J-07-140
SOCIETE COMMERCIALE – EXISTENCE – CAPACITE JURIDIQUE – PREUVE – IMMATRICULATION AU RCCM (NON) – PRODUCTION DES STATUTS DE LA SOCIETE ( NON) – PERSONNALITE JURIDIQUE (NON) – IMPOSSIBILITE D’ESTER EN JUSTICE.
Conformément aux dispositions de l’AUSCGIE, toute société, pour être valablement constituée, doit avoir des statuts et être inscrite au RCCM. Par ailleurs, c’est à compter de son immatriculation que toute société jouit de la personnalité juridique. Ainsi, faute pour une société de produire ses statuts et en l’absence de preuve de son inscription au RCCM, il faut en déduire que cette société n’a pas de personnalité juridique et ne peut dès lors ester en justice.
(Tribunal de Grande Instance du Moungo, Ordonnance n 04/CC du 27 janvier 2006, Affaire La société MENESSER SARL C/ la liquidation des Ets GORTZOUNIAN).
NOUS, JUGES COMMISSAIRES.
Vu les lois et règlements en vigueur.
Vu les pièces du dossier de la procédure.
Attendu que suivant requête du 16 janvier 2006 enregistrée au greffe du Tribunal de Grande Instance du Moungo, la société Menessier SARL ayant pour conseil Maître Luc TCHOUAWOU SIEWE, avocat au barreau du Cameroun, a saisi le juge commissaire chargée de veiller aux opérations de la liquidation des établissements GORZOUNIAN pour est-il dit dans cette requête.
Ordonner la distraction et la restitution à la demanderesse d’une commande électrique avec dynamos, des poulies d’élévateurs et des poids.
Ordonner également la main-levée des scellées apposées à l’usine MENESSIER à Manengolé.
Qu’au soutient de sn action, elle expose que par jugement n°48/CIV du 21 juillet 2005, le Tribunal de Grande Instance du MOUNGO a prononcé la liquidation des biens des établissements GORZOUNIAN.
Qu’en exécution de cette décision, Maître PENDA Jean, Huissier de justice à Nkongsamba a procédé à l’apposition des scellées à l’usine de calibrage de café GORZOUNIAN à Nkongsamba le 29 juillet 2005.
Que le même jour les scellés ont également été apposées à tord à l’usine de décorticage de café appartenant à la société MENESSIER SARL sise à Manengolé.
Qu’au moment de l’apposition des scellés à l’usine des établissements GORZOUNIAN à Nkongsamba s’y trouvait une commande électrique avec dynamos, des poulies d’élévateurs et des poids appartenant à la société MENESSIER SARL.
Que ces objets servant au décorticage de café et non au calibrage qui est la spécialité des établissements GORZOUNIAN y avaient été entreposés pour craindre les voleurs qui avaient déjà presque tout piller à l’usine MENESSIER à Manjo.
Que procédant à l’inventaire le 06 décembre 2005, l’Huissier sus nommé y a inclus à tord lesdits objets qui lui appartiennent.
Qu’il sollicite pour toutes ces raisons qu’il soit fait droit à ses demandes.
Attendu que pour faire échec à son action, la liquidation des établissements GORZOUNIAN sur la plume de son conseil, Maître TEPPI KOLLOKO Fidèle, Avocat au barreau du Cameroun conclut au principal son irrecevabilité et subsidiairement au débouté de la société MENESSIER.
Qu’elle fait valoir que l’action en justice suppose pour le demandeur la preuve de son existence notamment de sa capacité et de sa personnalité juridique.
Que la demanderesse n’a point rapporté de telles preuves.
Que ces preuves ne peuvent être administrées, s’agissant des sociétés que par les statuts conformes de celles-ci et l’inscription au registre de commerce et du crédit mobilier.
Que même si les statuts venaient à être produits, il faut pour être valables, qu’ils soient conformes aux dispositions des articles 908, 909, 910, 912, 913, 915 et 919 de l’Acte Uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique qui ont impartis aux sociétés antérieurement créées un délai de deux (02) ans pour se mettre en harmonie avec les dispositions de l’OHADA.
Que d’ailleurs l’article 98 de cet Acte énonce que « toute société jouit de la personnalité juridique au registre du commerce et du crédit mobilier, à moins que ledit acte n’en dispose autrement ».
Qu’elle estime que pour toutes ces défaillances, l’action de la société MENESSIER mérite d’être déclarée irrecevable pour défaut de capacité et de personnalité juridique.
Qu’elle soutient subsidiairement que la distraction étant la sanction d’un droit de propriété, elle ne peut avoir lieu que lorsque la preuve de cette propriété est établie.
Qu’elle poursuit que la société MENESSIER n’ayant pas la capacité ni la personnalité juridique, elle ne peut exercer aucun droit sur l’usine dont il s’agit, propriété des établissements GORZOUNIAN dont elle constitue une succursale.
Que non seulement la demanderesse ne rapporte pas la preuve de sa propriété mais il ressort du procès verbal dressé par l’huissier instrumentaire que l’usine dont il s’agit a été pillée et pour cette raison, les scellés n’y ont point été apposées.
Que dès lors, selon elle, cette demande est sans objet.
Attendu que réagissant à cet argumentaire, la demanderesse rétorque que contrairement au droit civil, le principe en matière commerciale est la liberté de la preuve.
Que l’existence d’une société peut être prouvée par tout moyen.
Qu’elle produit au débat thermocopie d’une copie de dépôt de cession de parts sociales de la SARL dit usine à café MENESSIER et Compagnie par monsieur Paul MENESSIER à monsieur SOUREN GORZOUNIAN et madame MENESSIER à monsieur KOURGEN GORZOUNIAN de l’étude de Maître SOCKA BONGUE, alors Notaire à Nkongsamba, ainsi qu’un procès verbal de l’assemblée générale des actionnaires de cette société en date du 09 février 1988.
Qu’elle estime que ces pièces suffisent pour justifier son existence, sa capacité et sa personnalité.
Qu’elle poursuit que les dispositions des articles 908, 909, 912, 913, 915 et 919 de l’acte uniforme OHADA sur le droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique qui impartissent aux sociétés antérieurement créées pour se mettre en harmonie aux dispositions de l’OHADA ne prévoient aucune sanction.
Que le non respect de ces dispositions n’a aucune incidence sur l’existence d’une société.
Que dès lors, selon elle, la fin de non recevoir soulevée par la défenderesse et tirée du défaut de capacité et de personnalité juridique est non fondée.
Qu’elle ajoute, s’agissant des autres demandes, que la défenderesse ne rapporte pas la preuve de ce que ces installations sont une succursale des établissements GORZOUNIAN.
Que tous les documents relatifs aux biens dont la distraction est sollicitée se trouvent également dans les bureaux des établissements GORZOUNIAN et les représentants de la société MENESSIER ne peuvent y accéder.
Qu’elle sollicite en cas du moindre doute à ce sujet que le juge commissaire s’y transporte de manière inopinée pour une vérification dans ses archives.
SUR LA FIN DE NON RECEVOIR DE L’ACTION TIREE DU DEFAUT DE CAPACITE ETR DE PERSONALITE JURIDIQUE DE L’USINE A CAFE MENESSIER
Attendu qu’il résulte des dispositions des articles 10 et 97 de l’acte uniforme OHADA relatif au droit des société commerciales et du groupement d’intérêt économique que pour être valablement constitué et avoir la personnalité juridique, toute société, à l’exception de la société en participation doit avoir des statuts et être inscrite au registre du commerce et du crédit mobilier.
Attendu que cette dernière exigence était d’ailleurs prescrite dans l’ancien droit par l’article 3 alinéa 1 du décret du 17 février 1930 instituant un registre du commerce au Cameroun et ses textes modificatifs subséquents.
Attendu que la société évoquée en l’espèce est une société anonyme.
Que pour qu’elle puisse jouir de la personnalité juridique, il faut que les prescriptions légales sus évoquées aient été respectées.
Attendu cependant que la demanderesse n’a pas pu produire ses statuts.
Que le procès verbal d’assemblée ordinaire sus évoquée ne saurait couvrir cette carence.
Attendu au demeurant que la défenderesse a versé au débat une lettre en date du 17 janvier 2006 du greffier en chef du Tribunal de Première Instance de Nkongsamba attestant que cette société n’est point inscrite au registre du commerce.
Attendu qu’il est dès lors établi que la demanderesse n’a pu justifier sa constitution en produisant les statuts sociaux et la preuve de son immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier.
Qu’il s’ensuit qu’elle ne peut donc jouir de la personnalité juridique ni de la capacité d’ester en justice.
Que pareille analyse commande de déclarer son action irrecevable.
Attendu que la partie qui succombe au procès en supporte les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement à l’égard des parties et en matière de revendication.
Déclarons irrecevable, l’action de la demanderesse.