J-06-55
RECOUVREMENT DES CREANCES ET VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – MAINLEVEE PARTIELLE – MAINLEVEE NON PREVUE PAR L’AUPSRVE – MAINLEVEE JUSTIFIE (OUI).
Article 62 AUPSRVE
Article 63 AUPSRVE
Un créancier opère entre ses propres mains et, sur autorisation judiciaire, une saisie conservatoire d’une somme au paiement de laquelle il a été condamné au bénéfice du débiteur par décision de justice. Le juge des référés en ordonne la mainlevée partielle. Le créancier conteste cette décision devant la cour d’appel comme consacrant une mesure non prévue par les textes.
Pour la Cour, s’il est constant que les nouvelles dispositions de l’Acte Uniforme, seul applicable, ne réglementent pas expressément la réduction ou cantonnement de la saisie conservatoire, cependant, ainsi que justement relevé par le premier juge, elles ne l’interdisent pas. Elle expose qu’il ne peut être utilement soutenu que le juge des référés ne peut ordonner le cantonnement de la saisie, alors qu’il n’est pas discuté qu’il conserve le pouvoir de rétracter l’autorisation de saisie et d’en ordonner la mainlevée pure et simple, que le cantonnement s’analyse en une rétractation partielle de l’autorisation de saisie et qu’il est de principe constant que « celui qui peut le plus peut le moins ».
COUR D’APPEL DE DAKAR, arrêt N 44 du 19 janvier 2001, AFFAIRE MOULIN SENTENAC (Me MBAYE SENE) C/ MOHAMED HAWILI, ZEN FAWAZ (Me GUEDEL NDIAYE & Associés).
LA COUR
PRESENTS :
– MOUHAMED DIAWARA, Président;
– MAMADOU DEME et MAMADOU DIAKHATE, conseillers. Papa NDIAYE Greffier.
ENTRE :
Les moulins SENTENAC, poursuit et diligences de ses représentants légaux en ses bureaux sis 50, Avenue du Président Lamine GUEYE, élisant domicile en l’étude de Me Mbaye Sène, Avocat à la cour.
Appelante :
Comparant et en concluant par l’organe desdits avocats.
D’une part :
Et MOHAMED HAWILI; demeurant à Dakar.
Monsieur ZEN FAWAZdemeurantà Dakar.
Élisant tous les deux domicile en l’étude de Me Guédel Ndiaye & Associés, avocat à la cour.
Intimés :
Comparant et concluant par l’organe desdits avocats; D’autre part :
Suivant exploit de Maître Elisabeth TINE, Huissier de justice à Dakar, en date du 06/12/1999, la société des Moulins Sentenac a déclaré interjeter appel de l’ordonnance rendue par le tribunal régional Hors Classe de Dakar en son audience du 29/12/1998 et à laquelle siégeaient Monsieur NGOM, Président et avec l’assistance de Mme BOCOUM, Greffier, sans mention d’enregistrement.
Par exploit susvisé, la société des Moulins Sentenac a fait assignation aux sieur Mohamed HAWILI et Zen FAWAZ d’avoir à comparaître et se trouver par-devant la Cour d’Appel de Dakar, Chambre civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 22/01/1999 pour y venir et entendre statuer sur les mérites de leur recours.
Par exploit en date du 11/10/1999 les sieurs Mohamed HAWILI et Zen FAWAZ ont déclaré interjeter appel du même jugement.
Et par exploit les sieurs Mohamed HAWILI et Zen FAWAZ ont fait servir assignation à la société les Moulins Sentenac d’avoir à comparaître et se trouver par-devant la Cour d’Appel de Dakar. Chambre civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 22/01/1999 pour y venir voir et entendre statuer sur les mérites de leur recours.
Sur ces assignations, l’affaire inscrite au rôle de la Cour sous le n 59 et 61de l’année 99 a été appelé à la date pour laquelle ladite assignation avait été servie.
A cette date, la Cour a ordonné la jonction des procédures pour être statué par un seul et même arrêt; puis l’affaire a été fixée au 19/12/1999 à la première chambre, puis renvoyée successivement jusqu’au 17/11/2000 date à laquelle elle a été utilement retenu.
En cette date Mbaye SENA, pour le compte des Moulins Sentenac a déposé des conclusions tendant à ce qu’il plaise à la cour :
Conclusion en date du 10 Avril 1999
Déclare les appels recevables en la forme.
Infirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau.
Vu les articles 62 et 63 de l’acte Uniforme.
Déclarer irrecevable l’action des sieurs Hawili et Fawaz; Subsidiairement.
Vu le difficultés sérieuses soulevées.
Se déclarer incompétente.
Plus subsidiairement.
Vu l’arrêt de la Cour de cassation en date du 17 mars 1999.
Vu la saisine du juge du fond.
Rejeter la demande de cantonnement de la saisie conservatoire comme non fondée.
Condamne les sieurs Hawili et Fawaz aux dépend Conclusions en date du 08 mars 2000.
Adjudant au concluant l’entier bénéfice de ses écritures principales ainsi que celui des présentes.
A leur tour Maître Guédel Ndiaye & Associés, pour le compte de Hawili et Fawaz ont déposé de conclusions tendant à ce qu’il plaise à la cour.
Conclusion en date du 12 Février 1999
Ordonner la jonction des appels interjetés contre l’ordonnance du 29/12/1998 et les déclarer recevables; Ordonner l’ordonnance entreprise.
Cantonner la créance des Moulins Sentenac à la somme de 419 000 000 de francs et les condamner aux dépens d’instance et d’appel dont distraction au profit des avocats soussignés qui le requièrent aux offres de droits.
Conclusions en date du 17 Février 2000 et 08 juin 2000 Déclarer m’appel recevable
Infirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau.
Ordonner la rétraction ou en tout état de cause.
Ordonne la mainlevée de la saisie arrêt pratiquée, si mieux n’aime la Cour de céans la cantonner à la somme de 69 000 000 francs CFA qui constitue la seule créance virtuelle dont peuvent justifier les Moulins Sentenac sur les concluants aux termes du protocole d’accord du 31 juin juillet 1991.
Condamne les Moulins Sentenac aux dépens d’instance et d’appel, dont distraction selon l’usage. Le ministère public a déclaré s’en rapporter à justice; les débats ont été clos.
Sur quoi Monsieur le Président a ordonné le dépôt des pièces du dossier sur le bureau de la Cour qui amis l’affaire en délibéré pour l’arrêt à intervenir à la date du 05/01/2001.
Droit
La cause en cet état présentait à juger les différents points de droit résultant du dossier et des conclusions prises par les parties en cause.
Quid des dépens
A la date du 05/01/2001, le délibéré a été prorogé au 19/01/2001.
Advenue l’audience publique et ordinaire de ce jour 19/01/2001, la cour vidant son délibéré a statué ainsi qu’il suit :
La cour :
Vu les pièces du dossier.
Oui les parties en toutes leurs demandes.
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
Statuant sur les appels formés les 6 et 11janvier 1999 par la Société des Moulins Sentenac d’une part, Vu les pièces du dossier de la procédure Hawili et Fawaz d’autre part, contre l’ordonnance n 1492 rendue la 29 décembre 1998 par le juge des référés du tribunal de Dakar dont le dispositif est ainsi conçu.
Déclarons l’action recevable en la forme.
Au fond entre ces propres mains suivant ordonnance n 2146/98 en date du 18 novembre 1998 à la somme de 420 000 000 francs.
Ordonnons la main-levée partielle.
Ordonnons l’exécution provisoire sur minute et avant enregistrement.
Considérant qu’il échet de déclarer ces appels recevables en la forme et d’en ordonner la jonction.
Au fond
Considérant que se disant créanciers des sieurs Hawili et Fawaz pour la somme de 1.259 000 000 francs, les Moulins Sentenac, sur autorisation du Président du Tribunal Régional de Dakar ont procédé à une saisie conservatoire entre leurs propres mains, de la somme de 839 000 000 francs en paiement de laquelle ils ont été condamnés au bénéfice des mêmes Hawili et Fawaz par l’arrêt de la cour de céans en date du 14 mars 1998.
Que sur saisine de Hawili et Fawaz, le juge des référés a cantonné cette saisie à la somme de 420 000 000 francs par l’ordonnance présentement déférée à la Cour.
Considérant que toutes les parties concluent à l’infirmation de cette ordonnance.
Que pour ce faire, les sieurs Hawili et Fawaz font valoir que le premier Juge a tenu pour constante la créance de 1.259 000 000 francs excipée par les Moulins Sentenac, qui n’aurait pas été contestée. Alors qu’ils ont essentiellement contesté la prétendue créance des Moulins Sentenec, documents à l’appui, qu’en effet, ladite créance qui résulterait le l’article 4 du protocole de cession d’actions du 31 juillet 1991, ne pourrait en aucun cas excéder la somme de 419 000 000 francs arrêté conventionnellement.
Que ne reconnaissant devoir que cette dernière somme, ils concluent par écritures du 12 février 1999 à l’infirmation de l’ordonnance et au cantonnement de la saisie à ce moment.
Que revenant sur cette demande suivant écritures des 17 février et 8 juin 2000, ils soutiennent que les Moulins ne justifient d’aucun principe de créance et demandent à titre principal l’infirmation de l’ordonnance entreprise et la rétraction de l’ordonnance n 2146/98 du 18 novembre 1998 qui a autorisé la saisie, et à titre subsidiaire le cantonnement de la saisie à la somme de 69 000 000 francs qui constituerait la seule créance virtuelle dont peuvent justifier les Moulins Sentenac aux termes du protocole d’accord du 31 juillet 1991.
Considérant que pour conclure également à l’infirmation de la même ordonnance, les moulins Sentenac soutiennent que :
– la demande en mainlevée partielle de la saisie sur le fondement des articles 62 et 63 de l’acte Uniforme portant sur les Procédures Simplifiées de Recouvrement et les Voies d’Exécution (A.U) serait irrecevable; que lesdites dispositions ne prévoiraient en effet que la mainlevée pure et simple de la saisie conservatoire pour inobservation de prescriptions des articles 54, 55, 59, 60 et 61du même A.U.; que dès lors, les prétentions de Hawili et Fawaz sur ce point seraient irrecevables;
– le juge de référés serait incompétent pour statuer sur les demandes de Hawili et Fawaz en raison de l’existence en la cause de difficultés sérieuses; que la négociation partielle de la créance par Hawili et Fawaz et la question de la partie du franc CFA applicable qui serait l’objet de contestation en cause constitueraient autant, de problèmes de fond dépassant le champ de compétence du juge des référés;
– L’arrêt de la cour de cassation du 17 mars 1999 ayant cassé en toutes ses dispositions l’arrêt du 14 mai 1998 dont se prévalaient Hawili et Fawaz pour demander le cantonnement de la saisie, cette demande ne pourrait plus prospérer.
Sur ce
Sur la recevabilité de la demande de main levée partielle sur le fondement des articles 62 et 63 de l’AU et les pouvoirs du juge des référés
Considérant que pour soutenir l’irrecevabilité de l’action, les Moulins Sentenac rappellent que l’article 62 de l’AU dispose qu e « même lorsqu’une autorisation n’est pas requise, la juridiction compétente peut, à tout moment, sur la demande du débiteur, le créancier entendu ou appelé, donner mainlevée de la mesure conservatoire si le saisissant ne rapporte pas la preuve que les conditions prescrites par les articles 54, 55, 59, 60 et 61ci-dessus sont réunies »; que dès lors, la saisine du juge des référés sur le fondement des dispositions de l’article 62 ne pourrait porter que sur la vérification du respect des prescriptions des articles 54, 55, 59 et 60 et 61énumère, en vue d’une main-levée pure et simple, à l’exclusion d’une mainlevée partielle.
Considérant qu’il convient de relever que le moyen soulevé tient non à une question de recevabilité de l’action. Mais à celle des pouvoirs ou de la compétence du juge des référés.
Considérant, cela précisé, qu’il est constant que les nouvelles dispositions de L’AU, seule applicable, ne réglementent pas expressément, à l’instar de l’article 403 ancien du CPC la réduction ou cantonnement de la saisie conservatoire.
Que cependant, ainsi que justement relevé parle premier juge, elles ne l’interdisent pas.
Considérant qu’il ne peut être utilement soutenu que par le juge des référés ne peut ordonner le cantonnement de la saisie, alors qu’il n’est pas discuté qu’il conserve le pouvoir de rétracter l’autorisation de saisie, notamment pour violation de l’article 54, et d’en ordonner la mainlevée pure et simple, que le cantonnement s’analyse en une simple rétraction partielle de l’autorisation de saisie et qu’il est de principe constant « celui qui peut le plus peut le moins ».
Que le moyen s’avère mal fondé.
Sur la mainlevée ou le cantonnement de la saisie
Considérant qu’il résulte des qualités du jugement entrepris que devant le premier juge, les sieurs Hawili et Fawaz contestaient la créance de 1.259 000 000 francs pour laquelle la saisie à été autorisée et effectuée, ne reconnaissant devoir qu’une somme de 419 000 000 francs à concurrence de laquelle ils demandaient le cantonnement de la saisie.
Qu’en cause d’appel, ils ont réitéré les mêmes prétentions suivants écritures du 12 Février 1999, avant de contester devoir une quelconque somme, et conclure à titre principal à la main levée pure et simple de la saisie, et à titre subsidiaire à son cantonnement à la somme de 69 000 000 francs qui constituerait la seule créance virtuelle dont peuvent justifier les Moulins Sentenac.
Considérant que pour statuer ainsi qu’il l’a fait, le premier Juge a tenu pour constantes la créance excipée par les Moulins Sentenac. Ainsi que celle de 839 000 000 francs invoquée par les saisis, puis, procédant à une compensation à concurrence de la plus petite des créances, il a cantonné la saisie au reliquat de 420 000 000 Francs.
Considérant qu’il a été produit aux débats l’arrêt du 17 mars 1999 par lequel la Cour de cassation a cassé l’arrêt du 14 mars 1998 dont se prévalait Hawili et Fawaz.
Que les motifs du premier juges tirés de la compensation ne peuvent plus prospérer.
Considérant cela étant, que pour contester la créances des Moulins Sentenac et demander la mainlevée ou le cantonnement de la saisie, les sieurs Hawili et Fawaz invitent la cour à une interprétation du protocole de cession d’action du 31 juillet 1991.
Que nonobstant les dispositions de l’article 820-9 du code de procédure civile visées par le premier juge, il échet de juger que cette interprétation outrepasse les pouvoirs du juge des référés eu égard aux dispositions de l’article 250 du même code.
Considérant qu’en définitive il échet d’infirmer l’ordonnance entreprise et de se déclarer incompétent en application de l’article 250 du CPC.
Par ces motifs
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référés en dernier ressort.
Déclare les appels recevables en la forme.
En ordonne la jonction.
Au fond
Infirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.
Se déclare incompétent en application de l’article 250 du code de procédure civile.
Condamne Hawili et Fawaz aux entiers dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la cour de Dakar, Chambre Civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 19 Janvier 2001séant au Palais de justice de ladite ville Bloc des Madeleines à laquelle siégeaient Monsieur Mouhamadou DIAWARA, président.
Messieurs Mamadou DEME, et Mamadou DIAKHATE Conseillers et avec l’assistance de Me Papa NDIYE, Greffier. Et ont signé le présent arrêt :
Le Président et le Greffier.