J-05-255
SURETES – HYPOTHEQUE CONSERVATOIRE – ORDONNANCE AUTORISANT A PRENDRE INSCRIPTION – ASSIGNATION EN VIOLATION – ORDONNANCE DE REFERE – RETRACTATION DE L’ORDONNANCE AUTORISANT A PRENDRE INSCRIPTION NON – INCOMPETENCE DU JUGE DES REFERES.
Le juge des référés est incompétent pour ordonner la rétractation d’une ordonnance autorisant à prendre inscription d’hypothèque conservatoire, dès lors que le tribunal est saisi d’une action en validation de l’hypothèque conservatoire.
Article 138 AUS
Article 141 AUS
(Cour d’appel d’Abidjan, arrêt du 23 mars 2004, Société AFRIDRAG c/ SCICCT).
LA COUR,
Oui le Ministère Public;
Vu les pièces du dossier;
Ensemble les faits, procédure, prétention des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit daté du quatorze (14) octobre 2003 comportant ajournement au mardi 28 octobre 2003, la Société Africaine de Dragages dite AFRIDAG agissant aux poursuites et diligences de son représentant légal, Monsieur GEORGES TOUMA, Gérant, a relevé appel de l'ordonnance de référé N°4206 rendue le 7 octobre 2003 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan qui, en la cause, a statué ainsi qu'il suit :
"Déclarons l'action de la Société SCI.C.C.T. recevable;
L'y disons bien fondée;
Ordonnons la rétractation de l'ordonnance N°2025/03 du 23/05/2003";
Il ressort des énonciations de cette ordonnance que suivant exploit daté du 4 Septembre 2003, la Société Civile Immobilière CENTRE COMMERCIAL de TREICHVItLE, dite SCICCT a fait servir assignation à la Société AFRICAlNE de DRAGAGE dite AFRIDRAG d'avoir à comparaître et se trouver par devant la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Abidjan, pour voir ordonner la rétractation de l'ordonnance N°2025/03 du 23/05/2003 ayant autorisé la Société AFRIDRAG à prendre une hypothèque sur les immeubles lui appartenant;
A l'appui de son action la Société SCI.CCT a expliqué qu'elle est propriétaire de l'immeuble "Treichville - Center" formant les lots,28 et 29 objet du titre foncier N°78.728 de la circonscription foncière de Bingerville, et, se prévalant d'une prétendue créance, la Société AFRIDRAG, par ordonnance N°2025/2003 du 23 Mai 2003, rendue sur requête, s'est fait autoriser à prendre une hypothèque conservatoire sur ledit immeuble;
Elle estimait que cette, ordonnance est illégale en ce qu'elle viole les dispositions de l'article 138 de l'acte uniforme relatif aux sûretés pour n'avoir pas indiqué que la juridiction compétente statuait" à charge de lui en référer en cas de difficulté";
Par ailleurs elle a relevé que la société AFRIDRAG a déjà sollicité et obtenu une ordonnance N°2679/2000 en date du 30 Juin 2000 autorisant la même prise d’hypothèque sur le même immeuble;
C'est alors que l'instance en radiation était en cours que la nouvelle ordonnance a été obtenue; Et quatorze (14) jours plus tard, la Société obtenait une troisième ordonnance pour le même objet;
Enfin, selon la demanderesse, la société AFRIDRAG a sollicité et obtenu l'ordonnance litigieuse en se fondant sur un arrêt N°927 rendu le 19/07/2002 par la Cour d'Appel d'Abidjan qui la condamnait à payer à ladite Société AFRIDRAG la somme de 162.206.224 francs; Or, selon elle, cet arrêt ne saurait fonder la demande de la Société AFRIDRAG d'autant que la Cour Suprême a ordonné la discontinuation des poursuites fondées sur l'arrêt N°927 de la Cour Suprême;
Les moyens et prétentions de la Société AFRIDRAG, défenderesse, n'ont pas été rapportés;
Pour ordonner la rétractation de l'ordonnance N°2025/03 du 23/05/2003 le Premier Juge a estimé que l'examen des pièces produites permet de relever qu'une première autorisation d’hypothèque conservatoire avait été obtenue par la Société AFRIDRAG par ordonnance N°2679/2000 du 30/6/2000 et que celle-ci ne produit aucune décision de radiation de cette ordonnance;
Au soutien de son appel la Société AFRIDRAG soulève in limine litis l'incompétence du Juge des référés en expliquant que le Tribunal d'Abidjan a été déjà saisi en validation de l'hypothèque conservatoire prise en vertu de l'ordonnance querellée;
Elle soulève également l'irrecevabilité du recours en rétractation pour violation de l'article 141 de l'acte uniforme relatif aux sûretés eu ce que ce recours est tardif;
Au fond, la Société AFRIDRAG réplique que contrairement aux prétentions de la SCICCT, l'article 138 de l'acte uniforme relatif aux sûretés n'a pas été violé, la mention "à charge de lui en référer en cas de difficultés, n'étant pas une mention obligatoire;
Sur le fait qu'elle aurait obtenu une ordonnance en Juin 2000 tout en reconnaissant que cette ordonnance obtenue et devenue caduque, l'appelante déclare que ce fait ne l'empêchait pas de solliciter et d'obtenir une autre ordonnance;
Sur l'absence de titre exécutoire, invoquée par la SCICCT, l'appelante réplique qu'aucune disposition légale n'exige un titre exécutoire pour prendre une hypothèque conservatoire;
La SCICCT, intimée, ne comparait pas en cause que l'acte d'appel ait été signifié en son domicile de Maître BLESSY CHRISOSTOME, Avocat a la cour;
Il convient donc de statuer contradictoirement;
DES MOTIFS
EN LA FORME
L'appel de la société AFRIDRAG a été relevé conformément aux prescriptions légales; Aussi convient-il de le déclarer recevable;
AU FOND
L'appelante soulève l'incompétence du Juge des référés;
En effet, pour se déclarer compétent et ordonner la rétractation de l'ordonnance N°2025/03 du 23/05/2003 ayant autorisé la prise d'hypothèque judiciaire, le Juge des référés a cru devoir estimer qu'une première autorisation d'inscription d'hypothèque conservatoire a été obtenue par la Société AFRIDRAG qui ne justifie pas pue celle-ci ait fait l'objet de radiation;
Il ressort cependant des productions que par exploit daté 26 Mai 2003, la Société AFRIDRAG, en notifiant l'ordonnance N°litigieuse à la société Civile Immobilière Centre Commercial de Treichville dite SCI.CCT, a fait servir à celle-ci assignation d'avoir à comparaître le 16 Juin 2003 par devant le Tribunal de Première Instance d'Abidjan pour voir ordonner la validation d'hypothèque conservatoire et Sa transformation en inscription définitive d'hypothèque;
Dès lors, le Tribunal étant saisi le 16/06/2003 en validation de l'hypothèque conservatoire autorisée par l'ordonnance sur requête n°2025/03 du 23/05/2003, c'est à tort que, saisi le 4 Septembre 2003 en rétractation de cette même ordonnance sur requête, le Juge des référés s'est déclaré compétent;
Il convient, donc sans qu'il ne soit nécessaire d'apprécier les autres moyens d'appel, d'infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de déclarer le Juge des référés incompétent;
L'intimée qui succombe doit être condamnée aux dépens en application de l'article 149 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare recevable l'appel régulièrement relevé par la Société AFRIDRAG de l'ordonnance de référé N°4206 rendue le 7 octobre 2003 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan;
AU FOND
L’y dit bien fondée;
Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions
Statuant à nouveau;
Déclare le Juge des référés incompétent en raison de la saisine du Juge du fond;
Condamne l’intimée aux dépens;