J-05-364
VOIES D'EXECUTION – SAISIE VENTE – CONTESTATION – ACTION DU DEBITEUR SAISI – DECES DU CREANCIER POURSUIVANT – ACTION DIRIGEE CONTRE LES OFFICIERS MINISTERIELS (OUI).
VOIES D'EXECUTION – SAISIE VENTE – CONTESTATION – ACTION FONDEE SUR LE DEFAUT DE QUALITE DES OFFICIERS MINISTERIELS ET NON SUR L'INSAISISSABILITE DES BIENS – FORCLUSION (NON).
VOIES D'EXECUTION – SAISIE VENTE – PROCES VERBAL DE RECOLEMENT AVEC ENLEVEMENT – PROCES VERBAL DRESSE APRES LE DECES DU CREANCIER POURSUIVANT – ABSENCE DE MANDAT – NULLITE.
C'est à juste titre que le débiteur saisi a initié son action directement contre l'officier ministériel, dès lors que le créancier poursuivant est décédé et que l'huissier de justice, en procédant au récolement et à l'enlèvement des biens, a agi de sa propre initiative et non sur ordre du défunt créancier poursuivant.
L'argument fondé sur la forclusion ne saurait valoir et doit être écarté, dès lors que le débiteur saisi se fonde sur le défaut de qualité des officiers ministériels et non sur l'insaisissabilité des biens.
Le procès verbal ayant été dressé après la mort du créancier poursuivant, il doit être déclaré nul, dès lors qu'il est évident que le défunt n'a pas pu donner mandat à l'huissier pour dresser ledit procès verbal.
Par conséquent, il y a lieu d'ordonner la restitution des biens enlevés.
Article 143 AUPSRVE
Cour d’appel d’Abidjan, chambre civile et commerciale, arrêt n° 233 du 10 février 2004, Affaire : MaÎtre ADOU YAPI JACQUES et un autre c/ M.K. , Le Juris Ohada, n° 2/2005, p. 31.
La Cour,
Vu les pièces du dossier;
Ensemble l'exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après
DES FAITS PROCEDURE PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
En exécution de l'ordonnance d'injonction de payer N°6976/2002 rendue le 13 novembre 2002 par le Président du tribunal de première Instance d'Abidjan qui a condamné M. K à payer à M. B la somme de quatre millions trois cent soixante quinze mille francs, (4.375.000F), ce dernier a fait pratiquer une saisie vente sur certains biens meubles de son débiteur suivant, procès-verbal daté du 7 Février 2002;
Le 21 février 2002 le Docteur B décédait;
Mais le 12 Mars 2002, Maître ADOU y APl Jacques dressait un procès-verbal de récolement avec enlèvement suivi de sommation d'assister à la vente;
Et en date du 27 Mars 2003,les biens saisis ont été vendus aux enchères publiques par Maître GNONKOURI Alexis, Commissaire-Priseur à Abidjan-Marcory
Entre-temps, plus précisément le 20 Mars 2003, Monsieur K assignait en référé d'heure à heure Maîtres ADOU YAPl Jacques et GNONKOURI Alexis à l'effet d'entendre prononcer la nullité des actes ainsi dressés à titre principal;
Le Juge des référés a rendu l'ordonnance N°1481 le premier Avril 2003 et dont le dispositif est le suivant : " Annulons le procès-verbal de récolement et d'enlèvement du 12 Mars 2003;
Ordonnons la restitution des objets enlevés sous astreinte de 100.000 francs par jour de retard;..."
Par acte d'huissier, en date du 15 Avril 2003, Maîtres ADOU YAPI Jacques et GNONKOURI Alexis ont interjeté appel de. ladite ordonnance;
A l'appui de leur appel, Maître ADOU YAPl Jacques et Maître GNONKOURI Alexis soutiennent que la procédure initiée devant le juge des référés est irrecevable à un double titre, tenant aussi bien au défaut de qualité des défendeurs qu’au non respect du délai d'action;
Sur le défaut de qualité des défendeurs, les appelants avancent que Monsieur K. prétextant de la mort de Mr B, les a assignés directement et en principal devant Je juge des référés en contestation de saisie;
Les deux appelants font remarquer que ladite action ne pouvait être dirigée directement contre eux, parce qu'ils ne sont pas créanciers de Monsieur K;
Ils expliquent qu'ils sont tous les deux des officiers, ministériels, Maître ADOU YAPI Jacques étant Huissier Justice tandis que Maître GNONKOURI Alexis commissaire-priseur;
Les appelants précisent enfin que c'est en tant qu'exécutants qu'ils ont pratiqué des saisies sur les biens meubles de Monsieur K;
Les appelants expliquent que faction, de Monsieur K devait plutôt être initiée contre les ayants droit de Mr B;
Par ailleurs, les appelants expliquent que selon l'article 143 du traité OHADA sur les voies d'exécution 5SIC° "les. contestations -relatives à la saisissabilité des biens compris dans la saisie sont portées devant la juridiction compétente par le débiteur, l'huissier ou l'agent d'exécution agissant comme en matière de difficultés, d'exécution; Lorsque l'insaisissabilité est invoquée par le débiteur, la procédure doit être introduite, dans le délai d'un mois à
compter de a signification de l'acte de saisie. Le créancier e$t entendu ou dûment appelé.";
Les appelants notent que la saisie litigieuse été pratiquée le 7 février 2003 et que Mr K avait jusqu'au 8 Mars 2003 pour élever des contestations devant le juge des référés car il invoquait l'insaisissabilité des biens;
Les deux appelants font remarquer que c'est seulement le 20 Mars 2003 que Monsieur K a saisi .Ie juge des référés pour contester la saisissable des biens;
Les appelants constatant, que Mr K n'a pas sai8i la juridiction compétente dans le délai d'un mois, concluent que son action est manifestement irrecevable;
Par ailleurs les deux appelants relèvent que le créanciet :{ou ses ayants droit) n'a pas été entendu ni .appelé;
Les appelants demandent, en conséquence à la Cour. querellée;
En réplique, l'intimé Mr K fait valoir
1° Sur le défaut de qualité des demandeurs
Que la Cour rejettera cette prétention sans difficulté et confirmera la décision critiquée sur cette question Il explique, d’une part, que l'action dont s'agit est relative à une question de procédure et à l'irrégularité de celle-ci;
Que leur présence dans un procès tendant à l'annulation des actes ou procès verbaux dressés dans le cadre d'une procédure rend nécessaire celle-ci;
L'intimée, explique, d'autre part, qu'il apparaît maladroit d'évoquer l'existence des ayants droit de feu B contre qui l'action aurait dû être dirigée dans la mesure où il est constant que le créancier Monsieur B était décédé au moment où l'huissier instrumentaire ADOU YAPl Jacques procédait à l'enlèvement de ses biens;
Il fait remarquer que si feu B avait laissé des ayants droit, il appartenait aux officiers ministériels en question de mener l'action en leur nom et que le silence. voJontairement gardé sur le décès en question commande que les appelants s'abstiennent de soulever posteriori l'existence des ayants droit de B;
2° Sur la forclusion du recours
L'intimé fait observer qu'il ressort très clairement de la décision attaquée que le juge des référés s'est appuyé sur le décès du Docteur B et non sur l'insaisissabilité des biens de Mr K. »;
Qu'en effet, pour le juge et à bon droit, un défunt ne peut pas donner mandat aux officiers ministériels à l'effet de procéder à un enlèvement de biens saisis;
Qu'en agissant comme ils l'ont fait tout en sachant que Monsieur B est décédé, ils se sont volontairement substitués au requérant en se cachant derrière leur ministère;
Que dès lors leur maladresse appelle la nullité du procès-verbal du 12 mars 2003,
DES MOTIFS
EN LA FORME
L'appel de Maîtres ADOU YAPI Jacques et GNONKOURI Alexis a été relevé conformément aux prescriptions légales;
Il convient de le déclarer recevable
AU FOND
Sur le moyen tiré, du défaut de qualité des défendeurs;
Maîtres ADOU YAPI Jacques et Alexis, GNONKOURI Alexis soutiennent que n'étant pas les créanciers de Mr. K, ce dernier ne pouvait les assigner directement devant le juge des référés en contestation de saisie;
Mais il ressort clairement des productions des parties que le créancier poursuivant M. B est décédé le 21 Février 2002, et que l'huissier de Justice, en procédant au récolement et l'enlèvement des biens le 12 mars 2003, a agi de sa propre initiative et non sur ordre du défunt créancier poursuivant, de sorte que c'est à juste titre que le débiteur saisi a initié son action directement contre l'officier ministériel;
Il y a dès lors de rejeter ce moyen comme non fondé;
Sur le moyen tiré de la forclusion du recours
Les appelants se fondant sur l'article 143 de l'Acte Uniforme portant voies d'exécution soulèvent la forclusion du recours exercé par le débiteur saisi au motif que ledit recours a été fait plus d'un mois après la signification de l'acte de saisie :.
Il résulte des pièces et débats que l'action initiée par Mr K est fondée sur le défaut de qualité des officiers ministériels et non sur l'insaisissabilité des biens de sorte que l'argument fondé sur la forclusion ne saurait valoir et doit être écarté;
Sur le procès-verbal de vente du Commissaire Priseur
Bien que les parties aient été, à plusieurs reprises, invitées à produire le procès-verbal de vente des objets saisis, aucun procès-verbal n'a été produit par elles de sorte qu' il doit être considéré que la vente n'a pas eu lieu;
Sur le procès-verbal de récolement avec enlèvement il ressort clairement des productions que ledit procès-verbal a été dressé bien après la mort de B, créancier poursuivant;
Il est tout aussi évident que le défunt n'a pu donner mandat à l'huissier pour dresser le procés-verbal litigieux qui, comme tel, doit être déclaré nul;
C'est donc à bon droit que le premier juge a dit que le procès-verbal du 12 mars 2003 est nul et, de nul effet et ordonné la restitution des biens enlevés sous astreinte de 100 000 F par jour de retard;
SUR LES DEPENS
Maîtres ADOU YAPI Jacques et GNONKOURI Alexis qui succombent doivent être condamnés aux dépens, en application de l'article 149 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort
"Déclare recevable mais mal fondé et rejette comme tel l'appel de Maîtres ADOU YAPI Jacques et GNONKOURY Alexis relevé de l'ordonnance de référé N° 1481 du 1er avril 2003 rendue par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de première Instance d'Abidjan;
Confirme ladite ordonnance en toutes ses dispositions;
PRESIDENT : M. KANGA PENOND YAO MATHURIN