J-05-309
VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – ABSENCE DE DOCUMENTS DE NATURE A JUSTIFIER LA SAISIE – RETRACTATION DE L’ORDONNANCE AUTORISANT LA SAISIE ET MAINLEVEE DE LA SAISIE (oui).
Lorsqu’il n’existe pas au dossier de la procédure un document de nature à justifier une saisie conservatoire opérée en vertu d’une ordonnance et qu’il apparaît, de ce fait,que la saisie n’a aucun fondement juridique, il y a lieu d’ordonner la rétractation de l’ordonnance et la mainlevée de la mesure
Article 54 AUPSRVE
(Tribunal DE PREMIERE INSTANCE DE COTONOU, 1ère CHAMBRE CIVILE, ORDONNANCE DE REFERE N° 72/03 du 31 juillet 2003, Société UKACHI INTERNATIONAL COMPANY SARL c/ CHUKUEMEKA Samuel OGBU).
L’an deux mil trois
Et le trente un juillet
Nous, Madame Eugénie AFFO née SEDOLO, Juge au Tribunal de Première Instance de Cotonou, tenant l’audience des référés civils; assisté de Maître Clément AHOUANDJINOU, Greffier, avons rendu l’ordonnance dont la teneur suit :
DEMANDEURS :
1°) Société UKACHI INTERNATIONAL COMPANY –SARL dont le siège social est à Cotonou au carré 165 Missité,prise en la personnne de son gérant UKAOMA IHEKE CHIMA, demeurant ès qualité audit siège;
2°) Monsieur UKAOMA IHEKE CHIMA, demeurant et domicilié au carré 165 Missité Cotonou,
Assistés de Maître Eliane EGUE ADOTE, Avocat à la Cour;
DEFENDEUR :
Monsieur CHUKUEKA Samuel OGBU, demeurant et domicilié au carré 175 Missité Cotonou,;
Représentée à l’audience par Maître Hyppolite YEDE, Avocat à la Cour;
LE TRIBUNAL
Par exploit en date du 21 mars 2003, la société UKACHI INTERNATIONAL COMPANY –SARL et monsieur UKAOMA IHEKE CHIMA ont attrait devant le Tribunal de Cotonou, statuant en matière de référés civils, Monsieur CHUEMEKA Samuel OGBU pour au principal, renvoyer les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent, vu l’urgence :
– Constater que suite à plusieurs commandes de marchandises faites au nom de la société UKACHI INTERNATIONAL COMPANY –SARL, pour le compte de monsieur CHKUEMEKA Samuel OGBU contre commissions, celui –ci reste devoir aux requérants la somme de $1536.70 soit en contre valeur 1630.370 F CFA;
– Constater que le requis n’apporte pas la preuve des manquants prétendument accusés dans le conteneur N°CAXU 4096597 dépoté et dont le contenu a été enlevé du port depuis le 06 / 09 / 2002;
– En conséquence, s’entendre rapporter l’ordonnance présidentielle n°1090 / 2002 du 16 décembre 2002 du 16 décembre 2002;
– S’entendre ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire de biens meubles corporels du 14 mars 2003 pratiquée suivant exploit d’huissier sous astreinte comminatoire de 1.000.000 par jour de résistance;
– Ordonner l’exécution de la décision à intervenir sur minute avant enregistrement nonobstant toutes voies de recours;
– Condamner le requis aux entiers dépens;
A l’appui de leur requête, la société UKACHI INTERNATIONAL COMPANY –SARL et monsieur UKAOMA IHEKE CHIMA, exposent qu’ils sont en relation d’affaires avec le défendeur;
Que monsieur UKAOMA IHEKE CHIMA importe au nom de la société UKACHI INTERNATIONAL COMPANY SARL et pour le compte des requis des balles de vêtements usagés (friperie ) moyennant
Une commission à chaque commande;
Qu’après plusieurs commandes, le requis reste devoir aux requérants la somme de £153670 soit en contre valeur 1.690.370 F CFA;
Que pour ne pas payer sa dette, monsieur CHUEMEKA Samuel OGBU prétend avoir accusé des manquants sur une cargaison de balles de tissu arrivées dans le conteneur n°CASXU 4096597 enlevées au port de Cotonou le 06 septembre 2002;
Que les requérants ont exigé du requis la production de la preuve dudit manquant notamment par la présentation du bon d’enlèvement du manutentionnaire en l’occurrence la SOBEMAP;
Qu’à ce jour, sept (07)mois après, le requis n’a toujours pas pu apporter la preuve du préjudice subi;
Que c’est dans cet état qu’il a pu solliciter et obtenir l’ordonnance présidentielle n°1090 / 2002 rendue à pied de requête le 16 décembre 2002 16 décembre 2002;
Qu’en exécution de cette ordonnance, il a fait pratiquer saisie conservatoire sur les marchandises appartenant à la société requérante par exploit du ministère de Maître Georges Marie d’ALMEIDA, huissier de justice à Cotonou;
Que cette saisie est sans fondement, abusive et frustratoire;
Que ladite saisie empêche les requérants de vendre lesdites marchandises acquises à crédit en vue de payer leur dette et pouvoir faire une autre commande ;
Que vu l’urgence, ils sont fondés à s’adresser au juge des référés en vue de voir rapporter l’ordonnance n°1090 / 2002 du 16 décembre 2002 et obtenir la mainlevée de la saisie conservatoire;
Monsieur CHUKUEMEKA Samuel OGBU, par l’organe de son conseil, Maître YEDE Hippolyte soutient que par acte sous-seing privé en date à Cotonou du 19 février 2000, il est entré en relation d’affaires avec monsieur UKAOMA IHIKE CHIMA, Directeur de la société UKACHI INTERNATIONAL COMPANY –SARL;
Qu’il ont arrêté de commun accord que monsieur UKAOMA achète en Angleterre des balles de friperies, les vendre et les livres au concluant en son magasin à Cotonou, à charge pour ce dernier de payer 50 % du prix de revient à la commande et la différence après revente des marchandises;
Qu’après chaque vente, le concluant paierait à son cocontractant une somme forfaitaire de F CFA 400.000 au titre de bénéfice;
Qu’en exécution de ce contrat, il a précédemment remis à monsieur UKAOMA IHEKE CHILA les sommes de 6627,80 F et 370 £ respectivement le 05 février et le 27 mars 2003 soit au total F CFA 7.607.580 mais n’a reçu de marchandises que pour £ 6692 (F CFA 7.026.600);
Que dans ces conditions, une requête en date du 22 novembre 2002, il a obtenu l’ordonnance n°1090 /2002, du Président du Tribunal de Cotonou;
Qu’il a pratiqué saisie le 14 mars 2003;
Que les arguments du requérant ne résistent pas à une analyse juridique sérieuse;
Que donc les allégations du demandeur sont mal fondées
Sur la mesure sollicitée
Attendu que les parties sont en relation sont en relation d’affaires;
Que monsieur UKAOMA IHEKE importe au nom de la société UKACHI INTERNATIONAL COMPANY –SARL et pour le compte des défendeurs, des balles de vêtements usagers et des balles de friperies moyennant une commission à chaque commande;
Qu’après plusieurs commandes, le défendeur reste devoir au requérant la somme de 1.690.370 F CFA;
Qu’ au lieu de payer la dette, monsieur CHUKUE EMEKA Samuel OGBU prétend avoir accusé des manquants sur une cargaison de balles de tissus arrivés dans le conteneur n°CAXU 4096597 enlevé au Port de Cotonou le 06 septembre 2002;
Que les requérants ont exigé sans l’avoir la preuve du manquant soutenu par le défendeur en l’occurrence la présentation du bon d’ enlèvement du manutentionnaire de la SOBEMAP;
Qu’au jours de cet exploit le défendeur n’a toujours pas rapporté la preuve du préjudice qu’il a subi;
Qu’il a cependant sollicité et obtenu l’ordonnance présidentielle n°1090 / 2002 du 16 décembre 2002;
Qu’en l’exécution de cette ordonnance, il a pratiqué saisie conservatoire sur les marchandises appartenant à la société requérante par exploit d’huissier;
Qu’il ressort des dispositions de l’article 54 de l’Acte OHADA relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution « Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut,par requête solliciter de la juridiction compétente du domicile du lieu où demeure le débiteur, l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur tous les biens mobiliers corporels et incorporels de son débiteur sans commandement préalable si elle justifie de circonstances de nature à en menacer le recouvrement»;
Qu’en l’espèce, le principe de créance ne se justifie pas;
Que le défendeur n’a pas rapporter au dossier le bon d’enlèvement de la SOBEMAP;
Qu’il n’existe pas au dossier un tel document de nature à justifier les saisies opérées en vertu des ordonnances n°1090 / 2002 du 16 décembre 2002;
Que donc les saisies opérées par procès-verbal des 14 mars 2003 n’ont aucun fondement juridique;
Qu’il y a lieu d’ordonner la rétractation de l’ordonnance n°1090 / 2002 du 16 décembre 2002 et mainlevée de la saisie conservatoire du 14 mars 2003;
Sur les astreintes comminatoires
Attendu que cette mainlevée a été sollicitée sous astreintes comminatoires de un million 1(1.000.000 ) F CFA par jour de retard;
Que la saisie opérée alors que le principe de créance n’est pas justifiée, est abusive, frustratoire et vexatoire;
Qu’elle constitue une voie de fait;
Que la fixation d’une astreinte comminatoire pour vaincre la résistance du défendeur serait justifiée;
Que néanmoins, la somme de 1.000.000 F CFA par jour de résistance sollicitée est exorbitante;
Qu’il y a lieu de la ramener à la somme de 50.000 F CFA par jour de résistance;
Sur l’exécution provisoire sur minute
Attendu que la présente saisie crée un préjudice certain aux requérants;
Qu’il y a urgence et péril en la demeure et lieu d’assortir la présente décision de l’exécution l’ exécution provisoire sur minute et avant enregistrement;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement, en matière de référé civil et en premier ressort :
Au principal renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent, vu l’urgence :
EN LA FORME
Recevons les parties en leurs moyens ;
Au fond
– Constatons le mal fondé des moyens du défendeur;
– Constatons la nullité de la saisie du 14 mars 2003;
– Ordonnons la rétractation de l’ordonnance 1090 /2002 du 16 décembre 2002 et la mainlevée subséquente de la saisie conservatoire pratiquée le 14 mars 2003 sous astreintes comminatoires de 50.000 F CFA par pour de retard pour compter de la présente décision;
– Assortissons notre ordonnance de l’exécution provisoire sur minute et avant enregistrement;
– Condamnons le défendeurs aux entiers dépens;
Délai d’appel = 15 jours
Le Président Le Greffier
OBSERVATIONS
Ndiaw DIOUF agrégé des facultés de droit, Directeur du Centre de Recherches, d’Etudes et de Documentation sur les Institutions et les Législations Africaines (CREDILA), Faculté des Sciences Juridiques et Politiques, Université Cheikh Anta Diop, Dakar
Lorsqu’il estime que les conditions de la saisie conservatoire ne sont pas réunies, le débiteur peut formuler des contestations en saisissant le juge d’une demande de mainlevée. C’est une telle demande que le Président du Tribunal de 1ère Instance de Cotonou a eu à traiter dans l’ordonnance ci-dessus reproduite.
Pour faire droit à la demande et ordonner la rétractation de l’ordonnance autorisant la saisie ainsi que la mainlevée de ladite saisie, il a relevé qu’il n’existait dans la procédure aucun document de nature à justifier la mesure querellée. Cette décision n’appelle pas d’observations particulières sauf qu’elle est rendue sur le fondement de l’article 54 AU/PSRVE alors que le texte applicable en l’espère, c’est l’article 62 qui, au demeurant, ne parle que de mainlevée (et non de rétractation de l’ordonnance).