J-05-92
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – DISTRACTION D’OBJETS SAISIS – ABSENCE DE PRECISIONS SUFFISANTES SUR LES REFERENCES DES OBJETS SAISIS SUR LE PROCES VERBAL DE SAISIE – DEDUCTION DE LA PRESOMPTION QUE LA DEMANDE DE DISTRACTION CONCERNE LES OBJETS SAISIS – DISTRACTION PRONONCEE.
En l’absence de toute précision, dans le procès-verbal de saisie, sur les références des objets saisis, permettant au Tribunal de vérifier la conformité de ces biens avec ceux dont la distraction est demandée, il échet de considérer que les factures produites sont relatives aux biens effectivement saisis, et de prononcer la distraction.
(Tribunal régional hors classe de Dakar (Sénégal), Jugement n° 96 du 17 janvier 2001, La SONAM c/ Receveur des taxes indirectes, liquidateur de la SOSECODA et Maître Djiby Diatta).
Tribunal régional hors classe de Dakar (Sénégal)
Audience publique ordinaire du 17 janvier 2001
Le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar (Sénégal), statuant en matière civile, a, en son audience publique, ordinaire tenue en la salle des Audiences le 17 janvier deux mille un, à laquelle siégeaient Monsieur Mouhamadou Bachir SEYE, Président de Chambre, Messieurs Cheikh Tidiane LAM et Chérif CISSE, Juges au Siège, membres, en présence de Monsieur Saliou MBAYE, Substitut de Monsieur le Procureur de la République, et avec l’assistance de Madame Maïmouna Bâ CISSE, Greffier, rendu le jugement dont la teneur suit :
ENTRE :
– La SONAM, 6, avenue Léopold Sédar Senghor à Dakar, poursuites et diligences de son Directeur Général, lequel fait élection de domicile en 1’Etude de Maître Mayacine TOUNKARA et Associés, Avocats à la Cour - 19, rue Abdou Karim Bourgi; DEMANDERESSE;
Comparant et concluant à l’audience par lesdits Avocats;
d’une part;
ET :
1.- Monsieur le Receveur des Taxes Indirectes, en ses bureaux sis au Bloc Fiscal à Dakar;
2.- Monsieur le Liquidateur de la SOSECODA, pris en cette qualité, en ses bureaux sis au 16, avenue Léopold Sédar Senghor à Dakar;
3.- Maître Djiby DIATTA, Huissier de justice à Dakar, 29, bis rue Grasland x Valmy;
DEFENDEURS;
Non comparant ni concluant à l’audience ni personne pour eux;
d’autre part;
Sans que les présentes qualités puissent nuire ni préjudicier en rien aux droits et intérêts respectifs des parties en cause.
FAITS :
Par exploit de Maître Jacques C. d’ERNEVILLE, Huissier de justice à Dakar, en date des 08 et 11 septembre 2000, la SONAM a fait servir assignation à Monsieur le Receveur des Taxes Indirectes et Monsieur le Liquidateur de la SOSECODA, à comparaître et se trouver par-devant le Tribunal Civil de céans, en son audience publique du 27 septembre 2000, pour et par les motifs exposés audit exploit :
Attendu qu’en exécution d’une contrainte fiscale rendue exécutoire le 11 juillet 2000, le Receveur des Taxes Indirectes a procédé, par le biais de Maître Djiby DIATTA, Huissier de justice à Dakar, à la saisie des biens ci-après :
– un micro-ordinateur,
– une photocopieuse;
Attendu que cette saisie a été faite le 25 juillet 2000;
Attendu cependant, que les objets saisis sur la SOSECODA ne lui appartiennent pas;
Attendu que tout ce matériel appartient à la SONAM, comme en font foi les pièces versées aux débats;
Attendu qu’il y a lieu en conséquence, d’ordonner la distraction des objets ci-dessus énumérés, de la saisie opérée le 25 juillet 2000;
Qu’il y a lieu d’ordonner l’exécution provisoire du jugement;
PAR CES MOTIFS
– Recevoir la présente action;
Y faisant droit :
Vu les factures versées aux débats;
– Ordonner la distraction des objets saisis;
– Ordonner l’exécution provisoire du jugement;
– Condamner les requis aux dépens;
Sur cette assignation qui contenait constitution de Maîtres Mayacine TOUNKARA et Associés, Avocats à la Cour pour la demanderesse, l’affaire a été inscrite au rôle général du Tribunal, sous le numéro 2094 de l’année 2000, et mise au rôle particulier de l’audience du 27 septembre 2000, indiquée dans l’exploit;
Appelée à cette audience, elle a été renvoyée au 08 novembre 2000, date à laquelle elle a été utilement retenue;
Maîtres Mayacine TOUNKARA et Associés, Avocats à la Cour pour la demanderesse, ont conclu à ce qu’il plaise au Tribunal, leur adjuger l’entier bénéfice de leur exploit introductif d’instance, et ont requis défaut contre les défendeurs non comparants;
A leur tour, Monsieur le Receveur des Taxes Indirectes, Monsieur le Liquidateur de la SOSECODA et Maître Djiby DIATTA, défendeurs, n’ont ni comparu, ni été représentés à l’audience;
Le Ministère Public a déclaré s’en rapporter à justice.
SUR QUOI, les débats ont été déclarés clos, et l’affaire mise en délibéré, pour le jugement être prononcé à l’audience du 17 janvier 2001.
DROIT :
En cet état, la cause présentait à juger les différents points de droit résultant des pièces du dossier et des conclusions orales des Avocats de la demanderesse.
QUID du défaut des défendeurs ?
QUID des dépens ?
A l’audience publique du 11 janvier 2001, le Tribunal, vidant son délibéré, a statué en ces ternes :
LE TRIBUNAL,
Vu les pièces du dossier;
Ouï Mes Mayacine TOUNKARA et Associés en leurs conclusions orales;
Nuls pour les défendeurs défaillants;
Le Ministère Public entendu, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu que suivant exploit de Maître Jacques C. d’ERNEVILLE, Huissier de Justice à Dakar, en date des 08 et 11 septembre 2000, la SONAM a fait assigner le Receveur des Taxes Indirectes, le Liquidateur de la SOSECODA et le sieur Djiby DIATTA, Huissier de justice à Dakar, en distraction d’objets saisis; l’exécution provisoire étant également sollicitée;
Attendu que les défendeurs n’ont ni comparu ni été représentés; qu’il échet de statuer par défaut à leur encontre.
1.- EN LA FORME :
Attendu que l’action a été introduite dans les forme et délai prescrits par la loi; qu’il échet de la déclarer recevable;
2.- AU FOND :
SUR LA DEMANDE PRINCIPALE :
Attendu que suivant l’exploit introductif d’instance, la SONAM a exposé qu’en exécution d’une contrainte fiscale rendue exécutoire le 11 juillet 2000, le Receveur des Taxes Indirectes a fait procéder, par le biais de Maître Djiby DIATTA, Huissier de justice à Dakar, à la saisie d’un micro ordinateur et d’une photocopieuse lui appartenant, suivant procès-verbal du 25 juillet 2000; qu’à l’appui de sa demande de distraction de ces dits objets, il a produit, outre un procès-verbal de saisie du 25 juillet 2000, deux factures délivrées par les Sociétés ABM et BUHAN TEISSEIRE, en dates respectives des 09 mars 1999 et 28 avril 2000;
Attendu que les défendeurs n’ont ni comparu ni été représentés;
Attendu qu’en vertu de l’article 141 de l’Acte Uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution, que le tiers qui se prétend propriétaire d’un bien saisi peut en obtenir la distraction, en précisant les éléments sur lesquels se fonde son droit de propriété;
Attendu qu’il est constant que suivant procès-verbal en date du 25 juillet 2000, que pour obtenir sûreté de sa créance à l’égard de la SOSECODA, le Receveur des Taxes Indirectes de Dakar a fait saisir entre les mains de celle-ci, un micro ordinateur et une photocopieuse;
Attendu qu’il résulte des factures en date des 09 mars 1999 et 28 avril 2000, que la SONAM a acquis auprès des Sociétés ABM et BUHAN TEISSEIRE, respectivement, une photocopieuse et un ordinateur;
Attendu, d’une part, qu’en l’absence de toute précision dans le procès-verbal de saisie sur les références des objets saisis, notamment leurs marques et numéros de série, permettant au Tribunal de vérifier la conformité de ces biens avec ceux dont la distraction est demandée, i1 échet de considérer que les factures produites sont relatives aux biens effectivement saisis;
Attendu, d’autre part, que les pièces versées au dossier établissent suffisamment la propriété de la SONAM sur les biens saisis, alors surtout qu’il ressort du procès-verbal du 29 juillet 2000, que le liquidateur de la débitrice principale avait déclaré lors de l’opération de saisie, que ces dits biens sont la propriété de la SONAM; qu’il échet, au regard de tout ce qui précède, d’ordonner la distraction de ces objets saisis;
2. SUR L’EXECUTION PROVISOIRE :
Attendu que compte tenu des circonstances de la cause, notamment de la nécessité pour la demanderesse, de pouvoir disposer de ses biens, il y a urgence suffisante pouvant justifier l’exécution provisoire sollicitée; qu’il échet de l’ordonner.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par défaut à l’égard des défendeurs, en matière civile et en premier ressort :
EN LA FORME :
– Reçoit l’action;
AU FOND :
Y faisant droit :
– Ordonne la distraction au profit de la SONAM, de la machine photocopieuse et de l’ordinateur saisis suivant procès-verbal de Maître Djiby DIATTA en date du 25 juillet 2000;
– Ordonne l’exécution provisoire;
– Met les dépens à la charge du Trésor Public;
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.
Observations de Joseph ISSA SAYEGH, Professeur
Cette décision est curieuse et ne peut être approuvée car elle déforme deux règles fondamentales du droit : en fait de meubles possession vaut titre et la charge de la preuve de la propriété d’un bien (quel qu’il soit) incombe à celui qui la revendique.
Or, en l’espèce, le fait que les biens saisis étaient en la possession du débiteur saisi devait emporter la présomption qu’ils lui appartenaient et le fait que le demandeur en distraction d’objets saisis ne parvenait pas à établir que les biens dont il se prétendait propriétaire et dont il demandait la distraction correspondaient bien à ceux saisis devait jouer en faveur du saisissant.