J-06-76
RECOUVREMENT DES CREANCES ET VOIES D’EXECUTION– SAISIE CONSERVATOIRE – PROPRIETE DE L’OBJET –CONVERSION EN SAISIE-ATTRIBUTION – VALIDITE (NON).
Pour sauvegarder sa créance résultant de l’inexécution par le fournisseur d’un contrat de livraison de blé, un acquéreur pratique, suivant ordonnance sur requête, une saisie conservatoire de créances entre les mains du Greffier en Chef du Tribunal de Première Instance sur les sommes et chèques que celui-ci détient pour le compte du fournisseur. L’acquéreur fait valider la saisie par le Tribunal de Première Instance et la fait convertir en saisie-exécution.
Les seconds juges infirment le jugement en toutes ses dispositions, au motif qu’on ne peut valablement saisir que ce qui appartient en propre au débiteur. Alors même que l’appelant n’a pas conclu, la Cour relève qu’elle a connu plusieurs procédures opposant le fournisseur à d’autres plaideurs, desquelles il est ressorti que le droit de propriété du fournisseur n’est pas définitivement établi sur les sacs de farine de blé dont le produit de la vente a été consignée au Greffe; qu’une consignation est soit une mesure de garantie prise au profit de créanciers en attendant la répartition qui doit être faite entre eux, soit une mesure destinée à assurer l’exécution d’une obligation qui n’existe pas encore, mais est susceptible de prendre naissance.
SOMMAIRE D’ARRET.
La consignation est, soit une mesure de garantie prise par le Juge au profit de créanciers en attendant la répartition qui doit être faite entre eux, soit une mesure de précaution destinée à assurer, éventuellement, l’exécution d’une obligation qui n’existe pas encore mais est susceptible de naître.
Article 50 AUPSRVE
(COUR D’APPEL DE COTONOU, ARRÊT N 130/2000 du 04 mai 2000, AFFAIRE Société SOCOSER C/ Société DAMEL-SARL ).
LA COUR
I FAITS ET PROCEDURE
Il ressort de l’exposé des faits présenté dans le dossier que, Courant mars 1997, la société DAMELa passé commande de 3965 sacs de blé à la société SOCOSER.
Le prix de la marchandise ainsi commandée, soit 55 510 000 Fcfa a été entièrement libéré par l’appelante alors que le produit devrait être livré selon le contrat depuis le 05 mai 1997.
Mais, jusqu’à présent, semble t-il, la SOCOSER n’a ni livré la marchandise, ni restitué les sommes indûment perçues, alors qu’elle a reçu livraison de 8 000 sacs de farine de blé par le navire caroline DELMAS arrivé au port de cotonou.
Malgré toutes les démarches entreprises à son endroit, la SOCOSER n’a pas remboursé la somme due.
Pour sauvegarder sa créance, la société DAMELa fait procéder à la saisie conservatoire entre les mains du Greffier en Chef du Tribunal de première Instance de Cotonou, « de toutes sommes, deniers ou objets quelconques de valeur appartenant à la SOCOSER « par ordonnance n 35/99 rendue à pied de requête le 11Janvier 1999.
Par exploit en date du 08 mars 1999, la société DAMEL SARLaattrait devant le Tribunal de Cotonou, la société SOCOSER pour :
– «. S’entendre condamner au paiement de l’intégralité de la somme de 55 510 000 F CFA sans préjudice des intérêts, droits de recouvrement frais et honoraires de poursuite.
Voir déclare bonne et valable la saisie-conservatoire des créances pratiquées à son encontre ».
Par jugement de défaut n 045/1ère Ch. Com rendu le 10 mai 1999, le juge statuant en matière commerciale, vidant son délibéré, a statué en ces termes :
– «. Condamne la Société SOCOSER et son directeur Monsieur Amadou DIALLO à payer à la société DAMEL SARL la somme de 55 510 000 F CFA.
Déclare régulièrement et valable la saisie conservatoire des créances pratiquées à son encontre le 10 février 1999.
La convertit en saisie-exécution paiement de la créance en principal, intérêts, frais et tous accessoires.
Condamne la Société SOCOSER et son directeur Monsieur Amadou Diallo aux entiers dépends ».
C’est de cette décision que la Société SOCOSER SARLarelevé appel par acte en date du 24 juin 1999.
Il MOYENS DE L’APPELANTE
Attendu que la société SOCOSER n’a pas produit ses moyens de défense, notamment ses conclusions pour soutenir son action.
Qu’il y a lieu de statuer en l’état par défaut à son encontre.
III. MOYENS DE L’INTIMEE
Attendu que pour le compte de la Société DAMEL SARL, Maître Sévérin HOUNNOU son Conseil a, dans ses conclusions d’appel en date du 28 février 1999, développée qu’il est acquis au débat que le Société DAMEL est créancière de la société SOCOSER de la somme F CFA 55 510 000.
Que cette somme représente le prix d’une commande de 3.965 sacs de farine de blé.
Que la preuve de la créance de la Société DAMEL sur SOCOSER résulte tant du reçu n 29 en date du 20 mars 1997 que de la réponse à la sommation de payer qui a été servie à la débitrice suivant exploit en date du 19 septembre 1997.
Qu’en état de la justification de la créance de la Société DAMEL, il appartient à la Société SOCOSER de rapporter la preuve de l’extinction de sa dette.
Que SOCOSER sera bien en peine de rapporter pareille preuve dans la mesure où la marchandise n’est pas livrée et le prix d’achat n’a pas été remboursé.
Qu’il suit incontestablement de ce qui précède que SOCOSER est débitrice envers elle de la somme principale de F CFA 55 510 000 outre les intérêts de droit et les frais.
Qu’en condamnant la société SOCOSER au paiement de cette somme, le premier Juge a fait une saine et bonne appréciation des faits de la cause.
Qu’il y adonc de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société SOCOSER à lui payer la somme de F CFA 55 510 000.
Que tout créancier justifiant d’un principe de créance peur pratiquer saisie sur les biens du débiteur.
Qu’il en est assurément ainsi dans la mesure où le patrimoine du débiteur est le gage de ses créanciers.
Qu’en l’espèce, plus qu’un simple principe de créance, elle détient sur la société SOCOSER une créance certaine, liquide et exigible.
Qu’aux termes de l’article 50 de l’Acte uniforme portant Organisation des Procédures simplifiées de recouvrement et des Voies d’Exécution : « les saisies peuvent porter sur tous les biens appartenant au débiteur alors même qu’ils seraient détenus par des tiers ».
Qu’elles peuvent également porter sur les créances conditionnelles, à terme ou à exécution successive.
Que pour obtenir paiement de sa créance, elle a pratiqué saisie conservatoire de créance entre les mains du Greffier en Chef du Tribunal de Première Instance de Cotonou sur les sommes ou chèque qu’il détient pour le compte de la SOCOSER.
Que cette saisie a été dénoncé à l’appelante suivant exploit en date du 17 février 1999.
Qu’une telle saisie est régulière en la forme et juste au fond.
Que c’est donc à bon droit que le Juge a ordonné sa validation et sa conversion en saisie-exécution.
Qu’il y adonc lieur de confirmer le jugement querellé.
IV. DISCUSSION
A En la forme
Attendu que la société SOCOSERarelevé appel contre le jugement n 045/1èfe Ch. Com. en date du 10 mai 199 dans les forme et délai de la loi.
Qu’il y a lieu de l’y déclarer recevable.
Attendu que selon la jurisprudence, lorsque le demandeur ne comparaît pas, le Tribunal doit rendre un jugement de défaut qui implique rejet de la demande et est susceptible d’opposition.
Qu’il y a lieu de constater le désintérêt de l’appelante pour cette procédure dont elle a pourtant pris l’initiative, et de prononcer par défaut à son égard, la décision à intervenir.
B Au fond
Attendu que la société DAMEL SARL sollicite la confirmation du jugement n 45 rendu le 10 mai 1999 par le Tribunal des céans statuant en matière commerciale.
Que ledit jugement a condamné la société SOCOSER et son Directeur Amadou DIALLO à payer à la société DAMEL SARL la somme de 55 510 000 francs CFA, déclare régulière et valable la saisie conservatoire des créance pratiquées à son encontre le 10 février 1999, et l’a convertie en saisie exécution.
Mais attendu que s’il est établi que la créance de la société DAMEL SARL sur la société SOCOSER est réelle, il n’est pas cependant établi à l’étape actuelle que les sommes d’argent consignées entre les mains du Greffier en Chef du Tribunal de Première Instance de Cotonou appartiennent à la société SOCOSER.
Qu’en effet, la cour des céans a connu de plusieurs procédures opposant la société SOCOSER à d’autres plaideurs tels que Madame caroline GLELE née ADJAVON, Monsieur André Sessi DJENGUE, la société AND et desquelles il est ressorti que le droit de propriété de la société SOCOSER n’est pas définitivement établi sur les sacs de farines de blé dont le produit de la vente a été consigné au Greffe du Tribunal de céans.
Qu’il s’agit en l’occurrence des procédures 427/97 et 533/98 dans lesquelles la Cour de céans a rendu les arrêts 16/98 du 15 janvier 1998 et 160/99 du 12 août 1999.
Que la somme déposée au Greffe du Tribunal de céans est une consignation ordonnée par juge.
Qu’une consignation est soit une mesure de garantie prise au profit de créanciers en attendant la répartition qui doit être faite entre eux, soit une mesure destinée à assurer, éventuellement, l’exécution d’une obligation qui n’existe pas encore mais est susceptible de prendre naissance.
Que le preuve n’étant pas encore définitivement faite que cette somme consignée appartient à la société SOCOSER, il serait hasardeux de confirmer le jugement querellé qui a validé la saisie conservatoire du 10 février 1999 et la convertie en saisie exécution.
Qu’on ne peut en effet valablement saisir que ce qui appartient en propre à son débiteur.
Qu’il échet en conséquence d’infirmer le jugement entrepris pour, évoquant et statuant à nouveau, dire qu’il n’est pas encore établi que les deniers et fonds saisis le 10 février 1999 entre les mains du Greffier en Chef du Tribunal de céans appartiennent à la société SOCOSER.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de la société DAMEL SARL, par défaut à l’égard de la société SOCOSER, en matière commerciale, en appel et en dernier ressort.
EN LA FORME
Déclare recevable l’appel interjeté contre le jugement n 45 rendu le 10 mai 1999 par le Tribunal des céans;.
AU FOND
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions; Évoquant et statuant à nouveau.
Dit qu’il n’est pas encore établi par Justice que les deniers et fonds consignés entre les mains du Greffier en Chef du Tribunal de céans appartiennent à la société SOCOSER.
Dit en conséquence que la saisie conservatoire pratiquée le 10 février 1999 entre les mains dudit Greffier par la société DAMEL ne peut être déclarée valable pour être convertie en saisie exécution.
Condamne la société DAMEL SARL aux dépens.