J-06-74
RECOUVREMENT DES CREANCES ET VOIES D’EXECUTION – PAIEMENT PARTIEL – IMPUTATION SUR LE PRINCIPAL OU SUR LES INTERETS.
Une banque en liquidation obtient du Tribunal de Première Instance la condamnation, au principal, d’une société débitrice lui ayant effectué des paiements partiels, à un montant représentant plus du double de la somme prêtée.
Sur recours de la société débitrice, la Cour d’appel annule le jugement querellé au motif que, si en vertu de l’article 1254 du Code civil, il appartient au créancier de décider si les paiements partiels effectués doivent s’imputer sur le principal ou sur les intérêts, il résulte de l’article 39 al. 2 in fine de l’Acte Uniforme portant procédures simplifiées et voies d’exécution que cette prérogative appartient désormais aux juridictions saisies qui peuvent en décider en considération tant de la situation du débiteur que du créancier; que s’agissant d’une société débitrice qui, en près de vingt ans n’a pas acquitté le cinquième de sa dette, la sagesse commande que le créancier puisse recouvrer d’abord ses créances en principal, avant de penser au recouvrement probable d’intérêts.
En application de l’article 39 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des Procédures Simplifiées de recouvrement, il appartient aux juridictions de décider, en considération de la situation tant du débiteur que du créancier, si les paiements partiels effectués doivent s’imputer sur le principal ou sur les intérêts.
Article 39 AUPSRVE
(COUR D’APPEL DE COTONOU ARRET N 209/2001du 12 juillet 2001, AFFAIRE Sté Générale de Commerce Industrie et Services « S.G.C.I.S » C/ Banque béninoise de Développement (BBD).
LA COUR
FAITS ET PROCEDURE
Par exploit en date du 07 mars 1994, la Banque Béninoise de Développement (BBD) Liquidation, assister de Maître KEKE AHOLOU,aattrait devant le tribunal de céans, la société Général de Commerce, Industrie et Service (GCIS) dont le siège est à Cotonou, au paiement de la somme de francs CFA 277.893 068 en principal, et 75 000 000 à titre de dommages-intérêts et ce, par un jugement assortie de l’exécution provisoire.
Statuant sur cette requête, le Tribunal des céans a rendu le jugement n 274/2eme C.Com du 05 décembre 1996 dont le dispositif est formulé ci-après :
– « -L’y déclare entièrement fondée.
Condamne la société Générale de Commerce Industrie et Service (GCIS) à payer à la BBD Liquidation la somme de francs CFA deux cent soixante dix sept millions huit cent quatre vingt treize mille soixante huit (277.893 068) en principal, outre les intérêts de droit pour compter du 07 mars 1994, date de l’assignation.
La condamne en outre au paiement de la somme de francs CFA huit millions (8 000 000) à titre de dommages-intérêts.
Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement nonobstant toutes voies de recours.
Condamne la société GCIS aux entiers dépens.
Suivant exploit en date à Cotonou du 20 janvier 1997, la société Générale de Commerce d’Industrie et Service (GCIS), assistée de Maître Edgar-Yves MONNOU,arelevé appel de cette décision avec assignation en défense à exécution provisoire.
IV DISCUSSION
A En la forme
Attendu que l’appel relevé le 20 janvier 1997 par la Société GCIS contre le jugement n0274/2e C. Com. Rendu le 05 décembre 1996 par le Tribunal de céans est recevable pour avoir respecté le délai et la forme prescrits par la loi.
Attendu que l’appel incident relevé par la BBD est aussi recevable en raison de son respect des prescriptions de la loi en la matière.
B Au fond
1) Sur la qualification de la décision entreprise
Attendu que la décision entreprise a été qualifiée de jugement réputé contradictoire en raison de ce que la défenderesse, la Société GCIS était représentée en la cause par un Conseil « qui n’a pas cru devoir conclure en dépit des multiples renvois concédés à cet effet ».
Attendu cependant que l’article 19 du Code de Procédure Civile dit BOUVENET prescrit que si au jour indiqué par la citation, l’une des parties ne comparaît pas, la cause sera jugée par défaut.
Qu’en application de cette disposition il a été jugé que lorsqu’une partie, sans produire ses moyens de défense s’est bornée à demander le renvoi de la cause et ne comparaît pas à l’audience à laquelle la cause a été renvoyée, « le jugement à intervenir est un jugement par défaut » ;caOF, 23-4¬1937.P. 1939.1-52.
Que c’est donc en méconnaissance de tout ce qui précède que la décision querellée a été qualifiée de « réputé contradictoire » par le premier juge.
Qu’il y a par conséquent lieu de l’annuler pour évoquer et statuer à nouveau afin de dire qu’elle est rendue par défaut à l’égard de la Société GCIS.
2) Sur la créance principale en cause
Attendu qu’il ressort clairement des pièces du dossier que pour couvrir un crédit mis à sa disposition par la BBD, la société GCISasouscrit cinq (05) billets à ordre de vingt cinq millions (25 000 000) F CFA chacun.
Que la BBD était donc créancière sur ladite Société de la somme de (125 000 000) F CFA.
Que la GCIS n’a pas respecté les échéances de remboursement portées sur lesdites traites et qui étaient de 30/09/87, 30/12/87, 30/02/88, et 30/09/88.
Qu’elle a cependant eu à faire des versements au profit de sa créancière à concurrence des mandats aux dates ci-après :
– 28/11/1988..11 000 000 F CFA;
– 12/01/ 1989.. 2 000 000 F CFA;
– 29/01/1989.. 500 000 F CFA.
Qu’il résulte de l’article 2 in fine de la disposition suscitée ( un passage manquant?) que, si en vertu de l’article 1254 du Code Civil il appartient au créancier de décider si les paiement partiels effectués doivent s’imputer sur le principal ou sur les intérêts, cette prérogative appartient désormais aux juridictions saisies qui peuvent en décider en considération de la situation tant du débiteur que du créancier.
Que s’agissant d’une Société débitrice qui, en près de vingt (20) ans n’a pas acquitté le cinquième de sa dette, la sagesse commande que la BCB-Liquidation puisse recouvrer d’abord ses créances en principal, avant de penser au recouvrement probable d’intérêts.
Qu’il y adonc lieu de dire que les règlements partiels de 24.200 000 F CFA sera imputé sur le principal de francs CFA 125 000 000 et de condamner les appelantes à payer à la BBD-Liquidation d’abord le reliquat de francs CFA 100.500 000; la poursuite du paiement des intérêts moratoires devant intervenir après.
3) Sur le paiement des dommages intérêts au profit de l’ex BBD
Attendu qu’estimant insuffisants les 8 000 000 F CFA que lui a accordés le premier juge, l’ex-BBD réclame sa revalorisation par référence aux termes d’une clause insérée dans une convention établie entre elle et un tiers.
Attendu que sur ce point la Cour estime pertinente l’analyse du Ministère Public, l’adopte par conséquent et reconduit la condamnation prononcée par le premier juge.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale, en appel et en dernier ressort.
En la forme
Déclare recevable les appels principal et incident élevés dans la présente procédure.
Au fond
Annule le jugement querellé pour violation de la loi; Évoquant et statuant à nouveau :
Dit que ledit jugement à été rendu par défaut à l’égard de la Société GCIS.
Dit que la Société GCIS est débitrice d’une somme principale de 125 000 000. F CFA vis à vis de l’ex BBD.
Dit que la somme de 24.500 000 F CFA payée par l’appelante s’imputera d’abord sur ce capital.
La condamne à payer à l’ex BBD des intérêts moratoires au taux légal sur le reliquat dû après chacun des paiements partiels opérés.
La condamne à payer à l’ex BBD la somme de 8 000 000 F CFA à titre de dommages et intérêts.
Déboute les parties de leurs demandes plus larges ou contraires.
Condamne la Société GCIS aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de Cotonou mes jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le PRESIDENT et le GREFFIER.