J-05-176
– PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT DES CRÉANCES – INJONCTION DE PAYER – CRÉANCE – CAUSE CONTRACTUELLE – ELÉMENTS – CRÉANCE RÉSULTANT D'UN CONTRAT DE MANDAT – RECOUVREMENT PAR LA PROCÉDURE D'INJONCTION DE PAYER (OUI).
– CRÉANCE – MONTANT – ELÉMENTS DE DÉTERMINATION.
La créance a une cause contractuelle dès lors qu'elle résulte d'un contrat de mandat intervenu entre les parties. Il en est ainsi lorsque pour le recouvrement de sa créance, l'intimée a requis un huissier de justice, lequel s'est engagé à recouvrer la créance, et il s'est formé un contrat de mandat en exécution duquel, l'huissier de justice a pratiqué la saisie du véhicule appartenant au débiteur et a eu recours, pour la vente, à un commissaire priseur dont le procès verbal de vente précise la somme à recouvrer, le décompte des différents éléments de la créance.
Lorsque le recouvrement ou l'encaissement est poursuivi en vertu d'une décision de justice, l'huissier de justice devant percevoir, à la charge du débiteur, un émolument calculé sur le total des sommes effectivement encaissées ou recouvrées, c'est à tort que l'huissier de justice a retenu, sur la somme versée par le commissaire priseur, ses frais.
Par conséquent, il doit au créancier la somme indûment retenue.
(Cour d'Appel de Daloa, 2ème Chambre Civile et Commerciale , Arrêt N° 227 du 30 Juillet 2003, Fofana Youssouf c/ O… Le Juris Ohada , n° 4/2004, octobre- décembre 2004, p. 44, note BROU Kouakou Mathurin).
LA COUR ,
Vu les pièces du dossier et les conclusions des parties;
Après en avoir délibéré;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par jugement civil contradictoire n° 117 du 06 avril 1999, confirmé par arrêt civil contradictoire n° 259 de la Cour d'Appel de ce siège en date du 11 juillet, le Tribunal de Première Instance de Daloa, a condamné la Société de réalisation d'études et de construction dite HORIZON, représentée par H., à payer à O., la somme principale de 5.000.000 F, pour le règlement de laquelle, un chèque du même montant remis, par la Société débitrice est revenu impayé malheureusement;
Requis par la créancier pour avoir cette somme et en vertu d'une ordonnance n° 62 du Président du Tribunal de Première Instance de Daloa, rendue le 04 juin 1999, Maître FOFANA YOUSSOUF, Huissier de Justice à Daloa, a pratiqué, le 10 juin 1999, la saisie- conservatoire du véhicule MITSUBISHI PAJERO immatriculé 83 CB 02 appartenant à la Société débitrice HORIZON et dont la vente, réalisée à Daloa, le 03 novembre 2001 par le Commissaire-priseur, Maître ROUZZI PAUL, a permis de recueillir la somme de 5.000.000 F, comme l'atteste le procès-verbal de vente, sur un montant total dû, de 08.151.793 F Y compris les frais divers;
Après déduction par le Commissaire-priseur, de ses frais évalués à 747.050 F le solde d'un montant de 4.252.950 francs a été reversé à l'huissier instrumentaire, lequel à son tour, a retenu, au titre de ses frais de Procédure somme de 1.352.950 francs, et reversé à O., le montant restant de 2.900.000 francs, contre décharge;
Mais, estimant que Maître FOFANA YOUSSOUF, Huissier instrumentaire restait lui devoir, sur la somme de 5.000.000 F, représentant le produit de la vente, un montant de 2.100.000 F, qui ne lui a pas été versé, fin décembre 2001 comme promis, O., a obtenu, le 20 juin 2002, du Président du Tribunal de Première Instance de Daloa, une ordonnance n° 348 le condamnant au paiement de ce montant, sur requête à laquelle étaient joints, le procès-verbal de vente du Commissaire-priseur en date du 03 novembre 2001, une sommation interpellative délivrée le 23 mai 2002 et un chèque S G B C 1 d'un montant de 500.000 francs;.
Cette décision lui ayant été signifiée à personne, le 19 juillet 2002, Maître FOFANA YOUSSOUF, y a formé opposition le premier août suivant, et sollicite, en la forme, l'annulation de l'ordonnance entreprise motif pris, du défaut; de base légale, en ce que le procès-verbal de vente ne peut être un support de créance et ce, en application de l'article 02 de l'acte uniforme précité; il soutient, au fond, pour demander la rétractation de l'ordonnance attaquée que c'est sur le produit des ventes, que les auxiliaires de Justice retiennent la part qui leur revient; avant de reverser la somme restante au créancier poursuivant, surtout que le Commissaire-priseur a déduit ses frais évalués à 747.050 F, du produit de la vente pour ne lui reverser que la somme de 4.252.950 F, montant effectivement encaissé;
Il verse des pièces;
En réplique, O. conclut au débouté de l'opposition en faisant observer :
1/ Que par l'acceptation de poursuivre le recouvrement de sa créance sur la Société HORIZON, Maître FOFANA YOUSSOUF a conclu avec elle, un contrat d e mandat, dont l'aboutissement est matérialisé par le procès-verbal de vente, établi par le Commissaire- priseur, qui indique la vente de l'objet saisi et le montant réel de son prix;
2/ Que pour obtenir l'ordonnance d'injonction de payer critiquée, elle s'est appuyée non seulement, sur le procès-verbal de vente du Commissaire-priseur sus-mentionné qui n'est rien d'autre que le résultat du mandat qu'elle lui a donné de recouvrer sa créance de 5.000.000 F, auprès de la Société débitrice "HORIZON", mais aussi sur la sommation interpellative du 23 mai 2002 et un chèque SGBCI d'un montant de 500.000 F, et ce, conformément aux dispositions de l'article 02 de l'acte uniforme de l'OHADA sus rappelé;
3/ Que la rétention par FOFANA YOUSSOUF, Huissier instrumentaire du montant de ses émoluments, ne peut se faire que sur les dépens et après avoir encaissé la totalité de la somme de 8.151.793 F, mais non sur la somme principale de 1.500.000 francs qui lui est due;
Le Tribunal de Première Instance de Daloa, statuant en la cause, a débouté FOFANA YOUSSOUF, de son opposition et l'a condamné au paiement envers O., de la somme de 1.852.950 F, suivant jugement civil contradictoire n° 94 du 14 mars 2003;
Par acte du 11 avril 2003, valant mémoire, FOFANA YOUSSOUF a relevé appel du jugement non signifié, dont il sollicite la réformation;
Moyens des parties;
Il reprend ses moyens de première instance et précise notamment en la forme, que pour obtenir l'ordonnance d'injonction de payer sus rappelée, la créancière a introduit une requête qui ne répond pas aux exigences de l'article 02 de l'acte uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
Il relève au fond que, en ramenant le montant de sa condamnation, à la somme de 1.852.950 F, la décision attaquée ne se justifie pas, en ce que la rétention de ses frais, par le Commissaire-priseur, à qui a été confié la vente de l'objet saisi, est approuvée, alors qu'il a suivi et exécuté le dossier de la procédure pendant quatre ans, de 1 998 à 2001, et produit un état des frais;
L'intimée, O., régulièrement; représentée, suivant "Procuration spéciale" du 20 mai 2003, n'a pas déposé d'écritures, en cause d'appel;
MOTIFS
Sur la recevabilité de l'appel;
Considérant que, la Cour de ce siège ayant, déjà statué sur cette question, suivant arrêt, avant dire droit n° 132 rendu le 21 mai 2003, il convient de s'en rapporter;
AU FOND
Sur l'annulation de l'ordonnance d'injonction de payer :
Considérant qu'aux termes de l'article 02 de l'acte uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, "la procédure d'injonction de payer peut être introduite, lorsque :
1/ La créance a une cause contractuelle;
2/ L'engagement résulte de l'émission de l'acceptation de tout effet de commerce ou d'un chèque dont la provision s'est révélée inexistante ou insuffisante";
Considérant que, pour déclarer la requête recevable et par la suite, l'ordonnance entreprise régulière, le Tribunal retient que, entre O., créancière, et Maître FOFANA YOUSSOUF, lequel, requis par elle, s'est engagé à recouvrer la créance due par la Société HORIZON, il s'est formé un contrat de mandat en exécution duquel ce dernier a pratiqué la saisie du véhicule appartenant à la Société débitrice et eu recours, pour la vente de l'objet saisi, au Commissaire-priseur, dont le procès-verbal de vente précise le prix, c'est-à-dire, la somme à recouvrer, le décompte des différents éléments de cette créance ainsi que son fondement;
Que la créance est donc contractuelle;
Que par ces énonciations, d'où il résulte que la créance dont le paiement est réclamé par O., à Maître FOFANA YOUSSOUF, a une cause contractuelle, en ce qu'elle résulte d'un contrat de mandat intervenu entre eux, le Tribunal a légalement justifié sa décision, qui dès lors, mérite confirmation;
Que l'appel n'est donc pas fondé;
Sur l'existence de la créance de O.;
Considérant que, pour condamner Maître FOFANA YOUSSOUF à payer à O., la somme de 1.852.950 F, le Tribunal énonce qu'il résulte des productions, que pour le recouvrement de sa créance de 5.000.000 F, résultant de l'ordonnance portant condamnation de la Société HORIZON au paiement de ce montant, l'huissier instrumentaire, FOFANA YOUSSOUF, mandaté par la créancière, a fait procéder à la vente, au prix de 5.000.000 F comme l'atteste le procès-verbal de vente, le véhicule de marque MITSUBISHI PAJERO appartenant à la débitrice, par le Commissaire-priseur, qui lui a reversé, la somme de 4.252.950 F, après avoir déduit ses frais, et a retenu au titre de ses frais, la somme de 1.352.950 F, avant de ne reverser à O., que la somme de 2.900.000 F;
Qu'il ajoute que Maître FOFANA YOUSSOUF, n'a perçu que la somme de 4.252.950 F;
Considérant qu'en statuant ainsi, alors que conformément aux dispositions combinées des articles 85 et 86 du décret n° 75-51 du 29 janvier 1975 portant tarification des émoluments, frais et débours des Huissiers de Justice, lorsque le recouvrement ou l'encaissement est poursuivi en vertu d'une décision de justice, l'huissier de justice perçoit, à la charge du débiteur, un émolument calculé sur le total des sommes effectivement encaissée ou recouvrées, le jugement attaque n'est pas légalement justifié;
Qu'il convient de le réformer sur ce point;
Considérant que, statuant à nouveau, la Cour devra ramener le montant de la somme due par FOFANA YOUSSOUF (4.252.950 - 2.900.000 F, déjà reversés) à 1.352.950 F indûment retenue;
Considérant enfin, que FOFANA YOUSSOUF, partie succombante, doit être condamnée aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort :
Vu l'arrêt avant dire droit n° 1 32 du 21 mai 2003, par lequel la Cour de ce siège, a reçu Maître FOFANA YOUSSOUF, en son appel relevé, le 11 avril 2003, du jugement civil contradictoire n° 94 rendu, le 14 mars 2003 par le Tribunal de Première Instance de Daloa;
L'y dit partiellement fondé;
Réforme ledit jugement en ce qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 1.852.950 F envers O.;
Statuant à nouveau;
Condamne Maître FOFANA YOUSSOUF à payer à O., la somme de 1.3552.950 F;
Confirme, pour le surplus de ses dispositions, le jugement attaqué; Condamne FOFANA YOUSSOUF aux dépens. Président : M. TOBA AKAYE EDOUARD
Note
Que recouvre la notion de cause contractuelle à laquelle fait allusion l'article 2 de l'Acte uniforme portant 0rganisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution?
Le mérite de cette décision est de démontrer que non seulement le contrat de mandat fait partie des contrats à l'origine de la créance susceptible d'être recouvrée par la voie de l'injonction de payer, mais surtout d'établir l'existence d'un tel contrat entre un créancier et un huissier, dès lors que requis, celui-ci s'est engagé à recouvrer ladite créance.
(Sur la cause contractuelle, de façon générale, voir les références citées, in Juris OHADA n° 3 / 04 p. 52, et TPI Daloa, jugement n° 02 du 09 janvier 2004, in Juris OHADA no3/04 p.49-). Ohadata J-03-390- Ohadata J-03-391
BROU Kouakou Mathurin