J-06-140
SOCIETES COMMERCIALES – SARL – ASSOCIE – ACTION SOCIALE – MANDAT DE L’ASSOCIE POUR AGIRaSA PLACE – VALIDITE DU MANDAT (OUI).
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE DELIVRER OU RESTITUER UN BIEN MEUBLE CORPOREL – FONDEMENT CONTESTATBLE DU DROIT DE PROPRIETE DU DEFENDEUR.
L’associé dans une SARLaun intérêt légitime à agir, et le mandat qu’il a pu donner à une personne pour le représenter dans cette action, est valable.
Le défendeur a une injonction de délivrer un véhicule, intentée par le demandeur, ne peut fonder son droit de propriété, pour résister à cette demande, sur une transaction emportant cession d’un véhicule faite devant la gendarmerie, les conditions de cette transaction étant suspectes et le véhicule appartenant à la société dont le signataire de la transaction est gérant sans pouvoir de disposer de ce bien social.
Article 1134 DU CODE CIVIL
Article 2044 DU CODE CIVIL
Cour d’appel de Cotonou, ARRET N 65/99 du 29 avril 1999, Monsieur « a » CONTRE Société « B ».
LA COUR
I. FAITS ET PROCÉDURE
Par exploit d’huissier en date à Cotonou du 08 juin 1998, la Société « B » a attrait devant le Tribunal de Première Instance statuant en matière de référé civil Monsieur « a » en restitution du véhicule marque Mercedès immatriculé N » X » sous astreinte comminatoire de dix mille (10 000) francs CFA par jour de retard.
Elle a sollicité en outre l’exécution provisoire sur minute de la décision nonobstant toutes voies de recours.
Vidant son délibéré le 25 juin 1998, le Tribunal saisi a disposé ainsi qu’il suit :
Renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent, vu l’urgence :
– Ordonnons à Monsieur « a » de restituer à la Société « B » représentée par Monsieur « C », le véhicule de marque Mercedès immatriculé « N X ».
– Disons que l’exécution provisoire n’aura lieu qu’après enregistrement.
Condamnons Monsieur « a » aux entiers dépens.
Suivant acte d’huissier en date à Cotonou du 09 juillet 1998, Monsieur « a » a relevé appel de la décision sus-citée.
Il MOYENS DE L’APPELANT
Attendu que pour le compte de Monsieur « a », Maître Rafikou ALABI, son conseil, conclut à l’infirmation de l’ordonnance N 073/1ère Chambre Civile du 25 juin 1998 en ce qu’elle a été obtenue en violation de l’article 1134 du Code Civil.
Qu’il expose à l’appui de sa demande que, Courant Octobre 1997, Monsieur « a » a acquis en France un autobus d’occasion de marque Mercedes de type 1013 qu’il aenvoyé au Bénin.
Qu’une Société dénommée « B » représentée par un certain « D » ,a demandé à lui acheter ledit véhicule.
Que Monsieur « a » dut accepter cette offre et la Société « B » ne pouvant payer le véhicule au comptant s’engage a apayer l’intégralité de la somme de six millions (6 000 000) de francs CFA convenue dès le premier virement de l’opération de café en cours.
Qu’après avoir pris possession dudit bus et l’avoir immatriculé en son nom sous le numéro N » X », la Société « B » exploita allègrement ledit véhicule sans se soucier de payer son créancier.
Que ne pouvant honorer son engagement, la Société « B » dut renoncer à l’achat dudit véhicule et le restitua amiablement à son légitime propriétaire suivant acte signé des deux parties le 7 mai 1998.
Qu’il est écrit dans l’acte sus indiqué :
« Le véhicule appartenant à la Société « B » n’est plus sa propriété. Cet autobus appartient désormais à « a ».
Que ledit véhicule a été ainsi restitué en l’état à son propriétaire ainsi que les pièces y afférentes aux fins de changement de nom.
Qu’il fut surpris de recevoir le 28 août 1998 un exploit de signification d’une ordonnance de référé rendue par défaut le 25 juin 1998 par le Président du Tribunal de céans à la requête de la Société « B » laquelle serait représentée par, un certain « C » suivant procuration du Président du Conseil d’Administration de ladite Société, lui enjoignant de restituer le bus.
Qu’il soutient d’une part le défaut de qualité de Monsieur « E » Président du Conseil d’Administration à agir en justice subséquemment et de son mandataire « C ».
Qu’en effet, une Société doit agir en principe par l’entremise de ses représentants légaux et statutaires.
Que la Société « B » étant une Société à Responsabilité limitée (SARL) doit en principe agir par l’entremise de son gérant, lequel ne peut déléguer son pouvoir sauf dans le cas où la loi et les statuts prévoient cette délégation.
Que dans ce cas il doit être fait mention de l’article qui prévoit cette délégation dans l’assignation.
Qu’il ressort de l’extrait du Registre du commerce de la Société « B » que celle-ci a pour seul gérant Monsieur « D ».
Que le défaut de qualité étant sanctionnée par une fin de non recevoir liée au fond, peut être invoquée en tout état de cause même pour la première fois en appel.
Qu’il s’en suit que l’action de la Société « B » doit être déclarée irrecevable et l’ordonnance querellée infirmée de ce chef.
Que d’autre part l’ordonnance entreprise a été obtenue en fraude des droits de Monsieur « a ».
Que l’acte du 7 mai 1998, par lequel la Société « B » a renoncé à l’achat du bus et reconnu la propriété de Monsieur « a » sur ledit véhicule vaut en effet transaction entre les parties conformément aux dispositions des articles 2044 et suivants du Code Civil.
Que l’article 2052 dudit Code dispose les transactions ont entre les parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort Que l’acte du 7 mai 1998, en vertu duquel le véhicule automobile de marque Mercedes immatriculé sous le numéro N 6057 RB est désormais la propriété de « a » ,adonc acquis l’autorité de chose jugée en dernier ressort.
Que la Société SIVAPI est mal fondée à réclamer ledit véhicule devant le juge des référés sur présentation de la carte grise et l’ordonnance querellée doit être infirmée de ce chef.
III.) MOYENS DE L’INTIMÉE
Attendu qu’en réplique aux moyens de l’appelant, Maître Alphonse « C », conseil de la Société « B » expose sur le moyen tiré du défaut de qualité du mandataire de Monsieur « E », Président du Conseil d’Administration, que la Société « B » est une Société à Responsabilité Limitée qui a plusieurs associés.
Que Monsieur « E » est l’un des associés de cette Société comme Monsieur « a ».
Que les statuts de la Société ont prévu parmi les administrateurs de la Société un Président Directeur Général.
Que Monsieur « E », en sa qualité de Président Directeur Général, a le droit de saisir la juridiction compétente de tout litige intéressant la Société.
Qu’il a en outre le droit de donner mandat à qui bon lui semble.
Que surabondamment, en qualité d’associé, Monsieur « E » a le droit d’agir en justice pour sauvegarder les intérêts de la Société « B » dont il est un associé.
Qu’il justifie en sa qualité d’associé d’un intérêt légitime pour agir.
Que cette faculté découle des articles 163, 326 aI 2 et 328 du Traité de l’OHADA portant droit uniforme des Sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique.
Que le moyen tiré du défaut de qualité est donc à rejeter en raison de ce qu’il est radicalement infondé.
Que s’agissant de l’acte du 7 mai 1998 sur lequel Monsieur « a » fonde son droit de propriété sur le véhicule dont s’agit, il soutient que le gérant doit agir dans l’intérêt de la société.
Qu’il ne peut logiquement pas céder seul un bien social à un associé à savoir Monsieur « a ».
Qu’une telle décision excéderait son pouvoir de gérant.
Qu’elle ne peut être que collective.
Que conformément à l’article 284 du Traité de l’OHADA précité : » les décisions collectives sont prises en Assemblée ou par consultation écrite si la réunion d’une assemblée n’est demandée par l’un des associés ».
Qu’ainsi est de plein droit inopposable aux associés l’acte en date du 07 mai 1998.
signé entre Monsieur « a » et Monsieur « D » et en fraude des droits de la Société « B ».
Que dans ces conditions, la Société « B » au nom de laquelle est immatriculée le véhicule dont s’agit, pour l’avoir régulièrement acquis, est fondée à en réclamer restitution.
Qu’il échet donc de confirmer l’ordonnance querellée.
IV. DISCUSSION
A/ En la forme
Attendu que Monsieur « a » a relevé son appel dans les forme et délai prescrits par la loi.
Qu’il échet de l’y déclarer recevable.
B/ Sur le fond
Sur le défaut de qualité du mandataire de Monsieur « E »
Attendu qu’il ressort de la déclaration aux fins d’immatriculation au registre de commerce en date à Cotonou du 30 décembre 1994 que Monsieur « E » est Fondé de Pouvoir à la Société « B ».
Qu’avant d’être Fondé de Pouvoir, Monsieur « E » est un associé de la Société « B ».
Qu’aux termes de l’article 323 du Traité précité « la Société à Responsabilité Limitée est gérée par une ou plusieurs personnes physiques associées ou non… ».
Que contrairement à ce qui est soutenu par l’appelant, Monsieur « D » n’est pas la seule personne ayant qualité pour agir en justice pour le compte de la Société « B ».
Qu’en effet, tout associé a qualité, pour agir en justice toutes les fois que cela se situe dans l’intérêt légitime de la Société.
Que dans le cas d’espèce, Monsieur « E » a donné mandat à Monsieur « C » pour empêcher Monsieur « a » de sortir de manière frauduleuse le véhicule dont il s’agit du patrimoine de la Société « B ».
Que Monsieur « E », associé de la Société « B » ayant un intérêt légitime à agir, a pu valablement donner mandat à Monsieur « C ».
Que le moyen tiré du défaut de qualité du mandataire de l’associé et Fondé de Pouvoir de la Société « B », Monsieur « E », n’est pas fondé.
Qu’il y a lieu de le rejeter.
Sur la propriété du véhicule de marque Mercedes immatriculé N » X »
Attendu qu’il résulte des pièces faisant foi que le livre de bord, la carte grise du véhicule de marque Mercedes objet du litige est immatriculé au nom de la Société « B » sous la N » X ».
Que l’acte du 7 mai1998 sur lequel Monsieur « a » semble vouloir fonder son droit de propriété sur le véhicule dont s’agit est contestable et contesté.
Qu’en effet, s’il est vrai que l’article 2052 du Code Civil dispose que les transactions entre les parties ont l’autorité de la chose jugée, encore faudrait-il que lesdites parties aient pu librement exprimer leur accord.
Que dans le cas d’espèce, l’acte du 7 mai 1998a été signé entre Monsieur « a » et Monsieur « D » à la Brigade Territoriale de Gendarmerie de Cotonou.
Qu’une Brigade de gendarmerie n’est pas le lieu le plus indiqué pour exprimer librement son consentement.
Que Monsieur « D », gérant de la Société « B » devant agir dans l’intérêt de la Société, ne peut logiquement pas seul céder un bien social de la Société « B » à un autre associé.
Que l’acte du 7 mai 1998 est inopposable aux autres associés.
Qu’il s’en suit que ledit acte sur lequel Monsieur « a » fonde tout son droit de propriété n’est pas valable.
Qu’il y a lieu de dire que c’est à bon droit que le premier Juge saisi a ordonné la restitution du véhicule de marque Mercedes immatriculé N » X » par Monsieur « a » à la Société « B » et de confirmer l’ordonnance entreprise.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé civil, en appel et en dernier ressort.
EN LA FORME.
Déclare Monsieur « a » recevable en son appel.
AU FOND.
L’y déclare mal fondé.
Confirme purement et simplement en toutes ses dispositions l’ordonnance N 073 rendue le 25 juin 1998 par la Première Chambre Civile du Tribunal de Première Instance de Cotonou.
Condamne l’appelant aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de Cotonou les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le PRESIDENT et le GREFFIER.
COMPOSITION DE LA COUR.
PRESIDENT Monsieur ArsènecaPO-CHICHL.
CONSEILLERS Madame Ginette AFANWOUBO épouse HOUNSA.
Messieurs.
Francis HODE; Mathieu NOUDEVIWA.
MINISTERE PUBLIC Madame Bernadette HOUNDEKANDJI.
épouse CODJOVI.
GREFFIER Madame Reine TSAWLASSOU.