J-06-68
VOIES D’EXECUTION – SAISIE-ATTRIBUTION DE CREANCES – SAISIE DE SOLDES DE COMPTES ENTRE LES MAINS D’UN TIERS – TIERS DETENTEUR ÉTABLISSEMENT BANCAIRE – OBLIGATION DU TIERS DETENTEUR – DECLARATION DU TIERS SAISI – OPERATIONS ANTERIEURES AFFECTANT LE SOLDE DES COMPTES – DIMINUTION DU SOLDE DES COMPTES – DEFAUT DE PAIEMENT PAR LE TIERS SAISI – DIFFICULTE D’EXECUTION (OUI) – JURIDICTION COMPETENTE – COMPETENCE DE LA COUR D’APPEL (NON).
Une saisie-attribution a été pratiquée sur les comptes du débiteur entre les mains d’un tiers détenteur qui est un établissement banCAIRE. a la fin de la journée, le solde desdits comptes a changé du fait de l’imputation de retraits d’espèces effectués par le débiteur quelques instants avant la saisie. En référé, le tiers saisi est condamné à payer au créancier saisissant, majorée de dommages intérêts, la somme initialement déclarée mais qui n’est plus disponible. Il fait appel de cette décision en estimant que le juge des référés a tranché sur une question de fond échappant à sa compétence, en se prononçant sur sa responsabilité et en ordonnant le paiement des dommages et intérêts.
Pour la Cour d’appel, ce litige né du refus, par le tiers saisi, de payer au créancier saisissant la totalité de la somme qu’il avait lui-même déclaré détenir pour le compte du débiteur, est une difficulté d’exécution. C’est en effet au cours de la procédure d’exécution que le Président du tribunal, juridiction compétente, a rendu la décision querellée. Dans ces conditions, la Cour se déclare non compétente pour connaître en deuxième ressort d’une difficulté d’exécution.
Article 156 AUPSRVE
Article 161 AUPSRVE
(COUR D’APPEL D’ABIDJAN, ARRET CONTRADICTOIRE, N 898 du 25 juillet 2000, AFFAIRE : BANQUE 0F AFRICA (Me AGNES OUANGUI C/ BHCI & IGB (Mes KONE & KOUASSI).
LA COUR
La Cour d’Appel d’Abidjan, Chambre Civile et Commerciale, séant au Palais de Justice de ladite ville, en son audience publique ordinaire du mardi vingt cinq juillet deux mille, à laquelle siégeaient :
– Monsieur AGNINI YOUSSOUF, Président de Chambre, Président;
– Mr. GBAYORO MATHIEU et Mr DJAMA EDMOND, CONSEILLERS à la cour, MEMBRES;
– Avec l’assistance de Maître IRIE ALAIN, Greffier.
A rendu l’arrêt dont la teneur suit dans la cause; ENTRE :
La Banque Of Africa Côte d’Ivoire dite B.O.A. société anonyme de droit ivoirien, RCI 48889 Abidjan dont le siège social est 11, Avenue JOSEPH ANOMA, immeuble SGML, 01BP 4132 01, prise en la personne de son DG M. JEAN-PIERRE GALIBERT, demeurant à Abidjan, Riviera 11101BP 4132 ABIDJAN 01.
APPELANTE Représentée et concluant par Maître AGNES OUANGUI, Avocat à la Cour, son conseil.
D’UNE PART.
Et.
1) La Banque de l’Habitait de Côte-d’Ivoire dite BHCI S.A. sise à Abidjan 22 Avenue JOSEPH ANOMA 01BP 2325 ABIDJAN 01, agissant pour son D.G. Mr COULIBALY LACINE.
2) La société Ivoirienne de Géobeton dite IGB, sise à Abidjan, immeuble GRUBER, Avenue Noguès IGB, sise à Abidjan 01, prise en personne de son gérant Mr. ASSALE ADOU demeurant à Abidjan.
INTIMEES.
Représentées et concluant par maîtres KONE et KOUASSI, Avocats à la Cour, leurs conseils.
D’AUTRE PART.
Sans que les présentes qualités puissent nuire, ni préjudicier en quoi que ce soit aux droits et intérêts respectifs des parties en cause, mais au contraire et sous les plus expresses réserves des faits et de droit.
FAITS :
La juridiction Présidentielle du tribunal d’Abidjan statuant en la cause, en matière civile a rendu le 11avril 2000 une ordonnance de référé n 1324 aux qualités de laquelle il convient de se reporter et dont le dispositif est ci-dessous résumé.
Par exploit en date du mardi 30 mai 2000 de Maître NICOLAS AKGO, Huissier de justice à Abidjan, la Banque of Africa a déclaré interjeter appel de l’ordonnance sus-énoncée et a, par le même exploit assigné la Banque de l’Habitat de Côte-d’Ivoire dite BHCI et la société Ivoirienne de Geobeton dite IGB à comparaître par devant la Cour de ce siège à l’audience du mardi 13 juin 2000 pour entendre, annuler ou infirmer ladite ordonnance.
Sur cette assignation, la cause a été inscrite au rôle général du greffe de la Cour sous le N 598/2000 de l’an 2000.
Appelée à l’audience sus-indiquée, la cause après des renvois a été utilement retenue le 11 juillet 2000 sur les pièces, conclusions écrites et orales des parties.
DROIT : En cet état, la cause présentait à juger les points de droit résultant des pièces, des conclusions écrites et orales des parties.
La Cour amis l’affaire en délibéré pour rendre son arrêt à l’audience du 18 juillet 2000, délibéré qui a été prorogé jusqu’au 25 juillet 2000.
Advenue de l’audience de ce jour, 25 juillet 2000, la Cour vidant son délibéré conformément à la loi, a rendu l’arrêt suivant :
LA COUR
Vu les pièces du procès.
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motif ci-après.
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant un exploit d’Huissier en date du 30 mai 2000 portant ajournement d’audience au 13 juin 2000, la Banque Of Africa Côte d’ivoire dite BOA société anonyme, représentée par son Directeur Général Jean-Pierre Galibert, demeurant à Abidjan et ayant mous conseil Maîtres AGNES OUANGUIarelevé appel de l’ordonnance de référé N 1324 du 11avril 2000 de la juridiction Présidentielle du Tribunal d’Abidjan qui l’a condamnée à payer à la Banque de l’Habitat de Côte d’Ivoire dite BHCI la somme de 17.302 085 francs CFA soit de 100 000 francs par jour de retard à compter du prononcé de.
La Banque Of Africa de Côte d’ivoire explique avoir comme client la Société Geo-Beton qui a ouvert dans ses comptes; l’un de dépôt à terme d’un montant de vingt millions (20 000 000 F) et l’autre, un compte Courant bénéficiant de vingt millions (20 000 000 FCFA).
Elle déclare que le 2 août 1999 à 16 heures a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptabilités de géobéton.
Qu’à l’occasion de cette saisie, la BOAa fait la déclaration suivante :
– compte Courant : Débiteur de 302 085 FCFA;
– compte de dépôt à terme : créditeur de 20 000 000 FCFA.
Or dans la journée du 2 août 1999 la société géobéton avait procédé à un retrait de 17 000 000 F CFA que le système informatique de la Banque n’a pris en compte qu’en fin de journée de sorte que le solde du compte Courant a été affecté par ce retrait pour devenir un débit de 17 302 085 FCFA.
Qu’ainsi, lorsque l’huissier instrumentaire s’est présenté avec un certificat de non contestation le 28 septembre 1999, la Banque Of Africa a réglé la somme de 2.697.915 francs représentant la différence entre le solde débiteur du compte Courant et le dépôt à terme de 20 000 000 FCFA.
Mais la BHCI, à la suite d’une assignation par exploit du 3 janvier 2000,ademandé et obtenu la condamnation de la Banque Of Africa à la lui payer la somme de 17.302 085 francs sous astreinte de 100 000 francs par jour de retard à compter du prononcé de la décision.
La Banque Of Africa soutient d’une part que la signification de l’ordonnance ayant été effectuée le 25 mai 2000, son appel est recevable en application de l’article 225 du code de procédure civile.
Que d’autre part, elle estime que contrairement à sa compétence, le juge des référés a tranché sur le fond en se prononçant sur la responsabilité de la Banque Of Africa et en ordonnant le paiement des dommages-intérêts.
Que la décision a un caractère définitif et non provisoire; Que cela constitue une violation de l’article 156 alinéa 2 de l’acte uniforme du traité OHADA.
« toute déclaration inexacte, incomplète ou tardive expose le tiers saisi à être condamné au paiement des causes de la saisie sans préjudice d’une condamnation au paiement de dommages-intérêts ».
Que la question de la responsabilité de la Banque Of Africa est une question de fond qui échappe à la compétence du juge des référés; que celui-ci aurait soulever d’office son incompétence : qu’à défaut de l’avoir fait, sa décision encourt la nullité.
La Banque Of Africa soutient subsidiairement que la BHCIa violé les dispositions de l’article 161de l’acte uniforme du traité OHADA en la faisant condamner au paiement de la somme de 17.302 085 F CFA sous astreinte de 100 000 francs par jour de retard.
Elle explique qu’en application du texte susvisé, le solde des comptes qu’elle détient pour le compte de la Société Géo-Béton peut être affecté à l’avantage ou au préjudice du saisissant par les opérations antérieures à la saisie; qu’en l’espèce la saisie-attribution a été pratiquée le 2 août 1999 à 16 heures 30 minutes alors que le retrait effectué par la société Géo Béton de la somme de 17 000 000 F CFAa eu lieu dans la matinée du 2 août 19999 par chèque n 0813 608 et le paiement a été fait en espèce que le retrait de 17 000 000 FCFA n’a été pris en compte à l’information qu’en fin de journée de sorte qu’au moment de la saisie, ce retrait n’était pas visible à l’écran informatique; que c’est à juste titre que la Banque Of Africa a déclaré ne détenir que 2.697.915 F après imputation des opérations de la journée; que la Banque Of Africa produit le relevé de compte de la Société Géo-Béton et son livre journalier pour établir l’opération de retrait espèce faite le matin alors que la saisie est intervenus l’après-midi.
La Banque Of Africa estime qu’elle a été condamnée à tort et demande alors l’infirmation de l’ordonnance.
En réplique la Banque pour l’Habitat en Côte-d’Ivoire dite BHCI, par ses conseils KONE MAMADOU et KOUASSI N’GUESSAN soulève l’incompétence de la Cour d’Appel et l’irrecevabilité de l’appel.
Elle explique en premier lieu que le litige qui oppose la Banque Of Africa et la Banque de l’habitat est relatif au refus de la Banque Of Africa de payer à la Banque de l’habitat la totalité de la somme de 20 000 000 francs CFA que la Banque Of Africa a déclaré détenir pour le compte de la Société Géo-Béton lors de la signification d’une saisie-attribution pratiquée entre ses mains par exploit du 2 août 1999.
Que la saisie-attribution pratiquée en vertu d’une décision exécutoire, est une procédure d’exécution prévue au titre IV de l’acte uniforme OHADA.
Que l’exploit d’assignation signifié à la Banque Of Africa le 3 janvier 2000 et l’ordonnance critiquée précisent qu’il s’agit d’une difficulté d’exécution de l’ordonnance d’injonction de payer en vertu de laquelle la saisie-attribution de créance a été pratiquée, relevant de la compétence de la juridiction des référés comme le prévoit l’article 221du code de procédure civile que la Cour d’Appel est incompétente pour statuer sur l’appel dont elle est saisie et l’appel est par conséquent irrecevable pour inobservation des conditions de forme et de délai.
MOTIFS DE L’ARRET
Sur la forme de l’arrêt
Les différentes parties ayant conclu par leurs conseils, il convient de statuer par un arrêt contradictoire.
Sur la recevabilité de l’appel
L’ordonnance querellée a été signifiée le 25 mai 2000 et l’appela été fait par exploit d’huissier du 30 mai 2000.
En application de l’article 225 du code de procédure civile l’appel de la Banque Of Africa est recevable.
Sur le fond
Le litige qui oppose la Banque de l’habitat en Côte d’ivoire à la Banque Of Africa est consécutif au refus de la Banque Of Africa de payer à la Banque de l’habitat la totalité de la somme ce vingt millions de francs que la Banque Of Africa a déclaré détenir pour le compte de la société Géo-Béton lors de la signification d’une saisie-attribution pratiquée entre ses mains le 2 août 1999.
Ce litige est donc une difficulté d’exécution étant donné qu’il est né au cours d’une procédure d’exécution.
En outre, l’assignation initiée par la BHCI pour voir contraindre la Banque Of Africa en date du 3 janvier 2000 est sans équivoque et la requête pour être autorisée à assignera été adressée au Président du Tribunal qui constitue en la matière une juridiction.
Ainsi l’appel d’une telle décision rendue par le Président du Tribunal ne peut être porté devant la Cour d’Appel de ce siège qui est incompétente pour connaître en deuxième ressort d’une difficulté d’exécution.
En conséquence, la Cour décline sa compétence; Sur les dépens.
La Banque Of Africa ayant succombé, il convient de la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale, en dernier ressort.
EN LA FORME
Reçoit la Banque Of Africa en son appel relevé de l’ordonnance du 11avril 2000.
AU FOND
Déclare la Cour d’Appel incompétente.
Condamne la Banque 0f Africa aux dépens.
En foi de quoi, le présent arrêta été prononcé publiquement par la Cour d’Appel d’Abidjan (Côte-D’Ivoire) les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.