J-07-156
1) VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE ATTRIBUTION DE CREANCES – CONTESTATIONS – DELAI – RESPECT ( OUI) – IRRECEVABILITE (NON).
2) VOIES D’EXECUTION – SAISIE – SAISIE ATTRIBUTION DE CREANCES – DETTE – EXIGIBILITE – INEXIGIBILTE PARTIELLE – MAINLEVEE PARTIELLE DE SAISIE.
1) Ne peuvent être déclarées irrecevables les contestations portées contre une procédure de saisie attribution de créances lorsqu’il est prouvé que celles-ci ont été faites dans les délais prévus par la loi.
2) Lorsque la dette à l’origine d’une procédure de saisie attribution de créance n’est que partiellement exigible, la mainlevée de la saisie attribution pratiquée doit être prononcée pour la part non exigible de cette dette et ce, conformément à l’article 153 AUPSRVE.
(Tribunal de Première Instance de Bafoussam, Ordonnance de référé n°32 du 05 janvier 2007, Affaire UCCAO C/ Tsidie Gabriel et autres).
NOUS, PRESIDENT, JUGE DE L’URGENCE.
Statuant en vertu de l’article 49 de l’acte uniforme OHADA portant voies d’exécution.
Attendu que par exploit du 08 novembre 2006 non encore enregistré, mais qui le sera en temps opportun de Me TEMGOUA Emmanuel, huissier de justice à Bafoussam, l’Union Centrale des Coopératives Agricoles de l’Ouest anciennement dénommée UCCAO dont le siège social est à Bafoussam, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux et ayant pour conseil la KKADJITT LAW FIRM, société d’avocats au barreau du Cameroun a donné assignation à.
1°- Monsieur TSIDIE Gabriel, ex-employé de l’UCCAO demeurant à Bafoussam et ayant pour conseil la SCP NANGHOU et NZEGAH, avocats associés à Bafoussam.
2°-Afriland First Bank SA, la société Générale des Banques du Cameroun SA, la Banque Internationale du Cameroun pour l’Epargne et le Crédit, Commercial Bank of Cameroon SA, Amity Bank of Cameroon SA, Crédit Lyonnais SA prise chacune en la personne de son directeur d’agence de Bafoussam et appelés comme tiers saisis d’avoir à se trouver et comparaître par devant nous pour est-il dit dans cet exploit.
EN LA FORME
Déclarer l’opposition de l’UCCAO recevable comme intervenue dans les forme et délai de la loi.
AU FOND
Constater que la grosse en vertu de laquelle la saisie querellée a été pratiquée n’a été ni communiquée, ni copie donnée à la requérante.
Vu les dispositions de l’article 35 de l’acte uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécutions.
Dire et juger qu’en omettant d’accomplir cette formalité, la saisie querellée est entachée de nullité.
constater que la signature du juge fait cruellement défaut du procès-verbal de conciliation dont s’est prévalu le saisissant.
Vu les dispositions de l’article 33 de l’acte uniforme OHADA susvisé.
Dire et juger que pour constituer un titre exécutoire, le procès-verbal doit être signé par le juge et les parties et que la saisie querellée pratiquée dans ces conditions sans titre exécutoire est par conséquent vouée à l’échec.
Dire et juger qu’à la date du 06 octobre 2006, la créance exigible de Monsieur TSIDIE s’élevait à la somme de 2 200°000 francs.
Constater que la saisie a été pratiquée pour un montant de 9 200°000 francs, laquelle n’était pas encore exigible.
constater que l’huissier instrumentaire a abusivement fixé ses droits de recette à la somme de 301 477 francs en violation du décret n°79/85 du 13 mars 1979 fixant le tarif des huissiers et agents d’exécution complété par celui n°80/142 du 28 avril 1980.
Dire et juger qu’il y a là tentative d’enrichissement sans cause, toute chose qui cause un sérieux grief à la société requérante, entachant par là de nullité la saisie querellée.
Au regard de ce qui précède.
Constater le caractère abusif et extrêmement vexatoire de la saisie pratiquée par Monsieur TSIDIE Gabriel.
Constater que la société requérante est bel et bien fondée à solliciter l’annulation du procès-verbal de saisie querellée ainsi que la libération subséquente de tous ses comptes objet de ladite saisie.
EN CONSEQUENCE
Bien vouloir annuler le procès-verbal de saisie attribution de créances dressé le 06 octobre 2006 par exploit de Me TCHOUA Yves, huissier de justice à Bafoussam, sur les comptes de la requérante et à la requête de M TSIDIE Gabriel.
Ordonner la mainlevée de ladite saisie sous astreinte de 100°000 francs par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir.
Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir sur minute et avant enregistrement.
Condamner le sieur TSIDIE Gabriel aux dépens dont distraction au profit de la KKADJITT LAW FIRM, avocats aux offres de droit.
Attendu qu’au soutien de son action, la demanderesse expose qu’en date du 06 octobre 2006, agissant en vertu de la grosse dûment en forme exécutoire du procès-verbal de conciliation totale n°40/05/MINETPS/DTETPSO dressé le 13 mai 2006 par Monsieur le chef de brigade provinciale d’inspection de travail et de la prévoyance sociale de l’Ouest à Bafoussam, une saisie attribution de créances a été pratiquée sur ses comptes domiciliés dans les établissements bancaires susvisés par exploit de Me TCHOUA Yves, huissier de justice à Bafoussam et ce, à la requête de M.TSIDIE Gabriel pour avoir paiement de la rocambolesque somme de 9 919 194 francs dont 6 200°000 francs en principal.
Qu’elle conteste énergiquement cette saisie pratiquée en violation de multiples dispositions légales.
Que la première violation tire son fondement sur l’article 35 de l’acte uniforme susvisé en ce que le saisissant a pratiqué cette saisie sans lui communiquer encore moins lui donner copie de la grosse dûment en forme exécutoire conformément à l’article 33 dudit acte au motif que le procès-verbal de conciliation totale dont s’agit n’a pas été signé par le juge et les parties et de ce fait ne saurait dès lors constituer un titre exécutoire.
Que la seconde violation est tirée du défaut de titre exécutoire conformément à l’article 33 dudit acte au motif que le procès verbal de conciliation totale dont s’agit n’a pas été signé par le juge et les parties et de ce fait ne saurait dès lors constituer un titre exécutoire.
Que la troisième violation est celle de l’article 153 du même acte OHADA en ce qu’au regard du calendrier d’exigibilité de ladite créance ainsi qu’il ressort dudit procès-verbal la créance du jour de la saisie était celle correspondant au 13 août 2006 alors évaluée à la somme de 12 000°000 francs.
Q’à cette date effectivement, elle s’était déjà libérée entre les mains du défendeur de la somme de 9 800°000 francs.
Que comme créance exigible, elle n’était redevable de M. TSIDIE Gabriel à la date de la saisie que de la somme de 2 200°000 francs.
Que pourtant et malheureusement, la saisie pratiquée en date du 06 octobre 2006 portait sur le reliquat de la somme totale contenue dans le procès-verbal de conciliation susévoqué soit 9 200°000 francs et non sur celle alors exigible.
(…).
Que compte tenu de tous ces manquements, elle est fondée à solliciter l’annulation du procès-verbal de saisie attribution querellé, ensemble l’exploit de dénonciation de ladite saisie ainsi que la libération de tous ses comptes abusivement saisis par le défendeur.
Qu’elle produit à l’appui de ses allégations un procès- verbal de saisie attribution du 06 octobre 2006 et un exploit de dénonciation de saisie attribution du 10 octobre 2006.
Attendu que pour faire échec à cette action, le défendeur, par le biais de ses conseils susnommés concluent en son irrecevabilité pour cause de tardiveté.
Qu’ils font valoir que l’article 170 alinéa 1 de l’acte uniforme susvisé dispose°: « à peine d’irrecevabilité, les contestations sont portées devant la juridiction compétente par voie d’assignation dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de ladite saisie au débiteur.
Qu’or la juridiction de céans n’a été saisie des présentes contestations que le 14 novembre 2006 c’est-à-dire après l’expiration du délai de mois qui courrait depuis le 10 octobre 2006 date de dénonciation de cette saisie.
Que d’après eux, l’assignation qui n’est qu’un acte extrajudiciaire ne saisit la juridiction compétente que lorsqu’une copie est remise au greffe après paiement de la consignation.
Qu’en l’espèce, il ressort de la chemise du dossier de la procédure que l’UCCAO n’a remis la copie de son assignation au greffe de céans que le 14 novembre 2006 et que c’est à cette même date que la consignation a été payée.
Qu’ils concluent leurs propos en disant que c’est le 14 novembre 2006 que la juridiction compétente dont parle le texte susvisé n’a été en réalité saisie, laquelle saisine est dès lors tardive d’où l’irrecevabilité de la présente action.
Qu’ils versent au débat une grosse du procès verbal de conciliation totale revêtue de la formule exécutoire et un exploit de signification de ladite grosse à l’UCCAO.
Attendu que contre ces arguments, la KKADJITT LAW FIRM rétorque que l’acte de saisine du Tribunal qui porte contestation a été bel et bien posée dans les délais d’un mois tel qu’indiqué par l’article 170 de l’acte uniforme susvisé.
Que c’est à dessein, mais maladroitement renchérissent ces conseils que le défendeur fait une interprétation erroné de ce texte en prétendant que l’ayant assigné pour l’audience du 24 novembre 2006, la demanderesse a violé ledit article.
Qu’ils concluent leurs propos sur point en soutenant que si l’acte uniforme prescrit le délai d’opposition, il ne prescrit malheureusement pas, et ne le saurait d’ailleurs pas, que ce délai est celui de l’enrôlement de l’affaire devant le Tribunal, lequel obéit à la fois aux formalités administratives que procédurales, à l’instar du délai d’ajournement.
Attendu qu’à l’analyse, il appert de l’exploit de dénonciation de saisie attribution de créances du 10 octobre 2006 que le délai des contestations devant la juridiction de céans en l’espèce expirait le 11 novembre 2006.
Qu’ainsi, la demanderesse a par exploit du 08 novembre 2006 assigné le défendeur par devant Nous aux fins d’opposition à cette saisie et mainlevée subséquente, soit bien avant le délai d’expiration susmentionné.
qu’il est dès lors loisible de constater que les contestations en l’espèce ont été bien soulevés conformément à l’esprit et à la lettre de l’article 170 alinéa 1 de l’acte uniforme susvisé.
Qu’il échet de conclure sur ce point que l’irrecevabilité de l’action pour cause de tardiveté excipée par les conseils de défendeur ne sauraient prospérer et par conséquent encourt rejet.
Attendu que sur le fond du litige, il ressort sans ambages au regard du mode de règlement de cette créance par la demanderesse et des échéances arrêtées d’accord partie et contenues dans le procès-verbal de conciliation totale tenant lieu de titre exécutoire qu’après versement des acomptes, la créance exigible conformément à l’article 153 de l’acte uniforme susvisé n’était évaluée à la date de la saisie qu’à la somme de 2 200°000 francs.
Qu’il est donc constant que le reliquat de cette créance au moment de la saisie au moment de la saisie ne répondait pas au critère d’exigibilité prévu par l’article 153 de l’acte uniforme susvisé, il s’ensuit que cette saisie est dès lors en partie abusive.
Attendu qu’en tout état de cause, il échet conformément à l’article 171 alinéa 1 de l’acte uniforme OHADA susvisé de donner effet à la saisie querellée pour la fraction de la créance évaluée à 2 200°000 francs exigible et non contestée au jour des opérations et en revanche ordonner la mainlevée immédiate du reste.
Attendu que pour vaincre une éventuelle résistance du défendeur de s’exécuter promptement relativement à cette mainlevée, il convient d’assortir cette injonction d’une astreinte de 10°000 (dix mille) francs par jour de retard à compter de la signification qui lui sera faite de notre ordonnance.
Attendu qu’il y a urgence à libérer le reste des comptes abusivement saisis tel que susspécifié.
Qu’il est par conséquent de bon ton et de bon droit de dire notre ordonnance exécutoire sur minute et avant enregistrement.
Et attendu que la partie qui succombe supporte les dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort.
En la forme, rejetons comme non fondée l’irrecevabilité de l’action pour cause de tardiveté excipée par les conseils du défendeur, les contestations en l’espèce ayant été bien soulevées conformément à la lettre et à l’esprit de l’article170 alinéa 1 de l’acte uniforme susvisé ainsi qu’il ressort aussi bien du procès-verbal de dénonciation de la saisie querellée que de l’exploit d’assignation du 08 novembre 2006.
Au fond, constatons qu’à la date de la saisie attribution de créances litigieuses, la créance exigible au regard des échéances contenues dans le procès-verbal de conciliation totale tenant lieu de titre exécutoire dont s’est prévalu le défendeur n’était évaluée qu’à la somme de 2 200°000 francs.
Constatons cependant que c’est sur le montant total du reliquat de cette créance dont la date butoire d’exigibilité est fixée au 13 août 2007 que cette saisie a été pratiquée.
Disons donc qu’une telle saisie est en partie abusive en raison de la non-exigibilité du reliquat de la créance dont s’agit.
En tout état de cause, donnons effet à la saisie pour la fraction de 2 200°000 francs exigible et non contestée au jour des opérations et ordonnons la mainlevée pour le reste ce sous astreinte de 10°000 (dix mille) par jour de retard à compter de la signification qui sera faite au défendeur de notre ordonnance.