J-05-94
VOIES D’EXECUTION – SAISIE – DISTRACTION D’OBJETS SAISIS – EXPIRATION DU DELAI POUR FORMER LA DEMANDE DE DISTRACTION – INOPPOSABILITE DU DELAI AU NON DEBITEUR.
« La seule saisie opérée sur les biens se trouvant au domicile commun des époux, fût-il le domicile réel, n’est pas susceptible d’asseoir une quelconque qualité de débiteur du conjoint ». Cette qualité ne pouvant être retenue, le dernier alinéa de l’article 143 et le délai d’un mois ne sont pas applicables ».
Article 143 AUPSRVE
Article 146 AUPSRVE
(Tribunal régional hors classe de Dakar (Sénégal), Jugement n° 160 du 23 janvier 2001, Omar Guèye c/ Aminata Dramé, Marietou Dione, Malick Sèye, Me Bernard Sambou, Maître Jean Maroun).
Tribunal régional hors classe de Dakar (Sénégal)
Audience publique et ordinaire du 23 janvier 2001
Le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar (Sénégal), statuant en matière civile, a, en son audience publique du vingt trois janvier deux mil un tenue en la Salle des Audiences, à laquelle siégeaient Madame Abibatou Babou FAYE, Juge au Siège, Président de Chambre, Monsieur Mamadou Lamine DIEDHIOU et Mme Henriette Diop TALL, Juges au Siège, Membres, en présence de Monsieur Saliou MBAYE, Substitut de Monsieur le Procureur de la République, et avec l’assistance de Monsieur Mame Mor BITEYE, Greffier, rendu le jugement dont la teneur suit :
ENTRE :
– Monsieur Oumar GUEYE, demeurant à Ouakam, Quartier Boulga à Dakar, pour qui domicile est élu en l’Etude de Maître Abdoulaye BABOU, Avocat à la Cour, Immeuble « Les Dunes », appartement n° C 24, Sodida à Dakar; DEMANDERESSE;
Comparant et concluant à l’audience par ledit Avocat;
d’une part;
ET :
– Madame Aminata DRAME, demeurant à Ouakam, Quartier Boulga;
– Madame Mariétou DIONE, demeurant à Ouakam, Quartier Boulga;
– Maître Malick Sèye FALL, Huissier de justice à Dakar, demeurant et domicilié 45, rue Félix Faure;
– Maître Bernard SAMBOU, Huissier de justice demeurant et domicilié 47, rue El Hadji Mbaye à Dakar;
– Maître Jean MAROUN, Commissaire Priseur - 25, avenue Georges Pompidou à Dakar;
DEFENDEURS;
Comparant et concluant à l’audience par Me Pape NDIAYE, Avocat à la Cour, Conseil de Aminata DRAME;
d’autre part;
Sans que les présentes qualités puissent nuire ni préjudicier en rien aux droits et intérêts respectifs des parties en cause.
FAITS :
Par exploit en date des 14 et 18 janvier 2000 de Me Abdoulaye DIOM, Huissier de justice à Dakar, le sieur Oumar GUEYE a donné assignation à Aminata DRAME, Mme Mariétou DIONE, Me Malick Sèye FALL, Me Bernard SAMBOU et Me Jean MAROUN, à comparaître et se trouver par-devant le Tribunal de céans, pour et par les motifs exposés audit exploit :
Attendu que par acte en date du 14 janvier 1998, Maître Bernard SAMBOU, Huissier de justice, a saisi au domicile de Oumar GUEYE, les objets ci-après :
– 1 poste téléviseur SAMSUNG, 1 décodeur Canal + Horizons, 4 fauteuils plus canapé plus table, 1 aquarium, 1 frigo 2 portes 430 L de marque Brastemps, 1 cuisinière six feux;
Que l’ensemble des objets ci-dessus sont la propriété de Oumar GUEYE, tel que cela ressort des reçus attestant respectivement des titres de propriété :
– Facture n° 195 du 11 août 1995 pour la TV Samsung – GIE Le Baol, contrat d’abonnement de Canal Horizons et reçus.
– Pour les fauteuils et l’aquarium, facture n° 90 du 12 juin 1987 de Adama FAYE;
Pour le reste, à savoir le frigo, la cuisinière, facture n° 86 de Ousseynou TAMBEDOU, Commerçant;
Qu’il échet en conséquence, de distraire de la vente, conformément à l’article 141 de l’OHADA, l’ensemble des griefs ci-dessus, suite à la sommation d’assister à la vente servie par Me Malick Sèye FALL.
PAR CES MOTIFS
IL PLAIRA AU TRIBUNAL :
– Déclarer recevable l’action de Oumar GUEYE.
Vu les pièces versées aux débats;
Vu les articles 139, 141 de l’OHADA sur les contestations relatives aux biens saisis;
– Ordonner la distraction de la totalité des biens mobiliers, tels que contenus dans le procès-verbal de saisie;
Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant toute voie de droit;
– Condamner les défendeurs aux dépens.
Sur cette assignation, l’affaire a été inscrite au rôle général du Tribunal, sous le N° 550 de l’année 2000, et mise au rôle particulier de l’audience du 25 janvier 2000, indiquée dans l’exploit;
Appelée à son tour à cette audience, elle fut l’objet de plusieurs renvois, jusqu’au 12 décembre 2000, pour être utilement retenue;
Me Abdoulaye BABOU, Avocat à la Cour, Conseil du demandeur, a lu, développé et déposé sur le bureau du Tribunal, les conclusions dont le dispositif suit :
CONCLUSIONS EN DATE DU 09 MARS 2000 :
IL PLAIRA AU TRIBUNAL :
EN LA FORME :
– Déclarer recevable l’action de Oumar GUEYE;
AU FOND :
Vu les pièces versées aux débats;
Vu les articles 139, 141 de l’OHADA sur les contestations relatives aux biens saisis :
– Ordonner la distraction de la totalité des biens mobiliers, tels que contenus dans le procès-verbal de saisie;
– Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant toutes voies de droit;
– Condamner les défendeurs aux dépens.
Maître Pape NDIAYE, Avocat à la Cour, Conseil de Aminata DRAME, défenderesse, a lu, développé et déposé sur le bureau du Tribunal, les conclusions dont le dispositif suit :
CONCLUSIONS NON DATEES :
– Déclarer irrecevable la procédure de distraction, par application de l’article 143 alinéa dernier, et ordonner la continuation des poursuites sans délai;
– Dire et juger que la distraction est infondée et ordonner la continuation des poursuites sur les biens saisis contenus dans le procès-verbal de saisie;
– Ordonner l’exécution du jugement à intervenir et condamner les demandeurs Oumar GUEYE et Mariétou DIONE aux entiers dépens.
Le Ministère Public a déclaré s’en rapporter à justice.
SUR QUOI, les débats ont été déclarés clos et 1’affaire mise en délibéré, pour le jugement être prononcé à l’audience du 23 janvier 2001.
DROIT :
En cet état, la cause présentait à juger les différents points de droit résultant des pièces du dossier et des conclusions des Avocats des parties.
QUID DES DEPENS ?
A l’audience publique du 23 janvier 2001, le Tribunal, vidant son délibéré, a statué en ces termes :
LE TRIBUNAL,
Vu les pièces du dossier;
Ouï les Avocats des parties en leurs conclusion respectives;
Le Ministère Public entendu, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Par exploit d’huissier des 14 et 18 janvier 2000, Oumar GUEYE a, par-devant le Tribunal de céans, assigné Aminata DRAME, en distraction d’objets saisis, suivant procès-verbal daté du 14 janvier 1998, sous le bénéfice de l’exécution provisoire;
EN LA FORME :
SUR L’IRRECEVABILITE DE L’ACTION TIREE DE L’ARTICLE 143 AU/PRSVE :
Par écritures non datées, Aminata DRAME a conclu à l’irrecevabilité de l’action, motif pris de ce que le délai à agir d’un mois prévu à l’article 143 AU/PRSVE, n’a pas été observé, d’autant qu’en l’espèce, la demande en distraction n’a été faite que 24 mois après la saisie;
Qu’elle ajoute que Oumar GUEYE, faisant cause commune avec son épouse, débitrice, la saisie opérée à l’encontre de son conjoint et sur des biens se trouvant au domicile commun, conféré à Oumar GUEYE, en raison de la signification à domicile réel, la qualité de débiteur;
Mais attendu que de prime abord, il y a lieu de faire observer que la seule saisie opérée sur les biens se trouvant au domicile commun des époux, fût-il le domicile réel, est insusceptible d’asseoir une quelconque qualité de débiteur du conjoint, d’autant mieux que le fondement même de la créance de Aminata DRAME, n’est autre qu’un jugement correctionnel restant la seule responsabilité de Mariétou DIONE;
Que cette précision étant, la qualité de débiteur de Oumar GUEYE ne pouvant être retenue, le délai à agir d’un mois prévu à l’article 143 AU/PRSVE ne saurait lui être opposable;
Qu’il échet de passer outre l’irrecevabilité soulevée;
AU FOND :
SUR LA DISTRACTION :
Par écritures du 09 mars 2000, Oumar GUEYE a revendiqué la propriété des objets saisis, en versant aux débats :
– la facture n° 195 du 11 août 1995 délivrée par le GIE Le Baol, pour la télévision,
– le contrat d’abonnement de Canal Plus Horizons et le reçu pour le décodeur,
– la facture n° 90 du 12 juin 1987 délivrée par Adama FAYE pour des fauteuils, le canapé et l’aquarium;
– la facture n° 86 datée du 21 mai 1995, délivrée par Ousseynou TAMBEDOU, pour le réfrigérateur et la cuisinière;
Que Aminata DRAME n’a pas estimé conclure sur ce chef;
Attendu que les présentes factures, n’ayant soulevé aucune contestation de part et d’autre, établissent après leur examen, la propriété de Oumar GUEYE sur les objets revendiqués;
Qu’il échet d’ordonner leur distraction au profit de ce dernier;
SUR L’EXECUTION PROVISOIRE
Attendu qu’il y a urgence à suffisance pour Oumar GUEYE, d’obtenir mainlevée de la saisie qui a été régulièrement opérée sur ses propres biens;
Qu’il échet d’ordonner l’exécution provisoire du présent jugement.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement, en patière civile et en premier ressort
EN LA FORME :
– Reçoit l’action de Oumar GUEYE;
AU FOND :
– Ordonne la distraction au profit de Oumar GUEYE, des objets saisis suivant procès-verbal du 14 janvier 1998;
– Ordonne l’exécution provisoire;
– Condamne Aminata DRAME aux dépens;
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.
Observations de Joseph ISSA-SAYEGH, Professeur
Cette décision ne peut être approuvée car si l’article 143 AUPSRVE n’est pas applicable, ce n’est pas parce que le demandeur n’est pas le débiteur, mais parce que la demande est une demande de distraction d’objet saisis n’appartenant pas au débiteur. Or, l’article 143 AUPSRVE concerne la contestation du caractère saisissable de biens saisis, qui, bien qu’appartenant au débiteur, ne peuvent être saisis en raison de leur nature particulière (outils de travail, par exemple).