J-06-175
PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ABSENCE DE MENTIONS PREVUES PAR L’ARTICLE 4 AUPSRVE DANS LA REQUETE – SUPPLEANCE DE CES MENTIONS PAR DES MENTIONS EQUIVALENTES DANS LE MÊME ACTE OU DANS UN ACTE SEPARE (NON) – NULLITE DE LA REQUETE.
SIGNIFICATION DE L’ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – DEFAUT D’INDICATION DU DELAI D’OPPOSITION, DE LA JURIDICTION COMPETENTE ET DES FORMES DE L’OPPOSITION – NULLITE DE LA REQUETE (ARTICLE 8 AUPSRVE).
– Le défaut d’indication de la forme sociale et du siège social du saisissant dans la requête aux fins d’obtenir une injonction de payer est une cause de nullité qui ne peut être réparée par leur suppléance par d’autres mentions équivalentes dans le même acte ou par acte séparé.
– De même, doit être annulé l’acte de signification de l’ordonnance dans lequel ne sont pas indiqués le délai et les formes de l’opposition ni la juridiction compétente pour en connaître.
Article 4 AUPSRVE
Article 8 AUPSRVE
Cour d’appel du Centre à Yaoundé, arrêt n 0373/C du 18 juin 2003, Affaire : Société caMINSUR contre Société EQUINOXE-DESIGNERS.
Faits : La société caMINSUR a interjeté appel contre le jugement du 19 janvier 2000 qui rejetait son opposition à injonction de payer contre la société EQUINOXE-DESIGNERS.
Au soutien de son appel, elle évoquait la violation des articles 4 de l’Acte uniforme OHADA N 6, en ce que l’identification faite par la Société EQUINOXE ne contenait de précision ni sur sa forme sociale, ni sur son siège social; et 8 du même acte en ce que la signification faite par l’huissier était nulle, car elle n’indiquait ni le délai, ni la juridiction, encore moins les formes dans lesquelles l’opposition doit être faite; et qu’enfin, elle ne se reconnaît pas débitrice des sommes réclamées par EQUINOXE.
A ces allégations, EQUINOXE répondait par la théorie des équipollents, qui interdit le prononcé de l’irrecevabilité de l’acte lorsque d’autres éléments sont consignés dans l’acte incriminé ou en dehors de cet acte pour le complément. Elle soutenait avoir joint à sa requête d’autres éléments précisant le siège social et l’objet social et alléguait que l’article 8 n’a pas été violé.
Solution des juges : Les juges d’appel ont décidé que les dispositions des actes uniformes sont d’ordre public. Ils ont infirmé le jugement entrepris en les basant sur le fait que l’objet et le siège social de la société caMINSUR n’avaient pas été précisés.
République du Cameroun.
Paix. Travail. Patrie.
Cpte n 232 /P/1999-2000.
Audience du 18 juin 2003.
Arrêt n 373/CIV du 18 juin 2003.
Civil contradictoire.
La Société caMINSUR.
(Me Guy NOAH).
contre.
La Société EQUINOXE DESIGNERS.
(Mes MUNA & KASSOK).
­ Opposition à injonction de payer.
La Cour d’Appel du Centre, siégeant en matière civile et commerciale, en la salle ordinaire de ses audiences, sise au Palais de Justice de Yaoundé, le mercredi dix-huit juin deux mil trois, et en laquelle siégeaient en collégialité :
– Monsieur BIAKAN à NGON Jeannot, vice-Président de la Cour d’Appel du Centre; Président.
– Monsieur MANDENG Fidèle, vice-Président de la Cour d’Appel du Centre; Membre.
– Madame DAHIROU, Conseiller à la Cour d’Appel du Centre; Membre.
Assistés de Maître MPOT Thomas; Greffier.
A été rendu l’arrêt suivant :
ENTRE :
– La Société caMINSUR, BP 12500 à Yaoundé, ayant pour Conseil Maître Guy NOAH, Avocat à Yaoundé, appelante, comparant et plaidant par ledit Conseil.
d’une part.
ET :
– La Société EQUINOXE DESIGNERS, ayant pour Conseils Maîtres MUNA & KISSOK, Avocats à Yaoundé, BP 307, intimée, comparant et plaidant par lesdits Conseils.
d’autre part.
Sans que les présentes qualités puissent nuire ou préjudicier aux droits et intérêts des parties en cause, mais au contraire, sous les plus expresses réserves de faits et de droit.
POINT DE FAIT.
Le 19 janvier 2000, intervenait entre les parties en cause, un jugement civil n 238 rendu par le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé, dont le dispositif suit :
PAR CES MOTIFS–
« Statuant publiquement, réputé contradictoire du défendeur et contradictoire à l’égard du demandeur, en matière civile et commerciale et en premier ressort.
– Reçoit l’opposition et l’y dit non fondée, et la rejette.
– Condamne le demandeur aux entiers dépens.
– Ainsi fait, jugé et prononcé en audience en audience publique, les mêmes jour, mois et an que ci-dessus.
Et ont signé sur la minute, le Président et le Greffier, en approuvant lignes et _ mots rayés nuls, ainsi que _ renvois en marge bons.
Pour expédition certifiée conforme.
Signé illisible.
Par requête en date du 02 février 2000, enregistrée à la Présidence de la Cour Suprême, le 03 du même mois, sous le n 991, la Société Cameroon INSURANCE SA, déclarait ce qui suit :
Qu’elle interjette formellement appel du jugement n 238 rendu le 19 janvier 2000 par le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé, statuant en Chambre de Conseil, qui a déclaré non fondée son opposition à l’ordonnance d’injonction de payer n 10 rendue le 11 novembre 1998 par le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé.
C’est pourquoi, elle sollicite qu’il vous plaise, Monsieur le Président.
Vu les articles 189, 190 et 191du Code de Procédure Civile et Commerciale du Cameroun.
– Lui donner acte du dépôt de la présente requête d’appel.
– Fixer la date à laquelle l’exposante produira ses défenses et celle à laquelle sera appelée la cause à l’audience.
– Dire que du tout, il sera donné avis aux parties, par Monsieur le Greffier en Chef.
Advenue laquelle audience, l’exposante conclura qu’il plaise à la Cour.
Attendu que le présent appel est régulier, pour avoir été fait dans les forme et délai prescrits par la loi.
Au fond
Attendu que par exploit en date du 13 novembre 1998 de Maître BIYIK Thomas, Huissier de Justice à Yaoundé, la Société EQUINOXE DESIGNERSasignifié à la requérante, une ordonnance n 10 rendue le 11 novembre 1998 par le Président du Tribunal de Grande Instance de Yaoundé et portant injonction de payer la somme de FCFA 12 052.518.
Attendu que par exploit de Maître BILONG MINKA Jeannette, Huissier de Justice à Yaoundé, en date du 24 novembre 1998, l’exposante a fait opposition à cette injonction de payer.
Attendu que le jugement querellé a rejeté ladite opposition.
Qu’en décidant ainsi, le premier Juge n’a pas fait une exacte application du droit.
Qu’en effet, aux termes de l’article 4 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement de créances et des voies d’exécution, la requête doit contenir, à peine d’irrecevabilité, les noms, prénoms, professions et domiciles des parties, ou, pour les personnes morales, leur forme.
Attendu que la requête du 11 novembre 1993 présentée par la Société EQUINOXE DESIGNERS, 37300 JOUE LES TOURS, ayant pour Conseils Maître MUNA et KISSOK, Avocats, BP 307 Yaoundé, au cabinet desquels elle élit domicile, aux fins des présentes et ses suites.
Que la requête ne contenait ni la précision sur sa forme sociale, ni sur son siège social.
Qu’une telle requête devait être déclarée irrecevable.
Que par ailleurs, l’exploit de signification du 13 novembre 1998 délivré par Me BIYIK Thomas, Huissier de Justice à Yaoundé, était nul.
Qu’en effet, l’article 8 de l’Acte uniforme prescrit, à peine de nullité de la signification, l’indication du délai dans lequel l’opposition doit être fondée, la juridiction devant laquelle elle doit être portée, et les formes selon lesquelles elle doit être faite.
D’avertir le débiteur qu’il peut prendre connaissance, au Greffe de la juridiction compétente dont le Président a rendu la décision d’injonction de payer, des documents produits par le créancier et que, à défaut d’opposition dans le délai indiqué, il ne pourra plus exercer aucun recours, et pourra être contraint par toutes voies de droit, à payer les sommes réclamées.
Attendu que ladite signification du 13 novembre 1998 ne comportait pas les indications ci-dessus prescrites, à peine de nullité.
Qu’au surplus, l’exposnnte ne se reconnaît pas débiteur des sommes réclamées par la Société EQUINOXE DESIGNERS.
Attendu que devant le premier Juge, EQUINOXE DESIGNERS n’a pas répliqué à ses arguments, reconnaissant par-là même, leur pertinence.
Qu’elle n’a non plus produit aucune pièce de nature à justifier sa créance.
Qu’en statuant comme il l’a fait, le premier Juge n’a pas fait une saine appréciation des faits de la cause, ni une juste application de la loi.
Qu’il y a lieu d’infirmer le jugement querellé.
PAR CES MOTIFS
– Voir constater que la requête du 10 novembre 1993 présentée par la Société EQUINOXE DESIGNERS ne contient pas de précision sur la forme sociale ni sur son siège social, en violation des dispositions de l’article 4 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement de créances et des voies d’exécution.
– Voir constater que la violation de l’article 8 dudit acte est prescrite à peine de nullité.
En conséquence, infirmer le jugement n 238 rendu le 19 janvier 2000 par le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé.
– Voir déclarer nulle et de nul effet, la signification du 13 novembre 1996 faite par exploit de Maître BIYIK Thomas, Huissier de Justice à Yaoundé.
Statuant à nouveau.
– Voir rétracter l’ordonnance n 10 rendue le 12 novembre 1993 par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de Yaoundé.
– Condamner la Société EQUINOXE DESIGNERS aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Guy NOAH, Avocat aux offres de droit.
Sous toutes réserves.
Signé illisible.
Par ordonnance en date du 04 octobre 2002, le Président de la Cour donnait acte d dépôt de sa requête à l’intéressée; ordonnait la communication par Madame le Greffier en Chef :
1 / à l’intimé, de ladite requête ainsi que la présente ordonnance.
2 / à l’appelante, de la présente ordonnance.
– Fixait au 20 novembre 2002, la date de l’audience à laquelle la cause sera appelée.
La cause ainsi notifiée a été portée au rôle de la Cour à l’audience, et appelée en ordre utile à l’audience, pour être retenue à celle du 21mai 2003, après des renvois utiles.
Le Président a fait le rapport de l’affaire.
Auparavant, Maîtres MUNA et Associés ont produit des conclusions à l’audience du 19 mars 2003, dont le dispositif suit :
PAR CES MOTIFS
– Dire et juger qu’en droit et en jurisprudence constante, la théorie des équipollents interdit le prononcé de l’irrrecevabilité de l’acte, lorsque d’autres éléments d’infirmation se trouvent soit dans l’acte incriminé, soit en dehors de cet acte.
– Dire et juger qu’en droit et en jurisprudence, dans le cas d’espèce, au soutien de sa requête d’injonction de payer datée du 10/11/1998, l’exposante a joint des documents complétant les mentions omises.
EN CONSEQUENCE :
– Rejeter la fin de non recevoir tirée de la violation de l’article 4 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution soulevée par l’appelante, dilatoire et non fondée.
– Constater en l’espèce, que la concluante a précisé le montant de la somme globale due, indiquer la voie de recours à exercer par le débiteur dans le délai de quinze jours, la juridiction compétente, et à défaut d’opposition, la possibilité d’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance d’injonction de payer.
– Constater que l’appelante n’a subi aucun grief et a pu faire valoir régulièrement, dans les délais légaux, ses moyens de défense.
– Dire et juger que la motivation du premier Juge est conforme à la jurisprudence constante de la Haute Juridiction Communautaire, qui rappelle que : » Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution a expressément prévu que l’inobservation de certaines formalités prescrites, est sanctionnée par la nullité. Toutefois, pour quelques-unes de ces formalités limitativement énumérées, cette nullité ne peut être prononcée que si l’irrégularité a eu pour effet, de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l’invoque ».
EN CONSEQUENCE :
– Rejeter les vices de forme soulevés par l’appelante, comme impertinents.
Au fond
– Constater que la créance litigieuse est conforme aux prescriptions légales du Législateur communautaire.
– Dire et juger que le premier Juge a bien dit le droit.
EN CONSEQUENCE.
– Confirmer le jugement n 238 du 19/01/2000, en tous ses points.
– SOUS TOUTES RESERVES.
Signé illisible.
SUR CE, les débats ayant été déclarés clos et la cause mise en délibéré pour le 18 juin 2003, la Cour, vidant son délibéré a rendu l’arrêt suivant :
LA COUR
Vu le jugement n 238 rendu le 19 janvier 2000 par le Tribunal de Grande Instance du Mfoundi.
Vu l’appel relevé contre ladite décision.
Ouï Monsieur le Président en son rapport.
Ouï les parties en leurs prétentions.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME
Considérant que par requête reçue à la Cour d’Appel du Centre, le 03 février 2000 et enregistrée sous le n 991, Me Guy NOAH, Avocat à Yaoundé, agissant au nom et pour le compte de la Société Cameroon ISURANCE SA, a déclaré interjeter appel contre le jugement n 238 rendu le 19 janvier 2000 par le Tribunal de Grande Instance du Mfoundi, dans la cause l’opposant à la Société EQUINOXE DESIGNERS.
Qu’il y a lieu de recevoir l’appel, comme fait dans les forme et délai prescrits par la loi.
Considérant que toutes les parties ont conclu et comparu; qu’il échet de statuer contradictoirement.
Au fond
Considérant que par exploit en date du 13 novembre 1998, la Société EQUINOXE DESIGNERSa fait signifier une ordonnance n 10 rendue le 11 novembre 1998 par le Président du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi, portant injonction de payer la somme de 12 052.518 FCFA.
Qu’elle a fait opposition à cette injonction de payer.
Que le jugement dont appela rejeté ladite opposition.
Que l’appelant relève que le premier Juge a violé les dispositions de l’article 4 de l’Acte uniforme de l’OHADA n 6.
Qu’il fait observer que l’identification de la Société EQUINOXE DESIGNERS n’était pas complète; qu’elle ne contenait ni la précision sur sa forme sociale, ni sur son siège social.
Qu’en outre, il soutient que la signification du 13 novembre 1998 de Maître BIYIK Thomas, Huissier de Justice à Yaoundé, a violé l’article 8 du même acte, qui prescrit, à peine de nullité, que la signification doit porter l’indication du délai dans lequel l’opposition doit être formée, la juridiction devant laquelle elle doit être portée, et les formes selon lesquelles elles doivent être faites.
Qu’enfin, elle ne se reconnaît pas débitrice des sommes réclamées par la Société EQUINOXE DESIGNERS.
Qu’elle sollicite l’infirmation et l’annulation du jugement entrepris.
Considérant que la Société EQUINOXE rétorque que la théorie des équipollences interdit le prononcé de l’irrecevabilité de l’acte, lorsque d’autres éléments sont consignés dans l’acte incriminé, soit en dehors de cet acte, pour le compléter.
Qu’elle soutient ainsi avoir joint à sa requête, d’autres éléments précisant l’objet social et son siège social.
Qu’il prétend que le juge de l’opposition ne peut examiner que les motifs d’irrecevabilité tirés de l’assignation qui le saisit.
Qu’il convient de rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée, comme mal fondée et dilatoire.
Qu’enfin, elle allègue que l’article 8 du même texte n’a pas été violé.
_ EQUINOXE DESIGNERS n’est pas précise.
Que son objet social et son siège social ne sont pas précisés dans l’acte.
Qu’or les Actes uniformes OHADA et leurs dispositions sont d’ordre public.
Que c’est à juste titre et sans examiner le second moyen, qu’il convient d’infirmer le jugement entrepris et de dire que la requête était irrecevable.
Qu’il convient de rétracter l’ordonnance entreprise.
Considérant que la partie qui perd le procès supporte les frais de la procédure.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties en cause, en matière civile et commerciale, en appel et en dernier ressort.
EN LA FORME
– Reçoit l’appel interjeté.
Au fond
– Infirme le jugement entrepris.
– Déclare irrecevable la requête.
– Condamne la Société EQUINOXE DESIGNERS aux dépens distraits au profit de Me Guy NOAH, Avocat aux offres de droit.
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique les mêmes jour, mois et an que dessus.
Et signent sur la minute, le Président, les membres et le Greffier approuvant lignes et mots rayés nuls, ainsi que renvois en marge bons.
Le Président Le 1er Membre.
Le 2e Membre Le Greffier.