J-06-136
RECOUVREMENT DES CREANCES ET VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – ACTES UNIFORMES – APPLICATION DANS LE TEMPS. – APPLICATION DE L’AUPSRVE AUX PROCEDURES INITIEES APRES LE 11JULLET 1998.
A la suite d’une saisie conservatoire pratiquée sur ses biens le 7 août 1998, une personne, portant le même nom que le débiteur et s’estimant saisie à tort, demande la nullité de la saisie pour non respect des formalités et mentions prévues par les articles 64 et 65 de l’Acte Uniforme sur le recouvrement et les voies d’exécution, ainsi que la distraction, à son profit, des biens saisis. Elle fait appel du jugement du Tribunal Régional de Thiès qui l’a déboutée au motif que les dispositions de l’Acte Uniforme susvisé n’étaient pas applicables.
La Cour d’appel infirme le jugement en considérant qu’aux termes de l’article 9 du Traité OHADA, les actes uniformes entrent en vigueur quatre vingt dix jours après leur adoption sauf modalités particulières d’entrée en vigueur prévues par l’acte uniforme lui-même; qu’ils sont opposables trente jours francs après leur publication au journal officiel de l’OHADA. Elle expose que l’Acte Uniforme sur le recouvrement simplifié et les voies d’exécution renvoie, en son article 338, au dit article 9 du traité sans aucune mention particulière; qu’ayant été adopté le 10 avril 1998 et publié le 1er juin 1998, il est entré en vigueur le 11 juillet 1998 et est opposable aux Etats parties un mois après sa publication, soit à partir du 1er juillet 1998; qu’étant applicable, en vertu de l’article 337 aux mesures conservatoires et d’exécution engagées après son entrée en vigueur, il s’applique aux procédures dont les requêtes ont été déposées après le 11 juillet 1998. La Cour en déduit qu’en l’espèce, la requête ayant été introduite le 20 juillet 1998, les actes de procédure doivent être soumises aux formalités prévues par les articles 54 et suivants et que le procès-verbal de saisie ne respecte pas les formalités et mentions prévues par ces nouvelles dispositions.
COUR D’APPEL DE DAKAR, Arrêt n 16 du 05 janvier 2001ABDALAH OULD HAFFED (Mes Sow, Seck & Diagne) C/ ABDOUL AZIZ SYLLA, Me Madoky NDIAYE, Ahmadou O. CHAFFED (Mes Kane & Niane).
LA COUR
PRESENTS.
– Mouhamadou DIAWARA, Président.
– Mamadou DEME et Mamadou DIAKHATE, Conseillers. Papa NDIAYE, Greffier.
ENTRE :
ABDALAH OULD HAFFED, commerçant demeurant à Mbour élisant domicile en l’étude de Mes Sow, Seck & Diagne, avocats à la Cour.
Appelant.
Comparant et concluant à l’audience par l’organe desdits avocats.
D’une part.
Et :
ABDOUL AZIZ SYLLA, commerçant 29 Rue Tolbiac à Dakar.
Mr AHMADOU OULD HAFFED, commerçant 39, Rue Gransland à Dakar.
Me Makody NDIAYE, commissaire Priseur à Thiès.
Elisant domicile en l’étude de Mes Kane & Niane, avocats à la Cour.
Intimés.
Comparant et concluant par l’organe desdits avocats; D’autre part.
LES FAITS.
Suivant exploit de Me Malick NDIAUYE, Huissier de justice à Dakar en date du 13 avril 1999, le sieur Abdallah Ould HAFFEDa interjeté appel d’un Jugement rendu le 18/02/1999 par le Tribunal Régional de THiès, présidé par Monsieur Lamine COULIBALY en présence de Me El Hadji Mamadou NDIAYE, Greffier, enregistré le 26/11/1999 sous le bordereau n 261, Vol VIII, F 18,case 256 aux droits (illisible).
Et par le même exploit, le sieur Abdallah Ould HAFFEDa fait servir assignation aux sieurs ABDOUL AZIZ SYLLA, AHMADOU OULD HAFFED et à Me Madoky NDIAYE d’avoir à comparaître et se trouver par-devant la Cour d’Appel de Dakar, Chambre Civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 07/05/1999 pour y venir voir et entendre statuer sur les mérites de son recours.
Sur cette assignation, l’affaire inscrite au rôle de la Cour sous le numéro 418 de l’année 99a été appelée à la date pour laquelle ladite assignation avait été servie.
A cette date, affaire a été appelée par Monsieur le Secrétaire Général chargé de la mise en état et a été renvoyée plusieurs fois jusqu’au 17/11/2000 data à laquelle elle a été utilement retenue.
Mes Sow, Seck & Diagne, pour le compte de Abdallah Ould HAFFED et Ahmadou Ould HAFFED ont déposé des conclusions en date du 11 août 1999 tendant à ce qu’il plaise à la Cour :
« Déclarer les appels principal et incident recevable en la forme.
Au fond.
Infirmer le jugement du Tribunal Régional de Thiès du 18 février 1999.
Statuant à nouveau.
Déclarer nul le procès verbal du 07 août 1998 et par conséquent juger irrecevable la procédure ou paiement et validité de saisie conservatoire.
Ordonner au profit de Abdallah Ould HEFFAD la distraction des objets saisis suivant procès verbal du 07 août 1998 de Maître Papa Sourakatou DIENE, huissier de justice à Thiès.
Condamner le sieur Abdoul Aziz SYLLA aux entiers dépens d’instance et d’appel dont distraction d’usage ».
A leur tour, Mes Kane & Niane, pour le compte de Abdoul Aziz SYLLA ont déposé des conclusions en date du 23 mars 2000 tendant à ce qu’il plaise à la Cour.
« En la forme.
Statuer ce que de droit sur l’appel principal de Abdalah Ould HAFFED et l’appel incident de Ahmadou Ould HAFFED; Au fond.
Entendre confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions.
Condamner les appelants aux entiers dépens »; Les débats ont été clos.
Sur quoi Monsieur le Président a mis l’affaire en délibéré pour l’arrêt à intervenir à la date du 29/12/2000.
DROIT.
La cause en cet état présentait à juger les différents points de droit résultant du dossier et des conclusions prises par les parties en cause.
QUID DES DEPENS?
A la date du 29/11/2000 le délibéré a été prorogé au 05/01/2001.
Advenue l’audience publique et ordinaire de ce jour 05/01/2001la Cour mêmement composée, vidant son délibéré a statué ainsi qu’il suit :
LA COUR
Vu les pièces du dossier.
Ouï les parties en toutes leurs demandes, fins et conclusions.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
Considérant que suivant acte en date du 16 avril 1999, Abdallah Ould HAFFEDa assigné Abdoul Aziz SYLLA partie saisissante, Ahmadou Ould HAFFED partie saisie et le commissaire priseur Madoky NDIAYE en appel du jugement rendu parle Tribunal Régional de Thiès le 18 février 1999 qui a rejeté en la forme la demande d’annulation de l’exploit et l’exception d’irrecevabilité pour défaut de précision des éléments du droit de propriété, avant de le débouter de sa demande en distraction et dire n’y avoir lieu à annuler le procès verbal de saisie conservatoire du 07/08/1998.
Qu’il aen outre condamné Ahmadou HAFFED à payer à Abdoul Aziz SYLLA la somme de 10 048.400 francs outre les intérêts de droit et validé la saisie conservatoire jusqu’à concurrence de ce montant outre l’exécution provisoire jusqu’à concurrence de la totalité.
Considérant que suivant autre exploit en date du 31mai 1999, Abdallah Ould HAFFED a, en vertu d’une autorisation présidentielle n 358/99 du 27 mai 1999, réassigné Ahmadou Ould HAFFED aux mêmes fins que ci-dessus.
Considérant que l’appel est recevable pour avoir été interjeté dans les forme et délai légaux.
AU FOND
LES FAITS
Considérant que par ordonnance en date du 27 juillet 1998, le Président du Tribunal Régional de Thiès a autorisé Abdoul Aziz SYLLA à pratiquer une saisie conservatoire avec enlèvement sur les biens de Ahmadou Ould HAFFED.
Que le 07 août 1998, SYLLAa fait procéder à la saisie conservatoire.
Que le sieur Abdallah Ould HAFFED après avoir saisi le juge des référés aux fins de mainlevée a assigné le saisissant, le saisi et le commissaire priseur en distraction à son profit des biens qu’il déclare avoir été saisis dans sa boutique suivant procès-verbal de saisie conservatoire en date du 07 août 1998.
Que les procédures de distraction et de paiement ont été jointes à l’audience du 07 janvier 1999.
I SUR LA NULLITE POUR VIOLATION DES DISPOSITIONS DES ARTICLES 64 ET SUIVANT DE L’ACTE UNIFORME DE L’OHADA
Considérant que Ahmadou Ould HAFFED soulève la nullité du procès verbal de saisie conservatoire pour défaut des mentions exigées par l’article 64, notamment l’élection de domicile, l’indisponibilité et la garde des biens, le droit du débiteur de solliciter la mainlevée, la désignation de la juridiction compétente en matière de contestation, l’identité des personnes ayant assisté aux opérations de saisie, la reproduction des dispositions pénales sanctionnant le détournement d’objets saisis et de celles des articles 62 et 63.
Qu’il invoque également la violation de l’article 65 exigeant la signification du procès-verbal au saisi absent au moment des opérations de saisie.
Qu’il estime qu’aucune de ces dispositions n’a été respectée par le saisissant dans le procès verbal dressé par Papa Sourakhatou DIENE le 07 août 1998; qu’il encourt l’annulation compte tenu de la nullité absolue prévue par les articles 64 et suivant de l’Acte Uniforme.
Qu’il reproche au premier juge d’avoir retenu que les dispositions de l’Acte Uniforme portant Organisation des procédures simplifiées de Recouvrement et des Voies d’Exécution ne sont pas applicables en l’espèce.
Considérant que Abdallah Ould HAFFED invoque les dispositions de l’article 9 et de l’article 338 dudit article.
pour conclure que l’Acte Uniforme est entré en vigueur le 10/71/1998 et a été publié le 1ef juin 1998 et qui le rend opposable le Zef juillet 1998; qu’ayant sollicité une ordonnance de saisie le 27 juillet 1998 et procédé à ladite saisie le 07 août 1998, le procès verbal devait impérativement respecter les dispositions de l’acte uniforme; qu’il sollicite en conséquence l’infirmation du jugement entrepris.
II SUR LA DEMANDE DE DISTRACTION
Considérant que Abdallah Ould HAFED au premier juge d’avoir rejeté sa demande au motif que l’acte introductif d’instance ne mentionne pas le certificat d’inscription au RCCM, les quittances de règlement d’impôt et l’avenant au contrat de bail qui doivent être écartés des débats; qu’il estime pour sa part que toutes les pièces qui fondent la distraction y sont visées et attestent sa propriété.
Qu’il précise que les pièces écartées par le premier juge ont pour but d’éviter la confusion entre lui-même Abdallah Ould HAFFED et Ahmadou Ould HAFFED, sa propriété étant attestée par les factures; qu’il précise que le saisi Ahmadou Ould HAFFED débiteur de SYLLA, exerce son commerce à Dakar au 39, rue Grasland comme en fait foi le procès verbal du 11/08/1998 et est domicilié à la rue 39 x 22 Médina comme cela résulte des titres de créances produits par SYLLA.
Que pour sa part, il s’appelle Abdallah et tient sa boutique à Mbour où la saisie a été opérée; que n’étant ni débiteur, ni associé au débiteur, ni garant, il ne peut être poursuivi du chef de cette créance; qu’il verse aux débats diverses factures justifiant sa propriété; qu’il plaide l’infirmation du jugement et la distraction des objets saisis à son profit en application de l’article 139 de l’Acte Uniforme.
Considérant que Abdoul Aziz SYLLA conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la nullité du procès verbal et condamné Ahmadou Ould HAFFED à lui payer la somme de 10 048.400 francs.
Que sur l’application, il rappelle avoir déposé sa requête aux fins de saisie conservatoire le 20/07/1998 et a été autorisé à pratiquer la saisie le 27/07/1998; qu’il considère en application de l’article 9 du traité que l’Acte Uniforme sur les PSRVE adopté le 10/04/1998; qu’il est entré en vigueur le 11 juillet 1998 avant d’être opposable le 11 août 1998; qu’il en déduit dès lors qu’à la date d’introduction de la requête, l’AUPSRVF n’était pas applicable; qu’ainsi Ahmadou Ould HAFFED est malvenu de réclamer l’application de l’Acte Uniforme.
Mais considérant qu’aux termes de l’article 9 du traité, les actes uniformes entrent en vigueur quatre vingt dix jours après leur adoption sauf modalités particulières d’entrée en vigueur prévues par l’acte uniforme lui-même; ils sont opposables 30 jours francs après leur application au journal officiel de l’OHADA.
Considérant que l’Acte Uniforme sur le recouvrement simplifié et les voies d’exécution renvoie en son article 338, audit article 9 du traité sans aucune modalité particulière; qu’ayant été adopté le 10 avril 1998 et publié le Zef juin 1998, il est entré en vigueur le 11 juillet 1998 et est opposable aux Etats parties un mos après sa publication, soit à partir du 1er juillet 1998; qu’étant applicable, en vertu de l’article 337 aux mesures conservatoires et d’exécution forcée engagées après son entrée en vigueur, il s’applique aux procédures dont les requêtes ont été déposées après le 11 juillet 1998.
Qu’en l’espèce, la requête ayant été introduite le 20/07/1998, les actes de procédure doivent être soumises aux formalités prévues par les articles 54 et suivants.
Considérant que le procès verbal de saisie ne respecte pas les formalités et mentions prévues par ces nouvelles dispositions, notamment la mention en caractères très apparents du droit qui appartient au débiteur de demander mainlevée de la saisie à la juridiction compétente du lieu de domicile si les conditions de validité ne sont pas réunies, la signification du procès verbal de saisie à Ahmadou Ould HAFFED, celui-ci n’étant pas présent au moment de la saisie; qu’il échet infirmant, le jugement entrepris et statuant à nouveau conformément à l’article 65, d’annuler le procès verbal de saisie conservatoire du 7 août 1998 et d’ordonner la mainlevée.
Considérant que Abdoul Aziz SYLLA sera tenu aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort.
Reçoit l’appel de Abdallah Ould HAFFED contre le jugement du Tribunal Régional de Thiès du 18/02/1999; Y faisant droit, infirme le jugement entrepris.
Statuant à nouveau, dit que l’Acte Uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution est applicable.
Annule le procès verbal de saisie conservatoire du 07/08/1998.
Condamne Abdoul Aziz SYLLA aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de Dakar, Chambre Civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 05 janvier 2001séant au Palais de justice de ladite ville Bloc des Madeleines à laquelle siégeaient Monsieur Mouhamadou DIAWARA, Président, Messieurs Mamadou DEME et Mamadou DIAKHATE, Conseillers et avec l’assistance de Maître Papa NDIAYE, Greffier.
ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET.
LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.