J-06-104
RECOUVREMENT DES CREANCES ET VOIES D’EXECUTION – INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – OPPOSITION TARDIVE (IRRECEVABILITE) – ABROGATION DES DISPOSITIONS NATIONALES CONTRAIRES (OUI).
Aux termes de l’article 10 AUPSRVE, « L’opposition doit être formée dans les quinze jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer ».
Une société créancière a obtenu une ordonnance d’injonction de payer qu’elle a signifiée à sa débitrice. Cette dernière forme opposition contre ladite ordonnance mais est déboutée. Devant la juridiction du second degré, l’intimé relève que l’appel est irrecevable pour avoir été interjeté hors délai.
Les dispositions nationales concurrentes étant abrogées par l’effet de l’acte uniforme, le délai d’ajournement qu’elles prévoyaient ne saurait être invoqué.
Pour la Cour d’Appel, l’ordonnance d’injonction de payer ayant été signifiée à l’appelante le 19 juillet 1999, l’opposition qu’elle a formée le 11 août 1999 est hors délai en vertu de l’article 10 de l’AUPSRVE.
(COUR D’APPEL D’ABIDJAN ARRET CIVIL CONTRADICTOIRE N 716 DU 06 juin 2000 AFFAIRE SOCIETE DE VENTE DE VEHICULES D’OCCASION VOEXIM (Me SOUMAHORO ABOU) C/ LA C.N.T.).
LA COUR
AUDIENCE DU MARDI 06 juin 2000.
La Cour d’Appel d’Abidjan, Chambre Civile et Commerciale, séant au Palais de Justice de ladite, en son audience publique ordinaire du mardi six juin deux mille, à laquelle siégeaient :
Monsieur AGNINI YOUSSOUF, Président de Chambre, PRÉSIDENT.
Mr GBAYORO MATHIEU et Mr KOUASSI BROU BERTIN, CONSEILLERS à la Cour, MEMBRES.
Avec l’assistance de Maître GOSSE KOUAME, GREFFIER,a rendu l’arrêt dont la teneur suit dans la cause.
ENTRE :
La Sté de vente de véhicules d’occasion VOEXIM, sise en face de l’Hôtel IBIS de Marcory 10 BP 2309 Abidjan O, représentée par son gérant Mr FOFANA IBRAHIM faisant élection de domicile au siège.
APPELANTE.
Représentée et concluant par Maître SOUMAHORO ABOU, Avocat à la Cour, son conseil.
D’une part.
Et :
La Compagnie Nationale de Transit dite C.N.T. Commissaire en douane, dont le siège est sis à Abidjan. Treichville 2 et 4 Boulevard de Marseille face Pharmacie du Palais des Sports 15 BP 580 Abidjan 15 prise en la personne de son représentant légal Mr SYLVAIN GOLI KOUADIO.
INTIMEE.
D’autre part.
Sans que les présentes qualités puissent nuire ni préjudicier en quoi que ce soit aux droits et intérêts respectifs des parties en cause, mais au contraire, sous les plus expresses réserves des faits et de droit.
FAITS : Le Tribunal de Première Instance d’Abidjan, statuant en la cause, en matière civile a rendu le 06 décembre 1999 un jugement N 517 enregistré à Abidjan le 27 mars 1999 (reçu : dix-huit mille francs), aux qualités duquel il convient de se reporter et dont le dispositif est ci-dessous résumé.
Par exploit en date du jeudi 06 janvier 2000 de Maître DADI KABA, Huissier de Justice à Abidjan, la Ste Vente de véhicules d’occasion VOEXIMa déclaré interjeter appel du jugement sus-énoncé et a par le même exploit assigné la Compagnie Nationale de Transit à comparaître par devant la Cour de ce siège à l’audience mardi 25 janvier 2000 pour entendre, annuler ou infirmer ledit jugement.
Sur cette assignation, la cause a été inscrite au rôle général du Greffe de la cous sous le numéro 73 de l’an 2000.
Appelée à l’audience sus-indiquée, la cause après des renvois été utilement retenue le 09 MAI 2000 sur les pièces, conclusions écrites et orales des parties.
DROIT : En cet état, la cause présentait à juger les points de droit résultant des pièces, des conclusions écrites et orales des parties.
La Cour amis l’affaire en délibéré pour rendre son arrêt à l’audience du 23 mai 2000, délibéré qui a été prorogé jusqu’au 06 juin 2000.
Advenue l’audience de ce jour, mardi 06 juin 2000 la Cour a rabattu le délibéré pour sa nouvelle composition délibéré séance tenante et rendu l’arrêt dont la teneur suit :
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après.
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par exploit d’Huissier daté du 10 janvier 2000 la Société VOEXIM, Société à responsabilité limitée par son gérant FOFANA IBRAHIMarelevé appel du jugement civil N 517 du 6 décembre 1999 rendu par le Tribunal d’Abidjan lequel, saisi par elle d’une action en opposition contre l’ordonnance d’injonction de payer N 4402 du 6 juillet 1999 l’a rejetée comme irrecevable pour être intervenue hors délai.
La Société VOEXIM expose que par une ordonnance d’injonction de payer N 4402 prise le 6 juillet 1999 à la requête de la Compagnie Nationale de Transit dite CNT elle a été condamnée à payer la somme de 2.810.514 FCFA.
Que l’ordonnance de condamnation lui a été signifiée le 19 juillet et elle a formé opposition à son exécution par exploit du 29 juillet 1999.
Que le Tribunal a déclaré l’opposition hors délai en se fondant uniquement sur la notification à la CNT qui aurait été faite hors délai alors que l’opposition formée contre l’une des parties est opposable aux autres.
Que l’acte d’opposition ayant été signifiée dans le délai requis à l’Huissier instrumentaire, partie appelée à l’instance, le Premier Juge aurait dû déclarer l’opposition régulièrement signifiée.
La Société VOEXIM déclare en outre que le Juge de l’injonction de payer aurait dû déclarer la requête irrecevable pour défaut de précision de la forme de la société débitrice et ce, en application de l’article 4 du traité OHADA sur la procédure simplifiée de recouvrement des créances et pour absence de précision sur le fondement de la créance. Sur le moyen tiré de l’imprécision du fondement de la créance, elle explique en effet que la CNTamentionné dans sa requête que la créance se fondait sur le dédouanement d’un lot de voitures alors que les tarifs douaniers varient suivant la puissance et l’âge du véhicule; qu’à défaut d’indications précises, la requête de la société CNT devrait être rejetée puisque les quittances libératoires de toutes les prestations fournies par la société CNT sont disponibles.
En réplique aux moyens d’appel de la Société VOEXIM, la Compagnie Nationale de Transit soulève in limine litis l’irrecevabilité de l’appel pour violation de l’article 12 alinéa 5 de la loi N 93-669 du 9 août 1993 relative à la procédure de recouvrement simplifiée de créance. Elle explique que l’article 15 du traité OHADA relative aux procédures de recouvrement simplifiées dispose que : la décision rendue sur opposition est susceptible d’appel dans les conditions du droit national de chaque Etat partie.
Toutefois le délai d’appel est de trente jours à compter de la date de la décision ).
Que l’article 12 alinéa 5 de la loi du 9 août 1993 dispose : le délai d’ajournement devant la Cour d’appel n’excédera pas quinze jours à peine d’irrecevabilité de l’appel, sauf cas de force majeure dûment prouvée).
La Société CNT relève que la société VOEXIM a relevé appel le 6 janvier 2000, soit un délai d’ajournement de vingt jours; que dès lors l’appel doit être déclaré irrecevable pour violation de l’article 12 alinéa 5 précité que la jurisprudence de la Cour d’Appel est constance en la matière pour s’être illustrée par l’arrêt 408 du 29 mars 1994 dans la cause BIAO-CI contre la société IVOIRE Gardiennage et Assisi avec l’arrêt N 1367 du Zef décembre 1998 dans la cause BIAO-CI contre ADOU N’GUESSAN.
Subsidiairement la Compagnie Nationale de Transit CNT demande la confirmation de la décision querellée.
Elle expose qu’en sa qualité de transitaire, elle a procédé au dédouanement des véhicules commandés par la Société VOEXIM et que celle-ci lui doit au titre des droits de douane la somme de 2.810.514 FCFA.
Que par ordonnance N 4402 du 6 juillet 1999, la Société VOEXIMa été condamnée à lui payer cette somme; que l’ordonnance a été signifiée à la Société VOEXIM le 19 juillet 1999 que c’est par un exploit d’huissier du 11 août 1999 que la Société VOEXI a déclaré former opposition a été déclarée irrecevable par jugement N 517 du 6 décembre 1999.
La Compagnie Nationale de Transit déclare que cette opposition est irrecevable conformément à l’article 10 du Traité OHADA sur la procédure de recouvrement simplifiée qui dispose que « l’opposition doit être formée dans les quinze jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer.
Qu’en considérant la date de signification de la décision portant injonction de payer, 19 juillet 1999, la Société VOEXIM avait jusqu’au 5 août 1999 pour exercer sa voie de recours; que contrairement à la date du 29 juillet 1999 indiquée sur l’exploit d’opposition, l’acte a été servi au cabinet de l’avocat de la Compagnie Nationale de Transit le 11 août 1999 comme cela est bien mentionné sur l’acte; que la société VOEXIM qui ne conteste pas ce point plaide que l’opposition formée contre une partie est opposable aux autres et que l’acte a été signifié dans le délai requis à l’Huissier de la CNT.
La Compagnie Nationale de Transit CNT soutient que l’Huissier n’est pas partie au procès et que la signification à lui faite de l’acte d’opposition ne saurait être opposable; que l’opposition et donc irrecevable pour être intervenu hors le délai imparti à l’article 10 précité.
La Compagnie Nationale de Transit relève que sa créance ne peut être contestée et produit des pièces qui la matérialise.
MOTIF DE L’ARRET
SUR LA FORME DE L’ARRET
Les parties ayant conclu par leur conseil respectif, il échet de statuer par un arrêt contradictoire conformément à l’article 144 du code de procédure civile et commerciale.
SUR L’EXCEPTION D’IRRECEVABILITE DE L’APPEL.
La Compagnie Nationale de Transit soulève l’irrecevabilité de l’appel pour violation de l’article 12 alinéa 5 de la loi N 93-669 du 9 août 1993 qui prévoit à peine d’irrecevabilité de l’appel un délai d’ajournement de quinze jours.
Elle précise, en effet que la société VOEXIM qui a interjeté appel le 6 janvier 2000afixé la date de comparution à l’audience de la Cour au 25 janvier 2000, soit un délai de 20 jours.
Mais, il importe d’indiquer que l’article 336 du traité OHADA relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution dispose : « Le présent acte uniforme abroge toutes les dispositions relatives aux matières qu’il concerne dans les Etats parties ».
Qu’en application de cette disposition du traité, la loi Ivoirienne N 93-669 du 9 août 1993 relative aux procédures de recouvrement, simplifiée de créances est abrogée et remplacée par le traité OHADA susvisé.
Qu’il se déduit de cette abrogation que l’article 12 alinéa 5 invoque par la Compagnie Nationale de Transit ne peut trouver application en l’espèce.
Or le traité OHADA e ne prévoit aucun délai d’ajournement; Qu’en conséquence cette exception doit être rejetée.
SUR LA RECEVABILITE FORMELLE DE L’APPEL
Le jugement N 517 du 6 décembre 1999 rendu sur opposition n’avait pas encore été signifié lorsque par exploit d’huissier du 10 janvier 2000, la société VOEXIMarelevé appel de ce jugement.
Le délai d’appel étant suspendu à la signification du jugement conformément à l’article 325 du code de procédure civile il suit de l’absence du signification du jugement du 6 décembre 1999 que le délai d’appel n’a pas couru et que des lors le recours de la société VOEXIM est recevable.
AU FOND
La société de vente des véhicules d’occasion dite société VOEXIM conteste le jugement N 517 rendu le 6 décembre 1999 pour avoir déclaré irrecevable son action en opposition contre l’ordonnance d’injonction de payer N 4402 du 6 juillet 1999 qui l’a condamnée à payer à la compagnie Nationale de Transit dite CNT la somme de 2.810.514.
Elle explique que l’acte d’opposition a été régulièrement signification dans le délai à l’huissier instrumentaire et que l’opposition formée contre l’une des parties est opposable aux autres. Aussi s’étonne-t-il du rejet de son action en opposition. Cette analyse n’est pas juste en l’espèce.
C’est en effet une erreur de considérer en l’espèce l’huissier Instrumentaire comme partie au procès qui oppose la société VOEXIM à la société CNT, l’Huissier dont s’agit ayant simplement été sollicité pour signifier l’ordonnance d’injonction de payer au débiteur.
Cette mission qui lui a été confiée ne le transforme point en une partie au procès, le créancier ayant la latitude de le changer pour la suite de l’exécution de son ordonnance.
Le Juge de Première Instance a fait par conséquent une juste appréciation des faits de la cause en rejetant ce moyen. Il convient de confirmer ses décisions sur ce point.
Sur le point concernant le délai d’opposition, l’article 10 du traité OHADA dispose :» L’opposition doit être formé dans les quinze jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer. Le délai est augmenté éventuellement des délais de distance ».
En l’espèce, l’ordonnance d’injonction de payer N 4402 du 6 juillet 1999a été du 06 juillet 1999a été signifiée à la société de vente des véhicules d’occasion dite VOEXIM le 19 juillet 1999; que la débitrice n’a formé son opposition que le 11 août 1999.
Qu’au regard de l’article 10 précité, le traité OHADA cette opposition est manifestement intervenue hors délai; que c’est à bon droit qu’elle a été déclarée irrecevable par le Premier Juge. Le jugement doit par conséquent recevoir confirmation.
SUR LES DEPENS
La Société de vente de véhicules d’occasion ayant succombé il convient de la condamner aux dépens; PAR CES MOTIFS.
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale, en dernier ressort.
EN LA FORME
Reçoit la Société VOEXIM en son appel du 6 janvier 2000 relève du jugement N 517 du 6 décembre 1999 rendu par le Tribunal d’Abidjan.
AU FOND
L’y dit mal fondée.
L’en déboute.
Confirme le jugement querellé en toutes ses dispositions.
Condamne la Société VOEXIM aux dépens.
En foi de quoi, le présent arrêt prononcé publiquement, contradictoirement, en matière civile, commerciale et en dernier ressort la Cour d’Appel d’Abidjan (5ème chambre civile A)a été signé par le Président et le Greffier.