J-07-100
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – RECEVABILITE (OUI) – TENTATIVE DE CONCILIATION – ECHEC – CONTESTATION DE LA CREANCE – EXCEPTION DE NULLITE POUR VICE DE FORME – ACTE DE SIGNIFICATION DE L’ORDONNANCE – ARTICLE 8 AUPSRVE – MENTIONS OBLIGATOIRES – NON MENTION DES INTERETS ET FRAIS DE GREFFE – NULLITE DE L’ACTE DE SIGNIFICATION (OUI).
La signification de la décision portant injonction de payer doit contenir, à peine de nullité, les mentions prescrites par l’article 8 AUPSRVE, et en l’espèce, le montant de la somme fixée par décision ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est précisé.
Le défaut d’indication du montant des intérêts et frais de greffe entraîne la nullité de plein droit de l’acte de notification.
Article 8 AUPSRVE
Article 10 AUPSRVE
Article 11 AUPSRVE
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n 201/06 du 24 mai 2006, OUEDRAOGO Daouda c/ KABORE Tankoudogo).
LE TRIBUNAL,
Vu les pièces du dossier.
Ouï les parties à l’audience du 22 mars 2006, date à laquelle l’affaire a été renvoyée au 12 avril 2006 à la demande du conseil de monsieur OUEDRAOGO Daouda et pour la tentative de conciliation; à cette date, le tribunal a constaté l’échec de la conciliation et l’affaire a été mise en délibéré pour jugement être rendu le 24 mai 2006; advenue cette date, le tribunal a statué en ces termes.
Par requête en date du 09 février 2006, monsieur KABORE Tankoudogo Lassané a sollicité l’autorisation de faire signifier à monsieur OUEDRAOGO Daouda une injonction de payer la somme de trois millions quatre cent quatre vingt mille cent cinquante (3.480.150) F CFA; il expose que cette somme représente le prix de matériaux vendus à monsieur OUEDRAOGO Daouda; que toutes les démarches par lui entreprises pour recouvrer le paiement de cette créance sont restées vaines.
Le 16 février 2006, monsieur KABORE Tankoudogo Lassané a par acte de maître Almissi OUEDRAOGO, huissier de justice à Ouagadougou, fait signifier à monsieur OUEDRAOGO Daouda, l’ordonnance d’injonction de payer n 052/2006, à lui délivrée par le Tribunal de grande instance de Ouagadougou le 10 février 2006 au pied de sa requête.
Contre cette ordonnance, monsieur OUEDRAOGO Daouda a par acte de maître Almissi OUEDRAOGO, huissier de justice à Ouagadougou, formé opposition.
Par le même acte, il a donné assignation à monsieur KABORE Tankoudogo Lassané et au greffe du Tribunal de grande instance de Ouagadougou, d’avoir à comparaitre, devant ledit tribunal pour s’entendre déclarer son opposition recevable, annuler la signification d’injonction de payer du 16 février 2006, rétracter l’ordonnance n 52/2006, condamner monsieur KABORE Tankoudogo Lassané à lui payer la somme principale de 519.850 F CFA outre celle de 200°000 F CFA au titre des honoraires d’avocat et enfin condamner KABORE Tankoudogo Lassané aux entiers dépens.
A l’appui de ses prétentions, il expose d’abord que la signification d’injonction de payer encourt annulation pour violation de l’article 8 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution car il n’est précisé nulle part le montant des intérêts comme le préconise l’article suscité; que la nullité des actes pour violation de l’article 8 a été suffisamment établie par la jurisprudence (jugement rendu le 14 juillet 2004 par le TGI de Ouagadougou dans l’affaire opposant KONDOMBO T. Marcel à SEONE Abdoulaye et jugement rendu le 28 décembre 2005 par le tribunal de grande instance de Ouagadougou dans la cause opposant BURKINA et SHELL à KY Boukary); que par ailleurs suivant avis n 001/99/JN en date du 07 juillet 1999, la Cour commune de justice et d’arbitrage a relevé que certaines formalités limitativement énumérées sont sanctionnées par la nullité; que toutefois, cette nullité ne peut être prononcée que si l’irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l’invoque; que hormis ces cas limitativement énumérés, le juge doit prononcer la nullité lorsqu’elle est invoquée, s’il constate que la formalité prescrite à peine de nullité n’a pas été observée sans qu’il soit besoin de rechercher la preuve d’un quelconque préjudice; qu’ensuite il a entretenu avec KABORE Tankoudogo Lassané des relations d’affaires; que cependant, en sollicitant l’ordonnance n 52/2006 portant sur la somme de 3.480.150 FCFA, ce dernier n’a aucunement tenu compte du coût de son véhicule dont il s’est saisi; qu’en effet suivant procuration datée du 04 février 2003, KABORE Tankoudogo Lassané lui a exigé la remise de son véhicule de marque TOYOTA immatriculé 11 GG 0949 BF; qu’il s’est auto proclamé, propriétaire dudit véhicule qu’il a mis à la disposition de sa femme; qu’il se devait donc de déduire la valeur du véhicule qu’il estime à 4.000°000 F CFA; qu’après compensation, la dette se ramène à la somme de 519.850 F CFA; qu’ainsi, les conditions édictées par l’article 1 de l’Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution relatives au caractère certain, liquide et exigible de la créance ne sont pas réunies; qu’en effet, la créance n’est pas certaine en ce sens qu’en opérant une déduction de la valeur du véhicule remis à titre de dation en paiement, il s’en suit que c’est plutôt KABORE Tankoudogo Lassané qui lui reste débiteur de la somme de 579.850 F CFA.
En réplique, KABORE Tankoudogo Lassané prétend que l’argument tiré de la violation de l’article 8 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ne saurait tenir car il ressort de l’avis de la Cour commune et d’arbitrage (CCJA) que la nullité de l’inobservation de certaines formalités limitativement énumérées ne peut être prononcée que si l’irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l’invoque; qu’alors que la non incorporation du montant des intérêts ne cause aucun préjudice au débiteur; que ces prétentions ne sont que des manœuvres dilatoires; que les intérêts courent jusqu’à parfait paiement et à compter du prononcé du jugement, la créance dont s’agit ne constituant pas un prêt bancaire assorti d’un taux d’intérêt légal et connu; que leur montant ne peut être déterminé au moment de la notification de l’injonction de payer; que la créance réclamée est certaine, liquide et exigible; que ce n’est qu’après le prononcé du jugement que les intérêts pourront être calculés; que la jurisprudence a toujours décidé de la sorte (affaire BOA-BF c/ YERBANGA Fleur Edwige et BATIONO Rachelle, jugement du 08 février 2006); qu’en outre, la présente procédure s’applique à la somme de 3.475.150 F CFA comme principal de la créance outre les frais et intérêts de droit; qu’en plus de ce montant, il est aussi créancier de monsieur OUEDRAOGO Daouda de la somme de 780°000 F CFA; qu’en garantie de cette créance dont le montant ne figure pas dans la procédure d’injonction de payer, il a exigé et obtenu un gage portant sur le véhicule de marque TOYOTA immatriculé 11 GG 0949 BF; que le gage n’a été donné qu’en garantie de la créance de 780°000 F CFA; que cette créance fait l’objet d’une procédure particulière et ne peut être confondue avec la présente procédure; qu’enfin, il s’est vu dans l’obligation de se doter d’un conseil juridique; qu’il y a lieu de condamner monsieur OUEDRAOGO Daouda à lui payer la somme de 800°000 F CFA au titre des frais et honoraires non compris dans les dépens et d’ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir en raison de la mauvaise foi du débiteur.
SUR CE
Attendu que l’ordonnance d’injonction de payer a été rendue le 02 février 2006 et signifiée à monsieur OUEDRAOGO Daouda le 16 février 2006.
Que contre cette ordonnance monsieur OUEDRAOGO Daouda a formé opposition par acte d’huissier le 27 février 2006.
Attendu que les conditions de forme des articles 10 et 11 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution ont été respectées.
Qu’il convient donc recevoir l’opposition de monsieur OUEDRAOGO Daouda en la forme.
Attendu que l’article 8 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution dispose que°: « A peine de nullité, la signification de la décision portant injonction de payer contient sommation d’avoir.
soit à payer au créancier le montant de la somme fixée par décision ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est précisé. ».
Qu’il résulte de cette disposition qu’outre le montant de la créance, le montant des intérêts et frais de greffe doivent être précisés.
Que le défaut d’indication du montant des intérêts et frais de greffe entraîne la nullité de plein droit de l’acte de notification.
Attendu qu’en l’espèce, monsieur KABORE Tankoudogo Lassané a fait sommation à monsieur OUEDRAOGO Daouda d’avoir à payer la somme de trois millions quatre cent quatre vingt mille cent cinquante (3.480.150) F CFA outres les intérêts de droit à venir dont le montant n’est pas précisé.
Qu’il s’en suit que l’acte de notification de l’ordonnance d’injonction de payer n 52/2006 du 10 février 2006 viole les dispositions de l’article 8 susvisé.
Qu’il échet en conséquence de l’annuler.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort.
Déclare recevable l’opposition à ordonnance d’injonction de payer n 52/2006 du 10 février 2006 recevable en la forme.
Au fond, annule l’acte de notification de l’ordonnance d’injonction de payer n 52/2006 du 10 février 2006 pour violation de l’article 8 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Condamne KABORE Tankoudogo Lassané aux dépens.