J-05-96
SURETES – CAUTIONNEMENT D’UNE SOCIETE PAR DEUX CAUTIONS POUR DEUX DETTES DIFFERENTES – OBLIGATION DU CREANCIER DE POURSUIVRE LA CAUTION POUR LA SEULE DETTE GARANTIE PAR ELLE.
Un premier financement a été consenti avec pour garantie, un cautionnement hypothécaire, un nantissement de compte d’investissement et un cautionnement personnel et solidaire. Un second financement a été octroyé à la SCI, avec pour garantie, un nantissement d’un compte d’investissement ainsi qu’un cautionnement personnel et solidaire; les cautionnements étant donnés par des personnes différentes et pour des dettes différentes.
Les effets de la subrogation conventionnelle ou légale ne pouvant être invoqués qu’à l’encontre de personnes pour le moins obligées à la dette, le créancier ne peut pas saisir indifféremment l’une des deux cautions, mais seulement celle qui s’est obligée à la dette.
(cour d’appel de Dakar, CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE 1, Arrêt Cour d’Appel n° 340 du 15 juin 2001, Sénégal Construction International, Sérigne Gaye et Amady damy BA c/ Maguette Wade, Maître Boubacar Wade et le greffier en chef du tribunal régional hors classe de Dakar).
republique du Sénégal
Cour d’appel de Dakar
CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE 1
ENTRE :
1°) Sénégal Construction International, société anonyme au capital de un million de FCFA, ayant son siège social à Dakar - 94 rue Carnot, poursuites et diligences de ses représentants légaux;
2°) Monsieur Serigne GAYE, Président du Conseil d’Administration de Sénégal Construction International S.A., demeurant à Dakar – 94, rue Carnot;
3°) Monsieur Amady Damy BA, demeurant à Dakar, Sicap Amitié III villa n° 4478 à Dakar, mais ayant domicile élu en l’Etude de Mes Guédel NDIAYE et Associés, Avocats à la Cour - 73 bis, rue Amadou Assane Ndoye, Dakar; APPELANTS;
Comparant et concluant par l’organe desdits Avocats;
d’une part;
ET :
– Monsieur Maguette WADE, demeurant à Dakar boulevard Djily Mbaye x rue Béranger Féraud, es nom d’une part, et es qualité de prétendu subrogé dans les droits de la Banque Islamique du Sénégal dite BIS, d’autre part;
– Maître Boubacar WADE, Avocat à la Cour, pris en sa qualité de Conseil du sieur Maguette WADE es nom, d’une part, et es qualité de prétendu subrogé dans les droits de la Banque Islamique du Sénégal dite BIS, d’autre part;
– Le Greffier en Chef du Tribunal Régional Hors Classe de Dakar, au Greffe dudit Tribunal, Bloc des Madeleines;
faisant élection de domicile en l’Etude de Me Boubacar DIALLO; INTIMÉS;
Comparant et concluant par l’organe dudit Avocat;
d’autre part;
LES FAITS :
Suivant exploit de Me Aloyse NDONG, Huissier de justice à Dakar, en date des 17 et 18 juillet 2000, Sénégal Construction International, Monsieur Serigne GAYE et Messieurs Amady Damy BA ont interjeté appel d’un jugement rendu le 04 juillet 2000 par le Tribunal Régional de Dakar, présidé par Monsieur Cheikh Tidiane LAM, et avec l’assistance de Me Mariam Sy BOCOUM, Greffier, enregistré suivant bordereau n° 057/4, Vol. XXIV, F° 192; Case 2960, aux droits de seize mille francs;
Et par le même exploit, Sénégal Construction International, Messieurs Serigne GAYE et Amady Damy BA ont fait servir assignation à Maguette WADE, Boubacar WADE et au Greffier en Chef du Tribunal Régional Hors Classe de Dakar, d’avoir à comparaître et se trouver par-devant la Cour d’Appel de Dakar, Chambre Civile et Commerciale, en son audience publique et ordinaire du 28 juillet 2000, pour y venir voir et entendre statuer sur les mérites de leur recours;
Sur cette assignation, l’affaire, inscrite au rôle de la Cour sous le numéro 692 de l’année 2000, a été appelée à la date pour laquelle ladite assignation avait été servie;
A cette date, l’affaire, mise au rôle particulier de l’audience, a été renvoyée plusieurs fois, puis au 27 avril 2001, date à laquelle elle fut utilement retenue;
Maîtres Guédel NDIAYE et Associés ont déposé des conclusions tendant à ce qu’il plaise à la Cour :
Conclusions du 19 février 2001 :
– Déclarer l’appel recevable;
– Infirmer le jugement querellé en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :
– Annuler la procédure de vente entreprise par le sieur Maguette WADE;
– Condamner le sieur Serigne GAYE aux dépens d’instance et d’appel dont distraction selon l’usage;
Conclusions du 12 avril 2001 :
– Rejeter toutes prétentions contraires du sieur Maguette WADE, comme radicalement mal fondées, et adjuger aux concluants le bénéfice de leurs écritures précédentes et présentes;
A son tour, Me Boubacar WADE a déposé des conclusions écrites en date du 22 mars 2001, tendant à ce qu’il plaise à la Cour :
– Statuer ce que de droit sur la recevabilité en la forme de l’appel de SCI, Serigne GAYE et Amady Damy BA.
AU FOND :
– Le rejeter comme mal fondé;
SUR QUOI, Monsieur le Président a mis l’affaire en délibéré, pour l’arrêt à intervenir à la date du 15 juin 2001;
DROIT :
La cause, en cet état, présentait à juger les différents points de droit résultant du dossier et des conclusions prises par les parties en cause;
QUID DES DEPENS ?
Advenue l’audience publique et ordinaire de ce jour 15 juin 2001, la Cour, dans la même composition que précédemment, vidant son délibéré, a statué en ces termes :
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en toutes leurs demandes, fins et conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
Statuant sur l’appel formé les 17 et 18 juillet 2000 par la Société Sénégal Construction International, en abrégé S.C.I., et les sieurs Serigne GAYE et Amady Damy BA, du jugement rendu le 04 juillet 2000 par le Juge des criées du Tribunal Régional de Dakar, dont le dispositif est ainsi conçu :
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de saisie immobilière et en premier ressort :
EN LA FORME :
– Déclare les dires recevables;
AU FOND :
– Les rejette;
– Dit que la vente de l’immeuble objet du TF n° 29677/DG sera poursuivie à l’audience du 29 août 2000;
EN LA FORME :
Sur la recevabilité de l’appel :
Considérant qu’au soutien de leur recours, les appelants font reproche au premier Juge, d’avoir rejeté leurs dires articulés autour de l’inexistence de la créance invoquée en fondement de la saisie, du défaut de titre exécutoire du saisissant, ainsi que de la violation des formalités prescrites par les dispositions des articles 269 et 270 de l’Acte Uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution;
Mais considérant qu’en application de l’article 300 du Code de Procédure Civile, il échet de déclarer l’appel recevable contre les seules dispositions du jugement statuant sur l’existence de la créance;
Qu’il échet de le déclarer irrecevable pour le surplus;
AU FOND :
Considérant qu’il est constant que se disant créancier de Amady Damy BA pour la somme en principal de 30.320.873 FCFA, Maguette WADE a poursuivi devant le Juge des criées du Tribunal Régional de Dakar, la vente forcée de son immeuble objet du TF n° 34677/DG appartenant à Amady Damy BA;
Considérant qu’au soutien de leur recours, les appelants exposent que la SCI a bénéficié de deux prêts au niveau de la Banque Islamique du Sénégal dite BIS :
– un premier prêt de 25.000.000 FCFA garanti jusqu’à hauteur de 35.000.000 FCFA par le cautionnement hypothécaire qu’il lui a consenti;
– un deuxième prêt de 62.000.000 FCFA garanti cette fois par le cautionnement personnel et solidaire de Maguette WADE;
Qu’après avoir payé l’intégralité du premier prêt et la moitié du second, la SCI restait devoir la somme de 30.320.873 FCFA à la BIS, qui a fait jouer la garantie du sieur WADE pour recouvrer le reliquat de sa créance;
Que le sieur WADE, ayant donc payé au titre de son cautionnement personnel et solidaire, la somme de 30.320.873 FCFA, a estimé être subrogé dans les droits de cette dernière, et a fait servir le commandement qui a donné lieu au jugement entrepris;
Que pour conclure à l’infirmation du jugement et à l’annulation de la procédure de vente, ils soutiennent que la subrogation dont se prévaut Maguette WADE ne saurait avoir d’effet à l’encontre de Amady Damy BA, puisqu’aussi bien, ce dernier n’a jamais garanti la créance dont le recouvrement est poursuivi;
Considérant que Maguette WADE, pour sa part, conclut à la confirmation du jugement;
SUR CE :
Considérant que les allégations des appelants quant à l’existence de deux créances distinctes, objet de garanties distinctes, sont confortées par les documents produits aux débats;
Qu’en effet, il résulte, d’une part, de la copie exécutoire de l’acte d’ouverture de crédit passé les 10 et 13 novembre 1997 par-devant Me Amadou M. NDIAYE, Notaire à Dakar, du certificat d’inscription en date du 28 novembre 1997, et du bordereau analytique en même date qui s’y trouve annexé, que la BIS a consenti un premier financement de 25.000.000 FCFA à la SCI, avec cautionnement hypothécaire de Amady Damy BA consenti sur le TF n° 24677/DG à hauteur de 35.000.000 FCFA, et d’autre part, de la correspondance en date du 20 juin 2000 adressée par la Banque à la SCI, de l’acte de nantissement de compte d’investissement en date du 18 mars 1998, et de l’acte de cautionnement personnel et solidaire en même date, que la SCI a bénéficié d’un second financement de 62.000.000 FCFA accordé par la même banque le 06 juin 1997, garanti cette fois, par le nantissement accordé par Maguette WADE sur ses comptes d’investissement, ainsi que par son cautionnement personnel et solidaire;
Considérant que ces documents n’ont pas été contestés;
Considérant que Amady Damy BA soutient sans être démenti, que le seul prêt qu’il a garanti a été intégralement remboursé, et que c’est en recouvrement du reliquat du second prêt que la BIS a fait jouer la garantie de Maguette WADE; qu’au demeurant, la garantie de WADE n’a pu l’être qu’au titre de ce prêt, le seul qu’il ait garanti;
Considérant, cela étant, que les effets de la subrogation, conventionnelle ou légale, ne peuvent à l’évidence être utilement invoqués qu’à l’encontre de personnes pour le moins obligées à la dette dont elle est l’effet du paiement;
Que tel n’étant le cas en l’espèce, il échet de dire que c’est à tort que le premier Juge a rejeté les dires des appelants;
Qu’il échet d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, d’annuler la procédure de vente.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de criées et en dernier ressort :
– Déclare l’appel recevable contre les chefs de jugement relatifs au principe de la créance;
– Le déclare irrecevable pour le surplus;
AU FOND :
– Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, annule la procédure de vente poursuivie par WADE sur le TF n° 24677/DG appartenant à Amady Damy BA;
– Condamne WADE aux entiers dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de Dakar, Chambre Civile et Commerciale, en son audience publique et ordinaire du 15 juin 2001 séant au Palais de Justice de ladite ville, Bloc des Madeleines, à laquelle siégeaient Monsieur Mouhamadou DIAWARA, Président, Messieurs Mamadou DEME et Abdoulaye NDIAYE, Conseillers, et avec l’assistance de Me El Hadji Ayé Boun Malick DIOP, Greffier.
Et ont signé le présent arrêt.