J-06-112
RECOUVREMENT DES CREANCES ET VOIES D’EXECUTION – INJONCTION DE PAYER – DEFAUT DE SIGNIFICATION AU DEBITEUR – DECHEANCE DU DROIT D’OPPOSITION.
Un sous-traitant initie contre son cocontractant, l’entrepreneur, une procédure d’injonction de payer en vue du recouvrement des sommes lui restant dues au titre de l’exécution du marché conclu entre eux. Le jugement rendu sur opposition de l’entrepreneur à l’ordonnance d’injonction de payer déclare celui-ci déchu de son droit d’opposition.
La Cour d’appel confirme cette décision, en retenant que le débiteur a signifié son recours au seul greffe du Tribunal de Grande Instance et pas au créancier, alors que l’article 11de l’Acte Uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement impose la signification de l’opposition à toutes les parties et au greffe, à peine de déchéance. La Cour décide en outre qu’en raison de la déchéance, c’est à bon droit que le Tribunal n’a pas statué sur l’exception d’incompétence soulevée par le débiteur.
Article 11 AUPSRVE
(COUR D’APPEL DE OUAGADOUGOU, ARRETN 15 DU 16 janvier 2004, AFFAIRE Société LAFCHAL C/ COMPAORE K. Saïdou.
LA CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE DE LA COUR D’APPEL DE OUAGADOUGOU (Burkina Faso), statuant en matière civile et commerciale en son audience publique ordinaire, tenue au Palais de Justice de ladite ville, le Vendredi 16 janvier 2004 à laquelle siégeaient :
Monsieur ZONGO Marc, Président de Chambre à la Cour d’Appel; PRESIDENT.
Madame OUEDRAOGO Brigitte et Monsieur SOME T. Séraphin, tous deux Conseillers à la Cour d’Appel MEMBRES.
Assistée de Maître BITIE Sidiki, Greffier de ladite Cour; GREFFIER.
A rendu l’arrêt dont la teneur suit dans la cause.
entre :
La Société LAFCHAL, dont le siège social est à Ouagadougou, Téléphone. : 50 34 03 73.
Appelant, ayant pour conseil Maîtres OUATTARA Mamadou.
D’UNE PART.
COMPAORE K. Saïdou, Entrepreneur demeurant à Ouagadougou.
Intimé, ayant pour conseil Maître OUEDRAOGO & BONKOUNGOU.
D’AUTRE PART.
Sans que les présentes qualités ne puissent nuire ou préjudicier aux droits et intérêts respectifs des parties en cause, mais au contraire sous les plus expresses réserves de fait et de droit.
LA COUR
Vu le jugement n 659/04 du 19 juin 2002.
Vu l’acte d’appel de la Société LAFCHAL SARL en date du 28 juin 2002.
Vu les pièces du dossier.
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
FAITS et PROCEDURE.
La Société LAFCHAL-SARLa été attributaire d’un marché pour la construction d’écoles primaires dans la Province du Sourou. Pour assurer l’exécution du marché, celle-ci, par un contrat de sous-traitance a confié l’exécution des travaux de construction d’une école type 3C1L et d’une latrine de l’Entreprise COMPAORE K. Saïdou. a la fin des travaux, l’Entreprise COMPAORE K. Saïdou soutient que la société LAFCHAL lui reste redevable de la somme de 5 137 416 F CFA et demande le paiement.
Le 14 février 2001COMPAORE K. Saïdou introduisait une requête afin d’injonction de payer contre la Société LAFCHAL auprès du Président du Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou et portant sur ladite somme outre les frais de recouvrement. Le 26 février 2001, Le Président rendait son ordonnance. Le 03 avril, celle-ci était notifiée à la Société LAFCHAL qui formait opposition le 12 avril 2001. Le 19 juin 2002, le Tribunal rendait son jugement en ces termes :» Déclare la Société LAFCHAL « Déchue de son droit d’opposition et en conséquence la condamne à payer à COMPAORE K. Saïdou la somme principale de 5 437 416 F CFA outre les intérêts de droit à compter du jour de la demande.
Contre ce jugement, la Société LAFCHAL Sarl interjetait appel le 28 juin 2002.
Dans ses conclusions, la Société LAFCHAL sous la plume de son conseil Maître OUATTARA Mamadou soutient que le premier Juge a décidé à tort qu’elle était déchue de son droit de faire opposition pour n’avoir pas signifié son recours à COMPAORE K. Saïdou conformément à l’article 11de l’Acte Uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Par ailleurs, l’appelant fait valoir que le jugement querellé n’a pas statué sur l’exception d’incompétence par elle soulevée alors que selon l’article 23 du contrat, les deux (02) parties s’étaient engagées à soumettre tout litige né à l’occasion de l’exécution de ce contrat à un arbitre. En vertu de cette clause compromissoire, COMPAORE K. Saïdou ne pouvait donc saisir le Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, juridiction étatique à l’effet d’obtenir le paiement de sa créance.
Enfin, la Société LAFCHAL à titre subsidiaire conclut que COMPAORE K. Saïdou n’apporte nullement la preuve de sa créance portant sur la somme de 5 137 416 F CFA et qu’au contraire, c’est lui qui lui est redevable de la somme de 3 237 039 F CFA.
En réponse, COMPAORE K. Saïdou sous la plume de ses conseils Maîtres OUEDRAOGO Oumarou et BONKOUNGOU Dieudonné conclut à la confirmation du jugement querellé. Il soutient que l’acte d’opposition du 12 avril 2001, par lequel la Société LAFCHALasaisi le Tribunal ne mentionne nulle part la signification du recours à lui faite. La conséquence de l’inobservation de cette formalité au sens de l’article 11de l’acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement des créances et voies d’exécution est donc la déchéance de la Société LAFCHAL de son droit de faire opposition.
Pour l’exception d’incompétence, COMPAORE K. Saïdou fait valoir que celle-ci a été soulevée après que la Société LAFCHAL ait conclut au fond pour nier l’existence même de la créance alors que l’article 122 du code de procédure civile dispose que « les exceptions doivent à peine d’irrecevabilité être soulevées simultanément et avant tout défense au fond ou fin de non recevoir », par conséquent, il conclut à son rejet.
DISCUSSION
Attendu qu’aux termes de l’article 11de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et voies d’exécution « l’opposant est tenu, à peine de déchéance et dans le même acte que celui de l’opposition de signifier son recours à toutes les parties et au greffe de la juridiction ayant rendu la décision d’injonction de payer ».
Attendu qu’il ressort de la copie de l’original de l’acte d’opposition du 12 avril 2001que la Société LAFCHAL n’a signifié son recours qu’au greffe du Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou et non à COMPAORE K. Saïdou.
Qu’en application de la disposition ci-dessus visée, il y a lieu de la déclarer déchue de son droit d’opposition et la condamner à payer à COMPAORE K. Saïdou la somme de 5 437 416 F CFA avec intérêts de droit à compter du jour de la demande.
Attendu qu’il est reproché au premier juge de n’avoir pas statuer sur l’exception d’incompétence soulevée par la Société LAFCHAL.
Mais attendu qu’ayant été déchu de son droit d’opposition, c’est à bon droit que le Tribunal n’a pas examiné les moyens invoqués par le débiteur au soutien de son opposition.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale et en dernier ressort.
EN LA FORME.
Déclare l’appel de la Société LAFCHAL-Sarl recevable; AU FOND.
Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions. Condamne la Société LAFCHAL aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Chambre Civile et Commerciale de la Cour d’Appel de Ouagadougou les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé, le Président et le Greffier.