J-06-96
DROIT COMMERCIAL GENERAL – BAIL COMMERCIAL – CHANGEMENT DE PROPRIETAIRE – EXPULSION – INTERPRETATION DE L’ARTICLE 92 DE L’AUDCG – CONTESTATION SERIEUSE – INCOMPETENCE DU JUGE DES REFERES (OUI).
Après avoir acquis un immeuble pris en location par des sociétés, l’acquéreur assigna en expulsion, devant le juge des référés, un des locataires qui tient de l’ancien propriétaire son bail pour une durée déterminée avec des périodes successives d’expiration. L’ordonnance par laquelle droit a été fait à la mesure sollicitée est déférée à la juridiction d’appel.
Devant cette instance, les parties ont notamment discuté l’interprétation de l’article 92 de l’AUDCG selon laquelle lorsque le bail est à durée déterminée avec des périodes successives d’expiration, le preneur devait former une demande de renouvellement avant l’expiration de chaque période.
Pour se déclarer incompétente, la Cour d’Appel a retenu que :
I les parties sont en désaccord sur la durée du bail, l’application en la cause et l’interprétation de l’article 92 de l’Acte Uniforme sur le Droit Commercial Général.
2 ces questions, qui doivent être tranchées avant toute décision sur la demande d’expulsion, échappent par leur nature à la compétence du juge des référés.
Article 92 AUDCG
(COUR D’APPEL DE DAKAR, CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE 2, ARRET N 162 DU 15 mars 2001CIVIL, REFERE La CIBA (Maître Tounkara et Associés) C/ Ismaêla Bâ, Agence ISMA Bâ Mona Center (Maître Guédel et Associés).
LA COUR
PRESENTS :
– Doudou NDIAYE, Président;
– Abdoulaye NDIAYE et ;
– Assane NDIAYE, Conseillers Mame Penda NDOYE, Greffier.
ENTRE :
La Central Insurance Broker Agency dite CIBA en ses bureaux 54, rue raffenel à Dakar, poursuites et diligence de son Directeur Général, élisant domicile en l’étude de Me Tounkara et Associés, avocats à la Cour à Dakar.
Appelante comparant et concluant à l’audience par ledit avocat.
D’une part.
Et :
Monsieur Ismaêla Bâ, Agence ISMA BA SCI MONA CENTER, 38, Rue Wagane Diouf à Dakar, élisant domicile en l’étude de Me Guédel Ndiaye et Associés, Avocats à la Cour à Dakar.
Intimé comparant et concluant à l’audience par ledit avocat.
D’autre part.
LES FAITS
Suivant exploit de Maître Abdoulaye Diom, Huissier de justice à Dakar en date du 08 janvier 2001, le Sieur Ismaêla Bâ, Agence ISMA BA SCI MONA CENTERa déclaré interjeter appel contre l’ordonnance par le tribunal Régional de Dakar en son audience du 14 juillet 2000 et à laquelle siégeaient Monsieur Mouhamadou Bachir SEYE, Président et avec l’assistance de Madame DIENG, Greffier, enregistrée le 21 décembre 2000 suivant bordereau n 1266/3, Vol XXIV, F 187,case 2887 au coût de neuf mille francs.
Et par l’exploit susvisé la CIBAa fait servir assignation au sieur lsmaêla BA, Agence ISMA BA SCI MONA CENTER d’avoir à comparaître et se trouver par devant la Cour d’Appel de Dakar, Chambre Civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 26 janvier 2001pour y venir voir et entendre statuer sur les mérites de son recours.
Sur cette assignation, l’affaire inscrite au rôle de la Cour sous le numéro 54 de l’année 2001a été appelée à la date pour laquelle ladite assignation avait été servie.
A cette date, l’affaire mise au rôle particulier de l’audiencea été renvoyée au 22 mars 2001, date à laquelle elle a été utilement retenue.
A cette date Maître Tounkara et Associés ont déposé des conclusions écrites, tendant à ce qu’il plaise à la Cour : Conclusions du 09 février 2001.
« Recevoir le présent appel.
Infirmer l’ordonnance entreprise.
Statuant à nouveau.
Vu le contrat de bail; constater que sa durée est fixée à 09 ans dont l’expiration est le 31janvier 2003.
Se déclarer incompétent.
Subsidiairement.
Débouter l’intimé de sa demande d’expulsion comme mal fondée.
Mettre les dépens à sa charge ».
A son tour Maître Guédel et Associés ont déposé des conclusions écrites, tendant à ce qu’il plaise à la Cour :
« Statuer ce que de droit quant à la recevabilité de l’appel.
AU FOND
Confirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.
Condamner la CIBA aux entiers dépens d’instance et d’appel dont distraction selon l’usage ».
Les débats ont été clos.
Sur quoi Monsieur le Président a ordonné le dépôt des pièces du dossier sur le bureau de la Cour qui amis l’affaire en délibéré pour l’arrêt à intervenir à la date du 29 mars 2001.
DROIT
La cause en cet état présentait à juger les différents points de droit résultant du dossier et des conclusions prises par les parties en cause.
QUID DES DEPENS?
Advenue l’audience publique et ordinaire de ce jour 29 mars 2001, la Cour vidant son délibéré a statué ainsi qu’il suit :
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Ouï les parties en toutes leurs demandes.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
Considérant que suivant exploit d’huissier du 08 janvier 2001, Centra Insurance Broker Agency (CIBA)a interjeté appel de l’ordonnance rendue le 24 juillet 2000 par le juge des référés du Tribunal Régional Hors Classe de Dakar qui a statué ainsi qu’il suit :
– « Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront mais dès à présent par provision vu l’urgence tous droits et moyens des parties réservés au fond.
Nous déclarons compétent.
Ordonnons l’expulsion de la CIBA des lieux loués; La condamnons aux dépens ».
Considérant que l’appel est fait dans les forme et délai prescrits par la loi.
Qu’il échet de le déclarer recevable en la forme; LES FAITS.
Considérant qu’un bail portant sur le local n 1au rez-de-chaussée de l’immeuble sis au 54 rue de Raffenela été passé entre la société SAIM KEBE et la Société CIBA; qu’il était stipulé que le bail est consenti et accepté pour une durée de 3.6.9. années à compter du 1er février 1994 pour expirer le 31janvier 1997, 31janvier 2000, 31janvier 2003.
Considérant que Ismaêla Bâ Agence Ismaêla Bâ SCI Mona Center ayant acquis par la suite l’immeuble loué est devenu bailleur de CIBA; qu’il ale 02 février 2000 assigné CIBA en expulsion devant le juge des référés.
AU FOND
Considérant que par conclusions en date du 09 février 2001, CIBAasoutenu que le bail a été librement signé par les parties, sous l’empire de la loi n 84-12 du 04 janvier 1984, notamment de son article 587, pour une durée de neuf ans; qu’il s’agit d’un bail à durée déterminée avec des périodes successives d’expiration, dont la dernière devait expirer le 31janvier 2003; que les dispositions de l’article 92 de l’Acte Uniforme sur le Droit Commercial Général ne devraient être opposables au preneur que trois mois avant l’expiration de cette période, soit le 31janvier 2003; que contrairement à ce que le premier Juge aindiqué dans son jugement, il ne ressort nullement dudit article que lorsque le bail est à durée déterminée avec des périodes successives d’expiration, le preneur doit former une demande de renouvellement avant l’expiration de chaque période.
Considérant que par conclusions datées du 19 mars 2001, l’intimé a opposé qu’il résulte de la disposition du bail relative à la durée que les parties avaient conclu un bail à durée déterminée de trois ans pour le terme du 31janvier 1997 renouvelable par tacite reconduction à compter de cette date pour deux autres périodes triennales; que la reconduction tacite du bail commercial à durée déterminée, qui était autorisée par l’article 592 de la loi n 84-12 du 04 janvier 1984, n’est plus possible depuis l’entrée en vigueur de l’Acte Uniforme qui dispose en son article 92 que ledit bail prend fin de plein droit à l’arrivée de son terme; si le preneur n’a pas demandé son renouvellement au plus tard trois mois avant ledit terme; qu’en vertu de ces dispositions d’ordre public, CIBA, faute d’avoir demandé le renouvellement de son bail au plus tard le 31octobre 1999, est déchu de son droit au renouvellement du bail arrivé à expiration le 31janvier 2000 et est devenu un occupant sans droit ni titre.
Considérant que les parties sont en désaccord sur la durée du bail l’applicabilité en la cause et l’interprétation de l’article 92 de l’Acte Uniforme; que ces questions qui doivent être tranchées avant toute décision dur la demande d’expulsion, échappent par leur nature à la compétence du Juge des référés.
Considérant qu’il y a lieu en conséquence, infirmant et statuant à nouveau de se déclarer incompétent.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort.
En la forme
Déclare l’appel recevable.
Au fond
Infirme l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau, se déclare incompétent.
Met les dépens à la charge de Ismaêla Bâ Agence Isma-SCI Mona Center.
AINSI fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de DAKAR, Chambre Civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 29 mars 2001séant au Palais de justice de ladite ville Bloc des Madeleines à Jaquelle siégeaient Monsieur Doudou NDIAYE, Président, Messieurs Abdoulaye NDIAYE et Assane NDIAYE, Conseillers et avec l’assistance de Maître Marne Penda NDOYE, Greffier.
ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.