J-05-340
VOIES D’EXECUTION – SAISIE ATTRIBUTION – ACTE D’ACQUIESCEMENT SIGNE PAR UN AGENT DU DEBITEUR – VALIDITE (oui).
L’acte d’acquiescement à une saisie attribution signé par un salarié d’une société est valable dès lors qu’il n’est pas établi que celui-ci a été obtenu à la suite de manières frauduleuses ou émane d’une personne n’ayant manifestement pas le pouvoir.
Article 157 AUPSRVE
(Cour d’Appel d’Abidjan Chambre Civile et Commerciale, Arrêt n° 621 du 08 juin 2004 CIE (Me EBIELE KADJO Benjamin) C/ Mr. KEITA IBRAHIM (Me COMA AMINATA) et BANQUE STANDARD et CHARTERED).
LA COUR,
Oui le Ministère Public;
Vu les pièces du dossier;
Ensemble les faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Suivant exploit daté du 13 février 2004 comportant ajournement au 2 mars 2004, la Compagnie Ivoirienne d'Electricité dite CIE, agissant aux poursuites et diligences de son représentant légal, Monsieur Frédéric PENIN, et ayant pour conseil, Maître EBIELE KADJO Benjamin, Avocat à la Cour, a relevé appel de l’ordonnance de référé N° 788 rendue le 11 février 2004 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal d'Abidjan qui, en la cause, a statué ainsi qu'il suit :
"Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront, mais dès à présent et vu l'urgence et par provision, déclarons la présente procédure sans objet;
Condamnons la CIE aux dépens";
Il ressort des énonciations de l'ordonnance querellée que par exploit daté du 27 janvier 2004 la CIE a fait servir assignation au sieur KEITA IBRAHIM; à l'effet d'avoir à se présenter par devant la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance pour voir ordonner la main -levée de la saisie pratiquée;
Au soutien de cette action, la CIE a expliqué que suivant exploit du 26/12/2003 Monsieur KEITA IBRAHIM a fait pratiquer saisie- attribution de créances sur son compte ouvert dans les livres de la Banque Standard et CHARTERED BANK; Saisie à elle dénoncée par exploit du 29/12/2003;
Estimant que l'acte de saisie ne respecte pas les prescriptions de l'article 157 de l'Acte Uniforme relatif aux voies d’exécution en ce qu'il n'indique pas le vrai représentant légal de la CIE, à savoir Monsieur Frédéric PENIN et non Mr ZADY KESSY Marcel et qu’ensuite, il n'indique pas le vrai siège; social à savoir "Abidjan Treichville" mais indique plutôt Abidjan plateau, elle conclut à la nullité de la saisie et à la mainlevée de celle-ci;
Les moyens du défendeur n'ont pas été mentionnés;
Pour déclarer l'action de la CIE sans objet le Premier Juge a relevé que la demanderesse a acquiescé le 29/12/2003 à la saisie- attribution pratiquée;
Au soutien de son appel, la Compagnie Ivoirienne d'Electricité dite CIE, par le canal de son conseil Maître EBIELE KADJO Benjamin, avocat à la Cour, rappelle les faits en exposant que suivant exploit en date du 26/12/2003 Monsieur KEITA IBRAHIM a fait pratiquer saisie- attribution de créance sur ses comptes ouverts dans les livres de la banque Standard et CHARTERED, saisie à elle dénoncée le 29/12/2003;
A cet exploit de dénonciation, prétend l'appelante, il est joint un acte d'acquiescement soigneusement préparé à l'avance par Mr KEITA IBRAHIM et soumis à la signature d'un agent de la CIE n'ayant pas pouvoir pour le faire;
Elle a donc assigné en contestation de cette saisie devant la Juridiction Présidentielle du Tribunal d'Abidjan qui a rendu la décision à présent, querellée;
Ces faits rappelés la CIE conclut à l'infirmation de l'ordonnance attaquée en faisant grief au Premier Juge d'avoir estimé qu'il "résulte des débats et des pièces produites que le CIE, demanderesse a acquiescé le 29/12/2003 à la saisie - attribution pratiquée et payé par la suite le principal de la dette";
Selon l'appelante, contrairement à l'opinion du Premier Juge l'acquiescement litigieux est postérieur au paiement effectué par elle;
Elle fait remarquer que bien avant la saisie - attribution de créance, elle a tiré le 10/12/2003, au profit de Monsieur KEITA IBRAHIM, un chèque BICICI d'un montant de 2.204.700 francs CFA et c'est le 26/12/2003 que ce dernier a fait pratiquer la saisie attribution qui lui a été dénoncée le 29/12/2003; C'est à cette occasion affirme-t-elle que l'acte d'acquiescement a été soumis à la signature d'un agent sans pouvoir à cet effet;
Pour l'appelante cet acte d'acquiescement signé par un agent qui n'a pas le pouvoir pour le faire est nul et de nul effet; de sorte que son action en contestation, contrairement à l'opinion du Premier Juge n'est pas sans objet;
Par ailleurs la CIE, soutient que c'est à tort que l'intimé fait remonter la date de départ des intérêts de droit à la date du jugement alors que l’arrêt correctionnel N° 307/2000 ayant réformé ledit jugement, la date de départ des intérêts de droit, selon elle, doit être la date de cet arrêt c'est - à - dire le 12 avril 2000;
Enfin, elle critique les taux pratiqués par le créancier comme étant exorbitant au regard de ceux pratiqués par la CIE;
Pour sa part, Monsieur KEITA IBRAHIM après avoir rappelé les faits ayant entraîné le présent litige estime que l'acte d'acquiescement est valablement donné parce que les statuts de la CIE n'ont pas valeur réglementaire et cette validité, selon lui enlève tout objet à la contestation de la saisie;
Il affirme par ailleurs que le Juge des référés est incompétent pour apprécier le pouvoir de la personne ayant signé l'acte d'acquiescement;
Il conclut à la confirmation de l'ordonnance entreprise;
DES MOTIFS
EN LA FORME
Les parties ayant toutes comparu, il convient de statuer contradictoirement;
L'appel de la CIE a été relevé conformément aux prescriptions légales;
Il est donc régulier et doit être déclaré, comme tel, recevable;
AU FOND
La CIE conteste l'ordonnance querellée d'une part en ce qu'elle a invoquée l'acte d'acquiescement du 29/12/2003 pour déclarer l'action en contestation sans objet; d'autre part, en ce que l'exploit de saisie - attribution violerait les dispositions de l’article 157 de l'acte uniforme relatif aux voies d’exécution pour avoir fait courir les intérêts de droit à compter du 25 juillet 1996, date du jugement; enfin en ce que les taux pratiqués par Mr KEITA IBRAHIM sont erronés;
La CIE conteste à tort la régularité de l’acquiescement donné par elle par acte du 29/12/2003;
En effet, du point de vue purement formel, cet acte d'acquiescement signé par la "Direction Juridique" de la CIE avec la mention :
"Nous, Soussignée, Compagnie Ivoirienne d'Electricité dite CIE, Société anonyme au capital de …", est parfaitement régulier et engage la Compagnie qui ne peut, en aucune manière exciper de la qualité ou non de l'agent signataire de l'acte d'acquiescement pour se soustraire de l'engagement ainsi pris;
Dès lors que l'agent signataire est bien un salarié de la CIE, celle-ci ne peut opposer au créancier le défaut de qualité pour signer un tel acte sauf à justifier que ledit créancier a usé de manoeuvre frauduleuse pour obtenir cet acte ou que, vu les fonctions du signataire au sein de la Compagnie, il est manifestement inconcevable qu'il ait ce Pouvoir;
La CIE ne rapporte aucune preuve en ce sens;
Sur le fond, peu importe que l'acte d'acquiescement ait été établi antérieurement ou postérieurement à la date du paiement du principal de la dette;
En effet, en procédant à la remise du chèque d'un montant de 25.204.700 F. CFA le 16/12/2003 en paiement du principal de sa dette, non seulement la CIE n'ignorait pas que le paiement qu'elle effectuait était consécutive à une décision de condamnation devenue définitive, mais en outre, elle était bien consciente de ce que l'exécution de l'obligation lui incombant qui se borne au paiement d'une certaine somme, s'entend du paiement du principal de cette somme des frais et intérêts échus;
Dès lors, en intervenant après le paiement du principal de la dette, sens aucune réserve, cet acquiescement parfaitement régulier signé par la Direction Juridique de la CIE, s'analyse comme en engagement de celle-ci à ne point discuter les accessoires de la dette dont le principal a déjà été acquitté;
C'est donc en vain qu'elle conteste par la présente action la date d'imputation des intérêts légaux ainsi que les taux d'intérêts pratiqués;
Ainsi, non seulement les dispositions de l'article 157 de l'acte uniforme relativement aux voies d'exécution n'ont pas été violées en l'espèce, mais encore, la CIE ne saurait valablement contester à présent les taux d'intérêts pratiqués par le créancier;
Il convient donc de déclarer son appel non fondé, de le rejeter comme tel et de confirmer l'ordonnance entreprise;
L'appelante qui succombe doit être condamnée aux dépens en application de l'article 149 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare recevable l'appel de la CIE régulièrement relevé de l'ordonnance de référé N° 788 rendue le 11 février 2004 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan;
AU FOND
L'y dit mal fondée;
L'en déboute;
Confirme l'ordonnance entreprise;
Condamne l'appelante aux dépens;