J-05-82
VOIES D’EXECUTION – SAISIE IMMOBILIERE – DEMANDE D’ANNULATION DU COMMANDEMENT TENDANT A SAISIE RELLE – CONTESTATION DE LA CREANCE MOTIVANT LA SAISIE REELLE – CREANCE CONSTATEE PAR LA GROSSE D’UN ACTE NOTARIE D’OUVERTURE DE CREDIT – EXISTENCE D’UNE CREANCE CERTAINE, LIQUIDE ET EXIGIBLE (OUI) – VIOLATION DES ARTICLES 247 ET
258 AUPSRVE (non).
La vente forcée d’un immeuble sur saisie réelle peut être poursuivie sur la base d’un acte notarié d’ouverture de crédit ayant donné lieu à création à des lettres de change. La créance est certaine, liquide et exigible, dès lors que le saisi n’établit pas que le débiteur a payé lesdites traites.
(Tribunal régional hors classe de Dakar, Jugement n° 505 du 7 mars 2000, Salif Mbengue c/ Crédit lyonnais.).
Tribunal régional hors classe de Dakar
Audience éventuelle du 07 mars 2000
L’an Deux Mille et le sept mars;
Le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar s’est réuni sous la présidence de Madame Abibatou Babou FAYE, juge, Président de la Chambre, en présence de Monsieur Cheikh Tidiane LAM et Madame Aïssatou Diallo BA, juge au Siège, membres, et aussi de Monsieur Samba FAYE, Substitut de Monsieur le Procureur de la République, et avec l’assistance de Maître Mariam Sy BOCOUM, Greffier;
A l’effet de procéder à l’audience éventuelle au Tribunal de céans, à la vente aux enchères publiques et au plus offrant et dernier enchérisseur;
Du droit au bail inscrit et des peines et soins édifiés sur une partie de la parcelle de terrain d’une superficie de 413 m², à distraire par voie de morcellement du TF N° 21521/DG, consistant en une villa à usage d’habitation, sise à Hann Maristes, derrière la voie ferrée, à hauteur du Km 7,3 Bd du Centenaire de la Commune de Dakar, près du cimetière catholique de Bel-Air;
Droit au bail saisi sur Salif MBENGUE dit GASTON, demeurant à Hann Maristes Villa N° 12, ou en tant que de besoin, au 98, avenue du Président Lamine Guèye à Dakar;
Suivant requête de la Société de Promotion et de Financement, le Crédit Sénégalais, ayant domicile élu aux Etudes de Maîtres Guédel NDIAYE & Associés, Avocats à la Cour, et Saër Lô THIAM, Avocat à la Cour;
Ladite vente aux enchères publiques étant poursuivie par Maître Guédel NDIAYE & Associés et Maître Saër Lô THIAM, suivant déclaration faite au Greffe du Tribunal de céans, le 03 février 2000;
La mise à prix étant fixée pour ledit immeuble, à la somme de 10.0000.0000 FCFA, les enchères ne pouvant être inférieures à 1.000.000 FCFA, et nul ne pouvant enchérir sans versement préalable d’une caution égale au montant de la mise à prix, sauf dispense de l’avocat poursuivant; le cahier des charges ayant été déposé au Greffe du Tribunal de céans, le 03 février 2000, pour voir statuer sur les dires à l’audience éventuelle de ce jour, 07 mars 2000;
A l’appel de la cause, Maîtres Soukeyna LO et Borso POUYE, Avocats à la Cour pour les disants Salif MBENGUE dit Gaston et Madame Ndeye Marema WADE, ont plaidé des dires dont le dispositif suit :
– Déclarer recevables lesdits dires, pour avoir été faits selon les forme et délai prescrits par la loi;
AU FOND :
– Dire et juger que le commandement est nul pour n’avoir pas respecté les dispositions des articles 247 et 258 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution;
SUBSIDIAIREMENT :
– Surseoir à statuer jusqu’à ce que les juges du fond régulièrement saisis se prononcent.
A leur tour, Maître Guédel NDIAYE et ASSOCIES, Avocats a la Cour pour le CREDIT SENEGALAIS, défendeur aux dires, ont répondu par dires datés du 03 mars 2000, ce qui suit :
– Statuer ce que de droit sur la recevabilité, des dires;
– Les rejeter comme mal fondés;
– Dire et juger que la vente sera poursuivie à l’audience d’adjudication;
– Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant toutes voies de recours et sans caution;
SUR QUOI, LE TRIBUNAL, STATUANT SUR LES DIRES :
Attendu que le 28 février 2000, le sieur Salif MBENGUE dit Gaston et la dame Ndeye Marema WADE ont régulièrement consigné des dires, à la suite du cahier des charges dressé par la SPF le Crédit Sénégalais, pour parvenir à la vente par expropriation forcée de l’immeuble objet du Titre Foncier N° 21521/DG saisi sur Salif MBENGUE dit Gaston;
Qu’il échet de déclarer lesdits dires recevables;
Attendu que pour parvenir à titre principal, à l’annulation de la vente du Titre Foncier N° 21521/DG, les disants ont plaidé la nullité du commandement, pour violation des dispositions de l’article 258 de l’AU/PSRVE, d’une part, et l’absence de titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, conformément à l’article 247 de l’Acte Uniforme précité, d’autre part, aux motifs que le Crédit Sénégalais n’a produit que la grosse d’un acte d’ouverture de crédit, laquelle ne saurait selon eux, être assimilée à la preuve effective d’une quelconque créance;
Que par ailleurs, le sieur MBENGUE a eu à bénéficier de plusieurs accords de rééchelonnement, dont le dernier en date du 28 mai 1999;
Que se conformant à l’accord susvisé, le sieur MBENGUE, depuis le 20 juin 1999, verse régulièrement la somme de 750.000 FCFA par mois;
Que le sieur MBENGUE a assigné le Crédit Sénégalais, pour entendre déclarer nuls et de nul effet, les actes intitu1és « dénonciation du projet d’accord et notification de déchéance à terme »;
Qu’en outre, ils ont assigné par acte en date du 12 janvier 2000, le Crédit Sénégalais, en annulation du commandement valant saisie réelle;
Qu’en tout état de cause, la créance n’est ni liquide, encore moins exigible;
Qu’ils sollicitent, à titre subsidiaire, le sursis à la vente, les juges du fond étant saisis de l’annulation de la dénonciation de l’accord et du commandement qui sont à la base de la présente procédure;
Attendu qu’en réponse, le Crédit Sénégalais a rétorqué que l’article 2 de l’Acte Uniforme ne s’applique pas en l’espèce, puisqu’il s’agit d’un immeuble immatriculé, sur lequel la dame WADE dispose d’un droit au bail, qui constitue un droit réel immobilier au sens de l’article 20 du décret foncier de 1932;
Que la grosse d’ouverture de crédit est considérée par l’article 33 de l’Acte Uniforme /PSRVE, comme un titre exécutoire;
Que les traites arrivées à échéance prouvent que la créance est liquide et exigible;
Que le fait d’affirmer avoir bénéficié des rééchelonnements prouve le principe et le quantum de la créance;
Que même la preuve dudit rééchelonnement n’est pas rapportée, puisque le disant ne verse aux débats qu’une simple photocopie – ne répondant pas aux exigences de l’article 28 du Code des Obligations Civiles et Commerciales – d’une correspondance qu’il avait lui-même adressée au Directeur du Crédit Sénégalais, et par laquelle il demandait un rééchelonnement;
Que ce sont les annotations sur ladite lettre, censées être faites par le Directeur du Crédit Sénégalais, qu’il considère connue constituant l’accord de la société poursuivante sur le rééchelonnement qu’il sollicitait;
Que l’action en annulation du commandement valant saisie réelle, introduite par exploit du 12 janvier 2000 devant le juge du fond, ne saurait justifier le sursis à la vente, dans la mesure où elle s’analyse en un incident de saisie immobilière qui est de la compétence exclusive du juge des criées;
1.- SUR LA NULLITE DU COMMANDEMENT :
Attendu qu’en vertu de l’article 20 du décret de 1932, 1’emphythèose et le droit de superficie sont considérés comme droits réels immobiliers;
Que toutes les transactions concernant lesdits droits sont notifiées au conservateur de la propriété foncière;
Attendu qu’en l’espèce, la vente porte sur un droit au bail et des impenses afférents à un titre foncier;
Attendu que ledit droit au bail n’a pas été conféré par l’autorité administrative;
Qu’il n’y a donc pas eu violation des dispositions de l’article 258 de l’Acte Uniforme, puisque le commandement a été visé par le conservateur, seule autorité habilitée, dans la présente procédure, à le faire.
2.- SUR L’ABSENCE DU TITRE EXECUTOIRE :
Attendu que l’article 33 de l’Acte Uniforme /PSRVE considère comme titres exécutoires, les actes notariés revêtus de la formule exécutoire;
Qu’en l’espèce, la vente est poursuivie sur la base d’un acte notarié d’ouverture de crédit en date du 29 juillet 1994, revêtu de la formule exécutoire;
Qu’il échet de dire qu’il existe bel et bien un titre exécutoire;
SUR LA LIQUIDITE ET L’EXIGIBILITE DE LA CREANCE :
Attendu qu’en plus de l’acte notarié précité, le Crédit Sénégalais a excipé diverses traites échues et impayées;
Que la créance est 1iquide et exigible, dès lors que le sieur Gaston MBENGUE n’établit pas la preuve qu’il a payé lesdites traites;
Que contrairement à ses allégations, le fait qu’il a reconnu avoir bénéficié de rééchelonnements prouve bien que le crédit a été mis en place;
SUR LE SURSIS A STATUER :
Attendu que la juridiction des criées a la plénitude de juridiction pour connaître des actions relatives au commandement valant saisie réelle;
Que tous les incidents concernant ledit commandement doivent être soulevés et débattus devant elle;
Que cela est de jurisprudence constante;
Qu’il s’infère de ce qui précède, que la saisine du juge du fond, d’une annulation du commandement valant saisie réelle ne peut entraîner le sursis à statuer;
Qu’il y a lieu, en conséquence, de rejeter les dires de Gaston MBENGUE et Marema WADE, comme étant mal fondés, et d’ordonner la continuation des poursuites;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de criées et en premier ressort :
EN LA FORME :
– Déclare les dires recevables;
AU FOND :
– Les rejette;
– Ordonne la continuation des poursuites;
– Renvoie La cause et les parties à l’audience d’adjudication du 11 avril 2000;
– Dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire;
Ainsi fait, jugé et prononcé, les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.