n'est effective que du jour de l'enrôlement de la procédure;
Or considérant que la SCGL n'indique pas la date de l'enrôlement pour permettre à la Cour de vérifier la pertinence de ses allégations; qu'il y a lieu de rejeter le moyen tiré de la violation l'article 136 alinéa 3 de l'acte uniforme relatif au droit des sûretés;,
Sur la violation de la règle electa una via
Considérant que la règle Electa una via interdit en principe à la victime d'une infraction qui a saisi le juge civil (pour obtenir réparation de son préjudice ) de changer de voie en saisissant le juge pénal pour les mêmes faits; qu'ainsi expliquée, cette règle ne peut être soulevée que devant le juge pénal; qu'il s'ensuit que cet adage allégué 'devant la juridiction civile est mal venu;
Sur l’existence d’une question préjudicielle tenant a l’introduction d’une action pénale pour faux et usage de faux contre Mr. ASSEBIAN jean-françois.
Considérant que la SCGL ne démontre pas que la procédure de faux;et usage de faux contre Mr. ASSEBIAN Jean-François était susceptible d'influer sur l'action civile en condamnation en validation d'hypothèque conservatoire introduite devant le Tribunal de Première Instance d'Abidjan; que dès lors, le sursis à statuer tiré de la règle le criminel tient le civil en l'état ne saurait prospérer;
Sur le défaut de qualité à agir
Considérant que par, acte notarié du II Décembre 1994, la société civile particulière American Ivoirian Investissement Corporation dite A2IC s'est portée acquéreur de 5 étages dans l'immeuble SMGL; que par cet achat, elle est devenue copropriétaire dudit immeuble au même titre que la SCGL; qu'ainsi, elle justifie de la qualité à agir pour réclamer sa part des intérêts surtout qu'il n'est pas démontré que les malfaçons objet de la condamnation de l'entrepreneur concerne seulement les appartements dont la SCGL est propriétaire;
DES DEPENS
Considérant que la SCGL succombe; qu'il y a lieu de condamner aux dépens de l'instance;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort;
EN LA FORME
Reçoit la Société Civile de Grand-Lahou dite SCGL en son appel relevé du jugement N°05 rendu le 23 Janvier 2003 par le Tribunal de première Instance d'Abidjan;
Rejette l'exception de nullité relative à l'exploit signification du 12 mai 2003;
AU FOND :
Déclare la SCGL mal fondée;
L'en déboute;
Confirme le jugement attaqué en tous ses dispositions;
La condamne aux dépens;