J-06-35
CCJA.caSSATION. ACTES DE COMMERCE. PREUVE. ARTICLE 5 AUPCG. LIBERTE DES MOYENS DE PREUVE. VIOLATION DE L’ARTICLE 1326 DU CODE CIVIL ET ABSENCE DE FONDEMENT DE L’ARRET ATTAQUE : NON.
L’article 1326 du code civil ne s’applique pas lorsqu’il s’agit, à l’égard des commerçants, de prouver les actes de commerce, lesquels, conformément à l’article 5 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, se prouvent par tous moyens. En retenant que la lettre en date du 29 septembre 2000, adressée à la Société SHANNY CONSULTING par la Société COTE D’IVOIRE CEREALES, ayant pour activité la commercialisation du maïs et du riz, et par laquelle elle s’est engagée à apurer le solde du compte, valait reconnaissance de dette, l’arrêt attaqué se trouve légalement justifié au regard des seules dispositions de l’article 5 de l’Acte uniforme sus-indiqué. Par voie de conséquence, la Cour d’Appel d’Abidjan, à qui il est reproché d’avoir omis de vérifier si la Société SHANNY CONSULTING avait exécuté toutes ses obligations contractuelles, n’avait pas à effectuer de recherche sur ce point excipé par la requérante.
ARTICLE 5 AUDCG.
Article 1326 DU CODE CIVIL
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A), ARRET N 053/2005 du 15 décembre 2005, Affaire Société COTE D’IVOIRE CEREALES (Conseil : Maître Francis KOUAME KOFFI, Avocat à la Cour) contre Société SHANNY CONSULTING (Conseils : La SCPA AHOUSSOU, KONAN et Associés, Avocats à la Cour), Recueil de jurisprudence de la CCJA, n 6, juin- décembre 2005, p. 35. Le Juris Ohada, n 2/2006, p. 6.
Pourvoi : n 109/2003/ PC du 20 novembre 2003.
LA COUR
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Deuxième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 15 décembre 2005, où étaient présents :
– MM. Antoine Joachim OLIVEIRA, Président, rapporteur;
– Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge;
– Boubacar DICKO, Juge;
– Et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier.
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans sous le numéro 109/2003/PC du 20 novembre 2003 et formé par Maître Francis KOUAME KOFFI, Avocat à la Cour d’Appel d’Abidjan, y demeurant 04, avenue Jean Paul II, Immeuble CCIA, 12e étage, agissant pour le compte de la Société COTE D’IVOIRE CEREALES, société anonyme, ayant son siège à Abidjan, PK 21, route de Dabou, 01BP 2040 Abidjan 01.
En cassation de l’Arrêt n 108 rendu le 04 février 2003 par la Cour d’Appel d’Abidjan, au profit de la Société SHANNY Consulting, Société à responsabilité limitée, sise à Abidjan Plateau, immeuble « SITARAIL », 1er étage, ayant pour Conseils la SCPA AHOUSSOU, KONAN et Associés, Avocats à la Cour d’Appel d’Abidjan, y demeurant 19, boulevard Angoulvant, Résidence Neuilly 1er étage, et dont le dispositif est le suivant :–
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort :
Déclare recevable et bien fondé l’appel relevé par la Société SHANNY CONSULTING.
Infirme le jugement n 178 rendu par le Tribunal de Première Instance de Yopougon en date du 19 février 2001, en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau :
Condamne la Société COTE D’IVOIRE CEREALES à payer à SHANNY CONSULTING, la somme de 24.658.333 FCFA.
Condamne l’intimée aux dépens; ».
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt.
Sur le rapport de Monsieur Antoine Joachim OLIVEIRA, Président
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’Harmonisation du droit des Affaires en Afrique.
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA.
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure, que par contrat en date du 12 octobre 1999, la Société COTE D’IVOIRE CEREALESaconfié à la Société SHANNY CONSULTING, la commercialisation publicitaire et promotionnelle de ses produits pour la période allant d’octobre 1999 au 1er septembre 2000, moyennant le paiement d’un prix forfaitaire de 75 000 000 FCFA; que le 29 septembre 2000, la Société COTE D’IVOIRE CEREALESaadressé à la Société SHANNY CONSULTING, une lettre signée de son Directeur Général, Monsieur Daouda KANTE, et libellée comme suit : » Suite à l’entretien du 08 septembre 2000 entre vous, d’une part, et d’autre part, Monsieur KANTE Daouda, PDG et Madame Diane MAOUA, DGA du groupe DOMAK COTE D’IVOIRE CEREALES, nous avons revu le contenu de notre entretien par rapport à notre situation actuelle. Partant de là, nous venons très respectueusement, vous proposer pour [l’apurement] de votre solde dans nos livres, à savoir : (30 000 000 + 10 000 000. 13.100 000) = 26.900 000 FCFA. Solde que nous comptons régler selon nos possibilités en 12 mois, à compter de fin décembre 2000, soit pour chaque mensualité 2 241.667 FCFA, jusqu’à l’extinction de la dette, qui interviendra fin novembre 2001 »; que la Société COTE D’IVOIRE CEREALES n’ayant pas honoré ses engagements, SHANNY CONSULTING l’a assignée en paiement de la somme de 28.900 000 FCFA devant le Président du Tribunal de Première Instance de Yopougon; que par Ordonnance d’injonction de payer n 92/2001, rendue le 27 mars 2001, ladite juridiction a fait droit à la demande de paiement précitée; que la Société COTE D’IVOIRE CEREALESaformé opposition devant la même juridiction qui, par Jugement n 178 du 19 février 2003,arétracté l’ordonnance susvisée; que sur appel formé par la Société SHANNY CONSULTING contre le Jugement n 178, la Cour d’Appel d’Abidjan a rendu le 04 février 2003, l’Arrêt n 108 dont pourvoi, et qui a infirmé le jugement entrepris et condamné la Société COTE D’IVOIRE CEREALES à payer à la Société SHANNY CONSULTING, la somme de 24.658.133 FCFA.
Sur les deux moyens réunis
Vu l’article 5 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général.
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, d’une part, d’avoir retenu que la lettre en date du 29 septembre 2000, par laquelle la Société COTE D’IVOIRE CEREALESaproposé à la Société SHANNY CONSULTING apurement du solde de leur compte, d’un montant de 26.900 000 FCFA, s’analysait en une reconnaissance de dette, alors que celle-ci n’était pas manuscrite par la Société COTE D’IVOIRE CEREALES et ne comportait la mention « bon et approuvé », comme l’exige l’article 1326 du Code civil; qu’en statuant ainsi, la Cour d’Appel a violé l’article susvisé; d’autre part, d’avoir fait droit à la demande de paiement de la somme de la somme de 26.900 000 francs formulée par la Société SHANNY CONSULTING, sans vérifier si cette dernière avait exécuté toutes ses obligations contractuelles; qu’ainsi, l’arrêt attaqué est sans fondement et doit être cassé.
Mais attendu que l’article 1326 du Code civil ne s’applique pas lorsqu’il s’agit, à l’égard des commerçants, de prouver des actes de commerce, lesquels, conformément à l’article 5 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, se prouvent par tous moyens.
Attendu que par lettre en date du 29 septembre 2000 adressée à la Société SHANNY CONSULTING, la Société COTE D’IVOIRE CEREALES ayant pour activité la commercialisation du maïs et du riz, s’était engagée à apurer le solde du compte existant entre elles; que dès lors, en retenant que ladite lettre valait reconnaissance de dette de la Société COTE D’IVOIRE CEREALES à l’égard de la Société SHANNY CONSULTING, l’Arrêt attaqué se trouve légalement justifié au regard des seules dispositions de l’article 5 de l’Acte uniforme susvisé; que par voie de conséquence, la Cour d’Appel d’Abidjan, à qui il est reproché d’avoir omis de vérifier si la Société SHANNY CONSULTING avait exécuté toutes ses obligations contractuelles, n’avait pas à effectuer de recherche sur ce point excipé par la requérante; d’où il suit que les moyens ne sont pas fondés et doivent être rejetés.
Attendu que la Société COTE D’IVOIRE CEREALES ayant succombé, doit être condamnée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré :
– rejette le pourvoi formé par la Société COTE D’IVOIRE CEREALES contre l’Arrêt n 108 rendu le 04 février 2003 par la Cour d’Appel d’Abidjan;
– la condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
– le Président;
– le Greffier.