J-05-332
VOIES D’EXECUTION – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER CONTENANT LA FORMULE EXECUTOIRE – CERTIFICAT DE NON OPPOSITION – TITRE EXECUTOIRE (OUI) – SAISIE VENTE – VALIDITE (oui).
La saisie vente réalisée sur la base d’une ordonnance d’injonction de payer contenant la formule exécutoire et ayant fait l’objet d’un certificat de non opposition est valable.
Article 7 AUPSRVE
(Cour d’Appel d’Abidjan Chambre Civile et Commerciale, Arrêt N°829 du 20/07/2004 Dame KOFFI Philomène (Me OCTAVE Marie Daniel) C/ AVOT Emile Louis Albert (Me KOUAKOU Christophe)).
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ensemble les faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-dessous;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant acte d’huissier en date du 23 février 2004, comportant ajournement au 02 mars 2004, Madame KOFFI Philomène a relevé appel de l'ordonnance de référé d'heure à heure N°746/2004 rendue le 10 février 2004 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan qui en la cause a statué ainsi qu'il suit :
"Statuant en audience publique, par décision contradictoire, en matière d'urgence et en premier ressort;
Recevons Madame KOFFI Philomène en sa demande;
L'en déboutons en l'état;
La condamnons aux dépens";
Au soutien de son appel, Madame KOFFI Philomène expose qu'en date du 7 février 2003, elle a reçu à la requête de Monsieur AVOT Emile Louis Albert, une sommation interpellative lui enjoignant d’avoir à lui payer la somme de trois millions quatre cent mille francs (3.400.000 F) au titre d'un prêt qu'il lui aurait consenti;
Qu'à cet exploit, elle a répliqué par un exploit de contestation dans lequel elle a indiqué à M. AVOT qu'elle ne restait rien lui devoir et que du reste, cette somme d'argent représentait une libéralité que ce dernier lui a faite;
Croyant, cette affaire close, elle sera surprise de recevoir le 10 juillet 2003, un exploit de signification d'une ordonnance d'injonction de payer N°06162/2003 rendue le 28 mai 2003 par le Président du Tribunal de Première Instance d'Abidjan;
Ledit exploit lui a été délaissé par le Ministère de Maître YAPI Ambroise, huissier de Justice près du Tribunal de Tiassalé;
Elle a formé opposition contre ladite ordonnance le 22 décembre 2003 et a sollicité du Tribunal de déclarer cette ordonnance caduque;
Malgré cette opposition, M. AVOT fera pratiquer une saisie vente sur ses biens meubles en date du 19 Janvier 2004;
Le 26 janvier 2004, elle a sollicité et obtenu de la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan, l'autorisation pour assigner en référé d'heure à heure M. AVOT aux fins de main-levée de ladite saisie;
Contre toute attente le Juge des référés, vidant son délibéré selon l’ordonnance n° 746/2004 rendue le 10 février 2004, l'a déboutée;
L'appelante explique que pour statuer comme il l'a fait, le Premier Juge a estimé dans sa motivation qu'elle n'a pas critiqué au cours des débats le procès-verbal de saisie vente du 19 Janvier 2004;
Madame KOFFI Philomène soutient qu'il n'en est rien et que tant dans sa requête aux fins de référé qu'au cours des débats, elle a démontré que la saisie vente a été pratiquée sur la base d’une ordonnance d'injonction de payer devenue caduque;
Elle explique qu'elle a indiqué dans ladite requête que l'ordonnance d'injonction de payer N°06162/2003 du 28 Mai 2003 lui a été signifiée par Maître YAPI Ambroise qui est Huissier de Justice près le Tribunal de Tiassalé par exploit en date du 10 Juillet 2003;
Ledit exploit est nul pour avoir été servi par un Huissier de Justice territorialement incompétent au motif que la Loi N°97-514 du 4 septembre 1997 élargissant la compétence territoriale des Huissiers de Justice n’ayant pas été suivi de son décret d'application ladite compétence se trouve inchangée;
Poursuivant son argumentation, Madame KOFFI Philomène explique par ailleurs que l'article 7 alinéa 2 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution dispose que l'ordonnance d'injonction de payer doit être signifiée dans les trois (3) mois de sa date;
La sanction en découlant est la caducité de l'ordonnance;
Or, relève l'appelante, en espèces, l'exploit de signification du 10 juillet 2003 étant nulle pour avoir été délaissé par un Huissier de Justice territorialement incompétent il s'ensuit que l'ordonnance d'injonction de payer dont s'agit, n'a pas valablement été signifiée de sorte qu'elle est devenue caduque;
L'appelante fait remarquer qu'aucune saisie vente ne peut être pratiquée sur la base d'une telle ordonnance (devenue caduque) et qu'en tout état de cause une telle saisie vente est nulle;
Madame KOFFI Philomène en conclut que la motivation du Premier Juge ne peut et ne saurait résister à cette critique fort justifiée en droit et que c’est à tort que le Premier Juge a estimé qu'elle n'a pas critiqué l'exploit de saisie vente du 19 Janvier 2004 alors même que cette saisie vente a été pratiquée sur la base d'actes et de décisions nuls et caducs;
L'appelante, tirant Les conséquences de tout ce qui précède affirme que l'ordonnance querellée mérite d'être infirmée;
En réplique, Monsieur AVOT Emile Albert soulève l’exception de nullité de l'acte d'appel formé par Madame KOFFI Philomène au motif que ledit acte viole de manière flagrante l'article 34 du code de procédure civile aux termes duquel, il doit y avoir entre le jour de l'assignation et celui indiqué pour la comparution, un délai de huit (8) jours au moins, si le destinataire est domicilié dans le ressort de la Juridiction;
Que l'acte d'appel de Mme KOFFI Philomène viole également les dispositions de l'article 430 du code précité qui dispose que "les délais prévus par ledit code sont tous francs";
En l'espèce l'acte d'appel lui a été servi le 23 Février 2004 avec pour date de comparution le 2 Mars 2004, au lieu du 3 Mars 2004 ou à une autre date postérieure à celle-ci;
En conséquence, il prie la Cour de céans de déclarer nul de nullité absolue l'acte d'appel formé par Madame KOFFI Philomène contre l'ordonnance de référé attaquée, et subséquemment l'irrecevabilité dudit appel;
Répliquant à son tour l'appelante fait valoir, sur l'exception d'irrecevabilité soulevée par l'intimé, que l'article 34 du code de procédure auquel fait référence l'intimé n'a prévu aucune sanction pour le non-respect du délai de huit jours et que s’il devrait y avoir nullité, celle-ci serait d'ordre relatif;
Et pour se prévaloir d'une nullité relative, la personne qui l’invoque doit rapporter la preuve qu'elle a souffert un préjudice;
Madame KOFFI Philomène fait remarquer que M. AVOT n'a souffert d’aucun préjudice, puisqu'il a pu comparaître et soulever la prétendue nullité de l'exploit;
Au total, il suit de ce qui précède que l'exception de nullité alléguée par l'intimé ne saurait prospérer et que la Cour voudra bien l'écarter et déclarer recevable l'appel de Madame KOFFI Philomène;
En seconde réplique M. AVOT soutient que le non-respect du délai de huit jours lui a causé un préjudice en ce qu'il a comparu dans la précipitation sans avoir eu le temps nécessaire pour préparer ses premiers moyens de défense;
DES MOTIFS
EN LA FORME
– sur la recevabilité de l'appel
Monsieur AVOT Emile Louis Albert plaide la nullité de l'acte d'appel au motif que le délai minimum de huit (8) jours entre l'assignation et la date de comparution n'a pas été respecté;
Il convient de relever qu'en l'espèce, nous sommes en matière de référé; et l'appel des ordonnances est régi par l’article 228 du code de procédure civile;
Ledit article notamment en son alinéa 2 ne prévoit pas de nullité pour la non - observation du délai minimum;
La partie qui s'en prévaut doit donc prouver le préjudice qu'elle a subi;
Or Monsieur AVOT qui invoque la nullité de l'acte d'appel ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'il a souffert du non-respect du délai minimum de huit (8) jours;
Il convient dès lors de rejeter ladite exception de nullité et de déclarer recevable l'appel de Dame KOFFI Philomène;
AU FOND
– Sur la régularité de l’exploit de signification
Il résulte de l'examen de l'exploit de signification du 10 Juillet 2003 que l'Huissier Instrumentaire, Maître YAPI Ambroise a observé les dispositions de l'article 6 de la Loi N°97-514 du 4 Septembre 1997, en précisant la modification requise;
Il en résulte que l'exploit de signification litigieux qui n'est pas entaché d'irrégularité est valable;
– Sur la validité de la saisie – vente
Pour plaider la nullité de la saisie - vente dame KOFFI Philomène fait valoir que ladite saisie - vente a été pratiquée sur la base d'une ordonnance d'injonction devenue caduque et de plus elle a formé opposition à ladite ordonnance par exploit en date du 22 Décembre 2003;
Il résulte de l'examen des pièces du dossier de la procédure et des développements faits plus hauts que l'ordonnance d’injonction de payer litigieuse, a été régulièrement signifiée à dame KOFFI Philomène;
Par ailleurs M. AVOT après avoir signifié l'ordonnance le 10 Juillet 2003, a obtenu un certificat de non-opposition et l'apposition de la formule exécutoire sur sa décision de sorte qu'il a obtenu un titre exécutoire valable sur la base duquel il a pratiqué une saisie - vente le 19 Janvier 2004;
C'est donc à bon droit que le Premier Juge a débouté Dame KOFFI Philomène de sa demande de main-levée de ladite saisie - vente;
Il convient dès lors de confirmer l'ordonnance querellée;
– sur les dépens
L'appelante qui succombe doit être en application des dispositions de l'article 149 du code de procédure civile, condamnée aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort;
Déclare Madame KOFFI Philomène recevable en son appel relevé de l'ordonnance de référé N°746/2004 rendue le 10 février 2004 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan;
L’y dit mal fondée;
L’en déboute;
Confirme l’ordonnance attaquée en toutes ses dispositions;
La condamne aux dépens;