J-06-164
PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT – INJONCTION DE PAYER.
VENTE D’IMMEUBLE – RELIQUAT DU PRIX IMPAYE – INJONCTION D EPAYER FONDEE.
Faits : La CITIMAa interjeté appel du jugement du 19 septembre 2002 dans l’affaire qui l’opposait au Dr FEZEU Paul.
La CITIMA prétendait que c’est à tort que l’opposition du Dr FEZEU contre l’ordonnance d’injonction de payer du 16 janvier 2002 avait été déclarée fondée, alors que la créance remplissait les conditions des articles 1et 2 de l’Acte uniforme OHADA N 6. La CITIMA expliquait qu’elle avait conclu avec le Dr FEZEU, un contrat pour l’achat d’un immeuble, moyennant 100 000 000 de francs. Après le versement de cette somme, le Dr FEZEU violant les engagements souscrits, avait rehaussé le prix de 60 000 000 de francs et le sommait, par exploit en date du 04 décembre 2001, à payer ce complément, faute de quoi la somme avancée lui serait restituée. C’est cette somme qui fondait la créance de la CITIMA, laquelle, résultant d’un contrat régulier, remplit les exigences posées dans l’Acte uniforme N 6.
Dr FEZEU, en réplique, soutenait qu’on ne saurait parler de dette dans ce cas, le chèque ayant été donné en paiement, et la sommation produite devant être considérée comme une mise en demeure de payer.
Solution des juges : Les juges d’appel ont examiné l’origine de la créance fondement de l’injonction de payer. Ils ont pu établir que celle-ci, prenant sa source dans le contrat de vente d’immeuble passé entre le Dr FEZEU et la CITIMA, avait bien une cause contractuelle. Par ailleurs, sa certitude, sa liquidité, son exigibilité étaient bel et bien établis par le Dr FEZEU lui-même, qui a clairement notifié à son cocontractant, sa ferme intention de révoquer le contrat les liant, sous huitaine, au cas où il ne paierait pas les 60 000 000 exigés, et de restituer le cas échéant, la somme de 100 000 000 avancée.
Infirmant le jugement entrepris, ils ont décidé que la créance de la CITIMA remplissait toutes les conditions requises par les articles 1et 2 de l’Acte uniforme et que l’opposition du Dr FEZEU était non fondée.
Cour d’appel du Centre à Yaoundé, arrêt n 399/CIV du 16 mai 2003, la CITIMA contre. Sieur FEZEU Paul.
République du Cameroun.
Paix. Travail. Patrie.
Cpte n 134P/2002-2003.
Audience du 16 mai 2003.
La CITIMA.
(Me KENFACK).
contre.
Sieur FEZEU Paul.
(Me MBOUNY).
La Cour d’Appel du Centre, siégeant en matière civile et commerciale, en Chambre de Conseil, conformément à la loi n 89/021du 29 décembre 1989 modifiée par celle n 96/10 du 07 août 1996 en son article 8 (2), en son audience publique ordinaire tenue au Palais de Justice de Yaoundé, le vendredi seize mai de l’an deux mil trois, à neuf heures dix minutes, et en laquelle siégeaient en collégialité :
Messieurs :
– YOSSA Christophe, Vice Président de la Cour d’Appel du Centre, Président.
– ELA Emmanuel Thierry, Conseiller à la Cour d’Appel du Centre, Membre.
– Madame MNOMO ZANGA Marie, Conseiller à la Cour d’Appel du Centre, Membre.
Avec l’assistance de Maître DOUMBE Jeanne Noëlle, Greffier.
A rendu l’arrêt suivant :
Entre :
– La CITIMA, appelante, représentée par Maître KENFACK et Associés, Avocat au Barreau du Cameroun, comparant et plaidant par ledit Conseil.
d’une part.
Et.
– Sieur FEZEU Paul, intimé, représenté par Maître MBOUNY, Avocat au Barreau du Cameroun, comparant et plaidant par ledit Conseil.
d’autre part.
Sans que les présentes qualités puissent nuire ou préjudicier aux intérêts et droits des parties, mais au contraire, sous les plus expresses réserves de fait et de droit.
POINT DE FAIT.
Le 19 septembre 2002, intervenait dans la cause pendante entre les parties, un jugement civil contradictoire n 652 rendu par le Tribuna1de Grande Instance du Mfoundi, et dont le dispositif suit :
Par ces motifs
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale et en premier ressort.
– Reçoit le Dr FEZEU Paul en son action.
– L’y dit fondé.
– Condamne la CITIMA aux dépens distraits au profit de Maîtres NGANDA et MBOUNY, Avocats aux offres de droit.
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique, les mêmes jour, mois et an que ci-dessus.
Suivent les signatures.
Ensuite se trouve la mention d’enregistrement dont la teneur suit :
« Enregistré à Yaoundé (Actes Judiciaires) le 15 01.2003, vol. 6 fol. 703case et Bd 255 ».
Signé illisible./.
Par requête en date du 16 octobre 2002, déposée et enregistrée à la Présidence de la Cour de céans, le 17 du même mois, sous le n 121, la CITIMA, sous la plume de son Conseil Maître KENFACK Francis, exposait ce qui suit :
A l’honneur de vous exposer :
Qu’elle interjette appel du jugement n 652 rendu le 19 septembre 2002 par le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé, dans la cause qui l’oppose à Sieur FEZEU Paul.
C’EST POURQUOI, ELLE SOLLICITE QU’IL VOUS PLAISE, MONSIEUR LE PRESIDENT.
Vu les articles 189 et suivants du code de procédure civile et commerciale, ensemble les dispositions de l’article 15 de l’Acte Uniforme OHADA n 6.
– Lui donner acte du dépôt de la présente requête.
– Fixer la date de production des défenses et celle à laquelle la cause sera appelée à l’audience.
– Dire que du tout, il sera donné avis aux parties, par Madame le Greffier en Chef.
Advenue laquelle audience, l’exposante conclura qu’il plaise à la Cour.
EN LA FORME
Le présent appel est régulier et recevable, parce que formé dans les délai et forme de la loi.
Au fond
C’est à tort que l’opposition de sieur FEZEU Paul contre l’ordonnance d’injonction de payer n 43 du 16 janvier 2002a été déclarée fondée.
En effet, il est sans conteste que la créance de la requérante remplit les conditions des articles 1et 2 de l’Acte Uniforme OHADA n 6.
Bien plus, sieur FEZEUatoujours reconnu sa dette et s’est toujours proposé de la payer.
Il y adonc lieu d’infirmer le jugement attaqué, et de dire sieur FEZEU non fondé en son opposition.
PAR CES MOTIFS
EN LA FORME
– Recevoir la CITIMA SA en son appel, parce que fait dans les forme et délai de la loi.
Au fond
– Infirmer le jugement entrepris.
Statuant à nouveau.
– Dire sieur FEZEU non fondé en son opposition, et l’en débouter.
– Le condamner à tous les dépens distraits au profit de Maîtres KENFACK et EY ANGOH, Avocats aux offres de droit.
Sous toutes réserves.
Yaoundé, le 16 octobre 2002.
Signé illisible.
Par ordonnance en date du 09 décembre 2002, le Président de la juridiction saisie donnait acte du dépôt de la présente requête à l’appelante, disait qu’avis sera donné aux parties par Madame le Greffier en Chef de la Cour de céans.
– 1 /a l’intimé, de la copie de ladite requête ainsi que l’ordonnance.
– 2 /a l’appelante, de la présente ordonnance.
– Fixait au 13 décembre 2002, la date limite de production des défenses par l’intimé, et au 20 décembre 2002, celle de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée.
La cause, sur cette notification inscrite au rôle de la Cour à l’audience sus-indiquée, fut appelée à son tour et retenue à celle du 02 mai, après renvois utiles.
Monsieur le Président a fait le rapport de l’affaire.
Maître MBOUNY Jacques, pour l’intimé, a déposé des conclusions écrites datées du 1er avril 2003, et dont la teneur suit :
PAR CES MOTIFS
– Constater que l’appelante ne rapporte pas la preuve de sa créance, son exigibilité, sa certitude et sa liquidité.
– Constater que le contentieux entre les deux parties a donné lieu à des expertises et à une décision d’arrêt des travaux, toute chose qui prouve à suffire, que les parties ne sont pas dans le cadre d’un recouvrement simplifié de créance.
– Confirmer par conséquent, le jugement rendu le 19 septembre 2002 par le Tribunal de Grande Instance du Mfoundi.
– Condamner la CITIMA SA aux entiers dépens distraits au profit de Maître MBOUNY, Avocat aux offres de droit.
Et ce sera justice.
Profonds respects.
Yaoundé, le 1er avril 2003.
Signé illisible.
Maîtres KENFACK et EY ANGOH, pour l’appelante, ont déposé des conclusions écrites datées du 24 avril 2003, et dont le dispositif suit :
PAR CES MOTIFS
Vu le chèque n 2085832 du 26 juin 2000 tiré sur la Standard Chartered Bank, ensemble le relevé de compte.
– Constater que sieur FEZEUaperçu la somme de 100 000 000 de francs CFA (cent millions).
Vu la sommation de sieur FEZEU adressée au représentant légal de la CITIMA SA, le 04 décembre 2001, ensemble son exploit d’opposition à injonction de payer du 1er février 2002 au 6e paragraphe du verso.
– Constater qu’il reconnaît sa dette et a promis de la payer 08 jours après la sommation du 04 décembre 2001, soit le 12 décembre 2001.
– Dire que la créance de la CITIMA sur sieur FEZEU, est certaine, liquide et exigible, aux dires même des actes du débiteur.
– Dire enfin que la créance tire son origine d’un contrat, et remplit, dès lors, les exigences de l’Acte uniforme OHADA sur le recouvrement simplifié des créances.
– Dire que les autres procédures opposant les mêmes parties devant les Tribunaux n’ont aucun impact sur la présente procédure.
– Voir donc infirmer le jugement entrepris.
Statuant à nouveau.
– Condamner sieur FEZEU Paul à payer les sommes suivantes à la CITIMA SA :
– 100 000 000 FCFA en principal.
– 11.875 000 FCFA au titre d’intérêts de droit.
– 10 000 000 FCFA au titre de frais de recouvrement.
Soit au total, la somme de 121.875 000 FCFA (cent vingt et un millions huit cent soixante quinze mille francs).
– Condamner enfin, sieur FEZEU à tous les dépens distraits au profit de Maîtres KENFACK et EY ANGOH, Avocats aux offres de droit.
Sous toutes réserves.
Yaoundé, le 24 avril 2003.
Signé illisible.
Maître SACK Luc, MBUNY et NGANDA, ont, pour l’intimé, déposé des conclusions écrites datées du 02 mai 2003, et dont le dispositif suit :
PAR CES MOTIFS
Vu la procédure suivie par l’appelante.
Vu le jugement entrepris et les textes légaux, notamment les articles 1et 2 de l’Acte uniforme OHADA n 6 sur le recouvrement des créances et les voies d’exécution.
– Constater qu’il y a difficulté à l’établissement univoque du rapport créancier/débiteur, en l’espèce.
– Dire et juger dès lors, que la créance, s’il y a lieu, ne remplit pas le critère de la certitude et n’est pas exigible.
– En conséquence, confirmer le jugement entrepris.
– Condamner la Société CITIMA SA, représentée par sieur NOUBISSI Christophe, aux dépens dont distraction au profit de Maîtres Luc SACK, J. MBOUNY et Simon Pierre NGANDA, Avocats aux offres de droit.
Sous toutes réserves.
Yaoundé, le 02 mai 2003.
Signé illisible./.
Maître MBOUNY, pour FEZEU Paul,a déposé des conclusions écrites datées du 30 mai 2003, dont le dispositif suit :
PAR CES MOTIFS
– Constater que le chèque, dans la présente cause, constitue un paiement et non la preuve d’une dette pour provision inexistante ou insuffisante, comme l’exige l’Acte Uniforme OHADA.
– Constater que la CITIMA allègue la créance contractuelle, mais ne produit pas le contrat.
– Dire que s’agissant d’une vente, le contrat n’est pas résolu unilatéralement, mais judiciairement.
– Dire que l’inexécution, si elle n’est pas justifiée, donne deux actions à l’acheteur : l’exécution forcée (réalisation de vente) ou la résolution de vente avec dommages intérêts.
– Dire que le juge de l’injonction de payer est incompétent à résoudre une vente et à ordonner le remboursement de la somme avancée, la résolution judiciaire étant une demande préalable à tout remboursement en matière de vente.
– Constater que le cadre contractuel des parties dans la présente cause, ne permet pas de parler de certitude, de liquidité ou d’exigibilité, conditions nécessaires pour une injonction de payer.
– Confirmer par conséquent, le premier jugement.
– Condamner la CITIMA aux dépens distraits au profit de Maître Jacques MBUNY, Avocat aux offres de droit.
Et ce sera justice.
Profonds respects.
Yaoundé, le 30 mai 2003.
Signé illisible.
Sur ce, la Cour a déclaré les débats clos, et l’affaire mise en délibéré, pour arrêt être rendu à l’audience du 16 mai 2003.
Advenue cette dernière audience, la Cour, vidant son délibéré par l’organe de son Président a rendu à haute voix et en collégialité, l’arrêt dont la teneur suit :
LA COUR
Vu le jugement civil n 652 rendu le 19 septembre 2002 par le Tribunal de Grande Instance du Mfoundi.
Vu l’appel interjeté le 17 octobre 2002 contre ledit jugement, par la CITIMA SA, ayant pour Conseil, Maître KENFACK.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Ouï Monsieur le Président du siège en la lecture de son rapport.
Ouï les parties en leurs fins, moyens et conclusions.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
Considérant que la CITIMA SA a interjeté appel contre le jugement civil n 652 du Tribunal de Grande Instance de Yaoundé, lequel jugement avait déclaré le Docteur FEZEU Paul fondé en son opposition à injonction de payer, et ordonné la rétractation de l’ordonnance n 43 rendue par Madame la Présidente du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi, laquelle ordonnance faisait injonction au Docteur FEZEU de payer à la CITIMA SA, la somme de 121.875 000 francs en principal, intérêts et frais de procédure.
EN LA FORME
Considérant que l’appel de la CITIMA SA est régulier et recevable, comme interjeté dans les forme et délai légaux.
Considérant que toutes les parties représentées à l’audience ont conclu par l’organe de 1eurs Conseils.
Qu’il y a lieu de statuer par arrêt contradictoire à leur égard.
Au fond
Considérant que la CITIMA SA reproche au premier Juge d’avoir déclaré le Docteur FEZEU fondé dans sa procédure d’opposition formulée contre l’ordonnance d’injonction de payer querellée, alors que l’examen des pièces au dossier révèle, d’une part, que sieur FEZEUatoujours reconnu sa dette; qu’i1s’est du reste, proposé de payer, et que d’autre part, la créance en fondement de l’ordonnance d’injonction de payer remplit les conditions fixées par les articles 1et 2 de l’Acte uniforme OHADA n 6 portant recouvrement simplifié et voies d’exécution.
Qu’elle explique qu’elle avait conclu avec le Docteur FEZEU, l’achat d’un immeuble à usage d’habitation, moyennant la somme de FCFA 100 000 000 (cent millions).
Qu’elle s’était libérée de son obligation, en lui versant ladite somme, suivant le chèque n 2085832 tiré sur la STANDARD CHARTERED BANK et dûment encaissé par ce dernier, comme en fait foi le relevé de compte banCAIRE produit aux débats.
Que rompant unilatéralement les engagements souscrits, le Docteur FEZEU rehaussait le prix de l’immeuble à la somme de francs CFA 160 000 000 (cent soixante millions), puis par exploit en date du 04 décembre 2001, il somma le représentant légal de la citima sa d’avoir à lui verser dans les huit jours, le complément du prix, soit (60 000 000) soixante millions, faute de quoi, la somme avancée lui sera purement et simplement restituée.
Qu’il se dégage des termes mêmes de cette sommation, que la créance de la CITIMA SA est certaine, liquide et exigible depuis le 12 décembre 2001, c’est-à-dire huit jours après l’exploit d’huissier servi le 04 décembre 2001.
Que la créance litigieuse résultant d’un contrat régulier et arrêté par les parties, tel que le reconnaît sieur FEZEU lui-même, toutes les exigences posées dans l’Acte uniforme OHADA n 6 se trouvent remplies.
Qu’elle conclut à l’infirmation du jugement entrepris et à la condamnation du sieur FEZEU Paul, au paiement des sommes suivantes, à la CITIMA SA :
– 100 000 000 FCFA (cent millions) en principal.
– 11.875 000 FCFA (onze millions huit cent soixante quinze mille francs).
– 10 000 000 FCFA (dix millions) à titre des frais de recouvrement.
Soit au total 121.875 000 FCFA.
Considérant qu’en réplique, Maîtres MBONY et SACK, Conseils de l’intimé, font valoir que contrairement aux affirmations dénaturées du droit avancées par l’appelante, la vente génère une obligation de faire.
Que lorsque l’acheteur estime que le vendeur n’a pas exécuté son obligation, qui consiste à délivrer la chose s’il estime qu’il a payé le prix, il aune alternative : soit le forcer à délivrer la chose, soit à demander 1a résolution avec dommages et intérêts.
Que dans le cas d’espèce, la CITIMA SA devait, soit assigner en réalisation forcée de la vente, soit en résolution avec remboursement et dommages intérêts.
Que l’on ne saurait parler de dette dans le cas d’espèce, le chèque ayant plutôt été donné en paiement partiel, et ne saurait être considéré comme une dette; et par conséquent, la sommation produite est une mise en demeure de payer de l’intimé, adressée à l’appelante, et non l’inverse.
Que la CITIMA ne saurait engager deux actions pour une même créance.
Qu’ils expliquent que les intérêts et frais contenus dans l’injonction de payer feront double emploi, si le juge du fond présentement saisi, ordonne le paiement d’autres dommages intérêts.
Qu’ils ajoutent qu’en ordonnant de payer la somme réclamée par l’appelante, la Cour risque de préjudicier au fond, puisqu’elle aura décidé que la vente est résolue du fait du Docteur FEZEU, ce qui n’est pas de son pouvoir, ledit contentieux étant déjà pendant devant le juge du fond.
Que relativement à la vente, ils font valoir que l’action en résolution est préalable à tout remboursement.
Que si la CITIMA ne veut ou ne peut obtenir la délivrance forcée de la dette, elle peut demander la résolution de la vente, après avoir mis le Docteur FEZEU en demeure; la résolution aura alors un caractère judiciaire, sauf si le contrat comporte une clause résolutoire, (ce qui n’est pas le cas) et l’acheteur ne peut, unilatéralement, résoudre le contrat (article 1184 du Code civil).
Que seul le juge du fond saisi en résolution de vente, pourra interpréter le contrat et déterminer les responsabilités des parties.
Qu’en l’espèce, l’expertise démontre à suffire, que l’immeuble du Docteur FEZEUasubi des dégâts, du fait de la CITIMA SA.
Quel serait, dès lors, le sort des droits du docteur, s’il était déjà condamné à rembourser la somme de cent millions de francs, avant que le juge du fond ne statue sur la faute de l’un ou de l’autre?.
Qu’il conclut a la confirmation du jugement entrepris.
Considérant que Maître KENFACK, Conseil de 1a CITIMA SA, rétorque que si la résolution judiciaire est une prescription légale, la même loi donne toute la force voulue à la résolution amiable.
Qu’en offrant de rembourser la somme de cent millions reçue dans le cadre de la vente, et en acceptant de les recevoir, les parties ont entendu se soustraire des contraintes liées à la procédure de résolution judiciaire.
Mais considérant qu’au sens précis et formel des articles l et 2 de l’Acte uniforme OHADA n 6, la créance susceptible de recouvrement par la voie de la procédure d’injonction de payer, doit remplir quatre conditions cumulatives.
Elle doit être :
– certaine, c’est-à-dire indubitable.
– liquide, c’est-à-dire susceptible d’évaluation en somme d’argent.
– exigible, c’est-à-dire à terme échu.
– d’origine contractuelle, c’est-à-dire résultant d’un rapport d’obligations.
Considérant qu’en l’espèce, la créance en fondement de l’ordonnance d’injonction de payer litigieuse, prend sa source dans le contrat de vente d’immeuble passé entre le docteur FEZ EU et la société CITIMA SA.
Qu’outre la rencontre des deux volontés qui doit sous-tendre tout contrat, les obligations réciproques qui en découlent naturellement ont connu à tout le moins, un début d’exécution de la part de CITIMA SA, qui a remis un chèque d’un montant de francs CFA cent millions, au Docteur FEZEU, qui reconnaît « expressis verbis » l’avoir encaissé (voir relevé de compte banCAIRE et sommation du 04 décembre 2001versés au dossier).
Considérant que la forme notariée exigée par le législateur de 1974, ne vise qu’à donner toute l’efficacité voulue à une telle convention : le vernis de solennité requis contribuant à la rendre opposable « erga omnes ».
D’où il suit que la créance litigieuse a bel et bien une source contractuelle.
Considérant s’agissant de la condition de certitude, qu’elle ne fait l’ombre d’aucune contestation, le Docteur FEZEU ayant reconnu dans la sommation qu’il a lui même servie à l’appelante, le 04 décembre 2001, avoir reçu une avance de somme d’argent de la part de la société CITIMA.
Que s’agissant de la liquidité, la photocopie d’un chèque d’un montant de francs CFA cent millions, régulièrement encaissé par le Docteur FEZEU, donne à la créance dont le recouvrement est poursuivi, le caractère de liquidité requis par la loi.
Que s’agissant enfin de l’exigibilité, elle découle de cette même sommation de payer, dans laquelle le Docteur FEZEU se fixe lui-même la date butoir du 12 mai 2001, pour restituer la somme de cent millions de francs CFA perçue.
Considérant au surplus, que contrairement à la thèse développée par l’intimé, l’appelante a entendu fonder son action, non pas sur l’article 1184 du code civil, qui traite de la condition résolutoire du contrat synallagmatique, mais plutôt sur les dispositions de l’article 1134 du code civil, et des conséquences qui découlent de la révocation d’un contrat, suite à un consentement mutuel.
Considérant en effet que cet article dispose : » les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ».
Qu’en droit, la conséquence de la révocation mutuelle, est la remise des choses en l’état où elles se trouvaient auparavant, toute idée du préjudice évacuée.
Considérant qu’en l’espèce, le sieur FEZEUaclairement notifié à son cocontractant, sa ferme intention de révoquer le contrat les liant, sous huitaine, au cas où il ne paierait pas les soixante millions exigés, et de restituer le cas échéant, la somme de cent millions de francs avancée.
Que la CITIMA SA a adhéré à cette offre de révocation exprimée par le sieur FEZEU, en acceptant de recevoir le prix payé.
Considérant que ce faisant, les deux parties ont certainement et nécessairement entendu se soustraire de toutes autres contraintes.
Considérant qu’il est de jurisprudence assise, que le consentement mutuel des parties à une révocation de la convention les liant peut être déduit, par le juge du fond, de l’ensemble des éléments de la cause (CS CO. arrêt n 39/CC du 30 mai 1967, bull. n 16 P.1809 ).
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, que le juge du premier degré n’a pas fait une saine appréciation des faits de la cause et une exacte application de la loi.
Qu’il échet, en conséquence, d’infirmer le jugement entrepris.
Considérant que la créance de la CITIMA SA réunit toutes les conditions requises par les articles 1et 2 de l’Acte uniforme OHADA n 6 portant recouvrement simplifié et voies d’exécution.
Qu’il échet, compte tenu de tout ce qui précède, de dire le Docteur FEZEU non fondé en son opposition, et de le condamner en conséquence, à payer à la CITIMA SA, la somme de FCFA 100 000 000 en principal, majorée des intérêts de droit au taux légal de 7%, à compter de la demande en justice, c’est-à-dire, la date de dépôt de la requête aux fins d’injonction de payer.
Considérant qu’il échet en outre de le condamner au paiement des frais de justice que la Cour évalue souverainement à la somme de sept millions de francs (7 000 000 FCFA).
Considérant que la partie qui succombe supporte les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement en chambre de conseil, en appel et en dernier ressort.
EN LA FORME
– Reçoit l’appel interjeté.
Au fond
– Infirme le jugement entrepris.
Statuant à nouveau :
– Condamne le Docteur FEZEU à payer à la CITIMA la somme de 100 000 000 francs CFA (cent millions de francs CFA) en principal, majorée d’intérêts de droit au taux égal annuel de 7% à compter de la demande en justice.
– Le condamne en outre au paiement des frais de justice évalués à la somme de 7 000 000 FCFA (sept millions) et aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique les mêmes jour, mois et an que dessus.
Et ont signé sur la minute, le Président, les membres et le Greffier en approuvant lignes mots rayés nuls et renvois en marge bons.
Le Président Le 1er Membre.
Le 2e Membre Le Greffier.