J-07-189
1) SOCIETE COMMERCIALE – TRANSFORMATION – CREATION D’UNE PERSONNE JURIDIQUE NOUVELLE (NON).
2) VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE DE CREANCE – DESIGNATION D’UN SEQUESTRE – INTERVENTION DES PARTIES (NON) – NULLITE.
3) VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE DE CREANCE – PROCES VERBAL DE SAISIE – INDICATION DE L’INDISPONIBILITE DES BIENS (NON) – NULLITE.
1) La transformation d’une société n’entraîne pas la création dune personne juridique nouvelle de sorte que l’ancienne et la nouvelle société doivent être considérées comme une seule et même entité juridique.
2) Doit être déclarée nulle la désignation d’un séquestre intervenue dans le cadre d’une saisie conservatoire lorsque les parties n’ont pas été convoquées à l’instance.
3) Est nul le PV de saisie et partant la saisie conservatoire lorsque ce PV n’indique pas.
l’indisponibilité des biens saisis.
Article 13 AUPSRVE
Article 49 AUPSRVE
Article 64 AUPSRVE
Article 103 AUPSRVE
Article 49 AUSCGIE
(Tribunal de Première Instance de Douala - Ndokoti, Ordonnance n 231 du 12 05 05, Affaire Sté SCEMAR SARL C/ NGUIMBOUS JEAN BLAISE SAMUEL ENAME NKWANE).
NOUS, Président, JUGE DU CONTENTIEUX DE L’EXECUTION.
Vu l’exploit introductif d’instance.
Vu les pièces du dossier de la procédure et après en avoir délibéré conformément à la loi.
Attendu qu’en vertu de l’ordonnance présidentielle n°237 du 08 mars 2005 non enregistrée mais qui le sera en temps utile de Maître YOSSA, huissier de justice à Douala, la Société SCEMAR SARL agissant poursuites et diligence de son représentant légal ayant pour conseil Maître NGAMKAN, avocat au barreau du Cameroun, BP 5791 Douala a fait donner assignation à.
Sieur Jean Blaise NGUIMBOUS ayant pour conseil Maître BILLONG NDJONG, avocat au barreau du Cameroun BP 12953 Douala.
Maître ENAME NKWANE, huissier de justice instrumentaire d’avoir à se trouver et comparaître par devant monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Ndokoti statuant en matière de contentieux de l’exécution pour est-il dit dans cet exploit.
Et tous autres à suppléer ou déduire.
Constater que la requérante à savoir la Société SCEMAR SARL dont le siège social est à Yaoundé est étrangère à l’arrêt n°185/P susvisé dont se prévaut sieur NGUIMBOUS, lequel oppose sieur NGUIMBOUS à la Société anonyme KETCH-SCEMAR dont le siège social est à Douala.
Constater que les objets saisis ont été placés sous la garde d’un tiers non désigné d’accord parties ni par le juge du contentieux de l’exécution au mépris de l’article 64 alinéa (6) de l’Acte Uniforme OHADA portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies d’Exécution.
Constater en outre que le procès verbal de saisie conservatoire décrié dispose que « les biens saisis sus mentionnés sont disponibles… » cependant que l’article 64 alinéa 6 susvisé prescrit à peine de nullité que l’huissier doit mentionner « en caractère très apparent, que les biens saisis sont indisponibles… ».
Dire et juger que ledit procès verbal est nul avec pour corollaire la nullité de la saisie qu’il soutend et de l’acte de conversion subséquent.
Constater par ailleurs qu’en mentionnant la mise sous séquestre de tout véhicule de la Société KETCH-SCEMAR l’ordonnance n°174 rendue le 25 janvier 2005 principal cheval de bataille du sieur NGUIMBOUS heurte par trop la lettre lumineuse de l’article 1961 alinéa 2 du code civil susvisé.
Dire et juger que les conditions d’un séquestre judiciaire ne sont pas réunies en l’espèce.
EN CONSEQUENCE rétracter l’ordonnance n°174 rendue le 25 janvier 2005 par monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de céans avec pour corollaire la mainlevée de la saisie abusivement pratiquée le 02 mars 2005 sur le matériel de travail de la requérante, l’immobilisation de celui-ci constituant une voie de fait génératrice de lourdes conséquences sur le plan financier.
Surabondamment au cas où le juge du contentieux de l’exécution viendrait à croire que les Société SCEMAR et KETCH- SCEMAR soient une seule et même Société, constater que sieur NGUIMBOUS ne rapporte pas la preuve de l’existence de circonstances de nature à menacer le recouvrement de sa créance.
Donner mainlevée de plus fort de la saisie conservatoire de biens meubles corporels pratiquée le 2 mars 2005 par sieur NGUIMBOUS au préjudice de la requérante avec tous ses corollaires notamment la nullité du procès verbal de conversion de ladite saisie conservatoire; lequel a été servi à la requérante le 04 mars 2005.
Ordonner l’exécution sur minute et avant enregistrement de la décision à intervenir nonobstant toute voie de recours.
Condamner sieur NGUIMBOUS aux entiers dépens distraits au profit de Maître NGAMKAN, avocat aux offres de droit.
Attendu qu’au crédit de son action, la demanderesse par l’entremise de son conseil Maître NGAMKAN expose.
Que sieur NGUIMBOUS a pratiqué saisie conservatoire sur le camion de la requérante de marque ASTRA, immatriculée Lt 12786 RC chargé de granulat suivant procès verbal en date du 02 mars 2005 du ministère de Maître ENAME NKWANE, huissier de justice à Douala.
Que l’huissier instrumentaire a cru pouvoir se constituer gardien des biens saisis au mépris des dispositions lumineuses de l’article 64(6) de l’Acte Uniforme OHADA n°6 le privant ainsi de l’usage de son matériel de travail.
Que pour tenter de donner une once de crédit juridique à ses errements, l’huissier sus nommé fait valoir qu’il agit en vertu de la grosse en forme dûment exécutoire de l’arrêt n°185/P rendu le 11 décembre 2003 par la Cour d’Appel du Littoral de même que l’ordonnance n 174 rendue le 25 janvier 2005 par le Président du Tribunal de Première Instance de Douala- Ndokoti alors même que la requérant n’est en rien concerné par aucun desdits actes.
Que la requérante dont le siège social est à Yaoundé est étrangère au litige en cause opposant sieur NGUIMBOUS à la Société anonyme KETCH SCEMAR dont le siège social est à Douala.
Que la Société visée par l’arrêt n°185/p et par l’ordonnance n°174 susvisée est bien la Société anonyme KETCH-SCEMAR et non la requérante.
Qu’en faisant pratiquer la saisie sur les biens de la requérante aux lieu et place de ceux de la Société anonyme KETCH-SCEMAR, laquelle est seule concernée par l’arrêt n°185/P, celle-ci est sujette à mainlevée.
Que d’autre part en plaçant les objets saisis sous la garde d’un tiers non désigné d’accord parties ni par le juge du contentieux de l’exécution l’huissier instrumentaire viole les dispositions de l’article 64 alinéa 6 de l’Acte Uniforme OHADA n°6.
Que bien plus la nullité dudit exploit avec pour corollaire la nullité de la saisie qu’elle soutend et celle de l’acte de conversion s’impose parce que l’huissier n’a pas mentionné « en caractère très apparent que les biens saisis sont indisponibles ».
Que les conditions d’un séquestre judiciaire ne sont pas réunies.
Que par ailleurs la condition de « menace dans le recouvrement » ne se trouve pas remplie tant il est vrai que la situation financière de la requérant ne peut susciter aucune crainte relative à sa solvabilité.
Que la requérante est une Société de travaux publics et de génie civil qui a pignon sur rue et dont la renommée et la notoriété ne souffrent pas de discussion.
Attendu que pour asseoir son argumentaire, la demanderesse fait verser aux débats une kyrielle de pièces dont l’extrait de l’arrêt n°185/P du 11 décembre 2003, l’ordonnance n°174 du 25 janvier 2005, le procès verbal de saisie conservatoire, le procès verbal de conversion de saisie conservatoire, l’extrait des statuts de SCEMAR et la photocopie de la carte grise du véhicule.
Attendu que réagissant à ces prétentions, le défendeur sous la plume de son conseil Maître BILLONG faisant valoir que « la Société KETCH-SCEMAR désignent une seule et même Société comme en témoigne l’offre d’arrangement à l’amiable et les débats ayant eu lieu en audience correctionnelle à Edéa, concluant au rejet des exceptions de nullité soulevées précisant par ailleurs qu’en tant que tiers comme elle prétend, la Société SCEMAR ne dispose que d’une action en distraction.
Attendu que pour conforter sa défense, sieur NGUIMBOUS par le biais de son conseil produit au dossier nombre de pièces dont l’offre d’arrangement à l’amiable, le mandement citation à partie civilement responsable, la citation, les conclusions de KETCH-SCEMAR.
SUR L’OPPOSABILITE DE L’ARRET N°185/P DU 11 DECEMBRE 2003 A LA SOCIETE SCEMAR
Attendu qu’il appert des pièces produites notamment de l’offre d’arrangement à l’amiable adressée au directeur de la Société KETCH- SCEMAR le 19 mai 1999 reçu par la Société SCEMAR le 14 mai 1999, des citations à partie civilement responsable, des conclusions de la Société KETCH-SCEMAR que la Société SCEMAR et la Société KETCH-SCEMAR désignent une seule et même entité juridique.
Attendu qu’aux termes de l’article 49 de l’Acte Uniforme OHADA sur les Sociétés commerciales et le GIE la transformation régulière d’une Société en une Société d’une autre forme n’entraîne pas la création d’une personne juridique nouvelle, il en de même de la prorogation ou de toute autre modification statutaire.
Attendu au demeurant que le refus de la demanderesse de produire l’intégralité des statuts de la Société SCEMAR conforte la thèse selon laquelle il s’agit d’une même entité juridique, qu’au regard de ce qui précède, il y a lieu de dire que la Société KETCH-SCEMAR et la Société SCEMAR constituent une seule et même Société.
SUR LA RETRACTATION DE L’ORDONNANCE N°174 DU 25 JANVIER 2005 ET LA MAINLEVEE DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DU 04 MARS 2005
Attendu qu’aux termes de l’article 103 alinéa 2 de l’Acte Uniforme OHADA N°6 la juridiction compétente pour ordonner sur requête à tout moment même avant le début des opérations de saisie et après avoir entendue les parties ou celles-ci dûment appelées, la remise d’un ou plusieurs objets à un séquestre qu’il désigne ».
Attendu qu’aux termes de l’article 64 alinéa 6 de l’Acte Uniforme OHADA n°6 en matière de saisie conservatoire des biens meubles corporels les biens saisis indisponibles sont placés sous la garde du débiteur ou d’un tiers désigné d’accord parties ou à défaut par la juridiction statuant en matière d’urgence.
Attendu qu’il résulte des débats et des pièces produites que la demanderesse n’a jamais été appelée encore moins entendue toute chose constituant une violation des dispositions de l’article 103 alinéa 2 de l’Acte Uniforme OHADA n°6, il y a lieu de déclarer nul et de nul effet le procès verbal de saisie conservatoire du 2 mars 2005 et celui subséquent de conversion du 04 mars 2005.
Attendu par ailleurs que le procès verbal de saisie conservatoire du 02 mars 2005 et celui subséquent de conversion de saisie conservatoire du 04 mars 2005 violent les disposions de l’article 64 alinéa 6 de l’Acte Uniforme OHADA n°6, qu’il échet au regard de ce qui précède d’ordonner la rétractation de notre ordonnance n°174 du 25 janvier 2005 avec toutes les conséquences de droit à savoir la nullité du procès verbal de saisie conservatoire du 02 mars 2005 et du procès verbal de saisie conversion du 04 mars 2005 et de donner mainlevée des saisies querellées.
Attendu que le défendeur ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties, en matière du contentieux de l’exécution conformément à l’article 49 de l’Acte Uniforme OHADA n°6 et en premier ressort.
Recevons la demanderesse en son action.
Constatons que la Société SCEMAR n’est pas étrangère au présent litige, la Société SCEMAR et la Société KETCH-SCEMAR constituant une seule et même entité juridique.
Constatons que l’ordonnance n°174 rendue le 25 janvier 2005 viole les dispositions de l’article 103 alinéa 2 de l’Acte Uniforme OHADA n°6.
Constatons que le procès verbal de saisie conservatoire du 02 mars 2005 et celui subséquent de conversion du 04 mars 2005 tels que dressés violent les dispositions de l’article 64 alinéa 6 de l’Acte Uniforme OHADA n°6.
En conséquence ordonnons la rétractation de notre ordonnance n°174 du 25 janvier 2005 et donnons mainlevée des saisies pratiquées au préjudice de la Société SCEMAR les 02 et 04 mars 2005.
Disons notre ordonnance exécutoire sur minute, par provision et avant enregistrement.