J-07-36
DROIT COMMERCIAL GENERAL – OBLIGATIONS – PRESCRIPTION – ACTE INTERRUPTIF – DECISION DE JUSTICE.
L’action en paiement initiée par le créancier n’est pas couverte par la prescription édictée par l’article 18 de l’Acte uniforme portant droit commercial général, dès lors qu’il a obtenu une décision qui constitue un acte interruptif de la prescription au sens de l’article 277 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général.
Cour d’appel d’Abidjan, chambre civile et commerciale, arrêt n 436 du 15 avril 2005, AFFAIRE B.Y. c/ SIFCA-SA, Le Juris-Ohada, n 4/2006, p. 43.
La Cour,
Vu les pièces du dossier.
Oui les parties en leurs conclusions.
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après.
DES FAITS, PROCEDURE ET PRENTENTIONS DES PARTIES
Considérant que par exploit d’huissier en date du 29 octobre 2004, le sieur B. Y a relevé appel du jugement n°1222 rendu le 09 juin 2004 par le Tribunal de première instance d’Abidjan dont le dispositif est ainsi libellé.
« Statuant en audience publique par décision contradictoire en matière commerciale et en premier ressort rejette le fin de non recevoir tiré de l’autorité de chose jugée.
La déclare en conséquence irrecevable.
Condamne le demandeur aux entiers dépens de l’instance ».
Considérant que par l’organe de son conseil Me AMANY KOUAME, le sieur B. Y expose qu’acheteur de café et de cacao domicilié à ISSIA était en relation d’affaire avec la SIFCA.
Qu’avec cette dernière, il signait, à la vente de chaque traite agricole desdits produits, des contrats dit « contrat de mandant ».
Qu’au terme desdites conventions, la SIFCA lui donnait mandat d’acheter pour son compte le café et le cacao aux producteurs.
Qu’il précise, toujours selon les termes du contrat de mandat, la SIFCA s’engageait à lui payer les sommes de°: 25.175 F CFA par Kilogramme de cacao et 14.977 F CFA par Kilogramme de café; Qu’il déclare que sur la base de ces contrats, les parties ont collaboré ainsi de 1982 à 1989.
Qu’il fait connaître que si de 1982 à 1987, il a été régulièrement rempli de ses commissions, il n’en a pas été ainsi pour la campagne 1988-1989 pour laquelle la SIFCA reste devoir au titre d’arriérée de commissions pour le cacao la somme de 42.750°000FCFA ainsi détaillée.
42. 756.000 F CFA au titre de la commission due pour 1.221.600 Kg de cacao à raison de 35 F la rémunération.
Que malgré plusieurs réclamations amiable, la SIFCA est restée de marbre.
Que de guerre lasse, il a dû assigner la SIFCA-SA en paiement.
Que sur cette assignation, le Tribunal civil a rendu le jugement querellé.
Qu’il estime qu’en motivant ainsi sa décision, le tribunat a violé la loi et c’est la raison pour laquelle le présent appel est exercé pour amener le tribunal à infirmer te jugement querellé.
Qu’il rappelle que pour déclarer son action prescrite, le tribunal a fait application de l’article 18 du traité OHADA relatif au droit commercial général qui stipule que « les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants se prescrivent par cinq ans si elle ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes.. ».
Qu’il souligne qu’en réalité, les faits soumis au tribunal soulèvent l’épineux problème du conflit des lois ou de l’application des lois dans le temps.
Qu’en l’espèce, entre l’article 18 du traité OHADA (sic) et l’article 2262 du code civil lequel est applicable aux faits soumis au tribunal, l’article 10 des actes uniformes répond à la question en disant que les actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les états parties.
Mais qu’il souligne que l’article 9 du même acte uniforme (sic) stipule que « les actes uniformes entrent en vigueur quatre vingt dix jours après leur adoption.. »; or attendu, en l’espèce, que les actes uniformes relatifs au droit commercial général ont été adoptés le 1er janvier 1998.
Or dit-il, il réclame des créances à lui dues de 1989 à 1993; soit des créances dues avant l’entrée en vigueur du traité (sic).
Qu’il déclare qu’en l’espèce donc, le délai de représentation (sic) édictée à l’article 18 ne peut commencer à courir qu’à partir de janvier 1998.
Que si on commence à compter le délai de prescription à partir de janvier 1998, le sieur B. Y devrait être prescrit (sic) le 1er janvier 2003; or, tout délai en matière procédurale est soumis au principe de l’interruption de l’article 277 du même acte uniforme relatif au Droit Commercial Général qui stipule que « le délai de prescription cesse de courir lorsque le créancier de l’obligation accomplit tout acte qui d’après la loi de la juridiction saisie est considéré comme interruptif de prescription ».
Qu’il précise que la loi de la juridiction saisie dont parle l’article 277 précité n’est autre que l’article 2244 du code civil Ivoirien qui stipule que°: « une citation en justice, un commandement ou une saisie signifie à celui qu’on veut empêcher de prescrire forment l’interruption civile ».
Qu’il affirme qu’en l’espèce le 22 avril 2002, il avait obtenu du président du tribunal de première instance du plateau une ordonnance d’injonction de payer N°3085/2005 et qu’il a signifiée en mai 2002.
Qu’il allègue que, conformément aux dispositions de l’article 244 précité, la signification de ladite ordonnance a opéré une interruption du délai de cinq ans de l’article 18 du traité OHADA (sic) relatif au Droit Commercial Général.
Qu’ainsi, un nouveau délai de 5 ans a commencé à courir à compter d’avril 2002 et jusqu’à avril 2007.
Qu’il soutient, dès lors, que l’assignation en paiement initiée par lui le 15 mai 2003 est bien recevable et non prescrite comme l’a jugé le tribunal dans sa déclaration (sic) querellée.
Qu’il estime par conséquent que la Cour de céans n’aura aucune peine à infirmer le jugement qui fait l’objet du présent appel.
Que sur le bien fondé de sa créance il rappelle que dans son assignation en date du 15 mai 2003, il avait sollicité du tribunal la condamnation de la SIFCA SA à lui payer la somme de quarante deux millions sept cent cinquante six mille francs CFA (42.756.000 FCFA).
Qu’à l’appui de sa demande, il expliquait que pendant la campagne agricole 88-89, il avait livré à la SIFCA 881.600 kg.
Que dans le contrat de mandat entre les parties, il avait été convenu que sa commission serait de 35 F/CFA le kilogramme soit au total°: 1.221.600 x 35- 42.756.000 F CFA’.
Qu’il souligne que depuis cette date jusqu’à ce jour, sa commission n’a pas été payée.
Qu’il avait même obtenu une ordonnance d’injonction de payer qui a été rétractée pour défaut de liquidité de la créance.
Que convaincu de la réalité de son dû, il a opté pour le juge du fond (?!).
Qu’il estime que la Cour jugera que sa demande est fondée et en conséquence, réformant le jugement querellé sur ce point condamnera la SIFCA à payer la somme de 42.756.000 F CFA.
Considérant que, pour sa part, la Société SIFCA SA par l’organe de se conseils Maîtres FADIKA, KACONTE et DIOMANDE, expose qu’e1le a pour activité le négoce du café du cacao.
Que, dans ce cadre, elle s’approvisionne en produits par l’intermédiaire de traitants (mandataires) qui achètent lesdits produits aux producteurs pour son compte et les lui remettent.
Qu’en contrepartie, le mandataire perçoit un rémunération fixe sur chaque kilogramme livré.
Qu’elle précise que dans ce cadre, elle préfinance les achats en accordant aux mandataires des avances de sommes d’argent remboursables en produits agricoles pour une valeur au moins égale.
Qu’il se crée alors un système de compte courant, dans lequel le compte du traitant dans les livres de SIFCA-SA est débité du montant des avances et crédité de la contre-valeur de chaque livraison de produits majorée de la commission correspondant à la quantité de produits livrés.
Qu’enfin de campagne, les parties arrêtent les comptes.
En cas de solde créditeur en faveur du traitant ce solde est payé par SIFCA-CA au traitant.
En cas de solde débiteur en faveur du traitant, ledit montant du solde est reporté sur la campagne suivante, afin de permettre au mandataire de livrer une quantité de produits d’un montant égal au solde débiteur concerné.
Qu’elle déclare que c’est dans ces conditions qu’au début de la campagne 1988- 1989, le compte de Monsieur B. Y et de l’imputation des commissions qui lui étaient dues, ce compte présentait un solde créditeur en faveur de Monsieur B. Y de la somme de 8.423.078 FCFA.
Que ce solde créditeur a été reporté sur la campagne 1989-1990; de ce fait, au 1er octobre 1989, le solde de départ de Monsieur B. Y était créditeur de la somme de 8.423.078 FCFA.
Que cette somme lui était payée le 21 mars 1990, par chèque SGBCI N°3185.
Qu’elle articule qu’à la fin de la première partie de la campagne que l’on dénomme dans le milieu « la principale », et à la suite des différentes opérations entre les parties, le compte de Monsieur B. Y se trouvait encore créditeur de la somme de 1.678.257 F CFA.
Que cette somme lui a été entièrement payée au moyen de trois chèques BIAO.
Pour les deux premiers, l’un, le 20 avril 1990, par chèque numéro 4663 d’un montant de 1.017.910 F CFA, le second portant le numéro 4756, d’un montant de 287.437 F CFA.
Et le troisième, portant le numéro 9 512 990, le 20 mars 1991, d’un montant de 372.910 FCFA.
Qu’elle souligne qu’ainsi à la fin de la campagne 1990-1991, elle avait soldé le compte de Monsieur B. Y.
Mais que contre toute attente, elle recevait le 2 mai, un exploit d’huissier lui signifiant une ordonnance N°3085/2002 en date du 22 avril 2002, lui faisant injonction de payer à Monsieur B. Y la somme de 65.838.27.8 F CFA.
Que contre cette ordonnance qui la condamnait injustement, elle formait opposition le 16 mai 2002.
Qu’elle fait connaître qu’elle a soulevé, d’une part, l’irrecevabilité de l’action de Monsieur B. Y pour cause de prescription°: en effet, la créance alléguée étant de nature commerciale, l’action en recouvrement de celle-ci se prescrit pour deux ans, conformément à l’article 18 du Traité OHADA (sic).
D’autre part, l’irrecevabilité de la requête aux fins d’injonction de payer pour défaut d’indication de la forme de la société SIFCA-SA, conformément aux prescriptions de l’article 1er de l’Acte uniforme portant injonction de payer (sic).
Enfin, la nullité de l’exploit de signification du 3 mai 2002 pour défaut d’indication des intérêts de droit ainsi que de l’avertissement de l’article 8 in fine de l’Acte uniforme suscité.
Que sur le fond, elle invoquait essentiellement l’inexistence de la créance dont recouvrement était poursuivi par Monsieur B. Y et rapportait la preuve que celui-ci avait été rempli de tous ses droits.
Qu’elle soutient que c’est à bon droit que le Tribunal a déclaré l’action en paiement de Monsieur B. Y irrecevable pour cause de prescription.
Que la Cour dira ma. fondé le présent appel.
Qu’elle rappelle en effet qu’il résulte de l’article 18 de l’Acte uniforme portant droit commercial général que.
« Les obligation nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants, ou entre commerçante et non commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes ».
Qu’elle déclare que faisant application de celle règle de droit, la Cour voudra bien dire et juger l’action frappée de prescription.
Qu’elle soutient qu’en effet, les parties ont toutes les deux la qualité de commerçant°: Monsieur B. Y en ce qu’il a fait de l’achat et la revente de produits agricoles, sa profession et la société S.I FCA-SA, de part sa forme et ses activités.
Qu’elle affirme que, dès lors, la créance de Monsieur B. Y, pour autant qu’elle existe, étant née des relations d’affaires qui ont existé entre lui et la société SlFCA-SA au cours de la campagne 88/89, a un caractère commercial.
Qu’elle précise que le demandeur disposait donc d’un délai de cinq ans, courant à compter de la fin de la campagne 88/89, pour engager son action en recouvrement. Or, de la campagne 88/89 à la date de la présente action initiée le 15 mai 2003, il s’est écoulé plus de 14 ans.
Que dans ces conditions, force est de constater que la prescription quinquennale susvisée est acquise.
Qu’e1le sou1igne que Monsieur B. Y tente vainement d’échapper à 1a dite prescription en soutenant en première instance que conformément à l’article 9 du même traité (sic), le point de départ du délai de cinq ans prévu par l’article 18 précité commence à la date d’entrée en vigueur de l’Acte uniforme relatif au Droit commercial Général, soit en janvier 1998.
Qu’elle déclare que, même dans une telle hypothèse, la prescription est acquise dans la mesure où ce nouveau délai serait dans tous les cas arrivé à expiration le 1er janvier 2003 comme le reconnaît, à présent, l’intimé dans son acte d’appel’.
Qu’alors que la présente action a été introduite par voie d’assignation le 15 mai 2003 soit cinq ans après l’expiration du délai de prescription.
Que dès lors Monsieur B. Y disposait de 5 ans à compter de la fin de la campagne 88/89 pour faire valoir son droit.
Qu’elle articule que le moyen tiré de la prescription quinquennale est juridiquement fondé, c’est à bon droit que le Tribunal a déclaré irrecevable la demande de Monsieur B. Y.
Qu’elle déclare qu’en tout état de cause, un tel moyen ne saurait prospérer dans la mesure où aux termes de l’article 10 du traité OHADA, les Actes uniformes sont directement applicables et obligatoires.
Qu’ainsi, l’article 18 s’app1ique aux obligations même nées antérieurement à son entrée en vigueur.
Qu’elle précise que pour la computation des délais, il est fait application du droit commun selon lequel la prescription commence à courir à la date à laquelle l’obligation est née.
Qu’elle fait remarquer que pour tromper la religion de la Cour, Monsieur B.Y dans son acte d’appel invoque un autre moyen fondé sur l’article 277 de l’Acte uniforme susvisé estimant que la prescription stipulée par l’article 18 du Traité a été interrompue du fait de l’ordonnance d’injonction N°308/ 2002 qu’il a obtenue le 22 avril 2002 et signifiée le 2 mai 2002.
Mais qu’elle soutient que s’il est vrai qu’aux termes de l’article 2244 du code civil, « une citation en justice, un commandement ou une saisie signifiée à celui qu’on veut empêcher de prescrire forment l’interruption civile », il n’en demeure pas moins que l’ordonnance susvisée a été obtenue et signifiée 12 ans après la campagne 88/89 soit à des dates où la prescription était déjà éteinte.
Que cette action était elle même prescrite et ne saurait par conséquent avoir un effet interruptif.
Qu’elle affirme qu’il résulte donc de tout ce qui précède que l’action initiée le 15 mai 2003 par Monsieur B. Y tombe, dans tous les cas, sous la sanction de la prescription quinquennale de l’article 18 du Traité OHADA.
Qu’elle estime que la Cour dira mal fondé son appel et confirmera par conséquent le jugement querellé.
Qu’elle allègue que si, par extraordinaire, la cour venait à passer outre la cause d’irrecevabilité ci-dessus relevée par SIFCA-SA, elle voudra bien cependant déclarer Monsieur B. y mal fondé en sa demande en paiement.
Qu’elle affirme qu’en réalité, la créance dont se prévaut Monsieur B. Y est une créance imaginaire, et c’est la raison pour laquelle n’est soutenue par aucune pièce justificative, notamment un document probant qui établit qu’elle resterait lui devoir des sommes d’argent.
Qu’elle précise qu’en effet, dans la pratique dans ce domaine, aucune livraison de produits ne s’effectue sans bon de livraison signé par le bénéficiaire ou le récipiendaire.
Le Tribunal aura compris que Monsieur B. Y était réellement sa religion (sic) pour obtenir une décision de justice afin de « légitimer » une escroquerie montée de toute pièce.
Qu’elle déclare que car, si Monsieur B. Y n’apporte pas la preuve de l’existence d’une créance à l’égard de la société SIFCA-SA.
Considérant que le sieur B. Y réplique que le débat devait être clos surtout que la SIFCA- SA elle-même reconnaît que le 22 avril N°305/2002 (PN°1) signifiée le 2 mai 2002 (PN°2) (sic, sic, sic).
Qu’en effet il fait connaître que selon une jurisprudence de la C.C.J.A. N°20 du 17/06/2002, tout commandement de payer interrompt la prescription quinquennale.
Qu’il précise qu’en l’espèce, comme il l’a dit dans son acte d’appel, le délai de prescription de cinq ans dont parle la SIFCA-SA ne pouvait commencer à courir avant l’entrée en vigueur du traité OHADA puisque c’est ce traité lui-même qui a introduit désormais le principe de la prescription en matière commerciale.
Qu’il déclare que le traité sus cité étant entré en vigueur le premier janvier 1998, c’est tout à fait logique que ce soit à partir de cette date qu’on compte le délai de prescription.
Qu’il affirme qu’à partir du 1er janvier 1998, il avait jusqu’au 1er janvier 2003 comme date butoir de prescription. Or comme il a déjà été dit dans l’acte d’appel avant le 01/01/2003 soit depuis le 2 mai 2002, un acte interruptif du délai a été posé.
Qu’il soutient que, dès lors, et selon la jurisprudence de la CCJA la créance de Monsieur B. Y entre 1988 et 1989 n’est pas prescrite.
Qu’il estime que la Cour infirmera donc le jugement entrepris sur ce point.
Qu’il soutient que la preuve de sa créance résulte du document édicté par la SIFCA- SA elle-même le 30 septembre 1989 lequel document signé par la direction commerciale de la SIFCA-SA a été intitulé°: « Etat des livraisons cacao de Monsieur B. Y ».
Qu’en effet il déclare qu’il ressort de ce document que du 01/10/1988 au 30/9/1989, il a livré à la SIFCA 1.221.908 FCFA avec un solde créditeur de 8.423.078 FCFA au profit de Monsieur B. Y soldé le 1/10/1989.
Qu’il souligne que la Cour constatera que la somme de 38.000°000 FCFA dont parle la SIFCA correspond à la valeur des fèves de cacao livrées par Monsieur B.Y du 7/07/89 au 30/9/89 à raison de 250 FCFA le kilo. Cette somme d’argent revient aux paysans et non à Monsieur B.
Qu’il précise que s’agissant de sa rémunération celle-ci figure dans la convention de mandat dont il a été question dans l’acte d’appel et qui n’est pas contestée par la SIFCA; dans cette convention, c’est bien cette dernière qui paie les commissions de Monsieur B. Y à hauteur de 35 FCFA le kilogramme.
Que c’est cette commission pour la campagne 88-89 qui n’a pas été payée.
Que la SIFCA-SA prétend avoir payé sans pour autant rapporter la preuve de ce paiement.
Qu’il rappelle en effet que l’article 1315 du code civil tome 11 stipule que°: « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son ob1igation ».
Qu’il précise qu’en l’espèce, il a suffisamment prouvé qu’il était le mandataire de la SIFCA-SA. Qu’il a produit des contrats de mandat dans lesquels la SlFCA a promis lui payer 35 FCFA sur chaque kilogramme de café ou de cacao acheté pour le compte de la SIFCA. Ce qui n’est d’ailleurs par contesté par la SIFCA-SA.
Qu’il fait remarquer qu’il appartient donc à la SIFCA d,e prouver qu’elle s°:est libérée de son obligation de paiement; ce qu’elle n’a pu faire depuis le Tribunal jusqu’à ce jour.
Qu’il estime que la Cour considérera par conséquent que la SIFCA-SA ne s’est pas libérée de son ob1igation et que de ce fait, sa demande est fondée.
Qu’il articule que conformément à l’article 82-4ème du traité OHADA sur les voies d’exécution que les intérêts de droit échus peuvent être sollicités.
Qu’il fait valoir qu’en l’espèce, la créance est due depuis 1988.
Qu’il estime que la Cour devra condamner la SIFCA-SA à payer le principal outre les intérêts à calculer selon les dispositions de l’article 82-4eme du traité OHADA (sic).
Considérant que la société SIFCA-SA réplique en soutenant que contrairement aux allégations, du sieur B. Y le principe, de la prescription en matière commerciale existait bien avant le traité OHADA.
Que l’ancien code de commerce ivoirien prévoyait bel et bien une disposition régissant la question de la prescription. L’article 189 bis du titre X de ce code disposait°: « les obligations nées entre commerçants à l’occasion de leur commerce se prescrivent par dix si elle ne sont soumises à des prescriptions spéciales, est la même.
Qu’en effet, Monsieur B réclame une commission qui lui serait due sur la campagne de cacao, pour la période de 88-89, la campagne de cette période, il faut le préciser, s’est terminée le 30 septembre 1989.
Qu’aussi, si l’on applique les dispositions anciennes de l’article 189 bis du code d,e commerce, l’on devra retenir que du 30 septembre 1989 au 15 mai 2003 (date de l’assignation de l’appelant), il s’est écoulé plus de dix ans, emportant ainsi prescription totale de l’action de l’appelant.
Qu’elle précise que si l’on applique également les dispositions nouvelles de l’article 18 de l’acte uniforme relatif au droit commercial général, l’on devra également retenir que du 30 septembre 1989 au 15 mai 2003 (date de l’assignation de l’appelant), il s’est écoulé plus de cinq ans, emportant également prescription totale et entière de l’action de l’appelant.
Qu’elle fait remarquer que pour tenter de sortir de cette situation, qui compromet gravement ses projets d’enrichissement sans cause, l’appelant a conçu un mode inédit de computation des délais de prescription pour parvenir à une hypothèse, non moins inédite, d’interruption de « son délai ». et pour tenter de se donner bonne conscience, il produit à l’appui de son argumentation une décision de la CCJA.
Qu’à cet égard, il convient de faire remarquer que dans la décision de la CCJA produite par l’appelant, cette dernière juridiction a déclaré prescrite l’action en réclamation des loyers qui avait couru de septembre 1983 à novembre 1994 en prenant pour point de départ du délai de prescription l’exigibilité de chaque loyer.
Qu’elle précise qu’à aucun moment, la CCJA n’a pris pour point de départ du délai de prescription la date à laquelle l’Acte uniforme est entré en vigueur, contrairement à la thèse nouvelle et dangereuse que veut véhiculer Monsieur B.
Qu’elle soutient qu’ il y a donc lieu, au regard de tout ce qui précède, de constater que l’action de Monsieur B. Y est, dans tous les cas, prescrite, et de confirmer le jugement querellé.
Considérant que le Ministère Public a conclu par écrit en sollicitant la confirmation du jugement querellé.
DES MOTIFS
SUR LA FORME
Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que l’appe1 du sieur B. Y interjeté contre le jugement N°1222 du 08 juin 2004 a été fait selon les formes et délai prescrits par la loi; qu’il échet donc de déclarer recevable ledit appel.
SUR LE FOND
Considérant que pour ruiner les réclamations du sieur B. Y, la société SIFCA-SA fait valoir principalement que l’action du sieur B. Y est prescrite et subsidiairement qu’elle n’est pas fondée parce qu’ayant déjà payé au sieur B. Y toutes ses commissions.
Considérant cependant qu’à l’analyse des textes de loi et jurisprudence invoqués par les parties litigantes, l’action en paiement de commissions entreprise par le sieur B. Y contre la société SIFCA-SA n’est pas prescrite.
Qu’en effet j’article 18 du traité OHADA (sic) portant droit commercial général stipule que les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants de prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus courtes.
Considérant qu’en l’espèce il est constant que le sieur B. Y a obtenu une ordonnance d’injonction de payer le 22 avril 2002 contre la Sté SIFCA-SA et à elle signifiée le 02 mai 2002, décision qui constitue un acte interruptif de la prescription au sens de l’article 277 de l’acte uniforme relatif au droit commercial général.
Considérant que contrairement à la lecture que fait la Sté SIFCA de l’arrêt N°20 du 17 juin 2002 de la C.C.J.A, le délai de prescription de cinq ans derrière lequel s’abrite la SIFCA ne pouvait commencer à courir qu’à compter du 1er janvier 1998 date d’entrée en vigueur du Traité OHADA, lequel traité prévu (sic) la prescription quinquennale.
Que par conséquent c’est à bon droit que le sieur B. Y soutient que sa demande en paiement de commissions dirigée contre la SIFCA n’est pas couverte par la prescription; qu’ainsi échet- il d’infirmer le jugement querellé en ce qu’il a déclaré prescrite la demande du sieur B. Y.
Considérant que statuant à nouveau sur le mérite de la demande du sieur B. Y il ressort des pièces versées aux débats notamment de la convention liant les parties litigantes que la SIFCA devait payer au sieur B.Y des commissions à hauteur de 35 francs le kilogramme; que cependant Il n’est pas prouvé par la Sté SIFCA le paiement de la commission du sieur B. Y pour la campagne 88-89; que c’est justement parce qu’elle est en peine de rapporter la preuve tangible du paiement des commissions litigieuse que la Sté SlFCA-SA s’abrite désespérément et vainement derrière la prétendue prescription de la demande en paiement desdites commissions.
Que la demande du sieur B. Y apparaît donc bien fondée; qu’aussi convient-il de condamner la Sté SIFCA à lui payer la somme de 42 756 000 francs au titre de ses commissions par (sic) la campagne 1988-1989.
Que la Sté SIFCA succombant, il échet de la condamner aux entiers dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort.
Vu les conclusions écrite du Ministère Public.
EN LA FORME
Déclare le sieur B.Y recevable en son appel relevé du jugement N°1224 rendu le 09 juin 2004 par le Tribunal de première instance d’Abidjan.
AU FOND
L’y disant bien fondé, infirme le jugement querellé.
Statuant à nouveau.
Dit que l’action du sieur B. Y n’est pas prescrite et est bien fondée.
En conséquence condamne la Société SIFCA à payer au sieur B. Y la somme de 42.756.000 francs à titre de commissions; Condamne la SIFCA aux dépens.
PRESIDENT°: M. TOURE ALI.