J-06-188
DROIT COMMERCIAL GENERAL – VENTE COMMERCIALE – MANDATAIRE APPARENT DE L’ACHETEUR LORS DE LA PASSATION DES COMMANDES – NON LIVRAISON DES MARCHANDISES COMMANDEES POUR DETTES ANTERIEURES NON REGLEES PAR L’ACHETEUR – MANDATAIRE NON CREANCIER DE LA LIVRAISON DES MARCHANDISES.
VOIES D’EXECUTION – ORDONNANCE DE SAISIE CONSERVATOIRE OBTENUE PAR LE MANDATAIRE APPARENT – DEMANDE DE RETRACTATION DE L’ORDONNANCE PAR LE VENDEUR – CREANCE DU SAISISSANT NON FONDEE.
Le débiteur d’une livraison de marchandises hors taxes envers une entreprise bénéficiaire des avantages de l’extraterritorialité d’une zone franche est fondé à retenir la livraison de ces marchandises s’il s’aperçoit que l’acheteur est débiteur dans ses livres. Le tiers qui est apparu comme un mandataire de ces marchandises lors de la passation des commandes n’est pas fondé à se prétendre créancier de cette livraison ni à procéder à une saisie conservatoire sur les comptes du vendeur.
Dès lors rétractation de l’ordonnance conservatoire doit être ordonnée.
Cour d’appel du Littoral à Douala, arrêt n 45/REF du 19 janvier 2004, SFID-PFI contre UCHEGBUSI Sylvester.
Faits : La société SFID-PFIa interjeté appel d’une ordonnance de référé n 113 rendue le 14 août 2001par Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance, par laquelle celui-ci déboutait la SFID de sa demande en rétractation d’une ordonnance du 19 juin 2001qui permettait à sieur UCHEGBUSI Sylvester de procéder à une saisie conservatoire des créances à son préjudice.
Au soutien de son action, la SFID déclarait qu’elle avait donné son accord à la société IMS pour l’achat hors taxes des contreplaqués et panneaux pour un coût total de 126 663.793 Fcfa. Procédant par commande successive, la société IMS passera les commandes n 9900.183 et 9900.188. La SFID lui adressera une facture pro forma le 22 mars 2001, pour la somme de 25 551.526 Fcfa. Au moment de la livraison, se souvenant que IMS est débitrice dans ses livres de la somme de 17.383.709 Fcfa, elle retiendra la somme avancée objet des commandes suscitées. En réaction à cette rétention, le sieur UCHEGBUSI Sylvester, alors client de IMS, qui avait déboursé la somme en question et qui était en réalité le bénéficiaire de cette dernière commande, obtiendra du juge l’autorisation de pratiquer une saisie conservatoire des créances sur les comptes de la SFID. C’est cette ordonnance que la SFID conteste, en se basant sur le fait que UCHEGBUSI n’a pas qualité pour saisir ses comptes, car ne pouvant démontrer qu’elle est le Directeur Général ou le représentant légal de IMS avec qui elle a traité.
Solutions des juges : Les juges ont considéré que la législation sur les zones franches est exceptionnelle, qu’elle crée une fiction d’extraterritorialité, à l’avantage de l’organe qui en bénéficie et que ces avantages sont strictement personnels. Le sieur UCHEGBUSI n’étant pas agréé à ce régime qui profitait seul à IMS, ils ont considéré que c’est à bon droit que la SFID avait pris le sieur UCHEGBUSI comme mandataire de la société IMS et avait raison de retenir l’argent dû. Ils ont considéré la créance du sieur UCHEGBUSI comme non fondée en son principe, ordonné la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée au détriment de la SFID, infirmant par là l’ordonnance querellée.
République du Cameroun.
Paix. Travail. Patrie.
2003. 2004.
Audience du 19 janvier 2004.
La Cour d’Appel du Littoral à Douala, siégeant en matière civile et commerciale en son audience publique tenue au Palais de Justice de ladite ville, le dix-neuf janvier deux mille quatre à huit heures trente du matin, et en laquelle siégeait Monsieur Jean-Jacques BIKOUE, Vice Président de la Cour d’Appel du Littoral à Douala, Président.
Avec l’assistance de Madame MEFANTE Marguerite, Greffier tenant la plume.
A rendu l’arrêt suivant dans la cause.
ENTRE :
La Société Forestière et Industrielle de la Doumé, point franc industriel SFID-PFI, BP 119 Douala, laquelle fait élection de domicile aux cabinets de Maîtres ELAME DIPOKO Georges Pancrace Germain BEBGA et ADA, Avocats au Barreau du Cameroun.
Appelante, comparant et plaidant par lesdits Conseils.
d’une part.
ET
UCHEGBUSI Sylvestre, lequel a Conseils, Maîtres NDOKY et ABSESSOLO, Avocats au Barreau du Cameroun.
Intimé, comparant et plaidant par lesdits Conseils.
d’autre part.
POINT DE FAIT :
Le 14 août 2001, intervenait dans la cause pendante entre les parties, une ordonnance n 1133, enregistrée le 11 juin 2003 au volume 002, folio 121, n 2668 au coût de 28 800; ordonnance rendue par le Tribunal de Première Instance de Douala, dont le dispositif est ainsi conçu :
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de toutes les parties, en matière d’urgence, en premier ressort, et après en avoir délibéré conformément à la loi :
– recevons la demande de la SFID-PFI;
– constatons que le chèque rentré impayé a été émis par TESSA BOIS et non par IMS ou Sylvestre;
– constatons également qu’en l’état de la procédure, il ne semble y avoir de rapport d’affaires entre le tireur du chèque et UCHEGBUSI ou SYLVESTRE tout court;
– disons en conséquence, n’y avoir lieu à rétractation de notre ordonnance et mainlevée consécutive;
– condamnons SFID-PFI aux dépens dont distraction au profit de Me NDOKY.
Ainsi jugé et prononcé en audience publique, les mêmes jour, mois et an que dessus.
En foi de quoi, la présente a été signée par le Président qui l’a rendue et le Greffier.
Par requête en date du 24 août 2001adressée à Monsieur le Président de la Cour d’Appel du Littoral à Douala et enregistrée au Greffe de ladite Cour le 24 août 2001, sous le n 1126, la Société Forestière et Industrielle de la Doumé, point franc industriel SFID-PFI, BP 119 Douala, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, laquelle fait élection de domicile aux cabinets de Maîtres ELAME DIPOKO Georges et Pancrace Germain BEBGA, Avocats à Douala.
A L’HONNEUR DE VOUS EXPOSER, MONSIEUR LE PRESIDENT :
Qu’elle relève appel de l’ordonnance de référé n 1113 rendue le 14 août 2001par Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Douala statuant en matière de référé, dont le dispositif est ainsi conçu :
– « Le Juge contradictoire à l’égard de toutes les parties.
Recevons la demande de la SFID-PFI.
Constatons que le chèque impayé a été émis par TESSA BOIS et non IMS ou SYLVESTRE.
Constatons également qu’en l’état de la procédure, il ne semble pas y avoir de rapport d’affaires entre le tireur du chèque et UCHEGBUSI Sylvestre.
Disons n’y avoir lieu à rétractation de notre ordonnance et à mainlevée… ».
QU’ELLE SOLLICITE QU’IL VOUS PLAISE.
Vu les articles 189 et suivants du Code de Procédure Civile et Commerciale.
Lui donner acte de la présentation de la requête.
Fixer la date à laquelle les parties produiront leurs défenses et celle à laquelle l’affaire sera appelée à l’audience publique.
Advenue laquelle audience, la requérante conclura.
EN LA FORME
Attendu que l’appel est recevable pour avoir été fait dans les forme et délai prévus par la loi.
Au fond
Attendu qu’il convient, pour une compréhension du litige, de relater les faits de la cause.
LES FAITS
Que par correspondance en date du 21 août 2000, la Société IMSCamerounasollicité auprès de la requérante, la possibilité d’acheter en hors taxes, 583m3 de· contreplaqués et panneaux, en vue de l’installation d’une usine de 117ha74a96ca à Song-Dong, dans le département de la Sanaga Maritime.
Que par facture pro forma en date du 23 août 2000, la SFID-PFI marquait son accord pour cette vente et évaluait le coût total de son produit à 126 663.793 FCFA.
Que ne pouvant régler en un seul arrêté le prix dans la facture pro forma, la Société IMS procédera à l’achat par vagues successives.
Que c’est ainsi que la Société IMS fera trois premières commandes en date des 8 et 10 novembre 2000, et les produits issus de ces commandes seront livrés, ainsi que l’attestent les avis d’enlèvement établis au nom de la Société IMS.
Qu’en date du 21/12/2000, la Société IMS fera une quatrième commande de contreplaqués et paiera par chèque, qui, présenté à l’encaissement, est rentré impayé pour défaut de provision.
Que toujours en exécution de l’accord du 23 août 2000, la Société IMS passera les commandes n 9900183 et 9900188 en vue de l’achat de 116.327m3 de contreplaqués.
Que la requérante adressera une facture pro forma à la Société IMS, en date du 22 mars 2001, pour la somme de 25 551.526 FCFA.
Qu’après avoir donné son accord pour la livraison des produits, la requérante se rappellera que la Société IMS est débitrice dans ses livres, de la somme de 17.383.709 FCFA, et retiendra la somme avancée, objet des commandes 9900183 et 9900188.
Que c’est alors que sieur UCHEGBUSI Sylvestre, se prétendant en relation commerciale, obtiendra l’ordonnance n 1904 du 19 juin 2000 et procédera à la saisie conservatoire des créances, au préjudice de la requérante.
Mais, que saisi en rétractation de la susdite ordonnance, et en mainlevée de ladite saisie, le Juge des référés a, contre toute logique juridique, débouté la requérante.
Que des arguments ci-après développés, le Président de la Cour n’hésitera pas à infirmer cette décision manifestement complaisante.
Attendu que pour débouter la requérante, le premier Juge a fondé sa décision sur le fait que le tireur de chèque, en l’occurrence TESSA BOIS, n’est pas en relation d’affaires avec UCHEGBUSI Sylvestre, et par conséquent, UCHEGBUSI ne saurait payer les dettes de TESSA BOIS.
Mais attendu que cette argumentation dénote tout simplement l’amalgame et la confusion dont a fait preuve le premier Juge.
Que dans la facture pro forma n 675/2000 du 23 août 2000, qui marque l’accord de la requérante sur la demande de IMS d’acheter les contreplaqués en hors taxes, il est bien dit que les paiements se feront en espèces ou par chèque certifié conforme.
Que cela signifie tout simplement, que la Société IMS dispose de deux modes de paiement pour régler ses factures.
Que les paiements soient faits par chèque ou en espèces, par n’importe quelle personne, importe peu.
Que ce qui importe est que les paiements soient faits au nom et pour le compte de IMS, en règlement de ses factures.
Que la facture pro forma n’exige pas que les paiements soient faits seulement par un chèque au nom de IMS, mais plutôt un chèque certifié.
Que la Société TESSA BOIS, ainsi que SYLVESTRE, encore moins UCHEGBUSI Sylvestre, n’ont jamais été en relation d’affaires avec la requérante.
Que les paiements effectués par TESSA BOIS et Sylvestre, en règlement des commandes IMS, ne signifient pas qu’ils sont en relation commerciale avec la requérante.
Qu’on ne saurait déduire sur la simple base d’un paiement fait par TESSA BOIS, ignorer l’accord du 23 août 2000 qui lie IMS à la SFID-PFI, et affirmer que TESSA BOIS est en relation avec la requérante.
Que pourtant, l’accord du 23 août 2000, qui lie la SFID-PFI et la Société IMS, est clair et ne permet aucune interprétation.
Qu’on ne peut parler de tolérance dans une vente commerciale qui est matérialisée par les écrits et où les conditions de vente sont claires et ne souffrent d’aucune interprétation.
Qu’enfin, le premier Juge n’a pas été saisi pour établir ou apprécier la relation d’affaires entre TESSA BOIS et UCHEGBUSI Sylvestre.
Mais que le premier Juge a été plutôt saisi en rétractation de l’ordonnance ayant autorisé UCHEGBUSI Sylvestre à pratiquer saisie conservatoire des créances au préjudice de la SFID-PFI, qui n’est pas juridiquement la Société IMS ou SYLVESTRE.
Attendu que la décision déférée à la Cour n’a pas fait allusion à la différence juridique qui existe entre le nom UCHEGBUSI Sylvestre et le nom SYLVESTRE.
Qu’au vu de ce seul point, le Président de la Cour constatera aisément la différence juridique entre les noms UCHEGBUSI Sylvestre et SYLVESTRE, et rentrera par voie de conséquence, à l’infirmation de la décision rendue par le premier Juge.
PAR CES MOTIFS
Infirmer dans toutes ses dispositions, l’ordonnance n 1133 rendue le 14 août 2001.
EVOQUANT ET STATUANT À NOUVEAU.
Dire et juger que le nom UCHEGBUSI Sylvestre n’est pas juridiquement le même nom que SYLVESTRE.
Dire et juger que UCHEGBUSI Sylvestre n’est pas en relation commerciale avec la SFID-PFI.
Dire et juger que UCHEGBUSI Sylvestre n’a pas qualité pour saisir les comptes de la requérante.
Dire et juger que le chèque émis par TESSA BOIS, en paiement de la commande IMS du 21/12/2000, ne signifie pas que TESSA BOIS est en relation commerciale avec la SFID-PFI (texte manquant).
(texte manquant) relation avec la concluante, et peut se faire en prendre possession par l’organe de son représentant légal.
Constater que la concluante, qui est agréée au Point Franc Industrie1, n’a accepté la commande de la Société IMSCameroun, qu’au vu des documents d’exonération de taxes tels que l’arrêté n 15/ MINDIC/ONZFI du 22 septembre 1999 accordant le statut de Point Franc Industriel à la Société IMSCameroun.
Dire et juger que le défaut de qualité de sieur UCHEGBUSI Sylvestre à ester n’est plus à démontrer, l’intéressé ne pouvant prouver qu’il est le Directeur Général ou le représentant légal de la Société IMSCameroun, étant rappelé que l’ordonnance n 1904 lui a été délivrée en son nom personnel et non pas au nom de la société IMS, qui seule, peut ester en justice contre la concluante.
Dire et juger que les versements en vue de la livraison des commandes n 9900183 et 9900188 ont été effectués pour le compte de la Société IMSCameroun, qui seule, est habilitée à recevoir livraison de cette commande, exclusion faite de UCHEGBUSI Sylvestre, qui a obtenu à tort en son nom, la signature d’une ordonnance de saisie contre la concluante.
EN CONSEQUENCE.
Infirmer dans toutes ses dispositions, l’ordonnance n 1133 rendue le 14 août 2001par le Président du Tribunal de Première Instance de Douala.
EVOQUANT ET STATUANTaNOUVEAU.
Rétracter l’ordonnance n 1904 rendue le 19 juin 2001par le Président du Tribunal de Première Instance de Douala.
Ordonner la mainlevée subséquente de la saisie conservatoire des créances pratiquée le 22 juin 2001au préjudice de la SFID-PFI, sous astreinte de 500 000 FCFA par jour de retard, à compter de la signification de la présente décision.
Condamner sieur UCHEGBUSI Sylvestre aux dépens dont distraction au profit de Maître ADA NNENGUE Brigitte, Avocat aux offres de droit.
Sous toutes réserves.
Les Conseils de l’intimé ont également sollicité de la Cour, l’adjudication de leurs conclusions, dont les dispositifs suivent :
PAR CES MOTIFS
[Conclusions du 23/08/2002 (NDOKY)[
Vu les dispositions de l’article 190 du Code de Procédure Civile et Commerciale exigeant que soit annexée à la requête d’appel, une expédition du jugement querellée.
Constater l’absence d’une expédition de l’ordonnance querellée dans le dossier de procédure.
EN CONSEQUENCE.
Bien vouloir déclarer irrecevable en l’état, l’appel de l’ordonnance n 1113 rendue le 14 août 2001par Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Douala.
Condamner en outre, la Société SFID-PFI aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître NDOKY DIKOUME, Avocat aux offres et affirmations de droit.
Sous toutes réserves.
[Conclusions du 14/07/2003 (ABESSOLO)]
Constater que IMS, qui a bénéficié d’une autorisation d’achat hors taxes et qui entendait vendre les contreplaqués achetés dans le marché intérieur, a passé une convention avec la SFID-PFI.
Constater que cette convention consistait, en prenant en compte ce fait, à augmenter le prix porté sur la facture pro forma initiale remise à IMS, de 5%.
Constater que le paiement devait être effectué directement par le client de IMS en espèce ou par chèque certifié avant l’enlèvement.
Constater que la SFID-PFI n’ignorait donc pas l’existence des clients de IMS dans la transaction qui devenait ainsi triangulaire.
Constater que le versement effectué était réputé fait par IMS pour le compte de Sylvestre, comme cela est porté sur le reçu délivré.
Constater que le chèque pour lequel on retient les fonds de l’appelant est antérieur à la facture pro forma du 23 août 2000 et a été remis pour des engagements antérieurs à l’opération IMS.
Constater que ce chèque manifestait l’antériorité des relations entre TESSA et la SFID, en ce qu’aucun règlement par chèque non certifié n’était prévu.
Dire et juger que la SFID savait nécessairement que Sylvestre achetait les contreplaqués pour lui-même, en bénéficiant des facilités accordées à IMS.
Dire que par les différents accords de livraison et par le fait que l’annulation de la commande a été directement adressée à UCHEGBUSI, la SFID sait qu’elle s’est obligée directement à l’égard de celui-ci, à lui livrer.
Dire qu’en l’absence de cette livraison, la SFID doit reverser la somme perçue.
EN CONSEQUENCE.
Confirmer l’ordonnance n 1133/CONT rendue le 14 août 2001par Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Douala.
Condamner la SFID-PFI aux dépens, tant d’instance que d’appel, avec distraction au profit de Maître Etienne ABESSOLO, Avocat aux offres de droit.
Sous toutes réserves.
SUR QUOI, les débats ont été déclarés clos et l’affaire mise en délibéré, pour arrêt être rendu le 15 décembre 2003.
Advenue ladite audience, le délibéré fut prorogé à ce jour 19 janvier, où la Cour, vidant son délibéré a rendu à haute voix, par l’organe de son Président, l’arrêt dont la teneur suit :
LA COUR
Vu les lois et règlements en vigueur.
Vu l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général.
Vu l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Vu l’ordonnance n 1133 rendue le 14 août 2001par le Juge des référés du Tribunal de Première Instance de Douala dans l’affaire opposant la Société Forestière et Industrielle de la Doumé (la Société) et le sieur UCHEGBUSI Sylvestre (Sylvestre).
Vu la requête d’appel de Maître ELAME DIPOKO Georges, Conseil de la société (reçue au Greffe de la Cour d’Appel de céans le 24 août 2001sous le n 1126 du registre).
Après en avoir délibéré conformément à la loi.
SUR LA FORME
Considérant que l’appel est recevable comme ayant été fait dans les délai et forme prévus par la loi.
SUR LE FOND
Considérant qu’il résulte des débats et des documents produits, que le 1er avril 1998, l’organisme appelé IMSa été agréé à la Zone Franche Industrielle sous le n 0052; l’arrêté n 150/MIJNDIC/ONZFI du 22 septembre 1999 lui a accordé le statut de point franc industriel, en ce qui est des immeubles ruraux non bâtis loués par elle; le 21 août 2000, elle a sollicité auprès de la société, l’achat en hors taxe de 583m3 de contreplaqués et panneaux; l’accord de celle-ci s’est manifesté par l’émission de la facture pro forma du 23 août 2000, par laquelle le cubage sollicité était cédé au prix de 126 663.793 francs; l’achat a été fait par IMS par vagues successives; ainsi, le 21 décembre 2000, un troisième achat portant sur 116m3 de contreplaqués au prix de 17.383.709 francs a été réglé par I.M.S. à l’aide d’un chèque revenu sans provision; le 14 mars 2001, IMSaencore commandé 116.327m3 de contreplaqués pour un montant de 25 551.526 francs CFA; le 26 mars 2001, ladite commande a été confirmée; la somme arrêtée a été versée par Sylvestre; la société a alors versé ce montant dans le compte de I.M.S. débiteur dans ses livres, de la somme de 17.383.709 francs CFA, et a réclamé à IMS, le versement d’un montant complémentaire avant la livraison des produits.
Que c’est alors que Sylvestre, prétendant être en relation d’affaires avec la société et avoir agi pour son seul compte, a sollicité et obtenu l’ordonnance n 1904 du 19 juin 2001l’autorisant à saisir conservatoirement des créances à toute banque, au préjudice de la société.
Que venant en contestation, celle-ci n’a pas eu gain de cause, d’où la décision querellée.
Considérant que l’appelante soutient que pour cette transaction, elle ne connaît que I.M.S. souvent représentée par TESSA Joseph alias TESSA BOIS ou par Sylvestre.
Considérant que celui-ci fait valoir que la société savait pertinemment qu’il agissait pour son seul compte; qu’ainsi, ayant su qu’il devait écouler les produits sur le marché local, elle a procédé à un réajustement à la hausse de 5%, et c’est à tort que la compensation a été faite par la société, qui par ailleurs, ne devait pas recevoir pour le paiement de la précédente commande, un chèque ordinaire en lieu et place d’un chèque certifié.
Considérant que la législation sur les zones franches est exceptionnelle; qu’elle crée une fiction d’extraterritorialité à l’avantage de l’organe qui en bénéficie, lequel achète à des prix exonérés des droits de douane.
Que ces avantages sont strictement personnels à cet organe.
Considérant que Sylvestre, qui n’est pas agréé à ce régime, se trouve dans la position d’un importateur de contreplaqués.
Que c’est vainement qu’on recherche dans les documents produits au soutien de ses arguments, une licence d’importation ou quelque autre document montrant qu’il était en droit d’importer et qu’il avait pris des dispositions pour payer les taxes douanières ou obtenir quelque moratoire pour cela.
Que la hausse de 5% proposée par la société se conçoit parfaitement dans ce contrat de vente à exécution successive, compte tenu de la fluctuation des cours des produits en cause.
Considérant qu’accepter un chèque simple à la place d’un chèque certifié ou des espèces, n’est pas contraire aux usages en matière commerciale; qu’il suit de là que c’est à bon droit que la société a considéré que Sylvestre était un autre mandataire de IMS et a procédé à la compensation litigieuse.
Que c’est à tort que le premier Juge a rejeté la contestation de la société.
Qu’en effet, la créance ne paraît pas fondée dans son principe; qu’il échet d’infirmer l’ordonnance entreprise et donner mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée, conformément aux dispositions de l’article 54 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Considérant que la partie qui succombe supporte les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement en matière civile et commerciale, en appel et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi.
– Infirme la décision entreprise;
– Ordonne la rétractation de l’ordonnance N 1904 du 19 juin 2001;
– Condamne Sylvestre UCHEGBUSI aux dépens.
Ainsi jugé et prononcé en audience publique, les jour, mois et an que dessus.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier approuvant.