J-05-320
VOIES D’EXECUTION – SAISIE ATTRIBUTION – ERREUR DE LA BANQUE TIERS SAISI DANS LA DECLARATION – CONDAMNATION AU PAIEMENT DES CAUSES DE LA SAISIE (non).
Une banque ne saurait être condamnée à payer les causes de la saisie dès lors qu’il est établi qu’elle a par erreur déclaré détenir des sommes d’argent pour le compte du saisi.
(Cour d’Appel d’Abidjan, Chambre civile et Commerciale, Arrêt n° 518 du 27 avril 2004, La société ECOBANK Côte d’Ivoire (Me MOULARE THOMAS) c / La coopérative ALEH- AHUN et la COLINA (Mes FLAN GOUEU G. Lambert).
LA COUR,
Vu les pièces du dossier
Oui les parties en leurs demandes, fins moyens;
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
Par exploit d’huissier en date du 30 Décembre 2003 comportant ajournement au 13 janvier 2004, la société ECOBANK Côte d’Ivoire ayant pour conseil Maître MOULARE Thomas, Avocat à la cour, a relevé appel de l’ordonnance de référé N° 5562 rendue le 18 Décembre 2003 par la juridiction Présidentielle du Tribunal de première Instance d’Abidjan, laquelle en la cause, a statué comme suit :
"Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé d’heure à heure et en premier ressort :
– Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent, vu l’urgence et par provision;
– Ordonnons à ECOBANK le paiement de la somme de 10.744.259 francs cfa à COLINA et celle de 6.113.413 francs cfa la Coopération ALEH-AHUN.
– Rejetons la demande d’astreints;
– Condamnons ECOBANK aux dépens;
Des écritures des parties, production et énonciations de l’ordonnance critiquée déférée à la censure de la cour, il résulte que par exploits en date du 26 Novembre et 18 Décembre 2003, la Coopération ALEH- AHUN a fait assigner par devant la juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Abidjan, la BICICI, la COLINA et ECOBANK aux fins de voir procéder au paiement des sommes dont elles sont dépositaires en leur qualité de tiers –saisis à la Coopérative ALEH-AHUN d’Alépé sous astreinte de 1.000.000 francs par jour de retard d’une part, et ordonner à la société ECOBANK le paiement de la somme de 6.113.600 francs cfa sous astreinte;
Au soutien de son action, elle a exposé qu’en vertu de l’arrêt N° 463 rendu le 18 Avril 2003 par la cour d’Appel d’Abidjan, La cour Suprême, par arrêt N° 479/03 en date du 9 octobre 2003, a ordonné la continuation des poursuites entreprises contre la compagnie d’ Assurances les TISSERINS;
Suite à la signification commandement a lui fait par exploit du 21novembre 2003, d’avoir à payer la somme de 30.748.431 francs, cause de la saisie, la Société ECOBANK, a exigé la production d’un certificat de non appel contre l’ordonnance N°4040 Bis du 2 septembre 2003 ayant rejeté la demande de mainlevée de ladite saisie;
Elle a assigné par ailleurs, a-t-elle précisé en intervention forcée la COLINA ayant pratiqué sur les mêmes comptes une saisie attribution antérieure à l’effet de procéder à un concours de saisie;
Elle a fait valoir que ECOBANK n’a pas procédé paiement de sa créance dans le délai de huitaine qui lui a été imparti de sorte que son attitude doit s’analyser comme un refus de paiement;
Dans ces conditions, a-t-elle conclu, ECOBANK doit être tenue au paiement des sommes réclamées surtout que le délai sus- indiqué est largement expiré;
Les défendeurs assignés à leur siège, n’ont fait valoir aucun moyen de défense;
Pour faire droit à l’action de la coopérative, le premier juge après avoir relevé que celle-ci et la COLINA ont pratiqué des saisies sur le compte de la compagnie les tisserins domicilié à ECOBANK portant sur le montant global de 18.000.000 francs, soit 10.744.259 francs pour le montant de la créance de la COLINA et 6.113.413.francs pour la coopérative ALEH-AHUN, a ordonné à cet établissement bancaire le paiement des sommes sous astreinte;
En cause d’appel, ECOBANK, après avoir rappelé les faits, soutient qu’elle n’a jamais refusé de payer les sommes par elles détendues pour le compte de la compagnie d’Assurances les TISSERINS;
La demande de main- levée de la saisie attribution de créance du 25 Juillet 2003 de la coopérative ALEH ayant été rejetée par la juridiction des référés, elle exigea pour le paiement la production d’un certificat de non appel conformément aux dispositions de l’article 34 de l’acte uniforme OHADA portant voies d’exécution, lequel lui a été signifié en cours d’instance ayant abouti à l’ordonnance critiquée de sorte qu’on ne peut retenir une faute à son égard;
Elle s’est conformée, ajoute –t-elle, à toutes les obligations qui lui incombent en indiquant clairement les soldes créditeurs des comptes N°1105243018 et N° 1105243019 d’un montant respectif de 2.787 francs et de 100.373 francs sur l’exploit de saisie attribution de créances en date du 25 Juillet 2003 pratiquée par la coopérative, et dans celui en date du 25 Février 2003 de la COLINA, le montant de 455.086 francs;
Les intimés, poursuit-elle, ne rapportent pas la preuve par la production d’un document quelconque qu’elle détient effectivement la somme de 18.219.255 francs pour le compte de leur débiteur, montant pour lequel la COLINA a fait pratiquer la saisie;
Aussi, estime-t-elle l’ordonnance querellée l’ayant condamnée à payer la somme globale de 16.857.672 francs montant des sommes saisie ne repose sur aucun élément ni de fait ni de droit;
Elle sollicite par conséquent l’infirmation de ladite décision en toutes ses dispositions;
En réplique, la coopérative ALEH conclut à la confirmation de l’ordonnance attaquée en faisant valoir qu’il ressort de la sommation interpellative en date du 9 Décembre 2003 que la main –levée d’une saisie antérieure sur le compte des Tisserins d’un montant de 20.385.025 a été ordonnée le 19 juin 2003;
Or ECOBANK n’a fait aucune déclaration dans ce sens. Lors de la saisie du 25 juillet 2003, alors que ledit montant disponible a été repositionné sur le compte de son débiteur les TISSERINS;
Celle-ci, ayant fait une déclaration inexacte, par mauvaise foi, doit être condamnée sur le fondement des articles 155 et 1556 de l’Acte Uniforme portant voies d’exécution;
Estimant que la résistance d’ECOBANK est injustifiée et abusive, elle relève appel incident et sollicite sa condamnation au paiement des causes de la saisie sous astreinte journalière de 1.000.000 de francs;
En réponse, ECOBANK rétorque que les prétentions de la coopérative ALEH ne sont pas fondée dès lors que la preuve de la fausseté des déclarations par elle faites sur les exploits de saisie attribution n’est pas rapportée;
DES MOTIFS
EN LA FORME
Les appels principaux et incident respectivement relevés par la société ECOBANK Côte d’Ivoire et la coopérative ALEH-AHUN de l’ordonnance de référé N° 5662 rendue le 18 Décembre 2003 sont réguliers pour être intervenue dans les formes et délai légaux;
Il échec dès lors de les déclarer recevables;
AU FOND :
SUR LE BIEN FONDE DE L APPEL PRINCIPAL
La société ECOBANK fait grief à l’ordonnance querellée de l’avoir condamnée au paiement de la somme de 16.857.672 francs, soit 10.744.259 francs à la COLINA
Et 6.113.413 francs à la Coopérative ALEH;
Les intimées quant à elles, affirment que la banque disposait de plus de 18.219.255 francs pour le compte de la Compagnie les Tisserins à la date de la saisie attribution de créances de la Coopérative ALEH-AHUN du 25 juillet 2003;
Contrairement aux allégations des intimées et à celles du premier juge, il ressort des différents exploits de saisie que ECOBANK a fourni les renseignements suivants :
1/ Compte N°1105243018 créditeurs de 2.787F/CFA.
2/ Compte N°1105243019 créditeurs de 100.373 F/CFA
Sauf erreur et émission de notre part et sous réserve de nos droits et des opérations en cours;
Par ailleurs; la compagnie LES TISSERINS fait l’objet de saisie en date du 25/02/2003 pour un montant de 18.219.255 francs cfa à la requête de la COLINA et par Maître LACOMBE HELENE.
Il en résulte que la Société ECOBANK n’a jamais déclaré qu’elle détenait pour le compte de la compagnie d’assurance les tisserins la somme de 18.219.255 francs;
Laquelle somme n’est que montant pour lequel la COLINA a pratiqué une saisie sur les comptes des TISSERINS ouverts à ECOBANK.
C’est donc à tort qu’elle a été condamnée au paiement de la somme globale de 16.857.679 francs; cette somme ayant été retenue par erreur comme étant celle détenue par ECOBANK pour le compte de la compagnie LES TISSERINS.
Il y a lieu en conséquence de déclarer bien fondée ECOBANK en son appel et d’infirmer l’ordonnance querellée;
SUR LE BIEN FONDE DE L APPEL INCIDENT
La coopérative ALEH-AHUN relève appel incident et sollicite paiement de sa créance sous astreinte de 1.000.000 francs;
Il résulte cependant de tout ce qui précède que cet appel incident est mal fondé et qu’il convient de le rejeter comme tel;
SUR LES DEPENS
La coopérative ALEH-AHUN succombe; il échet de la condamner aux dépens de l’Instance conformément à l’article 149 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort;
EN LA FORME
Reçoit la société ECOBANK-CI et la Coopérative ALEH-AHUN en leur appel principal et incident respectivement relevés de l’ordonnance de référé N°5662 rendue le 18/12/2003 par la juridiction présidentielle du tribunal de première Instance d’Abidjan;
AU FOND
– Déclare non fondé l’appel incident de la coopérative ALEH-AHUN, l’en déboute;
– Déclare en revanche bien fondé l’appel de la société ECOBANK
Infirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions;
Statuant à nouveau;
Rejette comme non fondée l’action de la coopérative ALEH-AHUN et de la COLINA tendant à voir condamner ECOBANK au paiement des causes des saisies