J-06-170
PROCEDURES COLLECTIVES – DEMANDE DE REGLEMENT PREVENTIF – CESSATION DES PAIEMENTS AVEREE – PRONONCE DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE.
S’il s’avère impossible d’exécuter un concordat préventif demandé par le débiteur dans les délais légaux, la cessation des paiements est avérée et le tribunal doit prononcer le redressement judiciaire
La cessation des paiements est avérée si le cumul du passif constitue le double du chiffre d’affaires.
Article 25 AUPCAP
Tribunal régional hors classe de Dakar, jugement n° 93 du 11 juin 2004 Sur requête aux fins de règlement préventif du Complexe MBAYANG SARL.
TRIBUNAL REGIONAL HORS CLASSE DE DAKAR (SENEGAL)
AUDIENCE PUBLIOUE ORDINAIRE DU 28 MAI 2004
Le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar, statuant en matière de procédures collectives a, en son audience publique ordinaire tenue le 11 juin de l’an deux mille quatre à laquelle siégeaient Monsieur Birane N.lANG, Président de chambre, Madame Aminata FALL CISSE et Monsieur Mouhamadou Lamine BA, Juges au siège, membres, en présence de Monsieur lbrahima BAKHOUM, Substitut de Monsieur le Procureur de la République et avec l’assistance de Maître Cheikhou Oumar SALL, Greffier, rendu le jugement dont la teneur suit :
LE TRIBUNAL
Attendu que par requête en date du 06 février 2004 le complexe Mbayang et Cie SARL a sollicité auprès du Tribunal son admission en règlement préventif;
EN LA FORME
Attendu que par ordonnance no 263/2004 du 19 février 2004 rendue par le Président du Tribunal de céans, il a été ordonné la suspension des poursuites individuelles avec désignation de Monsieur Idrissa NIANG aux fins de dresser un rapport sur la situation économique et financière du complexe Mbayang SARL;
Que le 23 avril 2004 l’expert a déposé son rapport;
Attendu que l’action a été introduite dans les forme et délai de la loi;
Qu’il échet de la déclarer recevable;
AU FOND
Attendu qu’à l’appui de sa requête aux fins de règlement préventif le Complexe Mbayang SARL fait observer qu’intervenant dans le secteur des services de gardiennage et nettoiement, il a vu son chiffre d’affaires se rétrécir de manière drastique au cours des trois dernières années passant de 147.696.657frs en 2000 à 117.568.250frs en 2001 et 69.547.618 en 2003, alors que ses charges sociales et fiscales n’ont pas varié;
Que les plans de redressement opérés n’ont pas permis le rétablissement de l’équilibre économique et financier de la société à cela s’ajoute une exécution forcée de la part de ses créanciers et le cumul du passif exigible est de 178.483.397frs;
Mais qu’il poursuit en affirmant qu’en dépit de la menace grave, il ne désespère pas dans les trois années à venir de retrouver son niveau d’exploitation normale et de faire face à ses engagements en désintéressant l’ensemble de ses créanciers puisque son résultat d’exploitation est en hausse de 16% par an en valeur absolue;
Attendu qu’aux termes de l’article 25 de l’acte Uniforme sur les Procédures Collectives d’Apurement du Passif est en cessation des paiements le débiteur qui est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible;
Qu’il résulte du rapport de l’expert Idrissa NIANG que le solde des engagements de la Société Mbayang SARL est de 178.483397frs;
Que selon l’expert, dans la mesure où les créances doivent être désintéressées dans un délai de trois ans et celles des travailleurs dans un délai maximum d’un an sur la base d’un compte d’exploitation provisionnel qui montre un résultat net de 18.484.001frs CFA en 2004, 25.178.475frs en 2005 et 32.604.582frs en 2006, le plan concordataire proposé par le débiteur ne peut être exécuté;
Qu’il résulte de cela que le passif du débiteur est de loin supérieur à son actif et que la situation ainsi décrite est celle d’un état de cessation des paiements puisque le cumul du passif constitue le double du chiffre d’affaire;
Qu’il échet en conséquence de prononcer le redressement judiciaire du Complexe Mbayang SARL étant entendu que l’exécution du plan concordataire et la réalisation des contrats signés sont une chance d’apurer son passif et de fixer la date de cessation des paiements au Il novembre 2002;
Qu’il y a lieu également de désigner Monsieur Chérif Sidou CISSE comme juge commissaire et Monsieur Alassane SECK comme Syndic;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, sur requête, en matière commerciale et en premier ressort;
EN LA FORME
- Déclare l’action recevable
AU FOND
- Prononce le redressement judiciaire du complexe Mbayang SARL;
- Fixe la date de cessation des paiements au 11 novembre 2002;
- Désigne Monsieur Chérif Sidou CISSE comme juge commissaire et Alassane SECK comme syndic;
- Passe les dépens aux frais privilégiés;
Observations de Joseph ISSA-SAYEGH
On doit approuver les tribunaux lorsqu’ils font une application stricte des règles du règlement préventif. Cette procédure collective doit être une mesure de sauvegarde pour éviter la cessation des paiements et non un palliatif au redressement judiciaire. L’obtention comme l’exécution du concordat préventif sont enfermées dans des règles strictes qui doivent être strictement respectées.
Par contre, on peut émettre des réserves sur la définition de la cessation des paiements lorsque le tribunal affirme : « Qu’il résulte de cela que le passif du débiteur est de loin supérieur à son actif et que la situation ainsi décrite est celle d’un état de cessation des paiements puisque le cumul du passif constitue le double du chiffre d’affaires ». Il nous semble qu’il y a là un lapsus calamae puisque la cessation des paiements ne peut être, à la fois, une insuffisance de l’actif pour régler le passif et une insuffisance de chiffre d’affaires par rapport au passif. Il se peut fort bien qu’une entreprise enregistre un chiffre d’affaires faible mais un important actif, par ailleurs, largement suffisant pour faire face au passif, soit que cet actif consiste en liquidités, soit en meubles et immeubles, soit les deux.