J-06-134
RECOUVREMENT DES CREANCES ET VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – PROPRIETE DES BIENS SAISIS – CONTESTATION DE PROPRIETE – JURIDICTION COMPETENTE – COMPTENCE DU JUGE DES REFERES (OUI).
SAISIE CONSERVATOIRE – VALIDITE DE LA SAISIE – NULLITE DE LA SAISIE DES BIENS D’UN TIERS.
En marge d’une procédure simplifiée de recouvrement en cours, un créancier fait pratiquer, sur autorisation du Président du Tribunal, une saisie conservatoire sur des cargaisons de sucre débarquées de deux navires et qui seraient destinées au débiteur. Ce dernier et une société et un commissionnaire en douanes se disant respectivement propriétaire et tiers détenteur des marchandises saisies, obtiennent du juge des référés la mainlevée de la saisie.
La Cour d’appel déboute le créancier qui soulève l’incompétence du juge des référés sur le fondement de l’article 141AUPSRVE. Elle décide que l’article 141sus-évoqué est relatif à la procédure de distraction alors qu’en l’espèce, il s’agit d’un litige né de l’exécution d’une ordonnance aux fins de saisie conservatoire; un tel litige diffère donc d’une demande en distraction relevant selon l’art. 49 de la compétence du juge des référés et non du juge du fond. Elle conclut que c’est donc à bon droit que le juge des référés s’est déclaré compétent.
Les seconds juges considèrent que le juge des référés a fait une saine application de la loi en déclarant irrégulière et abusive la saisie pratiquée sur les navires et en ordonnant la restitution des marchandises. En matière de transport maritime, expliquent-ils, le connaissement est l’unique document qui détermine le destinataire et donc le propriétaire des marchandises transportées, étant entendu qu’il peut faire l’objet d’un endossement. On ne peut pratiquer la saisie sur la cargaison transportée par un navire sans avoir la preuve formelle qu’elle est la propriété du saisi et il ressort des divers documents et pièces produits, notamment le connaissement, que le saisi n’est pas le propriétaire de la cargaison.
COUR D’APPEL DE LOME, CHAMBRE CIVILE arrêt N 156/01DU 27 AOUT 2001, AFFAIRE. LA SOCIETE BAUCHE (Me DOE-BRUCE) C/ LA SOCIETE CEREALIS, L’ÉTABLISSEMENT COMMISSIONNAIRE ET CONSULTANT EN DOUANE.
LA COUR
PRESENTS : M.M.
ABDOULAYE : Président.
WOAYI, HOUSSIN : Membres.
LODONOU : M.P.
OURO-DJOW : Greffier.
ARRET CONTRADICTOIRE.
AUDIENCE PUBLIQUE ET ORDINAIRE DU LUNDI VINGT SEPT AOUT DEUX MIL UN.
La Cour d’Appel de Lomé, statuant en matière civile et commerciale en son audience publique ordinaire du lundi vingt sept août deux mil un, tenue au Palais de Justice de ladite ville, à laquelle siégeaient Messieurs :
Bawa Yaya ABDOULAYE, Président de la Cour d’Appel de Lomé, PRESIDENT.
Kossi HOUSSIN et Kodjo WOAYI, tous deux conseillers à ladite Cour, MEMBRES.
En présence de Monsieur Dovi LODONOU, Troisième SUBSTITUT GENERAL.
Avec l’assistance de Me Christian Tchawissi OURO¬DJOW, GREFFIER.
A rendu l’arrêt dont la cause est pendante entre :
La Société BAUCHE, prise en la personne de son Directeur Général, assistée de Me DOE-BRUCE, Avocat à la Cour, son conseil.
Appelante d’une part.
Et :
La Société CEREALIS, prise en la personne de son Directeur Général.
L’Établissement Commissionnaire et Consultant pris en la personne de son Directeur Général.
Tous associés de Me AQUEREBURU, Avocat à la Cour, leur conseil.
Intimés d’autre part.
Sans que les présentes qualités puissent nuire ou préjudicier aux droits et intérêts respectifs des parties en cause mais au contraire sous les plus expresses réserves des faits et de droit.
POINT DE FAIT : Suivant requête aux fins d’assignation à bref délai devant la Cour d’Appel, Me DOE-BRUCE,aau nom et pour le compte de sa cliente la Société BAUCHE, fait donner assignation à la Société CEREALIS et l’Établissement Commissionnaire Consultant OMISSION que l’appelante avait par exploit en douane en date du 6 août 2001de Me Sédjou PARAIS, Huissier de Justice, interjeté appel de l’ordonnance N 128/01du 6 août 2001dont le dispositif est ainsi libellé :
« Au principal, renvoyons les parties à mieux se pourvoir ainsi qu’elles aviseront ».
Mais dès à présent, vu l’urgence.
Déclarons recevable la demande de la Société CEREALIS et des Établissements CCD.
Disons ladite demande bien fondée.
Déclarons irrégulière et abusive la saisie querellée.
Ordonnons la restitution des marchandises saisies sous astreinte de 1 000 000 francs CFA par jour de résistance.
Ordonnons l’exécution provisoire de la présente ordonnance nonobstant toute voie de recours et sans caution.
Mettons les dépens à la charge des requis.
Par ordonnance N 130/01en date du 8 août 2001, le Président de la Cour d’Appel autorisant la Société Bauche à assigner la Société CEREALIS et des Établissements CCD devant la Cour réunie extraordinairement pour l’audience du vendredi 10 août 2001à 10 heures.
L’affaire fut inscrite au rôle général sous le N 395/01et appelée à l’audience précitée.
Advenue l’audience du 10 août 2001, les conseils des parties ont présenté leurs moyens de défense et plaidé.
Le Ministère Public qui a eu la parole pour ses réquisitions, a déclaré s’en rapporter à Justice.
Les débats ont été publics.
POINT DE DROIT : La cause en cet état présentait à juger les différentes questions de droit résultant des conclusions respectives des conseils des parties et des pièces y jointes.
Sur quoi, la Cour amis l’affaire en délibéré pour l’arrêt être rendu à l’audience du 22 août 2001, lequel délibéré fut prorogé au 27 août 2001.
Et ce jour, 27 août 2001, la Cour vidant son délibéré a rendu l’arrêt dont la teneur suit.
LA COUR
Ouï les conseils des parties en leurs conclusions respectives.
Le Ministère Public entendu.
Vu l’ordonnance N 390/01en date du 6 août 2001du Président du Tribunal de Première Instance de Lomé.
Vu l’appel interjeté ensemble les pièces du dossier de la procédure.
Vu la requête aux fins d’assignation à bref délai.
Et après en avoir délibéré.
EN LA FORME
Attendu que par exploit en date du 6 août 2001, la Société BAUCHEa fait appel de l’ordonnance de référé sur assignation N 390/01du 6 août 2001rendue par le Président du Tribunal de Lomé; que cet appel relevé dans les forme et délai de la loi est régulier et partant recevable.
Au fond
Attendu que Me DOE-BRUCE, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de la Société BAUCHE, fait grief à l’ordonnance entreprise d’avoir déclaré irrégulière et abusive Il a saisie querellée et ordonné la restitution des marchandises saisies sous astreinte de 1 000 000 FCFA par jour de retard et enfin ordonné l’exécution provisoire.
Attendu qu’il expose à l’appui de son appel que pendant plusieurs années, la Société concluante a été en relations d’affaires avec la Société SAT (Société Africaine de Transit) dont le propriétaire est le sieur Mohamed TEFRIDJ; Qu’elle fournissait à la SAT du sucre; qu’à partir de l’an 2000, la SAT n’honorait plus à ses engagements et son compte dans les livres de la Société concluante présentait un solde débiteur de 3 367.3264,67 F CFA matérialisé par plusieurs traites acceptées par la SAT et non payées à l’échéance; que les saisies pratiquées sur les comptes banCAIREs de la SAT et du sieur ÎEFRIDJ furent infructueuses, que c’est désespérée de ne pas avoir de gage pour sa créance qu’elle fut informée que la SAT allait recevoir des cargaisons de sucre, une cargaison de 1500 tonnes embarquée sur le navire M/V HUA TOU pour (ou par?) l’Établissement C.C.D pour le compte de la SAT et une cargaison de 200 tonnes (ou 2000?) embarquée sur le navire M/V CEYNOWA pour le compte de la SAT; que c’est pour mettre sous main de la justice cette marchandise que la Société concluante a obtenue de Monsieur le Président du Tribunal de Lomé l’ordonnance N 786/2001du 23 juillet 2001l’autorisant à pratiquer une saisie conservatoire sur les cargaisons des sucres débarquées au Port Autonome de Lomé des deux navires et appartenant aux sociétés SAT et C.C.D. et entre les mains du Port Autonome de Lomé pour sûreté et avoir paiement de la créance de la société concluante évaluée à la somme de 4.74.390.67FF en principal, frais de recouvrement, intérêts légaux et mémoires pour les intérêts à agir; que c’est dans ces conditions que la société concluante a été attraite le 26 juillet 2001par assignation à la requête de la société CEREALIS se prétendant propriétaire des 2000 tonnes de sucre arrivées sur le navire M/V CEYNOWA; que le 27 juillet 2001une nouvelle assignation fut délaissée à la concluante à la requête de la société CEREALIS et de l’Établissement C.C.D. lesquels prétendent que la cargaison leur appartient; qu’à l’audience du 30 juillet 2001, le Conseil des demandeurs a indiqué qu’il ne retenait que la deuxième assignation dans laquelle l’Établissement C.C.D. et la société CEREALIS prétendent que c’est la société CEREALIS qui est propriétaire des deux cargaisons et l’Établissement C.C.D. n’est qu’un tiers détenteur desdites marchandises; que la mainlevée de la saisie pratiquée sur les deux cargaisons sollicitée au profit de la société CEREALIS ne saurait prospérer; que s’agissant de la distraction d’objets saisis la procédure rejetée par l’article 3 du Code de Procédure Civile a son pendant dans l’article 141de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; que cet article indique le Tribunal qui est compétent et non le Juge des Référés; Que sur l’irrecevabilité de la demande l’article 141de l’acte uniforme dispose que le tiers qui se prétend propriétaire d’un bien saisi doit dénoncer la demande de distraction au débiteur saisi et l’appeler en la cause; qu’en espèce on ne voit nulle part que la SAT ait été appelée en la cause pour la simple raison que les sociétés SAT, CEREALIS et l’Établissement C.C.D. ont des intérêts liés et veulent par un concert frauduleux permettre à la Suite de se dérober au paiement de sa dette, que par ailleurs, la société CEREALIS saisie pour d’une part, en ce qui concerne la marchandise débarquée du navire M/V HUATO, elle n’apporte pas la preuve de son droit de propriété; qu’en effet, elle ne figure ni comme chargeur, ni comme consignée ni comme Notify party sur le connaissement qu’elle a produit au débat; qu’elle n’y figure non plus comme endossataire du connaissement qui est un connaissement à perdre; que dans une sommation interpellative en date du 26 juin 2001tant le Pori : Autonome de Lomé que la NITRA indiquent que la cargaison débarquée du navire M/V HUATO appartient à SAT; que d’autre part, concernant la marchandise débarquée du navire M/V CEYNOWA, au départ dudit navire, la société CEREALIS est la société Jean Lion et Compagnie S.A. chargeur qui lui a endossé le connaissement à l’Établissement CCD qui s’est présenté à la société GETMA pour obtenir le bon à délivrer dont la délivrance indique la fin du connaissement; que la société GETMA dans la sommation interpellative du 26 juillet 2001affirme que les connaissements ont été endossés à l’Établissement qui lui avait été endossé, la société CEREALIS ne dispose plus d’aucun droit sur la cargaison des 2000 tonnes de sucre débarquée du navire M/V CEYNOWA; que par ailleurs l’Établissement CCD sur tous les documents douaniers et du Port affirme que la marchandise est pour le compte de la SAT; que sur la présence de l’Établissement CCD dans la cause, il importe de relever que ledit établissement est une entreprise personnelle appartenant à Monsieur ADDRA qui aide la société SAT à organiser son insolvabilité; que les bureaux de l’Établissement CCD sont situés dans l’enceinte des bureaux de la SAT dans la zone portuaire; que le sieur ADDRAa signé diverses correspondances de la SAT comme directeur de la SAT; que ces lettres ont été communiquées par le conseil de la SAT et de l’Établissement CCD; que la signature sur le papier entête de la SAT et de l’établissement CCD est la même; que dalleurs dans le passé, le sieur TEFRIDJ Mohamed a passé des commandes pour la SAT et a demandé de les livrer à l’établissement, ce qui a ouvert des lettres de crédits pour la société BAUCHE; que s’agissant du prétendu déroutage de la cargaison vers les magasins NITRA pour lui demander une cotisation pour l’entreposage de diverses marchandises dont le sucre; qu’elle sollicite qu’il plaise à la Cour d’annuler l’ordonnance de référé N 390/2001du 6 août 2001, de débouter la société CEREALIS et l’établissement CCD de toutes leurs demandes, fins et conclusions tant de première instance que d’appel et voir ordonner l’exécution provisoire de l’arrêt à intervenir nonobstant opposition; que par notes additionnelles non datées et signifiées par le conseil de l’appelante, la concluante expose que compte tenu du caractère périssable de la cargaison saisie, du caractère très dispendieux de l’entreposage des cargaisons saisies dans les magasins du port et de la NITRA et de la lenteur des procédures, il y a lieu de ne pas prolonger le magasinage de la cargaison saisie; qu’en effet, la prolongation de l’emmagasinage des cargaisons risquera d’obérer d’un important frais de magasinage la marchandise qui reste le seul gage susceptible de garantir le recouvrement de la créance de la concluante; qu’il y a lieu que la Cour ordonne que la requérante pourra être autorisée sur requête à soumettre à Monsieur le Président de la Cour d’Appel à faire vendre par un mandataire de justice, la cargaison saisie pour le prix de vente être consigné au Greffe de la Cour d’Appel pour le compte de qui il appartiendra.
Attendu que Me AQUEREBURU, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de la société CEREALIS et les établissements CCD dans ses notes en cours de délibéré valant conclusions en date du 14 août 2001, répliquant à l’appelante expose que par contrat de vente N 93081du 4 novembre 1999 et un autre N 0041du 4 janvier 2000, la société BAUCHEalivré à la SAT successivement 1.500 tonnes de sucre et 750 tonnes au prix de 1.500FF; que sur ces cargaisons plusieurs rapports des autorités douanières et des experts maritimes ont relevé que plusieurs sacs de sucre cristallisé ont subi des avaries; que la SATa fait des décomptes d’avaries et manquants et adressé des correspondances à la société BAUCHE S.A. à titre d’information et de réclamation; que les deux sociétés sont en pourparlers pour règlement amiable en prenant en compte les impayés et l’indemnisation des avaries lorsque la société appelante s’est fait délivrer l’ordonnance d’injonction de payer N 438/01du 30 avril 2001rendue par Monsieur le Président du Tribunal de Première instance.
de Lomé contre la SAT; que l’opposition à ladite ordonnance est pendante devant le Tribunal; que la SATasoulevé devant le premier juge plusieurs irrégularités dont l’incompétence des juridictions togolaises à connaître du présent litige par application de la clause d’arbitrage convenu et signé par les parties; que malgré l’instance pendante devant le Tribunal, la société BAUCHE initie une procédure de saisie conservatoire; qu’elle n’a pas voulu attendre la décision du Tribunal qui sans doute va se déclarer incompétent pour initier une telle procédure; que c’est multipliant les procédures et semant la diversion que la société BAUCHEasollicité et obtenu du Président du Tribunal une ordonnance N 796/01du 23 juillet 2001afin de procéder à la saisie conservatoire des marchandises dit-elle appartenant à la société SAT; qu’elle prétend être non seulement créancière de la société SAT d’une somme de 4 074.390,66FF et que cette dernière n’est pas en mesure de payer mais aussi a fait croire au Président du Tribunal que la SAT et le sieur TEFRIDJ Mohamed attendant l’envoi de plusieurs cargaisons de sucre à bord des navires M/V HUATO et M/V CEYNOWA qu’ils ont commandé qu’il s’agisse d’affirmations inexactes dénuées de toutes preuves; que la société BAUCHE munie de l’ordonnance de saisie précitée, après avoir fait la saisie conservatoire a fait dérouter les marchandises destinées à être entreposées au magasin NAD-SAT au magasin NITRA; qu’informée de la saisie, la société CEREALISapar correspondance du 26 juillet 2001, elle attirait également l’attention de la société BAUCHE et de l’huissier instrumentaire de l’erreur grave qu’ils commettaient en pratiquant des saisies sur la marchandise n’appartenant pas à leurs prétendus débiteurs que sont la SAT et le sieur TEFRIDJ; que la société BAUCHE n’ayant pas répondu à ces correspondances, les exposants ont saisi le Juge des référés pour voir ordonner main-levée desdites saisies irrégulières et abusive, la saisie querellée et ordonné la restitution des marchandises saisies sous astreinte de 1 000 000 F CFA par jour de résistance; que la société BAUCHEa cru devoir relever appel de l’ordonnance susvisée; qu’elle soulève l’incompétence du Juge des référés; que l’appelante fait une interprétation erronée de l’article 141de l’Acte Uniforme portant recouvrement de créance simplifié et des voies d’exécution; que l’action en distraction qui fait au fond est requise lorsque le tiers qui se prétend propriétaire du bien saisi justifie son droit de propriété par des allégations discutables; que lorsque le tiers justifie son droit de propriété sur un bien irrégulièrement saisi par un titre définitif et irréfutable, le Juge des référés ordonne purement et simplement à main levée des saisies abusivement pratiquées; que les concluants ne se prétendent pas propriétaires et justifient leur droit de propriété par connaissements qui en droit maritime sont le titre de propriété par excellence; que l’article 49 de l’Acte Uniforme portant recouvrement simplifié et voies d’exécution est formel; que l’ordonnance entreprise a été prise en vue d’une saisie conservatoire; que le Juge des référés est saisi compte tenu de l’urgence pour régler le litige relatif à ladite saisie conservatoire; qu’ainsi l’incompétence du Juge des référés soulevés par l’appelante est un moyen creux pour s’abriter derrière l’abus que constitue la saisie pratiquée sur les marchandises d’une tierce société; que c’est à bon droit que le Président du Tribunal s’est déclaré compétent.
Que s’agissant des titres représentatifs des marchandises saisies, la société BAUCHE dans sa requête aux fins de saisies conservatoires de marchandises en du 23 juillet 2001, affirmait qu’elle a appris que la SAT et le sieur TEFRIDJ dont elle se prétend créancière attendent l’envoi de plusieurs cargaisons de sucre qu’ils auraient commandé directement ou indirectement; que ces dires relèvent de l’affirmation gratuite tendant à surprendre la religion de Monsieur le Président du Tribunal; que la preuve en est que la requête du 23 juillet 2001n’a été accompagnée d’aucune pièce violant ainsi le principe selon lequel toute requête tendant à obtenir une décision doit être justifiée et accompagnée de pièces; que ce principe est consacré par les articles 3 et 4 de l’Acte Uniforme; que son inobservation est prescrite à peine de nullité; que la société BAUCHE est incapable de justifier dans les deux cas de saisie que les marchandises appartiennent à ses créanciers que sont la SAT et le sieur TEFRIDJ.
Que sur le titre de propriété des marchandises débarquées par le navire M/V HUATO, les mentions essentielles portées sur les connaissements sont le nom du propriétaire qui est la société SUCDEN et le Notify address, c’est-à-dire les Établissements CCD qui sont transitaires et prestataires de service ayant à sa charge les marchandises entreposées; que les 1500 tonnes de sucre transportées par le navire M/V HUATO et entreposées dans les magasins sont assurées par la société SUCDEN qui en est le propriétaire; que c’est pour cette raison que par correspondance en date du 5 juillet 2001, le consignataire dudit navire, la société GETMA-TOGOatransmis un avis d’arrivée aux Établissements CCD lui notifiant que les marchandises querellées seront débarquées et mises à sa disposition au Port Autonome de Lomé; que mieux par correspondance en date du 31 juillet 2001, la société GETMA-TOGOasaisi et les autorités portuaires et le Directeur de NITRA pour les informer que le navire M/V HUATOadéchargé 1500 MT de sucre en sacs de 50kg notifiées à CCD et que ces marchandises demeurent toujours la propriété du Groupe SUCDEN; que c’est en vain qu’on cherchait le nom de la SAT et du sieur TEFRIDJ, les prétendus débiteurs de la société BAUCHE sur les connaissements et les pièces afférentes; qu’il est clair que les informations reçues par la société BAUCHE et qui ne sont nullement corroborées par des documents fiables ne sauraient servir de titre de propriété en matière de transport et de vente maritime; que la saisie pratiquée sur les 1500 tonnes de sucre transportées par le navire M/V HUATO est abusivement et irrégulière.
Que s’agissant également des 2000 tonnes de sucre transportées par le navire M/V CEYNOWA qui ont été également saisies et déroutées dans les magasins NITRA, les connaissements produits prouvent que les 2000 tonnes de sucre appartiennent à la société CEREALIS et mis à la charge de la société CCD pour être entreposés dans le magasin MAD-SAT; que les connaissements ont été endossés par le propriétaire, la société CEREALIS pour être délivrés à l’ordre du transitaire CCD à charge de faire les procédures douanières et administratives; qu’en matière de transport maritime, les originaux de connaissement à ordre sont obtenus par le propriétaire des marchandises qui les confie au consignataire; que la mission des acteurs mentionnés sur un connaissement est bien définie et que la société SAT en tant que notify address ne saurait être le propriétaire des marchandises; que c’est dans le cadre de la mission qui lui a été confiée que les Établissements CCD ont saisi par correspondance en date du 19 juillet 2001les autorités douanières pour obtenir une autorisation afin de charger sous palans et de transférer dans les magasins de.
dédouanement « MAD-SAT » dans la zone portuaire les marchandises déchargées par le navire M/V CEYNOWA que le 19 juillet 2001, le consignataire du navire M/V CEYNOWAanotifié à la CCD un bon à délivrer pour prendre possession des marchandises; qu’il est important de rappeler que lorsque les 2000 tonnes de sucre débarquées par le navire susvisé ont été saisies, la société CEREALISapar correspondance en date du 25 juillet 2001confirmé son droit de propriété sus lesdites marchandises; qu’en outre les connaissements, les documents administratifs et plusieurs correspondances attestent le droit de propriété des concluants sur les 2000 tonnes de sucre saisies; que s’agissant de la sommation interpellative dont fait cas l’appelante, il est surprenant que devant un titre de propriété qu’est le connaissement, elle fait état d’une sommation interpellative; que les déclarations faites au cours de ces sommations interpellatives ne sauraient être recevables face aux connaissements confirmés par actes administratifs et les déclarations du consignataire des navires consignés dans les sommations interpellatives.
Que sur l’exécution de l’ordonnance querellée, il importe de remarquer alors qu’il s’agit d’une simple saisie conservatoire, la société BAUCHEa fait dérouter les marchandises dans les magasins de NITRA que l’ordonnance de saisie conservatoire a été transformée en une ordonnance de mise sous séquestre; que la société BAUCHE en procédant ainsi a violé l’article 103 alinéa 2 de l’Acte Uniforme.
Que sur l’identité de la société SAT et les Établissements CCD, les conclusions ont démontré que les marchandises objets de saisie n’appartiennent ni à la société SAT ni aux Établissements CCD; que c’est à tort que la société BAUCHE tire argument de ce que les correspondances de la société SAT et des Établissements CCD auraient été signées par le sieur ADDRA pour conclure que la SAT est une société actionnaire dont le directeur de CCD, on ne saurait conclure à l’identité de la société SAT-SARL et aux Établissements CCD; que par ailleurs les deux sociétés qui ont une immatriculation différente, une personne morale différente, ne peuvent pas être identiques juridiquement, qu’en droit des sociétés, cette analogie ne saurait prospérer.
Qu’enfin, c’est par ruse que l’appelante a introduit la demande tendant à vendre la cargaison saisie; que la Cour d’Appel ne peut dans sa décision prendre des mesures tendant à anticiper les décisions relevant de la compétence du Président de la Cour d’Appel; que le caractère périssable de la cargaison ne peut être déduit de facto de son entreposage; qu’il faut une preuve résultant d’un constat matériel d’un expert pour justifier une mesure laquelle doit être prise contradictoirement; que vendre la cargaison appartenant aux concluants serait brader les biens d’autrui et que nulle part l’Acte Uniforme n’a prévu une telle vente.
Attendu que Me DOE-BRUCE dans ses notes en cause de délibéré valant conclusions en réplique en date du 20 août 2001a repris de manière plus explicite les griefs soulevés contre l’ordonnance entreprise et sollicite qu’il plaise à la Cour lui adjuger l’entier bénéfice de toutes ses demandes et dire et juge que la société BAUCHE SA créancière poursuivant prendra rang privilégié exclusif sur le produit de la vente à concurrence de la totalité de sa créance en principal, frais et intérêts.
Attendu que Me AQUEREBURU dans ses notes en cours de délibéré valant conclusions en réponse en date du 22 août 2001reprenant ses moyens développés dans ses précédentes notes avec des pièces justificatives et des exemples à l’appui sollicite la confirmation pure et simple de l’ordonnance entreprise, le déboutement de la société BAUCHE de toutes ses demandes et l’exécution provisoire de l’arrêt à intervenir nonobstant toutes voies de recours.
Attendu qu’il résulte des éléments de la cause que la société BAUCHE suivant ordonnance N 786 du 23 juillet 2001a fait pratiquer une saisie conservatoire sur plusieurs tonnes métriques nette de sucre banc cristallisé CEE N 2 logé en sacs poly-propylènes double poluésbylène de 50 kg net embarqués sur les navires M/V HUATO et M/V CEYNOWA et débarqués sous les adresses de la société SAT et des Établissements CCD; que cette saisie a été faite pour sûreté et avoir paiement d’une créance de 4 074.390,55FF.
Attendu que la créance en paiement de laquelle la saisie conservatoire a été pratiquée résulte des contrats de vente N 93081du 4 novembre 1999 et N 0041du 4 janvier 2000 par lesquels la société BAUCHEalivré à la SAT successivement 1500 et 750 tonnes de sucre; que cette créance n’est pas contestée par la SAT qui cependant a émis des réserves sur le montant réel; que le litige relatif à cette créance est pendant devant le tribunal de première instance de Lomé et dont la cour de céans est relative à la régularité ou non de la saisie pratiquée sur les marchandises en garantie du paiement de ladite créance.
Attendu qu’il ressort également des pièces du dossier que suivant ordonnance N 390 du 6 août 2001, le Président du Tribunal de Première Instance de Lomé a déclaré irrégulière et abusive la saisie et a ordonné la restitution des marchandises saisies sous astreinte de 1 000 000 F CFA par jour de résistance.
SUR L’INCOMPETENCE DU JUGE DES REFERES
Attendu que l’article 49 de l’Acte Uniforme portant sur le recouvrement simplifié et voies d’exécution dispose en son alinéa ter « La juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute autre demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d’urgence ou le magistrat délégué par lui ».
Attendu que l’appelante fonde l’incompétence du Juge des référés en la présente cause sur les dispositions de l’article 141de l’Acte Uniforme portant sur le recouvrement simplifié et voies d’exécution; que l’article 141sus-évoqué est relatif à la procédure de distraction alors qu’en l’espèce, il s’agit d’un litige né de l’exécution d’une ordonnance aux fins de saisies conservatoires; qu’un tel litige diffère d’une demande en distraction relevant selon l’article 49 sus-indiqué de la compétence du Juge des référés et non du Juge de fond comme compétente de la faire croire l’appelante; que c’est à bon droit que le Juge des référés s’est déclaré compétent; qu’il échet donc de rejeter ce moyen comme non fondé.
SUR LA VALIDITE DES SAISIES PRATIQUEES
Attendu que c’est se prévaut de l’existence d’une créance dont la SAT et le sieur TEFRIDJ sont débiteurs que la société appelante a fait pratiquer les saisies sur les marchandises débarquées sur les navires M/V HUATO et M/V CEYNOWA. que pour justifier ces saisies l’appelante a estimé que lesdites marchandises sont la propriété de la SAT et du sieur TEFR.
Attendu qu’en matière de transport maritime, le connaissement est l’unique document qui détermine le destinataire final et donc le propriétaire des marchandises transportées, étant entendu qu’il peut faire l’objet d’endossement.
SUR LA SAISIE PRATIQUEE SUR LA CARGAISON DEBARQUEE DU NAVIRE M/V HUATO.
Attendu qu’il est constant en l’espèce selon les pièces produites au débat relativement aux 1.500 tonnes de sucre transportées par le navire M/V HUATO et entreposées dans les magasins de la NITRA, sont au nom du propriétaire la société SUCDEN et le notify adress les Établissements C.C.D. transitaire et prestataire de service ayant à sa charge les marchandises entreposées; que nulle part sur les connaissements relatifs aux 1500 tonnes de sucre ne figurent les noms de SAT et du sieur TEFRIDJ; que le saisi a déclaré n’être pas propriétaire de la marchandise transportée sur ledit navire, ce que conteste l’appelante.
Attendu que s’il y a identité apparente entre SAT CCD et du sieur TEFRIDJ qui peut faire présumer que la cargaison appartient à SAT et au sieur TEFRIDJ, les connaissements cependant prouvent le contraire; qu’ainsi ou ne peut pratiquer la saisie sur la cargaison transportée par le navire M/V HUATO sans avoir apporté la preuve formelle qu’elle est la propriété du saisi; qu’il y adonc lieu de rejeter la demande de l’appelante comme non justifiée.
SUR LA SAISIE PRATIQUEE SUR LA CARGAISON DEBARQUEE DU NAVIRE M/V CEYNOWA
Attendu que s’agissant des 2000 tonnes de sucre débarquées du navire M/V CEYNOWA, il ressort des mentions portées sur les connaissements relatifs à ladite cargaison que ces connaissements ont été endossés par la société CEREALIS qui à son tour l’a endossé aux Établissements C.C.D et le notify adress la SAT c’est-à-dire la personne à aviser de l’arrivée de la marchandise.
Attendu qu’il ressort de ces éléments que ces sociétés impliquées dans l’importation et les traitements administratif et douanier que la SAT et CCD s’identifient à la personne du débiteur le sieur TEFRIDJ dont on peut présumer qu’il est le propriétaire de la marchandise débarquée du navire M/V CEYNWA.
Attendu que si l’identité apparente de la SAT et du sieur TEFRIDJ montre à suffisance que le débiteur est impliqué dans le traitement de la marchandise débarquée du navire M/V CEYNOWA, cette identité apparente n’induit pas de facto que LA CARGAISON saisie sur le navire M/V CEYNOWA appartient au débiteur.
Attendu en effet qu’il ressort des divers documents et pièces produits notamment les connaissements 11ANRLFW 101, 11ANRLFW 101et 11ANRLFW 103 relatif aux 2000 tonnes de sucre transportées par le navire M/V CEYNOWA, le contrat de tierce détention CMA 358/01-TG-SAT/CEREALIS en date du 28 juin 2001, de la correspondance entre CEREALIS et SGS-TOGO en date du 18 juillet 2001, de la correspondance entre SGS et la SAT en date du 21 août 2001démontrent que le saisi n’est pas le propriétaire de LA CARGAISON saisie; que de l’analyse de ces documents et pièces, il ressort que si les connaissements ont été endossés au nom de CCD pour formalités, CCD ne devient pas pour autant propriétaire de la marchandise; que la SAT et CCD ne sont que des commissionnaires ayant en charge les formalités de transit relatives à LA CARGAISON pour le compte du propriétaire CEREALIS.
Attendu qu’il résulte ainsi de tout ce qui précède qu’en déclarant irrégulière et abusive la saisie pratiquée sur les deux navires et en ordonnant la restitution des marchandises, le Juge des référés a fait une saine appréciation de la loi; qu’il échet donc de confirmer l’ordonnance entreprise.
Attendu que sur la demande de l’appelante tendant à voir vendre LA CARGAISON saisie pour le prix de vente être consigné au greffe de la Cour d’Appel pour le compte de qui il appartiendra, la demande est sans objet; qu’il échet de la rejeter.
SUR L’EXECUTION PROVISOIRE
Attendu que les intimés sollicitent l’exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant toutes voies de recours.
Attendu qu’au regard de ce qui précède tendant à l’invalidation de la saisie contestée d’une part, vu la nature de LA CARGAISON en concurrence du sucre en l’état périssable d’autre part et enfin d’en disposer dans les meilleurs délais de la marchandise saisie; qu’échet de faire droit à la demande de l’exécution provisoire formulée par les intimés.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale et en cause d’appel.
EN LA FORME.
Reçoit l’appel.
Au fond.
Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions.
Rejette toutes les autres demandes de l’appelante comme non fondées.
Ordonne l’exécution provisoire du présent arrêt; Condamne l’appelante aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de Lomé, Chambre Civile, les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.